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Al-Ahram Hebdo
Encore un pas en
arrière
Maha Salem
Richard Goldstone
Mercredi 6 avril 2011
Palestine.
Le
juge sud-africain Richard Goldstone,
auteur d’un rapport de l’Onu sur les allégations de crimes de
guerre lors de l’opération israélienne dans la bande de Gaza fin
2008, a affirmé que son rapport aurait été « un document
différent » aujourd’hui. L’annonce choque le Hamas mais
satisfait Israël.
Sous
pression, le juge Richard Goldstone
a repris position sur son propre rapport, après avoir accusé
Israël de crimes de guerre durant son offensive contre la bande
de Gaza à l’hiver 2008/2009. A la suite de cette déclaration,
Israël a réclamé l’annulation du rapport qui l’accusait de «
crimes de guerre ». Son auteur a en effet reconnu avoir affirmé
à tort que l’Etat hébreu avait visé intentionnellement des
civils. « J’appelle l’Onu à annuler immédiatement le rapport
Goldstone. Il faut jeter ce rapport
dans les poubelles de l’Histoire », a affirmé le premier
ministre Benyamin Netanyahu, dans le cadre d’une offensive
médiatique et diplomatique destinée à rehausser l’image
internationale d’Israël.
En
première réaction, le mouvement islamiste Hamas, au pouvoir à
Gaza, s’est déclaré « choqué par la position du juge », alors
que le groupe radical Djihad islamique dénonçait « la reculade
du juge Richard Goldstone », lui
reprochant d’avoir « cédé aux pressions du lobby sioniste ».
Selon Sami Abou-Zouhri, porte-parole
du mouvement islamiste, le rapport mandaté par l’Onu « n’est pas
la propriété privée du juge Goldstone
», compte tenu du fait qu’il n’en était pas le seul auteur et il
a réitéré son appel à le mettre en application.
Partageant le même avis, l’Autorité palestinienne, par la voix
d’Hanane Achraoui, membre de son
comité exécutif, a dit « attendre du juge
Goldstone qu’il fasse preuve d’un engagement inébranlable
en faveur du droit international et non qu’il cède à la pression
israélienne. Même s’il a fait l’objet d’attaques incessantes en
Israël depuis la publication du rapport, le juge
Goldstone est la dernière personne
qui aurait dû succomber à cette pression ».
A la
parution du rapport, les autorités israéliennes, qui avaient
refusé de collaborer à l’enquête de
l’Onu, s’étaient déchaînées contre son auteur, de confession
juive, l’accusant de faire le jeu du Hamas. Dans une tribune
publiée samedi dernier par le Washington Post, M.
Goldstone a écrit que son rapport
évoquant de possibles crimes de guerre d’Israël — comme des
groupes armés palestiniens — pendant l’opération « Plomb durci »
aurait été « un document différent » aujourd’hui. Il a expliqué
que des attaques israéliennes contre des civils avaient été
classées comme intentionnelles parce qu’aucune autre conclusion
n’était possible à l’époque, mais que de nouveaux éléments
avaient montré depuis qu’il n’y avait pas eu de politique visant
à cibler les civils « de manière intentionnelle ». L’offensive
israélienne, visant à mettre fin aux tirs de roquettes depuis le
territoire palestinien, avait coûté la vie à 1 400 Palestiniens,
en majorité des civils, et à 13 Israéliens, pour la plupart des
militaires.
Faire le jeu d’Israël
Pour
exprimer sa satisfaction, le ministre de la Défense, Ehud Barak,
a déclaré qu’il fallait « à présent multiplier les efforts pour
que ce rapport soit annulé, et je vais m’y employer ». Il a
aussi demandé au juge Goldstone de «
publier ses conclusions actuelles » sans se contenter d’un
simple article de presse.
Partageant le même avis, le président israélien, Shimon Pérès, a
appelé pour sa part le juge « à s’excuser, pour avoir accusé
Israël de crimes de guerre et ignoré que l’offensive
d’autodéfense, Plomb durci, avait été lancée en riposte à des
milliers de roquettes tirées (depuis Gaza) contre des civils
innocents ».
Un
rapport, présenté en mars au Conseil des droits de l’homme de
l’Onu, reconnaissait qu’Israël avait engagé « d’importantes
ressources pour enquêter sur plus de 400 allégations de
mauvaises conduites opérationnelles à Gaza », tout en regrettant
qu’aucune enquête n’ait visé les responsables de l’opération.
Suite à ces enquêtes, trois actes d’accusation ont été lancés
contre des militaires israéliens, selon des sources judiciaires.
Le rapport s’alarmait du fait que le Hamas n’avait pas, pour sa
part, mené d’enquêtes sur le lancement d’attaques à la roquette
et au mortier contre Israël. En mars 2010, le Conseil des droits
de l’homme de l’Onu avait créé un comité pour assurer le suivi
du rapport du juge Goldstone. Le
magistrat sud-africain avait recommandé la saisine de la Cour
Pénale Internationale (CPI) de La Haye si les autorités
israéliennes et palestiniennes refusaient d’ouvrir des enquêtes
crédibles sur les « crimes de guerre » afin de punir les
coupables. Le changement de position du juge
Goldstone vient décrédibiliser son
rapport, faisant ainsi le jeu d’Israël, pour qui le massacre de
Gaza n’était qu’une « opération de légitime défense ».
L’impunité dont jouit Israël face à ses crimes de guerre
l’encourage — que ce soit à Gaza, au Liban ou dans l’attaque du
bateau humanitaire turc — à davantage de violence face aux
populations civiles. Le revirement de
Goldstone renforce un peu plus Israël dans son impunité à
utiliser la force pour défendre ses propres intérêts, peu
importe le prix à payer si le sang n’est pas israélien.
Droits de
reproduction et de diffusion réservés. ©
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Publié le 6 avril 2011 avec l'aimable autorisation de
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