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Al-Ahram Hebdo
Enfin la
réconciliation !
Maha Salem
Photo: Al-Ahram
Mercredi 4 mai 2011
Palestine.
Le chef en exil du Hamas, Khaled Méchaal,
et le président de l’Autorité palestinienne et chef du Fatah,
Mahmoud Abbass, se rencontrent pour la première fois depuis
quatre ans, au Caire. Les deux hommes doivent signer ce mercredi
un accord d’unification.
Encouragés par les mouvements
démocratiques qui secouent le Proche-Orient, les Palestiniens
réclamaient depuis des semaines que le Fatah, qui dirige la
Cisjordanie, et le Hamas, tout puissant dans la bande de Gaza,
se réconcilient. Un rêve qui a souvent hanté les esprits non
seulement des Palestiniens, mais aussi de tous les Arabes. Et
enfin, le rêve se concrétise.
Après quatre ans de division et
de conflit entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, les
dirigeants palestiniens ont décidé de mettre fin à leurs
différends. Ainsi, le Fatah du président Mahmoud Abbass et le
Hamas doivent signer ce mercredi au Caire un accord de
réconciliation. Essayant d’aborder tous les points de vue avec
les Palestiniens, une délégation égyptienne a multiplié les
contacts avec les dirigeants des territoires occupés. Et, pour
la première fois, la médiation égyptienne a réussi à trouver des
compromis avec les principales factions palestiniennes. Outre le
Hamas et le Fatah, le Djihad islamique, le Front populaire de
Libération de la Palestine (FPLP, gauche), et le Parti du peuple
palestinien (ex-communiste) parapheront l’accord de
réconciliation le 4 mai.
Grâce à la médiation égyptienne,
le plus important point d’achoppement a été réglé. Ainsi, le
premier article de cet accord porte sur la formation d’un
gouvernement non partisan jusqu’à des élections qui devraient se
tenir dans un an. L’accord se compose de six parties. Il prévoit
la formation d’un gouvernement intérimaire formé de
personnalités indépendantes, agréées par les deux parties,
jusqu’aux élections présidentielles, législatives et celles du
Conseil National Palestinien (CNP, Parlement de l’OLP). Cet
exécutif provisoire aura pour mission de préparer les élections,
de veiller au respect de l’accord et de poursuivre les efforts
pour mettre fin au siège de Gaza. Il sera également chargé de
résoudre les questions liées aux organisations de bienfaisance,
ainsi que les difficultés administratives posées par la
division. Son rôle sera notamment d’unifier les institutions
palestiniennes en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est.
L’accord a insisté sur l’entente
réalisée lors de discussions à Damas à l’automne 2010, portant
notamment sur la création d’une commission électorale centrale
composée de membres désignés par les deux parties. De même,
l’accord prévoit la création d’une commission judiciaire
composée de 12 juges pour trancher les litiges liés aux
élections. Une autre commission sera créée pour restructurer
l’OLP, présidée par M. Abbass. Quant aux questions de sécurité,
un Haut conseil de sécurité sera formé pour statuer sur les
questions se rapportant aux forces de sécurité des différents
mouvements. Ces dernières doivent être intégrées dans une force
de sécurité « professionnelle ». Jusqu’aux élections, les
questions de sécurité dans la bande de Gaza et en Cisjordanie
resteront respectivement du ressort du Hamas et de l’Autorité
palestinienne. Enfin les deux camps ont approuvé la libération
des détenus du Hamas en Cisjordanie et du Fatah à Gaza.
Le premier ministre du
gouvernement du Hamas dans la bande de Gaza, Ismaïl Haniyeh,
s’est déclaré prêt à démissionner. « Cet accord est très
important et il faut multiplier les efforts pour mettre fin aux
divisions et favoriser l’unité des Palestiniens », a-t-il
ajouté. Une déclaration importante puisque le premier ministre
du gouvernement du Hamas campait sur son poste et avait pour
ambition de diriger l’ensemble des territoires occupés.
Surpris par cette déclaration, le
premier ministre de l’Autorité palestinienne, Salam Fayyad, a
émis l’espoir que cet accord pourra conduire à la réunification
de la nation, « nécessaire pour permettre à notre peuple de
décider de son destin et d’établir un Etat indépendant sur la
totalité des territoires occupés depuis 1967, avec Jérusalem-Est
pour capitale », a insisté Fayyad.
Face à la haine israélienne
Les dirigeants israéliens ont
vivement critiqué cet accord. Pour eux, le Hamas est une
organisation terroriste. Un avis partagé par les Etats-Unis et
l’Union européenne. « Cet accord avec le Hamas, qui appelle à la
destruction de l’Etat d’Israël, doit inquiéter non seulement
tous les ressortissants israéliens, mais aussi tous ceux qui, à
travers le monde, aspirent à la paix entre Israël et ses voisins
palestiniens », a affirmé le premier ministre israélien,
Benyamin Netanyahu.
Face à ce rapprochement largement
bénéfique aux Palestiniens, Israël a menacé l’Autorité
palestinienne de sanctions. Le chef du gouvernement israélien
doit se rendre en Grande-Bretagne et en France cette semaine. Il
a annoncé qu’il déclarerait aux dirigeants de ces deux pays
qu’Israël souhaite la paix mais « restera ferme contre ceux qui
souhaitent lui nuire et mettre en péril son existence ».
Sous la pression des Etats-Unis,
des négociations de paix directes entre Israël et l’Autorité
palestinienne ont repris en septembre. Elles ont rapidement
échoué en raison du refus de Benyamin Netanyahu de prolonger un
moratoire sur les constructions dans les colonies juives de
Cisjordanie, un territoire que les Palestiniens revendiquent
pour un futur Etat.
Pour exercer davantage de
pression, Israël a annoncé, dimanche dernier, la suspension d’un
transfert de fonds à l’Autorité palestinienne suite à l’accord
de réconciliation. Le ministre israélien des Finances, Youval
Steinitz, a déclaré avoir ordonné le report d’une rencontre
consacrée au transfert de taxes dues à l’Autorité palestinienne
mais prélevées par Israël. Durant cette rencontre, les experts
des deux camps devaient entériner le transfert à l’Autorité
palestinienne d’une première tranche de 300 millions de shekels
(59,6 millions d’euros). Les responsables palestiniens « doivent
prouver que ces fonds ne vont pas alimenter une caisse commune
dans le gouvernement qu’ils veulent former avec le Hamas », a
expliqué M. Steinitz. « Il n’est pas question pour nous qu’une
caisse commune (palestinienne) puisse financer les activités
terroristes du Hamas, notamment ses achats de roquettes, et nous
voulons qu’il y ait deux caisses séparées », a insisté M.
Steinitz.
Défendant son camp, le ministre
palestinien de l’Economie, Hassan Abou-Libdeh, a précisé que ces
fonds sont transférés le 4 de chaque mois. « Ces fonds
reviennent au peuple palestinien. Israël les collecte en
prélevant une commission de 3 %. Tout retard dans le transfert
constitue une atteinte aux droits des Palestiniens et une grave
violation des arrangements actuels, dont Israël porte l’entière
responsabilité », a-t-il souligné, déplorant « l’ingérence
d’Israël dans les affaires intérieures palestiniennes ».
Défendant cette décision, le
ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, a fait part au
secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, de la « préoccupation
» de son pays face à cet accord de réconciliation. « Nous
attendons des dirigeants du monde entier et en particulier de
ceux de l’Onu qu’ils mettent comme condition à toute coopération
avec un gouvernement d’union palestinien qu’il se plie aux
conditions du Quartette pour le Proche-Orient », a ajouté M.
Barak. Le Quartette (Etats-Unis, Union européenne, Russie, Onu)
a fixé plusieurs conditions jusqu’ici refusées par le Hamas :
cessation des violences, reconnaissance des accords signés
précédemment par Israël et l’OLP et reconnaissance du droit à
exister d’Israël. L’accord interpalestinien ne mentionne pas ces
principes. De l’autre côté, les analystes négligent l’importance
de ces principes, puisque la Feuille de route, élaborée par le
Quartette en 2003, exige en outre le gel de la colonisation
israélienne en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est, ce
qu’Israël n’a jamais accepté. « Pourquoi doit-on toujours
obliger les Palestiniens à suivre les articles des anciens
accords tandis que l’Etat hébreu n’adopte aucun principe ? »,
explique le Dr Ibrahim Abdel-Qader, analyste au Centre des
Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.
Droits de
reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié le 5 mai 2011 avec l'aimable autorisation de
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