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Tel-Aviv s'insurge contre Washington
Israël teste la fermeté de Barack Obama
M. A. Boumendil
Photo Al Manar
Mercredi 8 avril 2009
Après avoir rejeté, mercredi, le processus d’Annapolis qui a
relancé en 2007 les négociations de paix pour aboutir à un État
palestinien, le ministre ultranationaliste a exclu, le
lendemain, toute concession sur le plateau du Golan, conquis en
1967 sur la Syrie et annexé en 1981 par Israël.
Au cours de sa visite officielle à Ankara
qui clôture sa longue tournée en Europe, le président américain
Barack Obama a évoqué le conflit israélo-palestinien devant les
parlementaires turcs. Il a notamment insisté sur le fait que
“les États-Unis soutenaient fermement l’objectif de deux États,
Israël et la Palestine, cohabitant dans la paix et la sécurité”.
“C’est l’objectif que les parties concernées ont convenu
d’atteindre dans la Feuille de route et à Annapolis. Et c’est
cet objectif que je poursuivrai activement”, a-t-il précisé. Le
ministre israélien de l’Environnement, Gilad Erdan, issu du
Likoud et très proche du Premier ministre Benjamin Netanyahou, a
violemment réagi lundi devant la Knesset en affirmant qu’il ne
prenait pas ses “ordres” du président Obama et qu’Israël “refuse
d’être le 51e état des États-Unis”.
Avant lui, et pour ses premières sorties publiques en qualité de
ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman
s’est davantage comporté comme un éléphant dans un magasin de
porcelaine que comme un diplomate. Après avoir rejeté, mercredi,
le processus d’Annapolis qui a relancé en 2007 les négociations
de paix pour aboutir à un État palestinien, le ministre
ultranationaliste a exclu, le lendemain, toute concession sur le
plateau du Golan, conquis en 1967 sur la Syrie et annexé en 1981
par Israël.
À Annapolis, le chef de gouvernement sortant, Ehud Olmert, et le
président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, avaient
convenu de négocier directement les questions centrales en vue
de la création d’un État palestinien. Les négociations devaient
porter, entre autres, sur les frontières, le sort des colonies
et le statut de Jérusalem-Est. Le nouveau chef de la diplomatie
de l’État hébreu a affirmé que son pays n’est lié que par la
“Feuille de route” du Quartette (États-Unis, Union européenne,
Russie et ONU), dont la mise en application s’est
malheureusement avérée problématique. Les craintes des
Palestiniens et de la communauté internationale se sont ainsi
confirmées et les réactions aux propos inquiétants du leader
d’Israël Beïtenou n’ont pas tardé. En Israël, l’ancienne
ministre des Affaires étrangères Tzipi Livni, désormais passée à
l’opposition, a demandé au Premier ministre Benjamin Netanyahou
de désavouer le nouveau numéro un de la diplomatie de l’État
hébreu. De son côté, le député travailliste Ofer Pines-Paz,
opposé au ralliement de son parti à la coalition
gouvernementale, a qualifié Avigdor Lieberman de “menace
stratégique pour Israël”. Au plan international, les États-Unis
ont réagi en réaffirmant leur attachement à une solution à deux
États. Au cours d’un entretien téléphonique avec l’intéressé, la
secrétaire d’État Hillary Clinton a souhaité le rencontrer “le
plus vite possible”, selon une déclaration du bureau de
Lieberman à l’AFP. Pour sa part, l’Égypte a qualifié de
“regrettables” les propos intempestifs du ministre israélien
considérés comme le “premier revers pour les efforts de paix de
la part du nouveau gouvernement” de l’État hébreu. Le ministre
égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Abou Gheït, a même
déclaré qu’il ne serrerait pas la main à Lieberman s’il venait à
le rencontrer, rapporte l’agence officielle Mena. Au moment même
où ses propos suscitaient inquiétudes et indignation tant à
l’intérieur qu’à l’extérieur d’Israël, Avigdor Lieberman a été
rattrapé par ses propres déboires.
À peine installé dans ses nouvelles fonctions, il a été convoqué
jeudi et interrogé pendant sept heures et demie par les
enquêteurs du Département des fraudes de la police. Soupçonné de
corruption, de fraude, de blanchiment d’argent et d’abus de
confiance, ses démêlés avec la police durent depuis treize ans,
et il sera de nouveau interrogé dans les jours ou les semaines
qui viennent. On ne sait toutefois pas si ces accusations sont
de nature à menacer sa présence au gouvernement. En fait, les
propos tenus lundi par le très influent ministre de
l’Environnement montrent que le discours fermé de Lieberman est
le résultat d’une politique concertée et non un dérapage d’un
homme connu pour ses positions extrêmes. Un bras de fer à
distance est donc engagé entre Tel-Aviv et Washington, un peu
comme si Israël testait la profondeur et la détermination du
président Obama. Ce dernier et son Administration auront du pain
sur la planche pour ramener l’allié au comportement d’enfant
gâté à des positions plus responsables.
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Publié le 9 avril 2009 avec l'aimable autorisation de Liberté.
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