Opinion
Les Libyens n'ont
pas fini de dire merci au binôme
Sarkozy-Juppé
Louis
Denghien
Le genre
de photo que l'équipe de campagne de
Sarkozy pourrait très vite mettre sous
embargo
Mercredi 14 mars
2012
Décidément, mauvaise
séquence pour l’opposition radicale
syrienne ! Un de ses plus fermes
soutiens français,
L’Express
publie un article, mercredi 14 mars, qui
met en question la militarisation et
l’instrumentalisation de l’opposition à
Bachar à la lumière de ce qui est en
train de se passer en Libye. Et ce qui
s’y passe, c’est une démonstration
permanente et à grande échelle des
méfaits de l’ingérence humanitaire à la
sauce OTAN, et de l’irresponsabilité, en
ce qui nous concerne, du tandem
Sarkozy/Juppé, lequel tandem, avec
l’arrogance qu’on lui connaît continue
de se décerner des
satisfecit,
mois après avoir livré le pays aux
radicaux islamistes du CNT.
L’Express
n’y va pas par quatre chemins : « Ce qui
se passe entre Tripoli et Benghazi est
un cauchemar politique » ! Car,
note l’hebdomadaire pourtant assez
atlantiste – et très, très anti-Bachar –
« plus
aucune autorité ne règne sur le pays,
les milices s’entre-déchirent et le
spectre de la partition menace l’unité
nationale« .
Vers une
indépendance de la Cyrénaïque (et une
nouvelle guerre civile) ?
Nous avions déjà entretenu
les visiteurs de ce site des incidents
sanglants survenu entre milices rivales
à Tripoli, des révoltes de tribus du
coté de l’oasis de Koufra (voir
notre article « Quelques problèmes
arabes dont on ne parlera pas à Tunis »,
mis en ligne le 23 février). Mais
c’est vrai que depuis, il y a plus fort
et plus grave : le 6 mars, les grandes
tribus de l’Est, de la Cyrénaïque donc,
réunies à Benghazi, berceau de la
révolte anti-Kadhafi, ont proclamé
l’autonomie de la province orientale de
la Libye, réclamant un Etat fédéral, et
même, dans les faits, confédéral,
première étazpe vers une indépendance
revendiquée à voix de plus en plus
haute. Cruel ricochet politique pour le
CNT installé à Tripoli, et dont les
fondateurs et meneurs venaient de
Benghazi ! Le CNT, dont L’Express
s’avise soudain qu’il «
ne
contrôle rien« , a d’ailleurs
vivement réagi en condamnant les «
séditieux«
. Mais c’est bien la seule réaction dont
il soit capable pour l’heure, car il ne
compte pas d’assez de troupes sûres pour
entreprendre une éventuelle reconquête
de la Cyrénaïque. Car du côté de
Benghazi, justement, on ne se fait pas
faute de rappeler que ce sont les
combattants issus de la région qui ont
été le fer de lance de la « révolution »
(avec les avions de l’OTAN).
Pourtant, du point de vue
qui est le sien, il faudrait faire
rapidement quelque chose : comme l’écrit
L’Express,
c »est à présent «
toute la
frontière entre la Libye et l’Egypte qui
échappe maintenant au gouvernement
central« . Et, accessoirement,
c’est en Cyrénaïque que se trouve les
quatre-cinquièmes des réserves de
pétrole et de gaz du pays.
A Tripoli, le CNT, tant
vanté pour son caractère démocratique
par Juppé et BHL, se réduit à un homme
fort : Abdelhakim Belhadj, ancien fidèle
d’Oussama ben Laden en Afghanistan. A
l’heure où l’armée américaine dit à
haute voix sa crainte des infiltrations
d’al-Qaïda en Syrie, il n’est pas
certain que Washington bouge le petit
doigt pour aider le « gouvernement » de
Tripoli.
D’autant que l’amorce de
sécession de la Cyrénaïque pourrait,
comme le suggère L’Express, décidément
bien revenu de son enthousiasme pro-CNT,
donner des idées à d’autres : les tribus
touaregs du Sud, par exemple, restées
fidèles à la personne, puis à la mémoire
de Kadhafi, et qui n’aiment ni les gens
de Benghazi, ni ceux de Misrata
(capitale « spirituelle » de
l’insurrection). Et les Berbères qui
peuplent la région frontière avec la
Tunisie pourraient se joindre au
mouvement centrifuge. Bref, c’est un
grand choix de chaos et de guerres
civiles, avec de possibles implications
des voisins, qui s’offre, grâce à
Sarkozy et à l’OTAN, aux Libyens.
De la
Libye à la Syrie,
et du CNT au CNS…
Etonnante et rapide – et
prévisible – vengeance posthume de
Muammar Kadhafi : la Libye risque bien
de ne pas lui survivre longtemps et
ceux-là même qui l’avaient renversé,
avec l’aide de l’OTAN, se retrouvent
confrontés à une nouvelle dissidence de
Benghazi et cette fois il n’est pas
certain que le gouvernement français –
ce qui ne veut plus dire forcément le
gouvernement Sarkozy – ressorte ses
Mirages pour les beaux yeux du CNT – vu
les enjeux pétroliers on verrait bien
les gouvernants français, quels qu’ils
soient, prendre plutôt la défense de la
nouvelle « république islamique de
Cyrénaïque », à moins qu’ils ne soient
devancés par les très pragmatiques et
cyniques dirigeants américains et
britanniques. Ces
événements sont aussi, bien sûr, un
sacré démenti aux prétentions humanistes
et géostratégiques de Nicolas Sarkozy et
d’Alain Juppé qui, pour se refaire une
virginité après leurs cafouillages
égyptien et tunisien, et gagner quelques
points dans les sondages français,
avaient pris la tête de la croisade
otanesque contre le colonel Kadhafi
: apprenti-sorciers, et incultes
géopolitiques qui auraient dû bûcher un
peu leurs fiches ou la page Wikipedia
sur la Libye. Mais il est vrai que chez
ces gens-là, on ne compte pas en mois,
encore moins en années, mais en semaines
médiatiques.
On est presque certain en
revanche qu’une éventuelle reprise de la
guerre civile en Libye n’arrachera
aucune remise en question à BHL,
toujours très « stoïque » en ce qui
concerne le sang arabe versé.
Le seul aspect positif de
cet immense gâchis, c’est qu’il
constitue, et c’est d’ailleurs le fonds
de l’article de
L’Express,
un formidable contre-exemple pour tous
ceux qui rêvent – ou ont rêvé tout haut
– d’une stratégie de déstabilisation et
d’ingérence en Syrie. A dire vrai, les
Occidentaux, s’ils n’avaient la mémoire
aussi courte – et sélective – avaient
déjà le précédent de l’Irak pour se
faire une idée des conséquences d’une
aide active et directe aux bandes armées
ASL et salafistes et aux fantoches du
CNS. Le CNS qui, au fait, a été reconnu
parmi les premiers comme «
représentant légitime du peuple syrien
» par le CNT. Qui lui a dépêché, au
fait, quelques centaines de volontaires
islamistes pour étoffer les rangs de
l’ASL. Du train où
vont les choses, c’est le CNS qui va
devoir envoyer l’ASL au secours du CNT !
Le
désastre - récent et en cours - en Libye
enterre un peu plus les dernière
espérances otanesques en Syrie
Publié le 14 mars
2012 avec l'aimable autorisation d'Info
Syrie
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