Syrie
Comment Bachar a
déçu Nicolas...
Louis
Denghien
Un grand
moment dramatique : Sarkozy tentant une
dernière fois d'attirer Bachar al-Assad
chez les "gens raisonnables", en
décembre 2010
Mercredi 7 mars
2012
Nous revenons sur la partie
de l’émission
Des
paroles et des actes – diffusée
mardi soir 6 mars sur
France 2
– où Nicolas Sarkozy a été interrogé sur
la Syrie. De cette séquence est
ressortie la raison profonde de la
guerre froide que mène depuis le début
de la crise le président français contre
son homologue syrien : Bachar n’a pas
voulu, comme tentait de l’en convaincre
Sarkozy, s’éloigner de l’Iran. Pour tous
ceux qui s’intéressent aux relations
franco-syriennes, la chose n’avait rien
d’une révélation, mais enfin, mardi
soir, Nicolas Sarkozy l’a dit à des
millions de téléspectateurs. Voici la
transcription, en langage sarkozien, de
cette bouleversante histoire d’amitié
déçue : «
J’ai essayé de le (Bachar)
ramener
dans la communauté des gens
raisonnables, j’ai essayé de le séparer
d’Ahmadinejad et des dirigeants
iraniens. J’avoue mon incompréhension
totale devant l’évolution de cet homme ».
Les «
gens
raisonnables » et les autres
Il est certain qu’un
serviteur empressé de l’Oncle Sam comme
Nicolas Sarkozy ne pouvait comprendre
qu’un dirigeant refuse de trahir son
camp, celui de la résistance arabe et
musulmane à l’impérialisme américain et
à son Etat associé sioniste – les «
gens
raisonnables », ce sont eux. A
noter qu’interrogé sur la possibilité
d’une intervention à la libyenne contre
Damas, Sarkozy a répondu de la même
façon et le même jour que son ami –
enfin plutôt son allié – Obama : «
Non, je
pense que ça ne serait pas raisonnable –
en tout cas je ne le ferai pas – de
lancer l’armée française sans un mandat
très clair des Nations-Unies« . Et
voilà qui amenait le chef provisoire de
l’Etat au cas de la Russie et de la
Chine – des gens « déraisonnables », on
suppose : «
Il faut
faire lever le véto russe et le véto
chinois » a-t-il dit, ajoutant en
quoi résidait son principal espoir en la
matière : «
J’espère
que la nouvelle élection de M. Poutine
va l’amener à considérer la question
syrienne avec une autre idée« .
On sait que «
M. Poutine
» a très vite douché cette ultime
espérance….
Mais Nicolas Sarkozy – un
garçon affectif, qui compte beaucoup sur
son charme personnel pour résoudre les
problèmes politiques – n’a pas considéré
la relation franco-syrienne que sous le
seul angle géopolitique. Les
téléspectateurs français ont pu ainsi
apprendre de sa bouche d’importantes
précisions quant à la personnalité
profonde de Bachar al-Assad.
Figurez-vous que lors de sa visite
officielle en France, en 2008, Bachar ne
«
massacrait pas les femmes et les enfants
à Homs » ! Certes, «
il n’était pas un
démocrate mais il n’était pas un
assassin. Il est devenu un assassin«
.
Et pour le bien supérieur
de l’humanité, et de l’Occident en
particulier, Nicolas a tenté de ramener
Bachar dans le droit chemin
pro-américain : «
J’ai
essayé de le convaincre, de l’attirer et
je lui ai dit : « si vous nous mentez,
ce sera la rupture » » ! On sait la
suite, Bachar al-Assad a vu arriver
l’émissaire français de Washington et de
Tel Aviv de très loin, avec de très gros
sabots. et il a décliné poliment la
perche que lui tendait son hôte
français.
Résister à une offensive de
charme de Nicolas Sarkozy, réaffirmer
tranquillement la souveraineté
diplomatique de la Syrie, refuser de
trahir ses alliés et de passer au
service de l’OTAN comme un vulgaire
Moubarak, tels sont, de l’aveu même de
M. Sarkozy, les premiers crimes de celui
qui n’était pas encore un «
assassin«
. Nous pensons, en
dépit de tout ce qui s’est passé depuis
onze mois, que Bachar al-Assad a eu
raison : il n’est jamais bon de devenir
l’ami d’un voyou.
Publié le 7 mars
2012 avec l'aimable autorisation d'Info
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