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Le Grand Soir.Info
Redeker, le « philosophe »
qui voulait péter plus haut que son c...
Leila Salem
Mercredi 5
octobre 2006
Naissance d’une
« étoile »
Hier, c’était
un parfait inconnu ; aujourd’hui, il est devenu une vedette
dans les colonnes de la presse, sur les écrans de télévision et
sur la toile. Professeur de philosophie dans un lycée de la
banlieue toulousaine ; Robert Redeker fut toujours persuadé
d’être "Je suis une célébrité,
sortez moi de là" . Il est décrit par plusieurs de
ses collègues comme quelqu’un d’imbu de sa personne, arrogant
et égocentrique et les élèves n’en pensent pas moins ;
ses cours de philo tournaient autour de sa petite personne et ses
articles étaient souvent lus en classe.
Cet ardent défenseur
des valeurs occidentales est devenu plus sioniste que sioniste et
fait tout pour le faire savoir. En effet, Redeker écume depuis
longtemps les rédactions de tout ce que la France compte comme
gazette islamophobe, ses papiers sont imprégnés par un fort
racisme et une rage contre la gauche qui à ses yeux est coupable
de complicité. Il justifie son « islamophobie
au nom de ses sympathies sionistes... » comme l’écrit
Danielle Bellatrach. Ses tribunes répétées, concentré de haine
anti-musulman, lui ont permis d’avoir le ticket d’accès au
cercle des nouveaux réactionnaires ; ces intellectuels de la
« gauche » ultralibérale fort médiatisés et
promoteurs de la guerre des civilisations.
Il faut dire
que notre homme, développe des théories aussi extravagantes les
unes que les autres avec une parfaite médiocrité qui lui est
sienne.
Pour rehausser
son CV et donner plus de consistance au personnage, ses parrains
n’ont pas hésité à lui trouver des jobs dans diverses revues.
Il est, par
exemple, membre du comité de rédaction de la revue « les
Temps Modernes », publication dirigée par Claude Lanzman, réalisateur
d’un film qui fait l’apologie de l’armée
sioniste .
Redeker est
aussi ami et ex-collaborateur pour ProChoix de Caroline Fourest,
une autre islamophobe patentée.
Il a également
publié des tribunes véhémentes dans divers quotidiens dont Le
Monde, Libération, Le Figaro.... Dans l’une de ses publication,
il traita les médias de complaisants (sic !) à l’égard
des dernières émeutes des banlieues. D’après lui, la
faiblesse et le laxisme de ces derniers les ont conduits à
chercher une « justification »
sociale à cet embrasement. Dans une autre, il dénonça la « pédagogie
déferlante » et la « sociolâtrie »
qui transforment, selon lui, les professeurs en vulgaires
animateurs de quartiers. Il y eut aussi cette autre tribune où il
légitima la publicité et fit son éloge « suscitant
du désir (...), humanise, nous rendant, au même titre que la
raison, plus hommes... » avait-il affirmé.
De même, il a
collaboré dans l’Arche, mensuel du judaïsme français. Dans
cette revue, il y a publié un article
virulent contre les palestiniens et les jeunes des banlieues « le
Palestinien et le jeune de banlieue jouent les fantômes du Prolétaire,
venant hanter les nostalgies de certains intellectuels et des
militants de gauche », à la différence du Prolétaire
qui « était affecté du signe positif du
progressisme » le Palestinien et le jeune de banlieue « n’expriment
qu’un mixte de fanatisme religieux et de fétichisme consumériste »
écrivait-il dans l’Arche.
Dans un
autre article publié dans la même revue, il s’attaqua à la
gauche devenue, selon lui, « antisémite »
par « vacuité intellectuelle et politique »
« Le vide politique actuel de la gauche »
l’a conduit à « la haine sur son objet primaire
ancestral, le Juif. » affirmait-il.
Tempête dans un
verre d’eau
Le 19
septembre, le « philosophe » revint à son activité
favorite, l’islamophobie, et publia dans le Figaro une diatribe
sur l’islam. Le 20 septembre, dans son bulletin d’information « Hassad
Al Yaoum » la chaîne Al-jazeera diffusa la nouvelle -
sans citer le nom de l’auteur- Le même jour, dans une émission
hebdomadaire d’Al Jazeera, dont le thème portait sur la polémique
créée par les propos du pape, Al-Kardaoui, survola l’affaire
de la publication du Figaro sans citer ni le nom du journal ni
celui de l’auteur. Au cours de cette émission, il appela à une
manifestation pacifique le 22 septembre, baptisée « jour
de la colère » en guise de protestation contre les
multiples attaques subies par les musulmans ces derniers temps. Il
mit en garde contre tout débordement et conseilla les musulmans
de ne pas tomber dans le piège des médias occidentaux et donner
l’image du musulman violent, cliché dont les médias sont
friands. À aucun moment, Al-Kardaoui n’a désigné le « philosophe »
français à la vindicte, comme l’ont affirmé Caroline Fourrest
et autres personnes et médias français (y compris l’Huma qui
devrait vérifier ses informations avant de les publier). L’émission
est archivée sur le site de la chaîne et consultable .
La liberté
d’expression s’arrête là où mes intérêts commencent
Le Figaro qui se pavane devant son
lectorat français dans les habits du grand défenseur de la
liberté d’expression, se fend, au même moment, en excuse
devant ses clients arabes et se désolidarise de Redeker. Le 21
septembre Pierre Rousselin, directeur-adjoint de la rédaction du
Figaro exprima sur Al
Jazeera ses regrets concernant la publication de l’article
de Redeker. Il déclara que la publication d’un tel article est
une erreur ; il affirma que ce texte n’exprime pas l’avis
du journal et qu’il a été publié dans le cadre d’une
tribune libre qui n’engage que son auteur. Il ajouta que parfois
des erreurs se produisent, des textes sont publiés sans vérification
préalable et il s’en excusa. Le même jour, l’article
incriminé fut retiré du site du Figaro.
La désillusion
Le 22
septembre, jour de la dite manifestation, les médias français se
mirent en branle et sortirent leur grosse artillerie pour capter
les images de foules musulmanes hystériques et violentes afin de
les diffuser sur toutes les chaînes occidentales. À leur grand
regret, rien ne se passa comme ils l’escomptaient ; les
rares manifestations se déroulèrent dans le calme et aucun acte
violent ne fut relevé. Ce jour-là, l’attention des gens étaient
portée vers le discours « Du jour de la Victoire » de
Nasrallah. Personne ne demanda la tête de Redeker ni même évoqua
l’affaire du « philosophe » français. Redeker
conserva son statut du parfait inconnu dans le monde
arabo-musulman ; les peuples arabes et musulmans restent
beaucoup plus préoccupés par les situations dramatiques que
vivent la Palestine, le Liban, l’Irak et l’Afghanistan que par
les petites bisbilles franco-françaises à la sauce Redeker.
Une opération
publicitaire bien réussie.
Redeker, cet
intégriste du vedettariat et de la publicité a signé sa tribune
dans le Figaro en se présentant comme professeur au lycée
Pierre-Paul-Riquet impliquant ainsi le lycée où il exerce et la
ville qui l’accueille. Le 22 septembre, Redeker informa le lycée
des menaces de mort dont il aurait fait l’objet et que désormais,
il vivra dans la clandestinité sous la protection de la DST.
Cette nouvelle se propagea comme une traînée de poudre et une
vraie effervescence régna au lycée « y a
mon prof de philo qui a fait un sale article ! »
dit un élève de cet établissement. Les lycéens se passèrent
des papiers chiffonnés reproduisant des extraits de l’article
de Redeker, les survolèrent d’abord vaguement, puis s’arrêtèrent,
choqués, sur la violence des propos : « Jésus
est amour » contre « Mahomet est
haine », « massacreur de juifs »,
« pillard »...L’un d’entre eux
demanda, « il est de qui cet article ?
Redeker ! Ah oui, celui qui brandit ses articles et les
partage si humblement à ses élèves... je m’en souviens !
». Un autre lança, désabusé, «
je ne lirai pas son torchon car lui, il dit qu’on mérite pas
ses cours je ne vois pas pourquoi il mériterait mon attention ».
Et un autre ajouta « y a mon frère qui
l’a eu l’an dernier, ce prof dit que la dictature est le
meilleur système possible et il dit que quelqu’un qui n’aime
pas la pub est quelqu’un qui n’aime pas la vie ? ».
« Ah ! bon » s’en étonna
un autre, « c’est dans le programme de
philo ça ? » Questionna-t-il. « Pas
plus que ses articles qu’il fait lire à ses élèves sur ses
heures de cours » répondit un autre. « Chapeau
Redeker, joli coup de pub » ricana un autre ;
« C’est son jour de gloire, c’est ce
qu’il a toujours cherché, il doit en être content »
poursuit-il en éclatant de rire.
L’armada de l’islamophobie
Au fil des
heures, élèves et enseignants se rendirent compte du piège dans
lequel veut les faire entraîner Redeker et ses acolytes. Avec
intelligence et lucidité, les élèves et leurs professeurs calmèrent
la situation et oublièrent, dès le lendemain, l’affaire
Redeker, et la vie au lycée de Saint-Orens reprit son cours
normal.
Cependant,
certains médias, ses pompiers pyromanes amateurs des eaux
troubles, ne l’entendaient pas de cette oreille. Eux, qui
voulaient la tempête, ont été déçus par l’attitude
responsable des élèves, du corps enseignant, des syndicats et du
maire de la ville de Saint-Orens. Deux jours après, caméras au
point, les télés débarquèrent en meute au lycée Saint-Orens
pour rallumer le feu. Les émissions se multiplièrent, les
journaux abondèrent dans le même sens et les défenseurs
inconditionnels du « philosophe » se précipitèrent
sur les plateaux de télévisions et ondes de radios pour venir à
son secours contre les méchants ennemis de la liberté d’expression-entendez
par là : musulmans et une gauche accusée de complicité.
D’un côté,
les extrémistes communautaires issus d’une partie de la droite,
de l’extrême droite traditionnelle et des groupes
ultrasionistes dénoncèrent « la menace
totalitaire et fanatique » réclamèrent « l’expulsion
des extrémistes » et saluèrent «
la lucidité des propos » de Redeker. De l’autre côté,
les nouveaux réactionnaires d’André Gluksmann à Alain
Finkielkraut en passant par Bernard-Henri Lévy, Pierre-André
Taguieff, Caroline Fourest et Cie profitèrent de l’occasion
pour renouveler leur haine et leur racisme anti-musulman à haute
voix et sans aucun complexe. Afin de venir en aide à leur frère
siamois, ils lancèrent un
appel de soutien au « philosophe »
Philippe de
Villiers , allant dans le même sens, lança sa propre pétition
de soutien et demanda, sans rire, à Jacques Chirac "d’héberger"
le bon père de famille.
La culture de la
haine
Par sa haine
aveugle, ce pseudo philosophe cherche à propager davantage la thèse
du choc des civilisation au sein de la société française et à
semer la haine entre les citoyens. Par son égocentrisme et son
irresponsabilité, il a terrorisé les élèves du lycée où il
exerce et a inquiété les parents, les élèves et les parents
musulmans plus que les autres. En effet, des groupuscules d’extrême
droite sont très actifs dans la région Toulousaine et cette
affaire risque de les revigorer. Cet été un lycéen de
Saint-Orens de la mouvance d’extrême droite fut mis en examen
pour avoir fabriqué un engin explosif de 6kg ! Ce garçon,
au profil dangereux se préparait à passer à l’acte. Bien
entendu, les médias, si prompt à dénoncer les méchants métèques
n’ont dirent mot, à peine un petit encadré paru dans la dépêche
du midi [1].
La liberté
d’expression
Redeker, le
menacé, n’est qu’un pion faisant partie d’un système qui
utilise la propagande de façon subtile afin de guider le peuple
vers des buts bien précis. Les médias, ces organisations aux
pratiques totalitaires disposent de pouvoirs considérables et
sont liées entre elles par des objectifs et des intérêts
communs et inavoués. Elles instrumentalisent les peurs, divisent
les citoyens, fabriquent les évènements et les opinions ;
de plus, elles ont appauvri la vie culturelle, ont favorisé la
pensée unique et ont réussi à tuer l’esprit critique du
citoyen.
Avant
d’accuser les musulmans, une proie si facile, les vaillants défenseurs
de la liberté d’expression devraient s’attaquer à Goliath et
libérer la parole du joug des industriels et des marchands
d’armes.
Leila Salem
Cholem-Alekheim
contre Redeker, par Danielle Bleitrach.
Faut-il
brûler Redeker ? par Maxime Vivas.
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