Opinion
Syrie: après les
"moudjahidines" arabes,
les "moudjahidines" iraniens
Leila Mazboudi
Vendredi 5 octobre
2012
Le groupe
terroriste iranien, l’Organisation des
Moudjahidines du peuple Iranien (OMPI)
voudrait rejoindre les rangs des
miliciens de l’ASL en Syrie dans le but
de combattre le Hezbollah et les
gardiens de la révolution iranienne.
Cette
décision a été révélée par le conseiller
politique de la milice de l’Armée
syrienne libre (ASL), Bassam Dada selon
lequel le commandement de la milice
s’attelle à étudier cette suggestion et
a plutôt tendance à l’accepter. Il a
toutefois dit qu’il est exclu que la
totalité des membres du groupuscule qui
compte quelques 6100 membres soient
absorbés, ni qu’ils soient admis avec
leurs armements. Il est question que ce
groupuscule s’installe dans un camp
édifié à la frontière avec le Liban.
Selon les dires du responsable de l’ASL,
leur coopération devrait se limiter à
apporter leur soutien logistique et non
à faire part aux combats, au motif que
ses hommes sont des combattants
performants.
Cette
suggestion intervient au lendemain de la
décision prise par l’administration
américaine de radier cette organisation
de sa liste noire terroriste dans
laquelle elle a été placée en 1997. En
échange, l'organisation iranienne se
devrait de renoncer à la violence.
À cet égard, le département d'Etat
souligne qu’il ne pardonne ni n'oublie
les actes terroristes passés des
Moudjahidines du peuple, dont leur
implication dans les meurtres de
citoyens américains en Iran dans les
années 1970 et dans un attentat sur le
sol américain en 1992.
Mais ceci n’a pas empêché
l’administration américaine de placer
les membres de cette organisation sous
la protection de l’armée américaine,
depuis l’invasion de l’Irak en 2003,
puis de veiller à ce que le gouvernement
préserve leur sécurité.
La proposition de l’OMPI à l'ASL
devrait également permettre aux quelques
4000 membres de ce groupuscule de
quitter l’Irak, où ils se sont installés
depuis 1980, pour collaborer avec le
régime de Saddam Hussein dans sa guerre
de 8 années contre l’Iran. Surtout que
depuis le retrait américain, le
gouvernement irakien exige leur départ.
Ils ont été contraints dans un
premier temps à quitter le camp Ashraf
situé à 150 km de de Bagdad, vers celui
de Liberty, une ex-base américaine en
attendant leur nouvelle destination.
L'OMPI a figuré sur la liste noire de
l'UE de 2002 à janvier 2009. Etant
toujours considérée comme telle au
Canada, elle a de fortes chances de voir
changer son statut, surtout après la
décision américaine.
L'organisation
Mojaheddin-e-Khalq, ou Monafekin-e-khalk
(comme se plaisent à l'appeler les
Iraniens, ce qui signifient les
hypocrites) a été créée en 1965 par des
étudiants iraniens souhaitant renverser
le régime du shah fondé sur l'appui
américain et mettre en place une
république socialiste islamique en Iran.
Ses membres ont participé au
renversement de la monarchie en 1979.
Après la révolution, ils ont refusé
de laisser le pouvoir à l'ayatollah
Khomeiny. Suite à une série d'attentats
meurtriers, l'OMPI a été interdite en
Iran et ses dirigeants se sont installés
en France et en Irak. Escomptant ses
incursions meurtrières en Iran, depuis
l’Irak, le gouvernement iranien estime
que les activités des Moudjahidines ont
causé la mort de plus de 12.000 Iraniens
et plus de 25.000 Irakiens.
Selon le journal français Libération,
« ils sont même suspectés d’avoir aussi
effectué de basses besognes pour le
compte du dictateur irakien. C’est ce
qui explique pour beaucoup pourquoi ils
sont détestés à ce point à la fois par
les Iraniens - qui les considèrent
aujourd’hui encore comme des alliés de
l’ancien envahisseur - et les Irakiens,
chiites et kurdes ».
Aujourd'hui
encore, elle semble oeuvrer dans la même
direction, s'attelant entre autre à
faire torpiller le programme nucléaire
iranien. Ses collaborateurs en Iran
espionnent les installations nucléaires
et tentent de fournir au Pentagone et
aux agences américaines sur les
évolutions dans ces domaines. Sa
collaboration avec le Pentagone a été
révélée par le journal français Le
Monde. Il lui est imputable d’avoir
rendu publique en 2002 la présence de
deux sites nucléaires à Natanz et Arak.
Ces
dernières années, elle est impliquée
dans l’assassinat des scientifiques
nucléaires iraniens. Lors des
interrogatoires, les auteurs des
assassinats ont reconnu appartenir à
cette organisation et collaborer avec le
Mossad israélien.
Plus encore, et selon le journal
français Le Monde, c’est cette
organisation qui est derrière
l’accusation adressée à certains
pèlerins iraniens enlevés en Syrie par
des miliciens d’être membres des
pasdarans.
Avec sa demande de rejoindre le rang
des miliciens en Syrie, l’OMPI viole son
engagement de renoncer à la violence.
Interrogé par Libération, un politologue
iranien ayant requis l’anonymat a
affiché son scepticisme quant à voir ce
groupuscule évoluer vers l’action
politique, signalant qu’il s’agit «
d’une secte au fonctionnement
incroyablement stalinien ».
Le journal français signale que
Washington non plus ne semble pas y
croire : «Le Département a de sérieuses
préoccupations sur l’OMPI en tant
qu’organisation, particulièrement au
regard des accusations d’abus perpétrés
[par l’organisation] contre ses propres
membres».
Comme l'administration américaine a
longtemps affiché à l'encontre de cette
organisation une position inverse que
celle qu'elle lui voue réellement, il
est exclue que le débarquement de cette
dernière en Syrie se passe sans son
blanc-seing. D'autant plus que la
politique américaine en Syrie est d'y
envoyer toutes les têtes chaudes du
monde arabo-islamique, combattant
d'Al-Qaïda compris. Question de s'en
débarasser, et d'exténuer le pouvoir
syrien aussi!
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