Opinion
Crise syrienne :
Quand les mafias s'en mêlent
Khodor Awarki
Vendredi 19 octobre
2012
Il y a un an, le
magazine français
Afrique Asie consacra une édifiante
enquête sur les mafias des médicaments
contrefaits*
qui provoquent la mort de milliers de
patients. Suite à une coopération
internationale multiforme avec les
services syriens luttant contre la
contrebande et la contrefaçon, ces
réseaux mafieux furent mis hors d’état
de nuire. Mais avec l’effondrement de
cette coopération, ces mêmes mafias, aux
ramifications syriennes, régionales et
internationales, se réimplantent de
nouveau, grâce notamment à la complicité
de certaines bandes armées fortement
soutenues par la Turquie et le contrôle
qu’elles exercent sur certaines zones
frontalières.
Mais cela ne
décourage pas pour autant les services
de santé syriens, énergiquement épaulés
par certaines forces d’élites de
l’armée, de continuer ce combat. En
effet, selon des informations ultra
confidentielles émanant des services de
santé dépendant des provinces d'Idleb et
Alep, auxquelles le site
Arabi Press, connu pour la qualité
de ses informations, puisées aux
meilleures sources, des commandos
d’élite de l’armée syrienne ont mené,
ces trois derniers jours, des raids
successifs sur des positions gardées par
d'importantes bandes armées des milices
de l'ASL,
soutenues par l'OTAN et la Turquie, dans
les localités de Azaz, Bennech et el
Tamanaa. Le but de ces opérations
n’était rien d'autre que la destruction
d'un réseau de fabrication de faux
médicaments dont les bénéfices sont
partagés entre les milices de l'ASL
et d'importants groupes mafieux
internationaux qui se sont spécialisés
dans la fabrication de faux médicaments
onéreux, destinés aux malades du cancer,
diabète ou hypertension, ainsi que les
faux médicaments destinés aux enfants
malades et dont le prix peut atteindre
des sommes astronomiques (des
milliers de dollars) sur le marché
officiel syrien.
Ces opérations
spéciales, brèves, ponctuelles et
chirurgicales, n'ont pas été menées par
des bombardiers ou des hélicoptères de
combat, mais à travers le parachutage
d’un commando des forces spéciales qui
s’était infiltré sur les lieux de
fabrication et s’y était retiré, une
fois la mission accomplie, dans des
conditions extrêmement périlleuses.
Elles se sont déroulées à quelques
mètres des positions de l'armée turque
situées de l'autre coté de la frontière,
de telle sorte que les militaires turcs
pouvaient voir les membres du commando
lors de leur retrait sans oser
intervenir...
Arabi Press a publié les détails de
l'opération avec, à l’appui, des photos
exclusives des laboratoires ou usines
clandestins détruites.
L'opération en
elle-même a été saluée comme un succès
militaire et sécuritaire majeur, en
raison des dégâts que causent les faux
médicaments sur la santé publique dans
les pays de la région, y compris en
Syrie.
Les faux
médicaments inondent les pharmacies de
nombreux pays comme le Liban, la
Jordanie, l’Irak, les territoires
palestiniens occupés, l’Iran, les pays
du Golfe ou ceux d’Asie centrale.
Il y a trois ans,
les forces des renseignements syriens
avaient déjà réussi à détruire un
important réseau de fabrication et de
distribution de faux médicaments. Mais
les récents événements de Syrie ont
profité aux groupes mafieux pour revenir
s’installer en Syrie sous la protection
de l’Etat turc et de ses supplétifs
syriens.
Il s’agit d’un
commerce à forte valeur ajoutée qui
pourraient atteindre des milliards de
dollars. Un commerce qui sera appelé à
prospérer si la Turquie et certains pays
occidentaux parvenaient à transformer
toutes les zones frontalières en zone
libre où les mafias internationales, et
non seulement les réseaux djihadistes,
pourraient agir sans retenue.
Cette intervention
a été commandée par le chef du service
de répression des faux médicaments
syrien, le colonel Hafez Makhlouf. C'est
le même haut officier qui a commandé une
opération similaire il y a trois ans,
mais dans des conditions régionales et
locales autrement plus favorables.
* Santé publique:
Mort sur ordonnance, Afrique Asie,
Octobre 2011, pages 70-71
© G. Munier/X.
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Publié le 19 octobre avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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