Mali
Alger-Paris: la
pomme malienne de la discorde
Kharroubi
Habib
Mardi 15 janvier
2013 Paris a
justifié l'intervention militaire
française au Mali en faisant valoir que
celle-ci a été décidée dans le respect
de la légalité internationale. Argument
en béton auquel rien n'est opposable de
la part des acteurs régionaux
nourrissant de la prévention contre la
participation étrangère à la région dans
une action militaire destinée à aider
les autorités maliennes à réinstaurer
leur souveraineté sur le nord de leur
pays. Il est
d'autant inattaquable que l'intervention
française a été sollicitée avec
empressement par ces autorités maliennes
légitimement effrayées par l'avance des
groupes armés en direction de Bamako qui
aurait été irrésistible sans cela.
L'Algérie ne pouvait dès lors émettre
son opposition à l'initiative française
en ne lui reconnaissant pas le caractère
légal tel que défendu par les autorités
françaises. Elle aurait ce faisant
engagé un combat diplomatique avec la
France perdu d'avance. Mais si Paris
donne l'impression de jouer sur du
velours en ayant mis la légalité
internationale de son côté, il va
néanmoins très vite apparaître qu'elle
devra compter avec les réticences
régionales et celles de l'Algérie en
particulier que suscitera la présence
prolongée au nord du Mali de sa force
d'intervention. Paris le sait
apparemment, ce pourquoi elle presse et
les Etats de la CEDEAO à dépêcher la
sienne et le Conseil de sécurité de
l'ONU pour qu'il donne à celle-ci les
moyens logistiques et financiers en
rapport avec sa mission.
L'Elysée et le Quai d'Orsay ne cessent
de souligner que la présence au Mali de
la force d'intervention française ne
sera pas immuable, conscients en cela
que même légale elle provoque de la
défiance quant aux buts pour lesquels
elle aurait été décidée. Celui de la
lutte contre le terrorisme et les
narcotrafiquants qui mettent en péril
l'existence en tant que nation du Mali,
n'inspire pas grande confiance au camp
des opposants à l'intervention
extra-régionale. A ce titre, Paris
n'échappe pas au soupçon d'avoir décidé
d'agir au Nord-Mali avec un agenda dont
la lutte contre le terrorisme
international n'est que le prétexte
cachant des visées ne tenant compte que
des intérêts d'Etat de la France.
L'Algérie n'a pu que prendre acte de la
tournure prise par les événements au
nord du Mali. Elle ne pouvait en l'état
des choses s'afficher ostensiblement
contre l'intervention française en
interdisant par exemple le survol de son
territoire aux avions français qui y
participent. Il n'en demeure pas moins
quelle s'estime en droit d'avoir son mot
à dire sur les développements que va
prendre cette intervention d'autant que
la logique de la stratégie militaire
mise en œuvre par ses promoteurs fait se
rapprocher de sa frontière le terrain
des combats. Pour
l'heure, les autorités algériennes
observent une ligne de conduite
respectueuse de la légalité
internationale même si la pertinence de
la décision qui en a découlé dans la
crise malienne ne leur apparaît pas
évidente. Paris aurait tort de
mésestimer le rôle d'acteur régional
clef de l'Algérie et d'ignorer son point
de vue pour ce qui touche au problème de
la région du Sahel. La visite d'Etat
effectuée par François Hollande est
censée avoir ouvert la voie à des
relations algéro-françaises basées sur
la confiance. La façon dont Paris a
imposé la vision française sur la crise
malienne ne manquera pas de montrer les
limites des pas réalisés dans ce sens.
Alger rumine sa déconvenue et s'astreint
pour l'instant à laisser faire, mais
elle réagira au moindre dérapage qui
surviendra dans la poursuite de
l'intervention militaire en cours au
nord du Mali. Elle a déjà pris date en
réaffirmant avec insistance qu'elle s'en
tient toujours et avec plus de
conviction à l'option de la solution
politique. Laquelle reste pour elle la
seule viable pour un règlement définitif
de la crise malienne dont la cause
déclenchante ne fut pas la présence au
nord du Mali des groupes armés
terroristes et narcotrafiquants mais la
faiblesse de l'Etat malien et son
incapacité à faire vivre entre elles et
en toute égalité de droits et de chances
les populations du Mali.
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