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Le Quotidien d'Oran
L'avenir du
printemps arabe se joue au Bahreïn
Kharroubi Habib
Vendredi 11 mars 2011
La sanglante guerre civile dont la Libye est le théâtre
relègue au second plan de l'actualité médiatique et des
préoccupations diplomatiques internationales les évènements
qui secouent le Bahreïn. Dans cet émirat, le peuple est lui
aussi dans la rue, déterminé à en finir avec la monarchie
autocratique régnant depuis deux siècles sur le pays et à
lui substituer un régime républicain démocratique.
Plus que la chute quasi certaine de la dictature de Muammar
Kadhafi, le succès de l'intifada populaire au Bahreïn fera
que le printemps démocratique à l'œuvre dans le monde arabe
atteindra par contagion des Etats de la région supposés être
à l'abri de ses effets. Cela, les chancelleries et les
médias occidentaux ne sont pas sans le savoir. Mais si les
seconds accordent un intérêt secondaire aux évènements du
Bahreïn, sacrifiant ainsi au réflexe de privilégier le
«sensationnel», les premières les occultent par calcul
délibéré. Il y a au Bahreïn une situation inédite dans
laquelle se concentrent tous les ingrédients pouvant donner
naissance à une reconfiguration dans le Golfe et en Arabie
que leurs experts les plus chevronnés ont été loin d'avoir
envisagée. Dans cet émirat, les contestataires sont passés
de la revendication de plus de démocratie à celle de
l'abolition de la monarchie. Il se trouve que cette
revendication est portée par des manifestants issus de la
communauté religieuse chiite, majoritaire en terme de
population dans le pays. Un mélange détonant que l'Amérique
et les Européens, faisant une fixation sur le danger
hégémoniste que représenterait l'Iran chiite, ne savent
comment faire avec. Ce sont eux qui, de toute évidence, ont
«conseillé» à la famille régnante des Al-Khalifa la retenue
que le pouvoir observe en terme de gestion de la
contestation populaire dont elle est en butte.
Mais le statu quo que l'attitude de la famille régnante
fait momentanément durer va devenir intenable du fait de la
détermination populaire à aller au bout du changement exigé.
D'autant que les Al-Khalifa sont l'objet de pressions des
autres familles régnantes de la région, affolées par la
crainte de la contagion de l'exemple du Bahreïn à leurs
royaumes et émirats. Pressions les poussant à recourir à la
répression, à laquelle plusieurs de ces familles régnantes
n'hésiteront pas à participer en lui prodiguant aides et
soutiens multiformes.
L'Amérique et l'Europe ne peuvent, sans se déjuger, ignorer
le caractère démocratique et libertaire du mouvement
populaire du Bahreïn. Toutefois, ils en saluent du bout des
lèvres la survenue. Conscients qu'il est porteur de
développements n'allant pas forcément dans le sens de leurs
intérêts géopolitiques et économiques au Moyen-Orient et du
maintien de leur influence dans la région.
C'est au Bahreïn que l'on vérifiera si l'Amérique et
l'Occident sont véritablement acquis au vent de la
démocratie qui souffle sur le monde arabe et qu'ils ne
tenteront pas de préserver leurs alliés stratégiques de sa
tempête.
Le peu d'empressement qu'ils mettent à exprimer leur
soutien au mouvement populaire de contestation au Bahreïn
est révélateur de leur répugnance à prendre acte de ses
revendications, dont ils craignent les conséquences pour
toute la région.
Le dossier Bahreïn
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