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La
solution de deux états, palestinien et israélien vivant côte à
côte, devient chaque jour plus improbable
Khaled Amayreh
Invasion de Naplouse par les
troupes coloniales israéliennes - Photo : 26 février 2007
AP/Emilio Morenatti
Avec l’échec manifeste des derniers efforts
diplomatiques pour relancer un processus de paix moribond et la
perspective d’une solution à deux états qui devient de plus en
plus insoutenable à cause principalement de l’expansion de la
colonisation israélienne, quelques intellectuels palestiniens
commencent à réclamer une stratégie nationale alternative pour
assurer la survie du peuple palestinien.
Cette semaine, le Roi Abdullah II de Jordanie a
avancé un pronostic sinistre de la situation globale en
Palestine, disant que les chances pour un règlement de paix équitable
et durable étaient en train de reculer rapidement. « Nous
nous trouvons à un véritable carrefour et il me semble que
c’est vraiment la dernière occasion pour faire la paix entre
nous tous » a dit le roi ce samedi dans une entrevue avec
une chaîne de télévision israélienne.
Il a ajouté que « les occasions que nous
avons aujourd’hui diminuent rapidement et je crois que les
choses sont en train de changer de telle sorte que bientôt, nous
ne pourrons plus parler de la solution de deux états. »
Des déclarations semblables reflétant la
frustration et les désillusions arabes face au soutien illogique
d’Israël par les Américains sont avancées par un certain
nombre de chefs arabes, y compris le sécrétaire général de la
ligue arabe, Amr Mousa.
Cette frustration a encore augmenté récemment
après que les USA aient épousé la position israélienne en ce
qui concerne l’accord de la Mecque entre Fatah et Hamas, bien
que cet accord ait été supervisé par l’Arabie Saoudite,
l’un des principaux alliés des Etats-Unis dans la région.
En effet, la plupart des Palestiniens arrivent à
la conclusion que quelque soit ce les Palestiniens peuvent dire ou
faire, Israël n’acceptera pas d’abandonner ce qu’elle a
conquis en 1967 et ne permettra pas la création d’un état
palestinien viable sur l’intégralité des territoires occupés,
y compris Jérusalem Est.
Si oui, se demandent certains, à quoi bon s’épuiser
avec un processus de paix qui n’amènera nulle part ?
Abdul Sattar Qassem, professeur de sciences
politiques à l’université de Najah à Nablus, décrit le
discours politique palestinien comme étant un « mode de
fonctionnement de l’impuissance et de l’échec. »
« Malheureusement, nos mouvements
politiques, particulièrement les prétendues parties dirigeantes
ne sont pas capables de nous mener à bon port. Ces groupes
travaillent plus par instinct de conservation de leurs intérêts
propres qu’à trouver une stratégie nationale de salut, et si
un miracle ne se produit pas, j’ai peur que nous continuerons à
souffrir. »
Qassem qui est un critique sans détour à la fois
du Fatah comme du Hamas, croit qu’une véritable direction
politique palestinienne doit, au lieu d’attendre un changement
de l’esprit ou du cœur de l’Ouest et en particulier des
Etats-Unis, essayer de trouver « des voies créatrices pour
raffermir la résolution de notre peuple. »
Par exemple, nous devrions nous libérer de la dépendances
financière à l’égard des non-arabes et des non-musulmans car
cette aide conditionnelle nous prive de notre volonté et de notre
capacité à dire « non » quand nous avons besoin de
le dire.
« Celui qui ne mange pas grâce à la sueur
de son front, n’est pas libre »
Cependant, Qassem semble ignorer que les
Palestiniens dans les territoires occupés de Cisjordanie et de
Gaza sont effectivement prisonniers et que leurs possiblités d’effecter
des changements sont limitées, pour le moins.
Il y a beaucoup de personnes dans l’arène
politique palestinienne qui pensent que le seul fait de la présence
d’une autorité palestinienne est un capital national qu’il
faut préserver à tout prix. Cela inclut la masse des
fonctionnaires, des employés et des agents de l’autorité
palestinienne qui se comptent par dizaines de milliers
Cependant, il y a ceux qui regardent l’autorité
palestinienne comme un « désastre » pour la cause
palestinienne. L’un des avocats de la dissolution de l’autorité
palestinienne est Muwaiya Al Masri, ancien législateur de Nablus.
Il a dit au Palestine Times que la solution de deux états était
« non réaliste, impossible même et signifierait la
destruction de la cause palestinienne. »
« J’ai invariablement réclamé la
solution d’un seul état qui va du Jourdain à la méditerranée
où les Arabes et les juifs vivraient dans la paix et l’égalité »
dit-il « C’est la bonne solution, la solution historique,
l’ultime solution. »
Al-Masri souligne qu’il est conscient du fait
qu’Israël rejetterait avec force la solution d’un seul état
par racisme ou volonté colonialiste.
« Ils veulent avoir un état avec une
majorité juive fixe et stable. En même temps ils ont tué toute
perspective raisonnable pour la création d’un état
palestinien. Il suffit de jeter un coup d’œil sur la carte et
de tirer ses propres conclusions . »
Al-Masri dit que tous les efforts politiques des
Américains, des Européens, des Arabes, et même des Palestiniens
ne changeront rien. « Israël ne se retirera pas totalement
de la Cisjordanie et de Jérusalem même si reconnaissons son
existence totalement et sans condition, ce que nous avons fait en
réalité. »
Al-Masri avance que la seule stratégie
palestinienne qui pourrait répondre aux espoirs des palestiniens
en matière de liberté et de justice est « la dissolution
de l’autorité palestinienne et l’adoption d’une stratégie
basée sur la solution d’un seul Etat » très proche de ce
qui s’est fait en Afrique du Sud.
« L’autorité palestinienne est une
catastrophe pour les palestiniens. Si vous lancez une enquête
d’opinion maintenant, vous constaterez que la plupart des
Palestiniens préconisent le démantèlement de l’autorité
palestinienne... sous l’autorité palestinienne, les colonies
ont augmenté de 400%, l’anarchie s’est installée et notre
avenir est de plus en plus sombre. »
Le député Mustfa Barghouthi souscrit aussi à
l’idée que les Palestiniens doivent aller vers la solution
d’un seul Etat » si Israël continue ses efforts « pour
nous imposer le projet d’un Etat morne, déformé et discontinu. »
Barghouthi indique que les Palestiniens font face
à une véritable crise de stratégie qui pourrait être surmontée
par l’intensification de la résistance populaire, de l’appui
et de la solidarité internationale, et de la consolidation
d’une saine culture politique locale.
« Mais tout d’abord, nous devons avoir une
direction nationale unifiée, une vision de notre avenir et une
stratégie commune pour être en mesure de parler au monde entier
d’une seule voix. »
Barghouthi a décrit le discours palestinien
courant comme de simples réactions, et principalement des réactions
verbales aux politiques et aux pratiques israéliennes.
« Nous devons avoir une stratégie proactive
en ce qui concerne Jérusalem et... à ce qui se produit dans
Bil’in. Avons-nous épuisé toutes nos énergies là-dessus ?
Je crois que la réponse est NON. »
27 février 2007 - Palestine
Times
Traduit de l’anglais par D. HACHILIF
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