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Opinion

Les mal-nommés pourparlers de paix
John Chuckman


Photo: P.A.S.

Samedi 11 septembre 2010

Je me demande si quelqu’un serait capable de dessiner la carte d’Israël. C’est probablement le seul pays au monde qui n’a pas de frontières définies, et il a même tout fait au cours des dernières décennies pour en arriver là.

Il avait des frontières à une époque, mais la guerre de 1967 est passée par là. Et il n’a aucune intention de retourner à ces frontières parce qu’il aurait pu le faire à tout moment au cours des 43 dernières années (ce qui aurait constitué une démonstration sans ambiguïté quant à sa réelle aspiration à une véritable paix et justice et qui aurait épargné les immenses souffrances humaines provoquées par l’occupation), mais cela aurait dilapidé tout l’effort consenti au cours de la Guerre de Six Jours dont le véritable objectif était précisément ce à quoi nous assistons dans les territoires palestiniennes.

En ce qui concerne la paix, dans le sens étroit du terme à savoir l’absence de guerre, Israël a déjà réalisé une sorte de paix de facto sans l’assistance des Palestiniens. Les Palestiniens n’ont rien à offrir en matière de paix si on accepte de la définition israélienne de ce terme

La paix israélienne est celle obtenue grâce à une puissance infiniment supérieure, au recours systématique et sans discernement de cette puissance, à la transformation des gens qu’il considère comme ses opposants en squatteurs sur leur propre terre, et grâce à une monde trop intimidé pour prendre une quelconque mesure efficace au nom de la justice ou de l’équité.

Comme l’a remarqué la physicienne et survivante de l’Holocauste Ursula Franklin, la meilleure définition de la paix c’est lorsque la justice prévaut. On peut trouver de nombreuses situations qualifiées à tort de paix ; par exemple, la paix interne imposée par un état policier ou celle imposée par une répression brutale dans une colonie.

Israël semble ne montrer aucun intérêt ou besoin pour le genre de paix que les Palestiniens pourraient offrir. Alors qu’est-ce que les Palestiniens pourraient bien offrir à Israël dans le cadre d’une négociation ?

Il y a de nombreuses questions « techniques » à régler entre les Israéliens et les Palestiniens, telles le droit au retour (des réfugiés – NdT), l’indemnisation des terres confisquées, la poursuite des expulsions de Jérusalem Est, le Mur et son tracé qui passe largement sur des terres palestiniennes, mais tout ceci au fond n’a pas grand chose à voir avec la véritable paix selon la définition d’Ursula Franklin et à laquelle nous avons toutes les raisons de penser qu’Israël n’est pas, et n’a jamais été, intéressé.

Israël veut être reconnu, non seulement en tant qu’état comme n’importe quel autre état, mais comme un « état juif », quelque soit la signification de ce terme ambiguë eu égard à ses frontières à géométrie variable et la définition même de Juif sur laquelle les Israéliens eux-mêmes n’arrivent pas à se mettre d’accord et se disputent sans cesse – entre réformés, orthodoxes, ultra-orthodoxes, Ashkénazes, Séfarades, Nord Africains, pratiquants, non-pratiquants, et autres factions et divisions dans une population peu nombreuse.

Je crois vraiment que les raisons pour lesquelles Israël cherche à obtenir une telle reconnaissance ne sont pas innocentes : c’est le genre de terme que l’on glisse dans un contrat et qui ensuite laisse la porte ouverte à pratiquement toutes les interprétations. Après tout, la reconnaissance d’Israël en tant qu’état a depuis longtemps été offert par les pays arabes en échange d’un accord juste, mais Israël n’a jamais montré le moindre intérêt.

Si la reconnaissance d’Israël comme un « état juif » était obtenue, quel serait le statut des non-juifs en Israël ? On peut l’imaginer, si on se réfère aux terribles propos du ministre des affaires étrangères d’Israël, Avigdor Lieberman, ou les propos encore pires d’Ovadia Yosef, fondateur du parti Shas, allié de Netanyahu, et l’ancien Premier Rabbin d’Israël.

Après tout, environ 19% des citoyens israéliens ne sont pas juifs, principalement les descendants des Palestiniens qui ont refusé de s’enfuir devant le terrorisme des gangs Irgun et Stern en 1948. Ils ont des passeports israéliens mais ne sont pas considérés comme des citoyens à part entière, des citoyens Juifs, et il y a même des lois qui créent cette sordide distinction que George Orwell avait décrite dans son livre Animal Farm : « Certains animaux étaient plus égaux que d’autres ».

Les nouveaux pourparlers se font en l’absence d’un représentant légitime des Palestiniens, ce qui serait le minimum, mais cette situation semble satisfaire Israël dont les services secrets ont depuis longtemps mené des opérations clandestines et des assassinats. Comme fait-on pour négocier lorsque la partie adverse n’a pas de représentant ?

Depuis bientôt deux ans, Mahmoud Abbas, un personnage qui ferait presque pitié et qui est censé représenter les intérêts palestiniens, fait semblant d’être président sans élections : il n’a aucune légitimité aux yeux des Palestiniens et du monde extérieur. Et encore, son autorité ne régne que sur certaines partions de la Cisjordanie.

Le Hamas, malgré ses défauts qu’on trouvera chez tous les dirigeants d’une population sévèrement opprimée (après tout, on a failli oublier que le Congrès National Africain en Afrique du Sud était affilié aux communistes), est malgré tout le gouvernement élu du territoire de Gaza, mais Israël a fait pressions sur les Etats-Unis – et par leur intermédiaire, sur le monde entier – de considérer les Hamas comme une puissance obscure, prête à lancer les forces du mal si jamais Israël relâchait sa pression.

Il serait beaucoup plus juste de parler d’accord ou d’arrangement avec les Palestiniens que de paix, mais tout n’importe quel accord exige une pression intense sur Israël, qui tient toutes les cartes en main, et cette pression ne peut être exercée que par Washington. Un arrangement impliquer toutes les questions « techniques » qui n’intéressent pas Israël – le droit au retour, les indemnisations, le Mur et Jérusalem Est, la position d’Israël est claire : c’est « non ».

Mais nous savons que Washington est dramatiquement faible lorsqu’il s’agit d’Israël. Le lobby Israélien est expert dans les campagnes téléphoniques et l’influence dans les médias et les campagnes de donation. Il arrive même à entraîner Washington à mener des guerres pour lui, comme en Irak, et comme il tente de le faire à nouveau contre l’Iran – ce qui sans aucun doute le signe clair d’une influence déterminante sur sa politique.

La plupart des membres du Congrès des Etats-Unis vivent dans la même peur diffuse du Lobby Israélien qu’ils ont connue sous J. Edgar Hoover (ancien directeur du FBI – NdT) et ses dossiers secrets. Hoover n’a jamais eu besoin de proférer des menaces lorsqu’un membre du Congrès ou un Secrétaire de Cabinet « dépassait la ligne rouge ». Il lui suffisait d’avoir une petite conversation, de faire quelques vagues allusions pour faire comprendre au politicien que ce dernier était en danger. Cela suffisait pour garantir l’influence de Hoover pendant des décennies.

On n’entendait jamais parler dans la presse du pouvoir silencieux exercé par Hoover dans les années 40, 50 et 60, mais il était présent. De même que le lobby israélien aujourd’hui.

Alors d’où vient ce nouvel élan pour un arrangement équitable ?

De nulle part. Israël poursuit son chemin avec ses lois injustes, confisquant les terres et les fermes, expulsant lentement mais sûrement tous ceux qu’il ne veut pas voir.

Partout ailleurs, un tel processus serait qualifié de nettoyage ethnique, mais pas ici, à moins que ne vous vouliez vous faire traiter de fanatique ou d’antisémite.

Cela dit, la possibilité d’un arrangement existe malgré tout. Il est possible que le faible Abbas, enfermé dans un salle à Washington, puisse être soumis à suffisamment de pression pour signer n’importe quel accord, accordant à Israël toutes les concessions qu’il demande en échange d’un état palestinien fait de bric et de broc et composé de parcelles des territoires qui n’intéressent pas Israël ou qu’il n’a pas encore confisqué. Un tel accord n’aurait aucune valeur, mais Israël ne se gênera certainement pas pour l’invoquer et l’interpréter à sa manière.

Après tout, l’histoire moderne d’Israël a déjà connu le partage des terres sans le consentement de leurs occupants, mais même ces divisions historiques – consultez les cartes étalées devant la Commission Peel (1937) ou la décision de l’ONU d’une partage (1947) et vous constaterez que le territoire avait été scindé en deux parties à peu près égales – sont aujourd’hui ignorées par Israël ou sont interprétées par un raisonnement tortueux. Qu’est qui a changé depuis ?

En l’absence de volonté, une véritable paix avec la justice est tout simplement impossible.

John Chuckman
http://dissidentvoice.org/2010/09/t...

traduction VD pour le Grand Soir

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Publié le 11 septembre 2010

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Source : Le Grand Soir
http://www.legrandsoir.info/...


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