Opinion
Le prix Nobel de la
paix à un dissident chinois
Jean Bricmont
Jean Bricmont
Dimanche 10 octobre 2010
Ceux qui ont attribué le prix
Nobel de la paix à un dissident chinois nous expliquent que la
paix et les droits de l’homme sont inséparables. On se demande
bien, alors, comment il se fait que le pays qui proclame le plus
son attachement aux droits de l’homme (les Etats-Unis) soit
aussi celui qui a le plus de soldats à l’étranger et qui mène le
plus de guerres et d’interventions de toutes sortes.
Le fait est que les Chinois
voient l’attribution de ce prix comme une ingérence occidentale
de plus dans leurs affaires intérieures. On pourrait peut-être
la défendre, au nom des droits de l’homme, si les autres
ingérences, déploiement de troupes et agitation des minorités,
n’avaient pas lieu. Mais tant que les défenseurs des droits de
l’homme ne comprennent pas que, dans la mesure où leur politique
est liée de facto à la volonté hégémonique de l’Occident, cette
politique, même avec les meilleurs intentions du monde, ne fera
qu’augmenter les tensions internationales et, à cause de cela,
ralentira les progrès en faveur des droits de l’homme qu’ils
souhaitent.
Si ceux qui attribuent le
prix Nobel veulent vraiment montrer leur courage, ils pourraient
sans doute trouver un Palestinien innocent dans les geôles
israéliennes (parmi les milliers qui s’y trouvent) et lui
décerner leur prix. La réaction serait amusante à observer.
Le jour-sans doute pas si
lointain- où les Chinois seront devenus plus forts que nous, on
peut craindre qu’ils se "souviendront" de toutes les
humiliations que nous leur avons fait subir dans le passé,
depuis les guerres de l’opium et le sac de palais d’été jusqu’au
soutien actuel au Dalai Lama et aux dissidents ; si la vengeance
est un plat qui se mange froid, je préfère ne pas faire partie
d’un banquet chinois lorsque ce moment du souvenir sera venu.
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