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IRIS

Afghanistan : premier sujet de désamour entre l'Europe et Obama ?
Jean-Pierre Maulny


Jean-Pierre Maulny - Photo IRIS

IRIS, 12 novembre 2008

Parmi les dossiers internationaux sur lesquels le président américain nouvellement élu, Barack Obama, est très attendu, il en est un qui tient particulièrement à cœur aux Européens : celui de l’Afghanistan. Aujourd’hui, 23 des 27 pays que compte l’Union européenne fournissent plus de 25.000 hommes de troupes à la force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan, force commandée par l’Otan.

Cela représente près de la moitié de l’objectif global de déploiement de forces que l’Union européenne s’était fixée en 1999 à Helsinki (1) . C’est également la moitié du nombre total de soldats au sein de la FIAS (50.000 hommes), sachant que les Américains en fournissent 20.000 – auxquels s’ajoute un nombre identique de soldats dans l’opération de lutte contre le terrorisme, Enduring Freedom. Même si les Européens sont sous commandement de l’Otan, l’Afghanistan est en réalité l’opération militaire la plus importante, et de loin, de l’Union européenne.

Or, la situation sur le terrain est aujourd’hui difficile. Les opposants au régime, comprenant le Hezb-e-Islami de Gulbuddin Hekmatyar, les Talibans pour l’essentiel originaires de l’ethnie pachtoune, et les combattants de diverses nationalités au service d’Al-Qaïda, ont accentué leurs opérations militaires depuis le printemps 2008. Les forces françaises et allemandes ont été victimes d’embuscades et d’attentats, preuve, s’il en faut, que l’on essaie de dissuader les Européens de s’impliquer plus en Afghanistan. En outre, les « insurgés » qui contrôlent le Sud du pays où s’étendent les cultures de pavot, risquent d’empêcher que les élections ne puissent se dérouler normalement dans cette région. Enfin, les Talibans se servent du Pakistan comme d’une base arrière, les tribus pachtounes étant localisées des deux côtés de la frontière afghano-pakistanaise.

Devant cette situation, le chef du gouvernement afghan, Hamid Karzaï, a entamé des démarches en vue de négocier avec ses opposants et les Britanniques eux-mêmes envoient des signaux de plus en plus forts pour signifier que ce conflit ne peut être gagné militairement et qu’il est temps d’explorer la voie de la solution politique.

Il est difficile de dire avec exactitude ce que fera Barack Obama dans cette région tant ses propos de campagne sur la politique étrangère ont paru manquer de précision. Barack Obama considère que le terrain principal de la lutte contre le terrorisme se situe en Afghanistan, qu’il est nécessaire d’y déployer des troupes supplémentaires qui pourraient basculer du théâtre irakien au théâtre afghan. Obama a également fait savoir qu’il autoriserait le recours aux actions militaires à l’intérieur du Pakistan si les terroristes d’Al-Qaïda s’y trouvaient et si le Pakistan ne réagissait pas ou n’était pas en mesure de réagir face à la recrudescence d’attaques de la part des Talibans et des forces d’Al-Qaïda localisées au Pakistan. On lui prête également le souhait de demander aux Européens de renforcer leurs contingents militaires en Afghanistan. Cela s’inscrirait dans le cadre d’une politique du « donnant-donnant », Obama s’engageant à plus de multilatéralisme en contrepartie d’une implication plus importante des Européens sur les théâtres d’opérations et, de manière générale, d’un meilleure partage du fardeau de la défense.

Pour le moment, rien n’indique que Barack Obama ne changera la ligne politique qui avait été définie par George W. Bush et qui veut que la lutte contre le terrorisme se fasse essentiellement, si ce n’est uniquement, par la voie militaire. Or, c’est pourtant bien un aggiornamento de la politique étrangère américaine qu’attendent les Européens après huit années d’échec complet de la politique mise en œuvre par George W. Bush. Aujourd’hui, les vraies questions sont : quelle est la meilleure manière de lutter contre le terrorisme ? Comment trouver une solution politique en Afghanistan ? Comment stabiliser le Pakistan, Etat de plus en plus déliquescent et qui détient l’arme nucléaire ?

Mais n’est-ce pas aux Européens de prendre en main leur destin ? A force de trop attendre du nouveau président élu, n’en oublient-t-ils pas de définir ce qu’ils souhaitent eux-mêmes ? Si 23 pays de l’UE sur 27 déploient près de la moitié de leur force militaire disponible, n’est-il pas temps de définir une politique européenne commune pour l’Afghanistan et ce au moment même où l’Union européenne revoit sa stratégie européenne de sécurité ?

Tout incite à agir dans ce sens : les deux longs mois de transition avant qu’Obama ne prenne vraiment ses fonctions offrent une fenêtre d’opportunité considérable pour l’UE afin qu’elle prenne vraiment position sur ce sujet. En outre, le souhait d’Obama de voir les Etats-Unis renouer un véritable partenariat stratégique avec les Européens ne peut qu’inciter les pays membres de l’UE à parler d’une seule voix. Comme l’opération afghane est une opération avant tout otanienne, une position commune de la part des Européens sur l’Afghanistan pourrait également donner vie à l’idée d’un caucus européen au sein de l’OTAN. Cela permettrait d’inscrire la relation transatlantique sur une base plus équilibrée pour les années qui viennent.

Une telle initiative, si elle était portée par la France, permettrait également de faire définitivement de la présidence française de l’Union européenne un véritable succès diplomatique.

(1) L’objectif était de 60.000 hommes pendant un an avec un délai d’alerte de 60 jours.


Jean-Pierre Maulny, directeur adjoint de l'IRIS

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Publié le 13 novembre avec l'aimable autorisation de l'IRIS.



Source : Affaires Stratégiques
http://www.affaires-strategiques.info/...


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