Le Dr James J. Zogby
Lundi 14 juin 2010
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En cherchant à changer de direction et de
trouver une « meilleure approche » dans le traitement de la
crise à laquelle Gaza est confrontée depuis fort longtemps,
l’administration Obama se heurte à plusieurs obstacle
profondément plantés.
Le Président américain a souligné sa
nouvelle approche lors d’une conférence à la Maison-Blanche
faisant suite à une rencontre avec le président de l’Autorité
palestinienne, Mahmoud Abbas. Il a répété son opinion
post-flottille selon laquelle le blocus imposé par Israël à Gaza
était « intenable » et il a appelé à un nouveau mécanisme
international impliquant Israël et comportant « l’Egypte,
l’Autorité palestinienne (AP) et la communauté internationale ».
Ce mécanisme se focaliserait sur
l’exclusion des armes, tout en permettant non seulement les
fournitures humanitaires, mais aussi « les biens et les services
nécessaires au développement économique et donnant à la
population la possibilité de créer ses propres entreprises, de
faire croître l’économie et de fournir des opportunités dans la
bande de Gaza », a dit Obama. Il a annoncé un package d’aides
incluant des biens spécifiquement ‘tatoués’ en vue de leur
utilisation « dans la construction de logements et d’écoles et
dans le développement des entreprises » à Gaza, certes, mais
aussi en Cisjordanie.
Enfin, Obama a renouvelé son soutien à
« une enquête crédible et transparente répondant aux exigences
internationales » et qui « mettra au jour tous les faits »
relatifs aux événements tragiques qui ont entraîné la mort de
neuf passagers du (navire turc) Mavi Marmara.
Les Israéliens ont démontré leur peu
d’intérêt pour une enquête qu’ils ne seront pas en mesure de
contrôler totalement. Ils ont fait une contre-offre, proposant
leurs propres enquêtes, aux ambitions limitées, tout en
suggérant qu’ils pourraient autoriser des « observateurs » à
assister à leur réalisation. Cela est bien en-deçà tant des
exigences de l’Onu que des préconisations d’Obama. En s’emparant
de tous les biens se trouvant à bord des bateaux capturés ainsi
que des effets personnels des passagers (téléphones portables,
caméras, ordinateurs portables et autres), les Forces
Israéliennes de Défense ont quasiment détruit les « pièces à
conviction ».
Les Israéliens n’ont fait montre d’aucune
inclination à accepter un « blocus des armes cogéré » qu’ils ne
contrôleraient pas entièrement, en faisant la contre-proposition
consistant à desserrer un peu le garrot de leur régime
d’occupation oppressif, permettant à certaines friandises ainsi
qu’à d’autres produits commerciaux fournis par Israël à entrer
dans la bande de Gaza.
Si l’opinion publique américaine soutient
majoritairement les éléments clés de son plan, ce n’est pas le
cas du Congrès. Un sondage effectué par Zogby International
après la conférence de presse à la Maison Blanche a mis en
évidence ce soutien aux objectifs du président américain. On
avait demandé aux gens d’évaluer l’affirmation d’Obama selon
laquelle la tragédie (de l’arraisonnement de la flottille
humanitaire pour Gaza, ndt) pourrait être utilisée comme une
opportunité pour « imaginer de quelle manière nous pouvons
satisfaire aux préoccupations d’Israël en matière de sécurité,
mais en même temps, commencer à ouvrir une opportunité pour les
Palestiniens ».
53 % étaient d’accord avec cette
affirmation (dont 79 % de personnes favorables aux Démocrates),
tandis que 39 % des sondés seulement ne la partageaient pas.
L’on avait demandé aussi aux personnes interrogées de réagir à
cette déclaration d’Obama : « Les Etats-Unis, avec les autres
membres du Conseil de Sécurité de l’Onu, ont dit très clairement
que nous condamnions tous les actes susceptibles d’avoir
entraîné une telle violence ».
« Nous avions affaire à une situation
tragique. Des vies ont été perdues, pour rien. Aussi
appelons-nous à une enquête effective sur tout ce qui s’est
produit ».
49 % des répondants partageaient cette
opinion du président américain (dont 88 % de démocrates), tandis
que 38 % ne la partageaient pas. Mais le Congrès voit les choses
différemment. Alors que quelques membres du Congrès seulement
ont rejoint le Président américain dans la condamnation des
tueries et ont appelé à une enquête indépendante et exhaustive,
beaucoup plus nombreux furent les membres du Congrès (dont des
Démocrates éminents et la quasi-totalité du contingent du
Grand Old Party, le
‘GOP’ (= les Républicains), ont été prompts à accepter les
points de discussions agréés par Israël, faisant des
déclarations et proposant une législation qui non seulement
soutient la version qu’Israël donne des événements, mais aussi
en appelle à une continuation du blocus contre la bande de Gaza.
Tout cela devrait montrer à notre Président
que, s’il veut que ses efforts de changement de direction
portent leurs fruits, il aura à affronter non seulement un
gouvernement déterminé et jusqu’au-boutiste en Israël et des
réalités palestiniennes têtues, mais aussi un parti-pris
pro-israélien atavique et irréfléchi au sein du Congrès.
Dr James J. Zogby, président de l’Arabe
American Institute
jzogby@aaiusa.org
Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier