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Israël face à son image

Ilan Greilsammer

Le Président Moshè Katsav

Incontestablement, c’est l’affaire du Président Katsav qui a le plus agité l’opinion israélienne au cours des dernières semaines. Bien sûr, on pourrait parler longuement de l’accumulation d’affaires de corruption et de la multiplicité des enquêtes en cours qui visent tel ou tel ministre, tel ou tel membre de la Knesset. Ces affaires sont regrettables, mais on objectera qu’il en existe de pareilles dans tous les pays, qu’argent et politique font bon ménage depuis des siècles, et qu’Israël n’échappe pas à une maladie qui frappe toutes les démocraties. Par contre, l’affaire du Président, c’est tout autre chose, un choc qui a profondément bouleversé les Israéliens.

En Israël, le président de l’Etat n’a que des pouvoirs extrêmement limités. Dans le système parlementaire qu’a adopté l’Etat juif depuis sa création, le Président est uniquement le symbole du pays, son image à l’intérieur et à l’extérieur. Il «est», en quelque sorte, Israël, aux yeux du peuple juif et aux yeux des nations. En Israël, par exemple, son rôle est en grande partie de «consoler» un pays régulièrement frappé par la guerre et les malheurs, et il est pour beaucoup de gens une figure emblématique, un personnage aimé et respecté dont la stature morale et intellectuelle doit être irréprochable : un homme qui se situe au-dessus des querelles politiques et des mesquineries quotidiennes. A l’étranger, lorsqu’on voit la façon dont est reçu le président d’Israël dans de nombreux pays, on comprend à quel point il est, pour les non-Juifs, le représentant de l’histoire du peuple hébreu, des persécutés, des morts de la Shoa, de la renaissance d’Israël…
C’est pourquoi les Israéliens sont véritablement effondrés, tétanisés, révoltés de découvrir ce dont on suspecte, et le mot est faible, leur président. Viol, abus de pouvoir exercé sur ses subordonnées, n’est-ce pas parmi les pires méfaits dont quelqu’un puisse être accusé? En conséquence, face à la dépravation morale suspectée de cet homme-symbole, le pays est amené à s’interroger sur beaucoup de choses. Comment se fait-il que les médias, lors de l’élection de Katsav comme président, n’ont pas osé révéler ce que tout le monde politique et journalistique, apparemment, savait depuis longtemps? Est-il justifié que le président soit élu par la Knesset, dans le cadre d’accords intervenus entre partis politiques, quand le résultat est un personnage comme celui-ci? Est-ce que l’Etat d’Israël, dont la légitimité est encore contestée par beaucoup, et qui se justifie en arguant de son droit moral, peut se permettre d’offrir cette image au monde? Avons-nous encore besoin d’un président, ou pouvons-nous nous en passer?

Réhabiliter l’institution
Peut-être, si le président Katsav avait compris l’ampleur de la déchéance, s’il avait immédiatement reconnu une partie au moins des faits qui lui sont reprochés, s’il avait démissionné en renonçant à son salaire et à ses avantages et cherché à se faire oublier, le pays aurait-il pu tourner la page, élire quelqu’un de bien à sa place, et l’on aurait pensé à autre chose. Mais ce qui est grave, c’est que, se sentant perdu et totalement incapable de comprendre le tort qu’il cause au pays et au peuple juif, Katsav s’est accroché de toutes ses forces à son semblant d’autorité, à sa résidence, à ses avocats, ses conseillers et ses proches, et a refusé de s’en aller. Son incroyable discours d’une heure, dans lequel il a violemment pris à partie tout le monde, les journalistes et les hommes politiques, la police et les autorités judiciaires, a montré à quel point la démocratie israélienne peut être minée de l’intérieur, même dans les plus hautes sphères de l’Etat.
Maintenant, il faut rebâtir, reconstruire les cadres de l’Etat. L’aspect «positif» de cette triste affaire a été de reposer quelques vraies questions, des questions fondamentales sur les institutions, le système électoral et le fonctionnement de la démocratie. Espérons qu’Israël sorte finalement grandi de cette épreuve.

Ilan Greilsammer, correspondant israélien

© CCLJ 2005
Publié avec l'aimable autorisation du CCLJ

 


Source : Centre Communautaire Laïc Juif de Belgique
http://www.cclj.be/regards/web/isr_actu.asp


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