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IRIN
Jordanie: Où trouver de nouvelles sources d'eau ?
Les agriculteurs de la vallée
du Jourdain sont confrontés à un manque de précipitations
inquiétant
(photo d’archives - Dale Gillard/Flickr)
AMMAN, 28 septembre 2009 (IRIN)
En Jordanie,
pays endetté où les ressources en eau sont limitées, le déclin
du niveau des précipitations vient s’ajouter à la forte
croissance démographique, rendant encore plus urgente la
nécessité de rechercher des sources d’eau alternatives.
La Jordanie collecte et utilise 90 pour cent de ses eaux de
pluie, mais le changement climatique conduit à une baisse du
niveau des précipitations, en particulier depuis deux ans, selon
des spécialistes de l’environnement.
En 2008-2009, les précipitations ont connu un déclin important
dans les régions de l’est du royaume, a indiqué un membre du
Département météorologique jordanien, sous couvert d’anonymat
car il n’était pas autorisé à parler à la presse.
« Il semble que le changement climatique affecte le niveau des
pluies, mais il est difficile de l’affirmer avec certitude, car
il faudrait pouvoir comparer les niveaux de précipitations sur
une période plus longue », a-t-il dit à IRIN.
Le pays ne dispose que d’un seul grand fleuve, le Jourdain, qui
s’est progressivement réduit au cours des dernières décennies,
pour ne devenir plus qu’un modeste cours d’eau séparant la
Jordanie de la Cisjordanie. Comme le royaume ne possède ni lacs
ni sources d’eau renouvelables, les deux tiers des ressources en
eau du pays proviennent des eaux de pluie et des aquifères
souterrains non renouvelables.
Le tiers restant est fourni par Israël, dans le cadre de
l’application du Traité de Wadi Araba de 1994 (connu sous le nom
de Traité de paix israélo-jordanien). L’eau est pompée et
acheminée jusqu’à la station de Zai, avant d’être traitée et
envoyée vers Amman et les villes environnantes.
Mais à la fin des années 1990, le gouvernement de Fayez Tarawneh,
l’ancien Premier ministre, s’est attiré les foudres de l’opinion
publique, pour avoir mal géré une affaire d’eau contaminée liée
à l’approvisionnement israélien. Depuis ce scandale, les
autorités n’ont pas eu d’autre choix que de rechercher des
ressources en eau alternatives et durables.
D’après Nedal Hadadin, spécialiste de l’eau à l'Université
publique Al Balqa, la baisse significative des précipitations
résulte du changement climatique provoqué par les hommes. Ce
phénomène est « déclenché par la dégradation de la couche
d’ozone », a-t-il affirmé.
M. Hadadin craint que la réduction des précipitations ne
s’aggrave, car le climat est de plus en plus imprévisible, ce
qui contribue à la modification des schémas pluviométriques.
Des ressources en eau de plus en plus limitées
D’après les données sur les ressources en eau fournies par les
Nations Unies et d’autres organisations, la Jordanie est l’un
des pays où l’insécurité hydrique est la plus forte au monde, la
consommation moyenne des Jordaniens étant cinq fois moins
importante que celle des Européens.
D’après l’édition 2009 du Rapport arabe sur le développement
humain, réalisé par le Programme des Nations Unies pour le
développement (PNUD), la Jordanie disposait en 2005, sur son
territoire, d’environ 150 mètres cubes d’eau douce renouvelable
par habitant, ce qui la classe, en la matière, parmi les pays
les plus mal lotis du monde arabe, après le Qatar, l’Arabie
saoudite, la Libye, les Emirats Arabes Unis et l’Egypte.
D’après le PNUD, la moyenne mondiale est de 6 800 mètres cubes
par habitant, et on parle de pénurie d’eau lorsque les
ressources sont inférieures à 1 000 mètres cubes par personne.
Cependant, étant donnée la sécheresse qu’a connue la Jordanie
ces dernières années, il est probable que ses ressources en eau
par habitant soient encore plus limitées aujourd’hui.
Le niveau d’eau dans les barrages de Jordanie baisse également,
a indiqué Elias Salameh, spécialiste de l’eau à l’Université de
Jordanie.
« Nos barrages sont à moitié vides et la population augmente
rapidement », a-t-il dit à IRIN. « Nous devons trouver une
solution à long terme. La Jordanie ne peut pas continuer à
dépendre des précipitations et des eaux souterraines ».
Un haut responsable du ministère de l’Eau, a affirmé, sous
couvert d’anonymat, que le pays « s’efforçait de récolter chaque
goutte d’eau tombée du ciel », mais que les barrages retenant
l’eau de pluie, qui fournissent la plus grande partie des
ressources en eau du pays, avaient perdu la moitié de leur
volume d’eau au cours des 10 dernières années.
Programme de distribution de l’eau
Une carte de la Jordanie
et des pays voisins indiquant l’emplacement de l’aquifère de
Disi
et du projet de canal mer Rouge-mer Morte - Photo Google Maps
En juin, au début de l’été, le gouvernement a
adopté un programme strict de distribution d’eau, afin de faire
face aux pénuries d’eau chroniques cette année. Ce programme
consiste à réduire la fréquence de l’approvisionnement en eau
des foyers, passant de trois ou quatre fois par semaine à
seulement une ou deux fois par semaine.
Les habitants sont invités à remplir leurs réservoirs personnels
lors des approvisionnements, de façon à tenir jusqu’à la semaine
suivante, car ils n’ont aucun accès à l’eau courante entre deux
approvisionnements.
La gestion de la distribution de l’eau est une tâche difficile
assurée par les nombreux responsables des stations de pompage.
Mais la Jordanie ne pourra pas se contenter d’une gestion
stricte de l’eau, affirment les experts, car sa population
augmente fortement tandis que ses ressources en eau diminuent.
L’aquifère de Disi
Une alternative proposée depuis des années consisterait à pomper
de l’eau de l’aquifère de Disi dans le sud. D’après les experts,
le bassin fournirait suffisamment d’eau douce pour satisfaire
les besoins de la Jordanie pendant plus de 100 ans.
Cependant, jusqu’à récemment, cette idée s’est heurtée à des
obstacles politiques et financiers.
L’Arabie saoudite et Israël, qui partagent l’aquifère avec la
Jordanie, craignaient que cette opération ne réduise leurs
réserves en eau.
Mais le projet a obtenu le feu vert en 2008, lorsque la Jordanie
a réussi à persuader ses voisins de l’importance de cette
initiative en termes de sécurité hydrique. Un accord a été
établi entre le gouvernement et la société turque Gama pour
permettre le lancement du projet Disi, dont le coût, qui s’élève
à 800 millions de dollars, est financé par des prêts de diverses
organisations, dont la Banque mondiale.
En août 2009, Gama a débuté les travaux dans la région de Wadi
Rum, dans le sud de la Jordanie.
Raed Abu Saud, ministre jordanien de l’Eau, a déclaré que les
habitants d’Amman pourraient recevoir de l’eau douce de
l’aquifère de Disi d’ici 2012, soit beaucoup plus tôt que ce qui
avait été initialement estimé.
A plus long terme
Cet aquifère contribuera certainement à réduire
de façon significative les pénuries d’eau en Jordanie, mais les
responsables reconnaissent qu’une autre source d’eau majeure
sera nécessaire pour répondre aux besoins de la population.
Le projet de canal mer Rouge-mer Morte constituerait la réponse,
d’après des responsables du ministère de l’Eau. Ce projet vise à
sauver la mer Morte en captant au moins 2,5 milliards de mètres
cubes d’eau de la mer Rouge pour les déverser dans la mer Morte.
En parallèle de ce projet, il en existe un autre en Jordanie :
le Projet national de développement des eaux de la mer Rouge
(JRSP), qui vise à répondre aux pénuries chroniques d’eau
potable en acheminant, via des canalisations, de l’eau de la mer
Rouge vers une station de dessalement – qui n’est pas encore
construite –, permettant ainsi de produire près de 700 millions
de mètres cubes d’eau potable par an en situation de pleine
exploitation.
Mais étant données la conjoncture économique mondiale et la
résistance des défenseurs de l’environnement, l’avenir de ce
projet demeure incertain.
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