|
IRIN
Jordanie:
Des incidents font ressurgir le problème de la pénurie d'eau
Avec un territoire couvert à 92 pour cent par
le désert, la Jordanie utilise des sources d’eau souterraine
pour approvisionner ses 5,6 millions d’habitants
Photo:
Maria Font de Matas/IRIN AMMAN,
20 novembre 2007 (IRIN) Des milliers de Jordaniens
ont été hospitalisés au cours des derniers mois pour des
maladies liées à la pollution de l’eau dans les villages et
villes du royaume. Mais pour certains experts, le pire est à
venir si une solution durable n’est pas trouvée pour mettre fin
à la pénurie d’eau dans le pays.
Le récent incident s’est produit dans un camp de réfugiés près
d’Irbid, à quelque 120 kilomètres au nord d’Amman, la
capitale. Des résidents du camp ont affirmé à IRIN que l’eau
du robinet était devenue jaunâtre et qu’ils craignaient pour
leur santé.
« Nous ne savons pas ce que nous buvons, mais ce qui est sûr
c’est que cette eau n’est pas pure », a expliqué Mahmud
Abdullah, un chauffeur travaillant dans le marché aux légumes du
camp.
Les autorités ont immédiatement ordonné la fermeture des systèmes
d’approvisionnement en eau après que des experts eurent constaté
que l’eau avait été polluée par des eaux d’égout.
En juillet 2006, un millier d’habitants d’un village proche de
la ville de Mafraq (nord) avaient été hospitalisés parce
qu’ils souffraient de diarrhée aigüe et de forte fièvre causées
par le cryptosporidium, un parasite, qui selon les spécialistes,
aurait été trouvé dans le réseau local de distribution
d’eau. Les investigations menées avaient révélé que la vétusté
des installations du réseau de distribution de l’eau était à
l’origine de la maladie.
Le 28 octobre, à Sakib, une ville proche de la cité romaine de
Jerash, au moins 400 personnes se plaignant des mêmes symptômes
ont été conduites à l’hôpital. Les autorités ont alors tenté
d’accuser un petit restaurant local d’avoir vendu de la
nourriture avariée, mais les habitants ont soutenu que l’eau
polluée était la cause de leur maladie.
La Jordanie est l’un des pays ayant les plus faibles ressources
en eau au monde. Un Jordanien consomme en moyenne 170 cm3 d’eau
par jour, contre 1 000 cm3 pour un citoyen d’un pays riche en
eau. Avec un territoire couvert à 92 pour cent par le désert, la
Jordanie utilise des sources d’eau souterraine pour
approvisionner ses 5,6 millions d’habitants.
En outre, la vétusté des installations du réseau de
distribution d’eau et la surexploitation de quelque 2 000 puits,
dont près de la moitié ont été construits illégalement,
contribuent à exacerber le problème.
D’après les estimations du ministère de l’Eau et de
l’irrigation, les nombreuses fuites sur les installations du réseau
de distribution d’eau lui font perdre au moins 45 pour cent de
sa capacité.
Le gouvernement applique actuellement un programme très strict de
rationalisation de l’eau, et n’assure une distribution d’eau
aux ménages qu’une à deux fois par semaine.
Contamination
Selon certains experts, la vétusté des installations du réseau
de distribution d’eau et le pompage irrégulier de l’eau sont
les principales causes de ces maladies hydriques.
« Lorsque l’eau est pompée dans des installations présentant
des fuites, une grande quantité d’eau revient dans les réservoirs
du réseau de distribution après le pompage, et l’eau ainsi réinjectée
contient des bactéries et d’autres sources susceptibles de
provoquer des maladies », a expliqué Salameh Hiari, expert
hydraulique à l’université de Jordanie.
Un pompage plus régulier de l’eau aurait permis de prévenir
une telle contamination, car l’eau polluée n’aurait pas été
réinjectée dans le réseau de distribution en raison de la
pression dans les tuyaux, a-t-il expliqué.
Carte de la Jordanie et de la région
environnante montrant la ville Desi Aquifer et le projet de la Mer
Rouge
Photo:
Google Maps
Des projets
hydrauliques
Selon M. Hiari, le seul moyen de mettre fin à cette situation désagréable
est de réfectionner les installations du réseau de distribution
d’eau et de trouver une source d’eau permanente.
Le gouvernement a un ambitieux projet de pompage d’eau de Disi
Aquifer, dans le sud, à Amman. Ce projet permettra d’acheminer
jusqu’à Amman de l’eau pompée à partir d’une source
souterraine située sous les montagnes de Wadi Rum, à quelque 300
kilomètres de la capitale, et de la vendre à un prix abordable
aux habitants ».
Mais ce projet n’en est qu’à ses débuts. Les études
montrent qu’il faudra au moins cinq années pour le réaliser.
Selon Hazzem Nasser, ancien ministre de l’Eau, le projet n’est
pas pratique et son coût serait bien trop élevé.
Un autre projet envisageait de relier la Mer Morte à la Mer Rouge
par un canal de 250 kilomètres et de construire une station de désalinisation.
Pour les autorités du ministère de l’Eau, ce projet est la
seule solution viable pour mettre fin à la pénurie d’eau.
Une étude de faisabilité, financée par la Banque mondiale, est
menée actuellement par un consortium international ; elle
permettra de déterminer la faisabilité de ce projet de cinq
milliards de dollars et son impact sur l’environnement.
« Nous ne baisserons pas les bras tant que le projet du canal de
la Mer Morte ne sera pas réalisé ; mais en raison des ressources
financières limitées de la Jordanie, nous ne pourrons pas mettre
fin à cette situation désastreuse sans l’aide de la communauté
internationale », a poursuivi M. Hiari.
L’afflux de réfugiés, la cause principale
Pour certains représentants du ministère de l’Eau et de
l’irrigation c’est « la croissance démographique subite »
qui est responsable de la diminution des réserves d’eau. «
Les installations du réseau de distribution d’eau avaient été
prévues pour faire face à une croissance démographique normale,
mais l’afflux soudain de réfugiés venus d’Irak a été préjudiciable
au réseau de distribution d’eau », a expliqué Nael Zu'bi, un
porte-parole du ministère de l’Eau.
La Jordanie a accueilli près de 500 000 réfugiés irakiens. Au
cours des 15 dernières années, plus de 1,5 million de
Palestiniens et d’Irakiens se sont réfugiés en Jordanie –
après l’invasion par l’Irak du Koweït d’abord, puis après
la chute du régime de Saddam Hussein.
Depuis les cinq dernières années, le gouvernement tente de réfectionner
les installations du réseau de distribution d’eau, a affirmé
M. Zu'bi : près de 270 millions de dollars ont été investis
dans la réfection du réseau de distribution d’Amman et 150
millions supplémentaires ont été consacrés à des projets
d’adduction d’eau dans d’autres régions.
« La réfection des installations du réseau de distribution
d’eau nécessite des financements de la communauté
internationale ; elle a le devoir de nous aider », a souligné M.
Zu'bi, ajoutant que le royaume avait besoin de 1,2 milliard de
dollars pour réfectionner l’ensemble du réseau. Copyright © IRIN
2007
Les informations contenues dans ce site web vous sont parvenues
via IRIN, un département d'informations humanitaires des Nations
Unies, mais ne reflètent pas nécessairement les vues des Nations
Unies ou de ses agences. Si vous réimprimez, copiez, archivez ou
renvoyez ce bulletin, merci de tenir compte de cette réserve.
Toute citation ou extrait devrait inclure une référence aux
sources originales. Toute utilisation par des sites web
commerciaux nécessite l'autorisation écrite d'IRIN. UN Office
for the Coordination of Humanitarian Affairs 2007.
|