Nouvelles et analyses humanitaires
TPO: Dans la ligne
de tir
IRIN
Les rues vides de Gaza après les frappes
israéliennes
Photo: Ahmed Dalloul/IRIN
GAZA-VILLE, 19
novembre 2012 (IRIN) Il s’agit d’un
terrible coup du sort, dit-il. Lorsque
les frappes aériennes ont commencé le 14
novembre sur la bande de Gaza, Othman
Abdel’Al a pris une décision qui
semblait sage. Les forces aériennes
israéliennes prenaient notamment pour
cible les bâtiments gouvernementaux des
militants du Hamas. M. Abdel’Al et sa
famille vivaient à proximité d’un poste
de police ; il savait que les siens
n’étaient pas en sécurité.
M. Abdel’Al pensait que l’opération
militaire serait de courte durée : il a
envoyé les membres de sa famille de 12
personnes chez des proches. Mais
l’opération s’est poursuivie, et sa
femme et trois de ses enfants sont
revenus chez eux un matin pour prendre
quelques biens de première nécessité :
des vêtements, de la nourriture, des
produits pour bébé.
C’est à ce moment-là que les bombes sont
tombées : trois obus ont touché le poste
de police, le quatrième l’a manqué.
Quelques minutes plus tard, sa femme
était morte, ensevelie sous les
décombres de leur maison.
Leur fils Hussein a parlé aux
journalistes d’IRIN depuis l’hôpital de
Chifa, à Gaza, alors que son père
hurlait de douleur, la tête bandée et
ensanglantée, une jambe brisée.
« Nous sommes partis de chez nous pour
nous mettre à l’abri, en sécurité, mais
la mort nous a suivis », a dit Hussein.
« Ce qui est arrivé à ma famille est un
crime qui nous a coûté cher ».
Les dernières
violences qui ont éclaté le 14
novembre entre le Hamas et l’armée
israélienne ont fait 51 victimes
palestiniennes et trois victimes
israéliennes, ainsi que des centaines de
blessés.
Depuis, les Gazaouis sont de plus en
plus nombreux à quitter leur domicile
pour se mettre à l’abri.
Il n’y a pas de chiffres disponibles
pour l’instant ; l’insécurité qui règne
à Gaza ne permet pas aux militants des
droits de l’homme et aux travailleurs
humanitaires de se déplacer librement
pour réaliser des évaluations.
Dans un
rapport du 17 novembre, le Bureau de
la coordination des affaires
humanitaires des Nations Unies (OCHA) a
indiqué que si les déplacements étaient
pour l’instant limités, au moins 22
familles des quartiers est de Gaza-Ville
auraient quitté leur domicile, craignant
une opération terrestre d’Israël.
Le Centre palestinien pour les droits de
l’homme a également indiqué que des
habitants auraient quitté leurs
quartiers, de crainte qu’ils soient
ciblés par des frappes aériennes.
L’héritage
de Plomb durci
Plus de 15 000 Gazaouis sont toujours
déplacés depuis les interventions
militaires israéliennes à Gaza, y
compris l’opération Plomb durci de
2008-2009, et la création d’une « zone
tampon » le long de la frontière au
cours de la dernière décennie. Selon un
groupe d’organisations d’aide
humanitaire travaillant à Gaza et connue
sous le nom de Shelter Sector, plus de 4
000 des personnes actuellement déplacées
ont été déplacées à trois reprises ou
plus depuis 2009 en raison des conflits
persistants et de leur incapacité à
reconstruire leur maison. En 2007,
Israël et l’Égypte ont imposé un blocus
à Gaza, restreignant l’importation de
biens comme l’acier et le ciment.
« Plus de 15 000 Gazaouis sont
toujours déplacés depuis les
interventions militaires
israéliennes à Gaza, y compris
l’opération Plomb durci de
2008-2009, et la création d’une
« zone tampon » le long de la
frontière au cours de la
dernière décennie » |
Malak Abd Rabbo a reçu les clés de sa
nouvelle maison, au nord-est de Gaza, il
y a tout juste trois mois.
Situé à moins d’un kilomètre de la
frontière israélienne, le quartier d’Ezbet
Abd Rabbo a été gravement touché par
l’Opération Plomb durci. Il a fallu plus
de trois ans pour reconstruire sa maison
grâce à un programme d’aide financé par
des pays du Golfe.
Pour Mme Abd Rabbo, la vie reprenait
tout doucement son cours : installée
dans une nouvelle maison, elle essayait
d’effacer les souvenirs de ce que sa
communauté avait perdu en 2008-2009 :
des centaines d’orangers et d’oliviers,
la plupart des maisons et dix parents.
Mais récemment, suite aux coups de
semonce tirés par les chars israéliens
en direction des zones agricoles, elle a
fermé la porte de sa maison et est
partie à Jabileya, au Sud. Chaque jour,
elle revient à la frontière pour aller
voir sa maison, en prenant bien soin de
partir avant le coucher du soleil.
« Nous sommes dans la ligne de tir »,
a-t-elle dit à IRIN. « Nous ne voulons
plus que nos enfants soient des
victimes. Nous ne voulons plus que nos
familles soient victimes de l’occupation
israélienne ».
Si l’Agence des Nations Unies pour les
réfugiés palestiniens (UNRWA) indique
qu’elle peut ouvrir ses écoles au public
en cas de nécessité, les familles
déplacées ne cherchent pas encore refuge
dans les bâtiments publics, a noté OCHA.
« Jusqu’à présent, les gens se
débrouillent et [s’installent] chez des
parents », a dit un militant des droits
de l’homme, « mais la situation changera
en cas d’incursion terrestre ».
D’autres indiquent qu’il est déjà
difficile de trouver de véritables
abris.
« Il n’y a pas de lieux sûrs à Gaza », a
dit Hamdi Shaqqura, directeur adjoint
des programmes du Centre palestinien
pour les droits de l’homme, en référence
aux frappes aériennes. « Gaza n’a pas
d’abris »
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Publié le 20 novembre 2012 avec
l'aimable autorisation de l'IRIN
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