Après les nouveaux affrontements qui se sont
produits ce mardi, peut-on craindre une guerre civile
interpalestinienne ?
Hind Khouri. Je ne le pense pas et je
n’imagine pas que les affrontements entre le Fatah et le Hamas
vont s’étendre parce que la société palestinienne constitue
un ensemble homogène. Il ne s’agit pas de violences de type
communautaire. Au sein d’une même famille, vous avez des gens
qui sont du Fatah, d’autres du Hamas. De manière générale,
les Palestiniens sont choqués par cette violence fratricide. Et
bien que la situation soit excessivement fragile, des gens de
bonne volonté, mais aussi des pays arabes, font leur possible
pour que cela cesse.
Est-ce qu’en dépit de l’aggravation de la
situation, le président Mahmoud Abbas va maintenir sa décision
de tenir les élections anticipées auxquelles il a appelé ?
Hind Khouri. Cela fait huit mois que le président
Abbas discute avec toutes les parties, dont le Hamas, pour
rassembler tous les Palestiniens autour d’un programme
politique permettant de sortir de l’impasse interne et
diplomatique actuelle. On ne peut pas attendre. Il faut faire
des choix car la situation faite aux Palestiniens ne peut plus
durer. Il faut, par exemple, payer les salaires des
fonctionnaires, aider l’économie palestinienne...
Les dirigeants du Hamas ne semblent pas
d’accord avec cette démarche électorale. Pensez-vous
qu’ils puissent in fine l’accepter ?
Hind Khouri. Je crois qu’il faut attendre que
les dirigeants du Hamas étudient les propositions du président.
Le problème est qu’il n’y a pas d’autre alternative sur
la table. Ou bien il y a un gouvernement d’union nationale ou
alors il faut en appeler au peuple pour décider par les urnes
quelle direction doivent prendre les dirigeants politiques.
Des responsables du Fatah affirment que l’allégeance
du Hamas à l’Iran, lors de la visite d’Ismaïl Haniyeh à Téhéran,
est à l’origine de la tension actuelle. Qu’en pensez-vous ?
Hind Khouri. Je crois que nous n’avons pas
toutes les données pour pouvoir répondre honnêtement à votre
question. Toutefois, il faut dire que nous sommes dans un
environnement où il est très difficile d’empêcher les ingérences
étrangères en Palestine. Il faut qu’on en tienne compte pour
préserver notre indépendance politique. Le président Abbas a
d’ailleurs rappelé le fait qu’Arafat ait soutenu l’Irak
durant la première guerre du Golfe a coûté cher au peuple
palestinien et qu’on en paie le prix jusqu’à aujourd’hui.
Le fait que la cause palestinienne soit juste, et doit être
soutenue le plus largement possible à l’échelle
internationale, nous commande d’avoir des relations équitables
avec tous les gouvernements et les peuples étrangers. Cela dit,
Il ne faut pas nier qu’avec le Hamas la politique étrangère
a changé et qu’elle s’est rapprochée de l’Iran.
Cela dit, je reste persuadée qu’Israël n’a
pas changé de politique. Contrairement à ce qui se dit, il a
intérêt à ce que le Hamas reste au pouvoir, un Hamas affaibli
et paralysé comme l’était, mais dans une situation différente,
Yasser Arafat. De telles conditions constituent une aubaine pour
qu’Israël maintienne sa politique de colonisation de la
Palestine. J’ajoute que la passivité de la communauté
internationale est aussi responsable de ce qui se produit
aujourd’hui. Cette attitude-là équivaut à fournir une carte
blanche à Israël et à le laisser agir au mieux de ce qu’il
estime être ses intérêts stratégiques, et de poursuivre ce
que Sharon a qualifié de « continuation de la guerre de
1948 ».
Entretien réalisé par Hassane Zerrouky