L’Autorité palestinienne a réussi
hier un retentissant coup
diplomatique à Paris. En arrachant
haut la main un statut de membre à
part entière de la célèbre
institution des Nations unies
l’Unesco, Mahmoud Abbas a infligé
une cinglante claque au couple
israélo-américain. Ce fut un moment
fort, chargé d’émotion, à la lecture
du «verdict» de l’assemblée générale
de cette organisation : «La
Conférence générale décide de
l’admission de la Palestine comme
membre de l’Unesco.»
Au-delà de cette autre grande
victoire pour la Palestine dans son
chemin inexorable vers sa
reconnaissance en tant qu’Etat
membre de l’ONU, il faut relever
l’échec cuisant des Etats-Unis et
d’Israël à faire capoter le
processus à coup de menaces et autre
propagande. Mais in fine, cette
artillerie lourde n’a pas dissuadé
les membres de l’Unesco qui ont
opposé un véritable veto à la
requête américaine.
Il faut féliciter ici le courage
de la France d’avoir été la seule
grande puissance à avoir donné sa
voix aux Palestiniens. Le
Royaume-Uni et l’Italie n’ont certes
pas voté en faveur de cette
adhésion, mais ils ne s’y sont pas
opposés non plus. Au final le oui
l’a emporté de manière écrasante,
puisque la résolution a été adoptée
par 107 voix pour, 52 abstentions et
14 voix contre, parmi les pays
présents hier au siège de l’Unesco à
Paris. La quasi-totalité des pays
arabes, africains et
latino-américains se sont prononcés
pour l’adhésion des Palestiniens, de
même que la France qui avait
pourtant émis de sérieuses réserves
ces derniers jours sur la démarche
palestinienne.
«L’Unesco, ce n’est ni le lieu ni
le moment. Tout doit se passer à New
York», jugeait encore vendredi le
ministère français des Affaires
étrangères.Les Occidentaux
estimaient que la candidature à
l’Unesco ne pouvait précéder
l’aboutissement de la démarche
entreprise par les Palestiniens
auprès de l’ONU, à New York.Mais la
France a changé radicalement sa
position, au grand bonheur des
Palestiniens, qui vont désormais
avoir une voix dans cette auguste
assemblée de l’éducation, de la
science et de la culture.
Les
Etats-Unis perdent la bataille
Les Etats-Unis, l’Allemagne et le
Canada, qui se sont retranchés dans
le déni des réalités, reçoivent à
l’occasion une belle gifle. Il faut
attendre de voir si les Etats-Unis,
qui ont menacé de cesser
«immédiatement» de leur contribution
financière à l’organisation –70
millions de dollars et 22% de son
budget – vont passer à l’acte.
«Nous pensons que c’est
contreproductif. C’est une mesure
prématurée», a répété hier
devant la Conférence générale de
l’Unesco la sous-secrétaire d’Etat
américaine à l’Education, Martha
Kanter. Mais cette ultime mise en
garde n’a servi à rien.
L’ambassadeur américain auprès de
l’Unesco, David Killion, ne pouvait
que constater son échec : «La
décision d’aujourd’hui va compliquer
notre capacité à soutenir les
programmes de l’Unesco.»
Son collègue et complice
israélien Nimrod Barkan appuyaient
que le budget de l’Unesco serait
ainsi amputé d’un quart de son
montant. «Cela deviendra impossible
pour l’Unesco de remplir ses
missions», a-t-il estimé. Mais qu’à
cela ne tienne, l’Unesco ne fermera
pas boutique pour autant. Sa
directrice générale, Irina Bokova,
admettait juste que l’organisation
devrait «probablement» réduire la
voilure. Mais elle insisté le
caractère «universel» de son
organisation.
Les Palestiniens et leurs nombreux
soutiens préfèrent savourer cette
belle victoire qui en appellera
d’autres. Après le coup
spectaculaire du 23 septembre devant
l’Assemblée générale de l’ONU,
Mahmoud Abbès engrange un autre
succès en faisant de la Palestine le
195e pays membre de l’Unesco en
attendant, un jour peut-être, de
franchir la porte de l’ONU.