Opinion
Il y a exactement
cent-vingt ans,
la France envahissait la Boucle du Niger
[l'Azawad] !
Hamma ag
Mahmoud
Jeudi 31 janvier
2013 Tombouctou,
composées essentiellement de tirailleurs
sénégalais, entendez des soldats
africains menés par des officiers
français. Ironie du sort, en cette année
2013, anniversaire de la première
bataille coloniale française pour
l’occupation de la Boucle du Niger, le
même scénario se répète. L’armée
française appuyée par des militaires
africains, clones des tirailleurs
sénégalais, sur les traces des colonnes
Bonnier et Joffre, a entamé à nouveau la
reconquête de l’Azawad.
C’est en 1893 que les troupes coloniales
françaises pénétraient à La ressemblance
des deux évènements est forte, même dans
les atrocités commises sur les
populations civiles. La colonne Joffre
en particulier n’a rien épargné sur son
itinéraire : populations civiles,
bétail, même les taillis d’épineux ont
été minutieusement brulés. Dans le pur
style des conquêtes coloniales, l’armée
franco-africaine se singularise
aujourd’hui, à Bamako, Ségou, Kona,
Sevaré, Seribala, Niono, Diabali, Dioura
et bientôt jusqu’à Gao, Kidal et
Tombouctou, par des massacres de
populations civiles déjà affublées du
nom de code "Peaux Rouges" à l’image des
Amérindiens, ce qui préfigure le sort
qui leur est réservé.
Les avions de chasse en action contre
les terroristes nous dit-on, n’épargnent
guère les civils terrorisés par le
fracas des bombes, de nuit comme de
jour.
Des milliers de personnes sont déjà sur
les routes de l’exil : femmes, enfants,
vieillards. Affamés et tous démunis.
Cette guerre, comme la première qui a
duré près de trente ans, pourrait être
longue si la France, en tête de la
croisade et responsable devant
l’Histoire, n’est pas résolue à la
réparation.
La guerre contre le terrorisme, si tant
en est le vrai mobile, pourrait et
devrait se faire avec plus de
discernement. Depuis plus de douze ans
l’AQMI opère dans l’Azawad au su et vu
de tous. Le Gouvernement du Mali
traitait avec lui au grand jour. Les
partenaires du Mali ont largement
déboursé des fonds pour la lutte contre
le terrorisme, sans résultats. Le
Président A.T.T et la classe politique
malienne n’ayant jamais été sanctionnés,
à l’image du Président Noriega du
Panama. Pourquoi ?
Le MNLA, depuis avril 2012, n’a cessé
d’alerter l’opinion publique
internationale sur la nécessité de
contrer le terrorisme dans l’Azawad, en
vain. Pourquoi la communauté
internationale a fait preuve d’autant de
passivité ?
Aujourd’hui, à la lumière des récents
événements, les agendas des différents
acteurs apparaissent au grand jour. Le
Mali, la CEDEAO qui ne se sont jamais
préoccupés du terrorisme et pour cause,
en font aujourd’hui le bon prétexte dans
leur croisade contre le MNLA. L’Algérie
qui ne tolère guère l’exploitation des
ressources de l’Azawad, n’a trouvé de
mieux que d’y favoriser toutes les
criminalités. Le MNLA qui a affiché ses
intentions de lutter contre le
terrorisme et le crime organisé dans
l’Azawad a vite été neutralisé.
Tout le monde aujourd’hui sait
pertinemment d’où vient cette onde de
choc.
La France qui clame haut et fort son
aide désintéressée au Mali, dévoile
aujourd’hui un autre agenda : la
liquidation du MNLA au prétexte de
rétablir l’intégrité territoriale du
Mali, ce qui va largement au-delà des
résolutions du Conseil Sécurité qui fait
du règlement politique du conflit un
préalable à la guerre contre le
terrorisme. Par conséquent
l’intervention militaire anticipée
devrait s’en tenir à l’endiguement des
terroristes sur la ligne de démarcation
entre l’Azawad et le Mali, en attendant
le règlement politique du conflit et la
préparation militaire de l’opération.
Les pogromes auxquels se livre
joyeusement l’armée malienne, sous
couverture française, ne font nullement
réfléchir les politiques en France. Les
nombreuses victimes civiles des
bombardements de l’aviation française et
les interminables cortèges des
populations vers les pays voisins, non
plus.
Les assassinats des civils "blancs", les
viols, les razzias organisées par
l’armée malienne et leurs supplétifs,
avec la complicité des militaires
français, rappellent étrangement les
événements survenus au Ruanda dans un
passé récent.
A l’image des Tutsi, les Touaregs
menacent-ils les intérêts Français ? Le
programme de formation de l’armée
malienne, financé par l’Union Européenne
ne vient-il pas trop tard ?
Au Mali les événements des années 60 et
90 le montrent bien : l’armée n’a
exécuté que des ordres des politiques,
les mêmes qui sont toujours là. Les
donneurs d’ordre, comme les auteurs de
crimes de guerre et de génocide, sont
aujourd’hui dans les hautes sphères de
l’Etat malien et de son armée. La France
et la communauté internationale le
savent très bien, eux qui s’apprêtent à
leur livrer l’Azawad pieds et mains
liés.
La France, comme en 1893, 1916, 1960,
réécrit outrageusement l’histoire de
l’Azawad.
Hamma Ag Mahmoud ,
Ancien Ministre.
Solidarité avec les Touaregs de
l’Azawad...
Le dossier Afrique noire
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