Syrie
Bombardement de la Syrie : La guerre
d'après
Gilles Munier

Gilles
Munier
Samedi 31 août 2013
Bombarderont,
bombarderont pas ? – Ils bombarderont
tôt ou tard, bien que l’opinion publique
occidentale soit contre. Ils
bombarderont parce qu’Israël, le lobby
militaro-industriel et les régimes
arabes qui lui sont inféodés le veulent,
parce qu’il faut renverser un régime qui
leur a rendu bien des services pendant
les guerres du Golfe ou comme
sous-traitant de la CIA pour ses
interrogatoires musclés, mais qui ne
cadre plus –
comme hier ceux de Moubarak et de
Kadhafi - avec leur plan de
redécoupage et de
« rééquilibrage » du monde arabe.
Le protocole
secret
L’utilisation de gaz
de combat est un prétexte parmi d’autres
pour diaboliser Bachar al-Assad et
tirer, pour commencer, quelques missiles
de croisière. Obama, Cameron, Hollande
et consorts se moquent de savoir qui a
vraiment gazé des habitants dans la
banlieue de Damas, et pourquoi. Il est
vrai que par rapport à l’enjeu du
conflit, les dizaines de milliers de
morts depuis deux ans et demi –
majoritairement
musulmans – comptent peu. En
avalisant les 13 points du Protocole de
Doha de novembre 2012 –
secret, comme l’étaient les Accords
Sykes-Picot de 1916 - l’opposition
syrienne pro-occidentale s’est engagée,
notamment, à
« geler » les relations économiques
et militaires de Damas avec Moscou,
Pékin et Téhéran ; à ne faire valoir les
droits de la Syrie sur le plateau Golan
que par des moyens uniquement politiques
–
autant dire à ne jamais les recouvrer
– ; à rompre ses relations avec le
Hezbollah libanais et la résistance
palestinienne ; à autoriser le passage
d’un oléoduc alimentant Israël en eau du
barrage Atatürk et celui d’un gazoduc
qatari à destination de la Turquie et de
l’Europe
(1). Les Occidentaux auraient pu
aller jusqu’à demander à l’opposition
syrienne de reconnaître Israël, mais
c’eut été la diviser encore plus. En cas
de renversement du régime -
ce qui ne semble pas être pour demain
- rien ne dit que ces exigences seraient
respectées. Pour l’instant, Bachar al-Assad,
dont la chute semble à terme inéluctable
-
parce que programmée, quelle qu’en soit
le coût humain - s’en sort plutôt
bien. La guerre civile l’a renforcé dans
son parti, au sein de sa secte
religieuse et aux yeux de cercles
nationalistes arabes en mal de leader.
Pour quelqu’un qui n’a pas brillé par sa
gouvernance de la Syrie les dix années
qui ont précédé le déclenchement de la
guerre civile, cela tient du miracle.
Poker menteur
On peut se demander,
si les bombardements
« ciblés » annoncés ne préparent
pas plutôt
« la guerre d’après », contre les
moudjahidine du
Front al-Nosra ou de
L’Etat islamique en Irak et au Levant.
Les états-majors de la coalition anti-Assad
tiennent surtout à détruire des dépôts
d’armes de destruction massive dont les
islamistes pourraient s’emparer.
Parallèlement, les services secrets –
et
le Mossad - s’emploient à réduire
l’influence des brigades salafistes en
finançant la création de
Sahwa, des milices syriennes
sunnites recrutées parmi les rebelles de
l’ALS
(Armée Syrienne Libre) et dans les
tribus bédouines, comme l’a fait la CIA
en Irak.
Dans la région d’Al-Anbar,
l’opération s’était déroulée avec un
certain succès, réduisant le nombre des
GI tués ou blessés. Ce qui n’était
pas prévu, c’est qu’Al-Qaïda
supplante les organisations islamiques
de résistance et étende son emprise
partout dans le pays. Le régime Maliki –
qui soutient par ailleurs Bachar al-Assad
– demande maintenant au Pentagone
d’installer des bases de drones-tueurs
pour détruire les camps d’entrainement
salafistes jouxtant la frontière
syrienne. On a l’impression d’assister
au Proche-Orient, en
live, à une partie de poker
menteur. Qui peut dire de quoi demain
sera fait ?
(1)Syrie-opposition :
« Protocole de Doha » : Fin de l’Etat
syrien, par Nouredine Merdaci
http://www.afrique-asie.fr/menu/actualite/4388-syrie-opposition-protocole-de-doha-fin-de-l-etat-syrien.html
© G. Munier/X.
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Publié le 31 août 2013 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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