Opinion
Sarkozy et
l'embargo criminel contre l'Iran
Gilles Munier

Gilles
Munier
Mercredi 25 janvier
2012
Nicolas Sarkozy a fini par obtenir ce
qu’il voulait: une guerre - à terme
- avec l’Iran, tout en déclarant à son
habitude le contraire. Les nouvelles
sanctions économiques qu’il avait
annoncées en présentant ses voeux au
corps diplomatique et son appel du 21
janvier pour l’adoption d’«un régime
de sanctions beaucoup plus fort,
beaucoup plus décisif », se sont
traduits par la décision de l’Union
européenne d’imposer un embargo
pétrolier à l’Iran et de geler les
avoirs de sa banque centrale. Les seuls
pays à applaudir sont Israël et les
Etats-Unis.
Vers une nouvelle guerre
Sergueï Lavrov, ministre russe des
Affaires étrangères, a déclaré que ces
décisions «n'ont rien à voir avec la
volonté d'assurer le régime de
non-prolifération de l'arme nucléaire.
Cela se fait dans le but d'exercer une
action destructrice sur l'économie
iranienne et la situation de la
population». J’ajouterai que cet
embargo n’a pas été décrété, selon
Sarkozy, pour éviter «un déchaînement
militaire et le chaos au Proche-Orient»,
il y conduit. Nous sommes aux prémisses
d’une nouvelle agression occidentale,
avec en toile de fond une guerre
confessionnelle opposant les sunnites
aux chiites, dont les seuls vainqueurs
seront les colons sionistes en Palestine
et les pays de l’Otan.
Je ne suis pas un partisan du régime des
mollahs et ne l’ai jamais été ; ce qui
ne veut pas dire que je ne reconnais pas
les mérites de la diplomatie iranienne
quand c’est nécessaire. Je ne suis pas
non plus pour la course au nucléaire au
Proche-Orient, et suis donc contre une
éventuelle bombe iranienne à partir du
moment où toute la région serait
dénucléarisée. Toute la région, cela
veut dire : y compris Israël, qui
détient plus d’une centaine de têtes
nucléaires et dispose des missiles pour
les transporter. On nous refait le coup
des armes de destruction massive qui a
permis de justifier l’agression de 2003
contre l’Irak. Une de ses conséquences
désastreuses, et peut-être voulue, a été
de livrer ce pays aux Iraniens pour
passer à la phase actuelle du plan de
remodelage du Proche-Orient. En clair,
je souhaite le renversement du régime de
Téhéran… mais par le peuple iranien.
Des multinationales
en quête de jackpot pétrolier
Comme cela a été le cas en Irak - je
l’ai vécu - l’embargo va martyriser
la population. Si Israël bombarde un
site nucléaire – j’étais à Bagdad 15
jours après l’attaque de Tammouz -
l’ayatollah Khamenei en sortira
renforcé. Personne ne peut prédire les
conséquences d’une agression contre
l’Iran, si ce n’est la mort de centaines
de milliers de civiles, des milliers de
réfugiés, la destruction des structures
sociales du pays et la montée en flèche
du ressentiment et de la haine des
musulmans envers les Occidentaux… tout
cela pour conquérir une position
géostratégique face à la Chine, et pour
satisfaire des multinationales en quête
de jackpot pétrolier.
L’embargo décidé par l’Union européenne
vise également le régime baasiste syrien
et le Hezbollah libanais. En asséchant
les finances de l’Iran, l’apprenti
sorcier Sarkozy et ses alliés croient
qu’ils les mettront à genoux. C’est
oublier, comme l’a dit Mahmoud
Ahmadinejad sur la chaîne américaine
ABC, que «tout pays se privant de
l’accès au marché énergétique iranien
verra bientôt sa place prise par
d’autres». Il y a suffisamment
d’armes au Proche-Orient pour déclencher
- «peut-être, hélas», comme dit
Sarkozy - une conflagration
mondiale. Excusez du peu.
© G. Munier/X.
Jardez
Publié le 25 janvier 2012 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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