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Opinion

La loi d'anathémisation - herem - dans le contexte du passé et du présent juifs
Gilad Atzmon

Samedi 16 juillet 2011

http://www.gilad.co.uk/writings/gilad-atzmon-the-herem-law-in-the-context-of-jewish-past-and.html

Il semble que l’Union européenne soit préoccupée par la nouvelle loi d’anathémisation (herem) israélienne. Cette loi stipule que toute personne ou toute organisation appelant au boycott d’Israël, colonies inclues, est susceptible de faire l’objet de poursuites de la part des cibles dudit boycott, sans que ceux-ci aient à apporter la preuve qu’ils aient subi un préjudice quelconque.

“Nous sommes préoccupés par l’effet que pourrait avoir cette loi sur la liberté de citoyens et d’organisations israéliens d’exprimer des opinions politiques non-violentes”, a déclaré la porte-parole européenne en chef pour les relations extérieures Catherine Ashton.

Des personnes et des institutions de plus en plus nombreuses ont désormais compris qu’Israël n’est pas une « société civilisée » : ce pays ignore totalement les notions de droits humains et civiques, et il ne partage pas les fondements communs et essentiels du système occidental des valeurs. Israël n’est pas une démocratie, il n’en a jamais été une. Tout au plus a-t-il réussi à mimer certaines des semblances d’une civilisation occidentale, mais il a manifestement échoué à internaliser la signification de la tolérance et de la liberté.

Cela ne devrait en rien nous surprendre : Israël se définit lui-même comme un Etat juif, et la judéité est, fort malheureusement, intrinsèquement intolérante ; de fait, on peut soutenir que l’intolérance juive est aussi ancienne que les juifs eux-mêmes.

En matière de législation, dès lors, comment devons-nous comprendre les implications du terme « herem » ? Le mot hébreu herem, dans son usage contemporain, fait référence à un bannissement, un boycott et une sanction. Toutefois, dans le contexte biblique, ce mot suggère la destruction totale de l’ennemi et de ses biens, à l’issue d’une campagne militaire.

Partant, l’émergence du christianisme peut être vue comme une tentative de redresser une telle situation d’intolérance brutale ; le christianisme peut être compris comme une tentative de s’éloigner de l’idéologie obscurantiste de l’Ancien Testament. Le christianisme a induit des idées d’harmonie et d’amour. Il n’est donc pas étonnant que l’homme qui a osé suggérer à ses contemporains juifs d’ « aimer leur prochain » ait fini cloué à une poutre de bois. Il a fini par être lui-même en butte à une vile campagne de herem (ostracisation) homicide.

Uriel Da Costa

La mentalité herem est intrinsèque à l’enseignement juif et à la mentalité juive. Beaucoup de gens savent que Spinoza a été victime du herem rabbinique. Mais plus rares sont ceux qui connaissent l’histoire d’Uriel Da Costa.

Da Costa est né catholique à Porto, au Portugal, en 1585. Très tôt, Da Costa prit conscience que sa famille était d’origine juive et, à travers ses études, il commença à envisager de faire retour au judaïsme. En 1617, Da Costa et sa famille avaient décidé de retourner au judaïsme et ils s’enfuirent du Portugal à Amsterdam, qui allait très rapidement devenir un centre bouillonnant d’activité de la diaspora séfardie.

Une fois en Hollande, toutefois, Da Costa fut très rapidement désenchanté du judaïsme rabbinique. Il en vint à considérer que l’élite rabbinique se consumait en rituels en en légalisme talmudiques. En 1624, Da Costa publia un ouvrage intitulé : « Examen des traditions des Pharisiens », qui remettait en question la croyance fondamentale en l’immortalité de l’âme. Cet ouvrage mettait par ailleurs l’accent sur les hiatus entre le judaïsme biblique et le judaïsme rabbinique.

Le livre, considéré controversé, fut brûlé publiquement. Da Costa fut convoqué devant l’élite rabbinique d’Amsterdam pour avoir formulé des opinions blasphématoires à l’encontre du judaïsme et du christianisme. Il fut condamné à une forte amende, et il fut condamné au herem.

En 1633, Da Costa chercha à se réconcilier avec la communauté. Il jura de redevenir « un singe parmi les singes ». Toutefois, très rapidement, il commença à exprimer derechef des opinions rationalistes et sceptiques, par exemple en faisant état de ses doutes au sujet du caractère divin de la loi biblique : ne s’agissait-il pas plutôt d’un texte simplement couché par écrit par Moïse ? Il en vint à conclure que toutes les religions étaient des inventions humaines et, en fin de compte, à rejeter toute religion formalisée et ritualisée. Sans doute le premier des athées juifs, Da Costa en vint à considérer que la religion devrait être fondée uniquement sur la loi naturelle ; il croyait que Dieu réside dans la nature, qui est emplie de paix et d’harmonie, alors que la religion organisée est marquée au coin de la violence et du combat perpétuel.

Il ne fallut pas longtemps à Da Costa pour, de nouveau, être condamné au herem rabbinique. Durant sept années, il vécut dans un isolement relatif, ignoré par les membres de sa famille et par ses amis. Finalement, cette solitude devint insupportable pour lui et,  une fois de plus, il fit amende honorable.

Comme condamnation de ses visions hérétiques, il reçut publiquement trente-neuf coups de fouet dans la synagogue portugaise d’Amstardam, puis on l’obligea à resté couché sur le sol tandis que les membres de la congrégation lui marchaient dessus. Ces événements traumatisèrent Da Costa, qui devint suicidaire. Après avoir rédigé son autobiographie « Existences exemplaires », en 1640, dans laquelle il a révélé son expérience de victime de l’intolérance juive, il se résolut à mettre un terme à la vie de son cousin et à la sienne propre. Voyant un jour son parent s’approcher de lui, il se saisit d’un pistolet et il appuya sur la gâchette, mais le coup ne partit pas. Puis il trouva un autre pistolet, qu’il retourna contre lui-même, après quoi il fit feu. Des témoins ont décrit son agonie de ‘terrible’.

Sionistes et « antisionistes » : kif-kif bourricot

Les annales des mesures rabbiniques de basse police contre toute dissidence sont horrifiantes. Mais, malheureusement, l’intolérance juive va bien au-delà des seules institutions religieuses. En Israël, il semble que les juifs se lancent l’anathème les uns les autres de manière courante. La soi-disant « gauche juive » impose le herem aux colonies de la Cisjordanie (comme si Tel-Aviv n’était pas une colonie…) et, en réponse, le gouvernement de droite ostracise les réprouvés de gauche.

Et comme nous le savons tous, les voix juives critiques éminentes, à l’extérieur d’Israël, comme celle de Norman Finkelstein ont fait l’objet d’anathèmes sionistes incessants depuis des années.

Toutefois, l’on est fondé à trouvé étonnant que les (soi-disant) « antisionistes » juifs, qui clament être « progressistes », « athées » et « cosmopolites », utilisent eux aussi en permanence les mêmes tactiques talmudiques d’anathème (herem) qui ont été employé par leurs ancêtres rabbiniques durant des siècles.

Au cours de la décennie écoulée, nous avons été confrontés à plus d’une campagne d’anathème (herem) juive « antisioniste ». C’est ainsi que des juifs soi-disant « antisionistes » se sont tout entiers consacrés à détruire l’association Deir Yassin Remembered (DYR), qui était alors l’association pro-palestinienne la plus importante et la plus efficace au Royaume-Uni. L’étude du langage ordurier utilisé par les activistes juifs « antisionistes » (http://jewssansfrontieres.blogspot.com/2005/06/sympathy-for-devil.html) et l’observation des stratégies auxquelles ils ont recours contre leurs coreligionnaires juifs authentiquement antisionistes et contre les militants de la solidarité avec les Palestiniens révèlent une image particulièrement sombre et une réédition des tactiques d’anathème rabbinique les plus horribles.

Mais une telle découverte et une telle compréhension de ces tactiques juives soi-disant « antisionistes » ne doivent pas réellement nous surprendre, car, après tout, à l’instar de l’Etat juif, les « antisionistes » juifs s’identifient eux aussi en tant que juifs.

Toutefois, à la différence des juifs rabbiniques – qui, eux, fournissent au moins quelque justification de leurs jugements sévères fondés sur une supposée transgression des préceptes bibliques – les juifs soi-disant « antisionistes » se focalisent exclusivement sur les mesures de rétorsion. Mais un tel état de fait n’a rien pour nous surprendre : alors que pratiquement aucun des juifs soi-disant « progressistes » et « antisioniste » ne croit en Dieu ou n’observe les prescriptions de la Torah, ils se sont manifestement arrangés pour retirer du judaïsme ses pires méthodes, à savoir une intolérance brutale et obtuse.

Je suis personnellement manifestement en butte à des campagnes d’anathème herem constantes, à l’instigation de divers activistes juifs ethniques, tant sionistes que crypto-sionistes.

Toutefois, j’ai le plaisir de vous informer que mes détracteurs échouent lamentablement. De fait, ils ont désormais pris l’habitude d’apprendre que leurs tentatives d’anathème désespérées visant à m’excommunier font long feu, l’une après l’autre, les laissant frustrés et de plus en plus isolés du discours public relatif au conflit israélo-palestinien.

A la réflexion, j’aurais tendance à supposer que la mise en circulation de plus en plus large de mon travail n’a que peu à voir avec mon talent ou avec ma conviction, toutefois. C’est bien plus simple que cela : ma vision de l’humanisme et de l’éthique est probablement plus directe, plus cohérente, plus inclusive et plus cohérente que l’exclusivisme ethnocentrique pseudo-progressiste des juifs soi-disant « antisionistes », qui se manifeste avec une telle clarté dans chacune de leurs campagne de herem et qui est implicite dans la plupart de leurs écrits.

Les juifs et la campagne Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS)

Conformément à l’attente, la juiverie mondiale a accueilli favorablement la nouvelle loi israélienne de herem. D’après le quotidien israélien Ha’aretz, l’organisation qui chapote les associations juives en France, le CRIF, a salué la nouvelle loi israélienne de herem : « Le directeur général du CRIF Haim Musicant a fait observer qu’une loi similaire à celle-ci existe depuis longtemps en France, à la grande satisfaction de la communauté juive française ».

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a lui aussi défendu la nouvelle loi, disant « ce qui entache l’image d’Israël, ce sont ces attaques sauvages et irresponsables contre la tentative déployée par une démocratie afin de tracer une frontière entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas ».

Netanyahu nous résume ici les choses de manière éloquente : la nouvelle loi talmudique a pour fonction de mettre en évidence et de fixer les termes relatifs à ce qui est acceptable à l’intérieur de la « démocratie cachère » : il s’agit d’un édit non-civilisé dicté par une politique effrontément exclusiviste. D’une manière en tous points semblable, les juifs soi-disant « antisionistes » affirment bien souvent savoir de quoi retourne l’ « antisionisme cachère », et de quelle manière les frontières doivent en être définies. De manière particulièrement incroyable, les « antisionistes » juifs ne cessent par ailleurs jamais de nous faire des sermons sur « qui est acceptable » pour les Palestiniens et sur « qui est mauvais » pour eux.

Je suppose qu’au jour d’aujourd’hui, le continuum entre l’attitude de Netanyahu et celle des crypto-sionistes à l’œuvre parmi nous est tout à fait prouvé, et qu’il est suffisamment évident pour que nul n’en ignore.

Au mois d’avril de cette année (2011), le célèbre journaliste et cinéaste Max Blumenthal a répondu à certaines des questions que soulève l’hégémonie juive au sein du mouvement BDS . Le BDS est un appel à l’initiative d’Omar Barghouthi et de la société civile à imposer un boycott, une campagne de désinvestissement et des sanctions à Israël.

Il a écrit : « Je suis allé hier soir à l’Université Columbia pour assister à la présentation de son dernier livre par Barghouthi : « Boycott, Désinvestissement et Sanctions : un combat global pour les droits palestiniens ». Durant sa conférence, Barghouthi a mentionné le fait qu’il avait cherché à rencontrer le président de l’association J Street, Jeremy Ben-Ami, afin de mettre au point un débat au sujet de la campagne BDS. La réponse de Ben-Ami avait été celle-ci, comme l’a rapporté Barghouthi : « Nous voulons que ce débat reste au sein de la communauté juive ; par conséquent, nous ne participerons à aucun débat (à ce sujet) avec quelque Palestinien que ce soit ».

« Au mois de décembre 2010 », poursuit Blumenthal, « j’ai eu un débat sur le BDS qui m’opposait au directeur de l’association J Strett U, Daniel May. Ma partenaire, dans ce débat, était Rebecca Vilkomerson, de l’association Jewish Voice for Peace. Quant au partenaire de Daniel May, c’était un étudiant juif de Princeton, qui s’appelait, lui aussi, Daniel May… Toutes les personnes impliquées dans ce débat étaient donc juives ashkénazes, et pourtant, nous débattions au sujet d’un mouvement fondé et contrôlé par la société civile palestinienne… »

Si vous vous demandez pour quelle raison J Street insiste ainsi à ce que le BDS soit géré comme une « affaire intérieure strictement juive », ou pour quelle raison le BDS est devenu un « appel juif », voici la réponse : le BDS est interprété par la plupart des juifs comme un appel à l’anathème, au herem, or c’est ce que les juifs font le mieux : détruire, exclure, excommunier, réduire au silence, boycotter, sanctionner. Il est vrai que cela fait des siècles que les juifs font ça.

Mais c’est ici que surgit un autre problème relatif aux juifs en matière de représentation et de contrôle au sein du mouvement de boycott. Autant la majorité d’entre nous sympathisons avec l’appel de la société civile palestinienne, il n’y a pratiquement personne, parmi nous, qui veuille effectivement opérer à l’intérieur de cet appel, ou prendre des directives au sujet de ce que nous devons faire et penser auprès d’une synagogue juive trotskiste soi-disant « antisioniste ». Or il se trouve – et cela m’attriste beaucoup, parfois – que certains des crypto-sionistes qui oeuvrent au sein du mouvement BDS se servent aujourd’hui de cet important appel palestinien pour faire la promotion d’intérêts juifs ou pour combattre d’autres militants de la solidarité avec les Palestiniens.

Mais je suis persuadé que, pour que le mouvement BDS réussisse, il doit être attentif avant toute chose à l’appel palestinien, et à cet appel avant tous les autres. Pour que le BDS soit efficace, il doit se transcender lui-même et dépasser la banale activité de type anathémisation herem. Il doit être un appel universel et il doit être géré comme une campagne de la société civile.

Le herem, le post-herem, et, pour finir,  une blague

Israël et le sionisme, comme nous le savons désormais, ont démontré qu’ils n’étaient que des rêves avortés. Ils ont été conçus initialement pour civiliser la vie juive et démanteler le mode existentiel juif autodestructeur. Ils avaient  pour finalité de faire passer les juifs à la phase post-herem. Ils s’étaient juré de transformer le juif en un être productif. Mais les choses ont mal tourné : ni les sionistes ni les soi-disant « antisionistes » n’ont réussi à s’extraire de la désastreuse culture du herem. Il semble que tout l’univers de la politique identitaire juive soit la matrice des herem et des stratégies d’exclusion. Pour être un « véritable juif », la seule chose que vous ayez à faire, c’est désigner à qui vous vous opposez, qui vous haïssez, qui vous excluez ou qui vous boycottez.

Une telle situation est de fait tout à fait tragique, mais elle ne manque pas de nous rappeler une vieille blague juive :

Question : Combien faut-il de synagogues dans un village ne comptant qu’un seul habitant juif ?

Réponse : Il en faut deux : une où il puisse aller prier, et une autre où il puisse ne jamais mettre les pieds !

traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier

Publié le 9 août 2011

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Source : Marcel Charbonnier

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