Tendances
de l'Orient
La nouvelle guerre
froide
Ghaleb Kandil
Lundi 30 septembre 2013
Ce qui s'est passé ces derniers jours
dans les coulisses de l'Assemblée
générale des Nations unies illustre
clairement l'émergence de nouveaux
rapports de force internationaux,
caractérisés par la fin de l'hégémonie
américaine et l'apparition de nouvelles
réalités. Celles-ci laissent présager le
début d'une guerre froide, différente de
celle que le monde a connu durant la
seconde moitié du XXème siècle.
Certains analystes pensent que la fin de
l'hégémonie unilatérale américaine
conduit forcément à l'apparition d'un
monde multipolaire. Mais en examinant de
plus près ce qui s'est passé, on arrive
à l'observation suivante: les puissances
émergentes, notamment l'axe de la
Résistance mené par la Russie, avec un
rôle essentiel pour l'Iran, est parvenu
à imposer de nouveaux équilibres grâce à
un processus d'accumulation des
victoires, plus particulièrement contre
Israël au Liban, et, surtout, grâce à la
résistance de la Syrie dans la guerre
universelle menée contre elle. Ces
nouvelles réalités ont contraint
l'Amérique et ses alliés Français et
Britanniques à accepter les nouvelles
règles qui se sont traduites, au Conseil
de sécurité, par une réciprocité dans
l'utilisation des vétos, qui était, ces
dernières décennies, le monopole de
l'Occident.
Ces nouveaux rapports de force se
caractérisent par la fin des invasions
et des grandes guerres, mais ils
n'empêcheront pas la poursuite des
conflits politiques et des crises. Parmi
ces enjeux, figure une question vitale
pour la Russie: la récupération de son
rôle historique dans l'Europe slave et
orthodoxe, que l'Occident a ravi au
Pacte de Varsovie après l'effondrement
de l'Union soviétique.
Un monde multipolaire signifie un
changement global des règles du jeu et
des relations à l'intérieur des Nations
unies. Or, la structure administrative
et politique de cette organisation ainsi
que son appareil exécutif, restent
totalement sous hégémonie américaine. Ce
qui signifie que le déséquilibre se
poursuivra jusqu'à ce que les forces
émergentes, qui ont démantelé le monde
unipolaire, réussissent à reconstruire
les institutions des Nations unies et à
imposer un changement de leurs règles de
fonctionnement, comme par exemple
l'intégration de nouveaux membres
permanents au Conseil de sécurité, à
l'instar du Brésil, de l'Afrique du Sud
et, ultérieurement, de l'Iran.
Le nouvel ordre mondial verra alors la
chute de l'hégémonie unilatérale de
l'Amérique, qui a utilisé ces trois
dernières décennies sa puissance
militaire pour agresser et assujettir
des Nations entières. Pendant toute
cette période, Washington a utilisé
l'Onu et ses institutions comme s'il
s'agissait d'annexes à sa diplomatie. La
Russie et la Chine étaient dans une
période d'attente et se contentaient,
tout au plus, de protester
politiquement, jusqu'à ce que la
victoire de la Résistance contre Israël,
en 2006, a posé les jalons du grand
changement.
De nombreux dossiers litigieux opposent
l'Amérique d'un côté, la Russie, la
Chine, l'Iran et les pays des Brics de
l'autre. La concurrence ouverte pour le
contrôle des ressources énergétiques et
des marchés se poursuivra et continuera
de provoquer des polarisations sur la
scène internationale. Mais les nouvelles
réalités empêcheront que les Etats-Unis
aient recours à la guerre pour imposer
leur volonté.
Si la conférence de Yalta s'est soldée
par une partage du monde en deux zones
d'influence, sur lesquelles se sont
déployées les armées des deux grandes
puissances de l'époque, aujourd'hui, il
n'existe pas de lignes de démarcations
bien précises entre les zones
d'influence. Au contraire, les lignes
sont enchevêtrées et aucun compromis
global n'est envisageable. C'est selon
ces nouvelles règles d'engagement que la
guerre froide contemporaine aura lieu.
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