Opinion
La terre de la promesse
Gershon Baskin
Gershon Baskin
The Jerusalem Post, le 25 octobre 2010
Le président Barack Obama et le
gouvernement américain perdent patience à force de devoir
composer avec de mesquines chamailleries israélo-palestiniennes
sur des points de procédure. C’est ce que nous dit
l’éditorialiste du New York Times Thomas
Friedman, [triple] lauréat du Pulitzer. Son conseil : le Premier
ministre Benjamin Netanyahu devrait accéder à la requête
américaine de prolonger de soixante jours le moratoire de la
construction dans les colonies, en modique contrepartie de la
nature du soutien accordé à Israël par les États-Unis.
Peut-être a-t-on même fait remarquer à
Netanyahu que Friedman joue au golf avec Obama, et sait
généralement ce dont il parle quand il donne une indication
quant à ses attentes.
Regardons les choses en face, le problème
du développement des colonies, comme le président de l’Autorité
palestinienne, Mahmoud Abbas, l’a dit [au journal télévisé] Mabat (1),
était l’œuvre des Américains. À son arrivée au pouvoir, Obama
insista pour qu’Israël gèle toute construction dans les
implantations, à quoi Abbas répondit : “Comment peut-on
s’attendre à ce que je me contente de moins ?“ Il ne s’agit pas
là de sous-estimer l’exigence d’un gel des implantations ; les
Palestiniens ont assisté à des négociations en cours tandis que
le territoire discuté se réduisait à en être méconnaissable. Il
est clair qu’Israël ne peut être sérieux quant à des pourparlers
de paix tout en persistant à construire sur une terre qui fera
peut-être partie d’un État palestinien.
Le président George W. Bush avait posé la
même demande, et l’avait même inscrite dans la Feuille de Route,
mais j’imagine que nul ne l’avait vraiment pris au sérieux
puisque, après le sommet d’Annapolis en novembre 2007, les
négociations bilatérales directes prirent leur plein essor et se
poursuivirent jusqu’à la fin du gouvernement d’Ehud Olmert.
Israël ne cessa pas un seul jour de construire.
ALORS, QUELLES PERSPECTIVES maintenant ?
Soit Netanyahu accède à la demande/exigence américaine, soit
c’est Abbas qui renonce, ou les États-Unis pourraient bien leur
dire à tous deux : “Vous avez notre numéro ; appelez-nous quand
vous serez sérieux.“ Pour le moment, les Palestiniens examinent
diverses mesures unilatérales. Israël s’affaire à agiter les
menaces de son propre arsenal de mesures unilatérales. Le
gouvernement américain continue de chercher une formule magique
pour ramener les deux parties à la table de négociation.
Je suppose que si Netanyahu et Abbas
avaient la moindre confiance en leur capacité à parvenir à un
accord véritable, ils trouveraient leur propre moyen de revenir
à la table de négociation. Mais il semble qu’aucun des deux ne
croie en la possibilité d’un accord, alors pourquoi mettre leurs
carrières politiques en danger ? La paix devrait leur importer
un peu plus qu’au président des États-Unis. Les raisons de cette
absence d’efforts sur le terrain pour faire avancer le processus
sont incompréhensibles, sachant que ni Israël ni la Palestine
n’ont aucune option stratégique pour le maintien de leur
existence nationale en dehors de la paix.
Qu’est-ce qui empêche Netanyahu de faire à
Abbas une offre qu’il ne pourrait refuser, ou vice-versa ?
Peut-être qu’un grand “point final aux conflit et
revendications” serait trop espérer – mais pourquoi Netanyahu ne
peut-il présenter à Abbas une carte montrant quelles zones au
sein des frontières du 4 juin 1967 (2) Israël est prêt à donner
en échange des blocs d’implantations qu’il souhaite annexer ?
Cela montrerait un sérieux dont on pourrait difficilement faire
fi.
0u pourquoi Abbas ne peut-il présenter
une carte montrant quelles zones les Palestiniens sont prêts à
laisser Israël annexer – Abbas sait certainement que Ramat-Eshkol,
Ha-Guiva ha-Tzarfatith [la “Colline française“] Guilo, Efrat et
d’autres blocs d’implantations ne feront jamais partie d’un État
palestinien. Pourquoi ne dit-il pas à Netanyahu : “Nous
comprenons que ces zones vont faire partie d’Israël –
Qu’êtes-vous prêt à nous donner en échange ? Qu’est-ce qui
empêche Netanyahu de soumettre un plan de sécurité cohérent
joint à un plan de retrait des Territoires permettant la
naissance de l’État palestinien ? Pourquoi Abbas ne peut-il dire
à Netanyahu qu’une fois l’État palestinien fondé et l’occupation
finie, une fois les droits de la minorité nationale
palestinienne garantis au sein d’Israël et une solution trouvée
d’un commun accord à la question des réfugiés, la Palestine
reconnaîtra Israël comme l’Etat nation juif ? Qu’est-ce qui
empêche Netanyahu de dire à Abbas qu’Israël est prêt à soutenir
et parrainer la candidature palestinienne à l’entrée à l’ONU
dans le cadre d’un accord plein et entier sur tous les points du
statut définitif ? Pourquoi Netanyahu et Abbas ne peuvent-ils se
mettre d’accord pour qu’Abbas appelle tous les chefs d’État de
la Ligue Arabe à venir à son invite prier à la mosquée al-Aqsa (3) ?
Pourquoi les deux dirigeants ne peuvent-ils convenir que,
lorsque la paix se fera, chacune des nations aura son ambassade
à Jérusalem, unie dans la paix et capitale des deux États. C’est
la Terre promise. C’est aussi la terre des promesses, habitée
par des peuples de grande promesse.
Les deux peuples continueront à ne récolter
que souffrances s’ils échouent à faire la paix. Nous ne faisons
pas une fleur à Obama en acceptant de négocier. Ce ne sera pas
pour faire plaisir au reste du monde que nous accepterons de
vivre en paix – dans deux États pour deux peuples. Certes, la
paix servira les intérêts du monde et ceux des États-Unis, mais
c’est aux peuples d’Israël et de Palestine qu’en reviendront les
bénéfices majeurs. Aucune des deux sociétés ne réalisera jamais
son vrai potentiel sans mettre fin au conflit. Aucun Premier
ministre israélien ni aucun président palestinien ne pourra
jamais générer la sécurité et la prospérité sans la paix.
Nos peuples ont besoin de dirigeants qui
comprennent qu’ils ne seront pas jugés sur la longueur du sursis
face à l’inévitable, mais sur leur diligence à résoudre le
conflit. Quand ce sera chose faite, Abbas pourra tenir ses
promesses de liberté, d’indépendance et d’affranchissement de
l’occupation.
Netanyahu pourra tenir sa promesse de
voir Israël au nombre des quinze premières nations en termes
de développement économique et social. Israël et la
Palestine se montreront capables de se surpasser et de
proposer un modèle exemplaire de coopération entre d’anciens
ennemis dans leur intérêt mutuel.
Notes
(1)
Mabat (“Regard“),
est le journal télévisé de la première chaîne israélienne. [NdlT].
(2) Les frontières d’Israël à
la veille de la guerre des Six Jours, souvent désignées
comme “la ligne verte”. [idem].
(3) Al-Aqsa, la plus grande
des mosquées de Jérusalem, fut construite au VIIe siècle sur le
Mont du Temple/Esplanade des Mosquées – laquelle est considérée
depuis cette époque comme le 3e lieu saint de l’islam, le
Prophète étant dit y avoir entrepris son ascension vers le
septième ciel. [idem].
Traduction : Tal pour La Paix Maintenant
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