Opinion
Guerre,
désinformation médiatique et
manipulation des droits des gais
L'Atride John Baird, sauver Hélène ou
sacquer Troie ?
Fida
Dakroub
John
Baird, le ministre canadien des Affaires
étrangères
Samedi 12 octobre 2013
Généralités
M. John Baird, grâce à de vieux
discours humanistes bourgeois et à de
vocabulaire philanthropique qui sente le
renfermé, a inventé une nouvelle méthode
pour rendre les personnes gaies au
Canada encore plus adorées qu’elles ne
l’étaient avant le 8 août 2013 [1].
Suivant cette méthode, en effet, un
ministre du cabinet conservateur actuel
présente sur la scène internationale, et
sous la bannière des torys, une nouvelle
pièce théâtrale du genre épique, dont
l’intrigue n’est pas l’ingérence dans
les affaires intérieures des autres pays
– comme vous l’auriez crû —, mais bien
plutôt la protection des droits des
personnes gaies à l’étranger et la
dénonciation des tyrans et des monstres
qui osent les violer ! Autrement dit,
l’Atride John Baird
Voix-Sonore [2] appelle tous les libres
du monde – Argiens, Danaéens et
Achéens [3] - à s’embarquer pour une
nouvelle Iliade, non pour sacquer Troie,
mais bien pour sauver Hélène ! Quelle
audace, quelle grandeur !
Nous conseillons à M. Baird de
prendre un brevet pour son invention :
ce qui pourrait, en tout cas, être d’un
très bon rapport.
Il est à noter que cette
méthode est d’autant plus rentable,
notamment pour les torys, que l’on
guerroie contre la discrimination légale
envers les personnes gaies à
l’extérieur, plus que l’on fait pour
mettre fin à la discrimination sociétale
envers lesdites personnes à l’intérieur.
Elle doit devenir tout particulièrement
rentable, car n’importe quel journal,
n’importe quelle chaîne télévisée, un
National Post, une CBC peuvent, sous
prétexte de violation des droits des
gais en Russie, en Iran ou en Ouganda,
se permettre d’aller plus loin que
l’Atride Baird lui-même – parce qu’ils
possèdent le pouvoir de désinformer les
masses – et appeler au boycottage de la
vodka russe, du tapis persan et de la
danse kigganda. Ainsi, les communautés
gaies du Canada, qui souffrent de
l’inégalité et de la discrimination
sociétales – car le système de valeurs
dominant leur offre une égalité légale,
mais non sociétale – se trouvent
impliquées, côte à côte avec le Parti
conservateur – leur prédateur discursif
et idéologique -, dans une nouvelle
Iliade pour sauver leurs frères et sœurs
outre-mer.
« Toutes ces voix montaient
jusqu’à l’éther, jusqu’à la lumière de
Zeus » [4].
En effet, la méthode de M.
Baird n’est qu’une partie du plan
général du gouvernement tory qui aspire
à jeter de la cendre aux yeux, notamment
en ce qui concerne les droits des
personnes gaies au Canada.
L’Iliade de John Baird
contre la Russie : sauver Hélène ou
sacquer Troie ?
Pendant le mois de chaleur
étouffante de juillet, M. Baird se dit
très inquiet de la répression des droits
des personnes gaies à l’étranger et se
précipita à dénoncer les pays qui les
violaient. A fortiori, monsieur
Baird décrit la loi controversée qui
mettrait un frein au militantisme pour
les droits des homosexuels en Russie
comme étant « haineuse ». Nous parlant,
il dit ces mots qui ont des ailes :
« Cette loi mesquine et odieuse
aura une incidence sur tous les Russes
durant 365 jours, chaque année. C’est
une incitation à l’intolérance, qui
engendre la haine. L’intolérance et la
haine engendrent la violence »,
ajouta-t-il [5].
C’était le 8 juillet 2013
lorsque l’Atride John Baird Voix-Sonore,
soutenu par la parole de Zeus Kronide,
réitéra depuis Rio de Janeiro, au
Brésil, que la défense des droits des
minorités sexuelles, des femmes et des
croyances religieuses faisait partie des
valeurs canadiennes. Or, ces
déclarations courageuses causèrent le
désordre parmi les dieux de l’Olympe. À
preuve, quelques jours plus tard, une
organisation de femmes conservatrices
(REAL Women of Canada), dont les membres
sont dévouées au temple de la déesse
Héra Blanche-Main [6], critiqua
vertement l’Atride, pour s’être porté à
la défense des droits des homosexuels à
l’étranger, et d’avoir outrepassé ses
pouvoirs en « imposant » sa propre
vision des choses à des pays souverains.
En effet, la vice-présidente de
l’organisme, madame Gwendolyn Landolt,
s’en indigna ; elle s’agitait sur son
siège, et le grand Olympe fut secoué.
Elle accusa l’Atride Baird de défendre
des valeurs qui ne sont pas canadiennes,
mais plutôt « les siennes, celles de
militants et d’une élite de gauche
» [7]. Lui parlant, elle dit ces mots
qui ont des ailes : « Pour qui John
Baird se prend-il en utilisant l’argent
des contribuables pour promouvoir
son agenda personnel et imposer des
normes à des pays étrangers ? [8] » ; «
Oh ! la ! la ! Poséidon, puissant Maître
du Séisme ! [9]»
Par le passé, monsieur Baird se
fut aussi prononcé contre la
discrimination et la violence que
subissent les homosexuels en Ouganda,
qui a aussi une loi anti-gaie [10].
Quel bonheur ! Quelle
allégresse ! Ménélas, mon ami,
pourquoi ce souci [11] ?
D’abord, tout en prenant compte
des fondements idéologiques
conservateurs de monsieur Baird, nous
nous charmons à comprendre les
motivations objectives qui se cachent
derrière son ardeur et son enthousiasme.
Pour en faire, nous dessinons les points
d’interrogation suivants :
1. quelles sont les motivations
qui se cachent derrière l’enthousiasme
inexplicable de l’Atride à s’embarquer
pour une telle Iliade ?
2. d’où vient cette inquiétude
incompréhensible de monsieur Baird
envers les droits des personnes gaies en
Russie ?
3. pourquoi la Russie, l’Iran,
le Kenya et l’Ouganda, mais non pas la
Géorgie, l’Arabie saoudite, le Pakistan
et le Rwanda, par exemple ?
4. est-ce que vraiment l’Atride
veut sauver Hélène, comme il essaye de
nous persuader, ou est-ce qu’il veut
sacquer Troie ?
Avant toute chose, les
motivations objectives qui poussent
monsieur Baird à guerroyer pour les
droits des gais en Russie ne
s’expliquent pas dans le contexte du
discours philanthropique de monsieur
Baird lui-même, mais bien plutôt dans le
contexte de la politique générale du
gouvernement Harper qui cherche à jouer,
sur la scène internationale, un rôle
plus « impérial » et à foutre le nez
dans le train des pays souverains.
En premier lieu, monsieur Baird
a ciblé la Russie pour son oppression
des personnes gaies parce qu’il
considère la Russie comme un pays non
ami sur le plan de la politique
étrangère. Il est à noter ici qu’en
Russie la limitation des libertés
desdites personnes est un fait réel, et
nous la condamnons haut et fort. Or,
s’il est vrai que les personnes gaies en
Russie sont victimes de l’oppression et
de la persécution, il est non moins vrai
que lesdites personnes partout dans le
monde souffrent des mêmes conditions, à
l’exception de l’Occident, où les
communautés gaies bénéficient d’une
égalité légale bien établie, mais non
sociétale. Il aurait pu être plus
fructueux, si monsieur Baird avait ciblé
l’Arabie saoudite, par exemple, où les
homosexuels sont condamnés à la peine de
mort, mais monsieur Baird cible
explicitement la Russie.
En second lieu, l’ardeur de
monsieur Baird envers les personnes
gaies en Russie s’explique dans le
contexte de la « Deuxième Guerre froide
» qui se déroule depuis quelques années
entre les pays atlantiques, d’un côté,
et les nouvelles puissances montantes,
telles que la Russie, la Chine et leurs
alliés, de l’autre côté. Il faut noter,
dans ce sens, le rôle que joue
précisément la Russie dans plusieurs «
dossiers chauds » partout dans le monde,
surtout au Moyen-Orient, comme le
nucléaire iranien et la crise syrienne.
La fatwa de Khomeiny
sur les droits des transgenres
Pour ce qui est de l’Iran, il
n’y a pas grand-chose à dire. D’un côté,
l’homosexualité y est prohibée par la
Sharia islamique. De l’autre côté,
l’Iran est le seul pays musulman qui
reconnait les droits sociaux et humains
des personnes transgenres, et leur offre
le service et le support médicaux dont
elles ont besoin. En effet, pendant que
certains gouvernements provinciaux au
Canada refusaient d’assurer la chirurgie
de réattribution sexuelle (CRS) pour les
personnes transgenres, lesdites
personnes en Iran profitaient de fonds
gouvernementaux à presque 90 % pour leur
CRS. Notons qu’avant la révolution
islamique de 1979, le sujet de la
transsexualité en Iran n’eut jamais été
officiellement traité sous le régime du
Shah. Cependant, au début des années
1980 et grâce à une fatwa de l’ayatollah
Khomeiny, les individus transgenres
furent officiellement reconnus par le
gouvernement et autorisés à subir des
opérations chirurgicales afin de changer
de sexe. En plus, en 1963, l’ayatollah
Khomeiny écrit un livre dans lequel il
dit qu’il n’existe aucune restriction
religieuse vis-à-vis de la chirurgie
corrective, pendant que le gouvernement
impérial n’avait aucune politique
précise vis-à-vis des individus
transgenres [12]. Nous mentionnons ici
le grand rôle qu’eut joué Maryam Katoun
Molkara, anciennement un homme connu
sous le prénom de Fereydoun, dans la
lutte pour les droits des personnes
transgenres en Iran. Avant la
révolution, elle voulait devenir une
femme, mais ne pouvait se permettre
l’opération sous le régime du Shah. De
plus, elle souhaitait avoir une
autorisation religieuse. Depuis 1975,
elle écrivait des lettres à l’ayatollah
Khomeiny, alors exilé. Ses
correspondances avec l’ayatollah
devinrent par la suite la fatwa
autorisant de telles opérations en Iran.
La fatwa originelle de Khomeiny fut
depuis confirmée par l’actuel guide
suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali
Khamenei, et est aussi soutenue par de
nombreux membres du clergé iranien. À
titre d’exemple, le hojatol-islam
Kariminia, un membre du clergé de niveau
moyen qui est en faveur des droits des
transgenres, a déclaré qu’il souhaite «
suggérer que le droit des transsexuels à
changer de sexe est un droit de l’homme
» et qu’il essaie « de présenter les
transsexuels aux gens à travers [son]
mon travail et faire disparaitre les
stigmates ou insultes attachés à ces
individus [13] ».
Notons aussi qu’en Iran, une
fois qu’un individu transgenre a changé
de sexe, cette personne devient
légalement une personne de ce sexe. Tous
les documents légaux, comme les actes de
naissance et les passeports sont
modifiés selon l’opération subie.
En dépit de faits ci-devant,
monsieur Baird jouait l’Atride en
attaquant durement l’Iran dans une
assemblée internationale de
parlementaires à Québec, le 22 octobre
2012. S’adressant à 1400 délégués de
l’Union interparlementaires, il dit ses
mots qui ont des ailes : « Le régime
iranien est un exemple troublant
d’intolérance religieuse », a-t-il
lancé [14].
Pour conclure, il suffit de
tracer des parallèles entre la rigueur
de monsieur Baird sur les droits des
minorités en Iran et les liens d’amitié
qui lient les Atrides du cabinet tory
aux rois d’Israël. Pour rappel, le
Canada est engagé dans un bras de fer
avec la République islamique d’Iran,
depuis qu’Ottawa a fermé son ambassade à
Téhéran en septembre 2012. Les
diplomates iraniens furent expulsés du
Canada, et le gouvernement Harper
reprocha au régime iranien de soutenir
les terroristes, de chercher à obtenir
l’arme nucléaire, d’appuyer le
gouvernement syrien de Bachar al-Assad
et de souhaiter la destruction de l’État
d’Israël [15]. Le lecteur l’avait
deviné.
Des évangélistes
américains à la traque des homosexuels
en Ouganda
En ce qui concerne l’Ouganda,
c’est un pays dans lequel il faut
parfois se cacher pour vivre.
L’homosexualité y est punie par la loi :
des photos d’homosexuels sont publiées
dans la presse avec des titres qui
incitent à la violence. Un projet de
loi, écrit en 2009 par un jeune député
de 29 ans, David Bahati, a pour but de
condamner tout homosexuel à la peine de
mort, et toute personne couvrant un
homosexuel d’une peine de 3 ans de
prison.
Or, ils ne sont pas si nombreux
ceux qui savent, surtout parmi les
communautés gaies, que les compagnies
d’exploitation du pétrole ont découvert
récemment des réserves pétrolières dans
ce pays et que sous le parc national de
Murchison Falls, l’une des dernières
grandes réserves naturelles de
l’Ouganda, repose une richesse naturelle
considérable du pétrole. En effet, le
géant pétrolier français Total a
commencé des études pour préparer des
tests sismiques dans le parc national
comme un prélude à une production
pétrolière potentielle. Des rapports
différents estiment les réserves
pétrolières de l’Ouganda de 2, 5
milliards barils de pétrole avec une
spéculation de 6 milliards barils [16],
ce qui pourrait aiguiser l’appétit de
monsieur Baird. À cela s’ajoutent
d’autres points d’interrogation :
1. comment expliquer
l’homophobie dans ce pays ?
2. qui est à l’origine de ce
mouvement ?
3. qui diffuse ces idées dans
la société ougandaise ?
Selon un reportage de Dominique
Mesmin sur la chaîne télévisée France TV
Info, la loi a été écrite en binôme avec
Julius Oyet, chef extrémiste des Born
Again ougandais. Le Born Again est un
mouvement évangéliste, venu des
États-Unis, comptant 9 millions de
fidèles dans le pays, soit un quart de
la population, et dix mille églises.
David Bahati en fait partie, ainsi que
le président Museveni, sa femme et un
tiers des députés [17]. Ainsi qu’en
témoigne Sylvia Tamale, doyenne de droit
de l’université de Kampala, qui
s’insurge contre l’influence des groupes
évangélistes radicaux : « Les
extrémistes américains de droite ne
peuvent pas appliquer leurs idées chez
eux. Ils cherchent des alliés
compatissants dans des pays comme
l’Ouganda » [18]. Or, les extrémistes
évangélistes ne sont pas seuls à la
chasse des homosexuels en Ouganda. À eux
se sont joints les extrémistes
musulmans. Un imam radical de la mosquée
de Kampala appelle explicitement à
traquer les homosexuels et à les tuer
sur place pour que la volonté de Dieu
soit faite [19].
… et des conservatrices
canadiennes à l’exclusion des
transgenres
Parallèlement aux extrémistes
évangélistes qui incitent la haine
contre les homosexuels en Ouganda, une
organisation de femmes conservatrices du
Canada incite aussi la haine contre les
personnes transgenres. Il est question
ici des publications et des points de
presse tenus par les membres de
l’organisation REAL Women of Canada à
propos du projet de loi C-279. Pour
rappel, ledit projet enchâsserait dans
la Loi canadienne sur les droits de la
personne un article protégeant les
droits des transgenres canadiens, et
criminaliserait l’incitation à la haine
ou au génocide sur la base de l’identité
sexuelle. Or, les articles publiés sur
le site Web de ladite organisation ne
cachent ni la haine ni le discours
discriminatoire envers les personnes
transgenres. La preuve en est qu’à
plusieurs reprises, les membres de
ladite organisation amalgamèrent les
individus transgenres avec les
pédophiles et les considérèrent comme
des personnes dont « les activités
sexuelles sont problématiques » [20].
Pour sa part, la vice-présidente de
ladite organisation, Gwen Landolt, donna
l’alarme et avertit les dieux de
l’Olympe du danger pédophile qui se
cachait derrière la reconnaissance des
droits des transgenres. S’adressant à la
déesse Héra Blance-Main, elle dit ces
mots qui ont des ailes :
“It’s all in how the word
‘gender identity’ is defined,” said
Landolt, explaining that “gender
identity” is a catch-all phrase that
could be interpreted by activist
courts to legitimize “any kind of
sexual deviancy (…) this could
include pedophilia, if that’s their
deeply felt experience of gender and
if that’s their sexual
preference” [21].
Par contre, les membres de
l’organisation REAL Women of Canada
savent bien que l’adoption du projet de
loi C-279 pourrait offrir aux personnes
transgenres une protection totale aux
lieux de travail, au réemploi, aux
services publiques et au logement :
« REAL Women of Canada
argues that another major effect of
the bill would be
that “transgendered, transsexual,
and sexually confused individuals
will be given full protection,
re-employment, services, housing,
etc., in public institutions under
federal jurisdiction. These
behaviors will be ‘normalized’,
accepted, and protected [22]».
Pourtant, REAL décide de rester
neutre envers le débat ci-devant tout en
justifiant sa neutralité en insistant
que la protection de la Commission
canadienne des droits de la personne est
suffisante, et que le projet de loi
C-279 n’est pas nécessaire dans ce
sens [23].
Le projet de loi C-279,
une Odyssée houleuse
Pour ce qui est de l’Atride
John Baird, pendant qu’il s’embarque
dans une Iliade pour sauver les droits
des personnes gaies à l’extérieur, il
devient évident que les droits desdites
personnes à l’intérieur errent depuis
longtemps dans une Odyssée de
va-et-vient entre le pays des
Cyclopes [24] - le Sénat – et la mer de
Poséidon [25] - la Chambre des communes.
Le projet de loi C-279 incarne
donc la souffrance des personnes
transgenres canadiennes, leur rappelant
qu’elles ne sont pas à leur place dans
leur pays tant qu’elles ne sont pas
explicitement protégées par la Loi sur
les droits de la personne. Il reste à
dire ici à tous les membres des
communautés LGBT du Canada, qui
applaudissent le ministre John Baird,
que leurs intérêts ne doivent pas se
porter sur un embarquement pour l’Iliade
de l’Atride Baird, mais bien plutôt sur
une sortie de l’Odyssée du projet de loi
C-279. À plus forte raison, il faut que
ledit projet passe pour que les
personnes transgenres aient le même
niveau de protection que celle de la
majorité des Canadiens.
En revanche, pour la quatrième
fois, un simple député présente un
projet de loi d’initiative parlementaire
concernant les droits des personnes
transgenres. La preuve en est qu’avant
C-279, des versions antérieures du
projet de loi furent présentées au cours
des législatures précédentes et sont «
mortes sur le feuilleton » lors de la
dissolution du Parlement et le
déclenchement des élections générales.
La première version, C-392, fut
présentée par Bill Siksay lors de la 38e
législature le 17 mai 2005. Le projet de
loi fut présenté de nouveau sous le
numéro C-326 à la 39e législature, le 19
juin 2006. Aucun de ces deux projets de
loi n’a été débattu. M. Siksay présenta
le projet de loi C-389, le 15 mai 2009.
Il reçut la deuxième lecture et fut
débattu une première fois les 10 mai et
8 juin 2010, et fut adopté par la
Chambre des communes le 8 juin. Il fut
ensuite considéré par le Comité
permanent de la justice et des droits de
la personne de la Chambre des communes
le 2 novembre 2010, qui l’adopta sans
amendement. La Chambre l’adopta à
l’étape du rapport le 8 décembre 2010.
Le débat à la troisième lecture eut lieu
le 7 février 2011, et la Chambre
l’adopta à troisième lecture le 9
février. La première lecture au Sénat
survint le lendemain, mais il est mort
sur le feuilleton le 26 mars 2011 lors
de la dissolution du Parlement. Le
projet de loi C-279 reçut la première
lecture le 21 septembre 2011. Le débat à
deuxième lecture eut lieu le 5 avril et
le 1er juin 2012. Enfin, le 6 juin
2013, le projet de loi C-279 fut adopté
à deuxième lecture à la Chambre des
communes, avec 150 voix pour et 132
contre, et il fut renvoyé au Comité
permanent de la justice et des droits de
la personne.
Cette fois, le C-279 fut adopté
par les parlementaires aux communes ; 18
conservateurs, dont trois ministres, y
accordèrent leur appui. Il fut étudié ce
printemps au comité permanent du Sénat
sur les droits de la personne, et ne fit
pas l’objet d’amendements en dernière
analyse le 11 juin. Mais après cette
date, le projet de loi ne put être mis
au vote pour une troisième lecture
finale au Sénat. Et le projet de loi
pourrait se heurter à un nouvel
obstacle. La sénatrice conservatrice
Nancy Ruth proposa en effet un
amendement, parce qu’elle voudrait que
le sexe fût inclus dans l’article sur
l’incitation à la haine, afin que les
femmes bénéficiassent des mêmes
protections. Si l’amendement de la
sénatrice est adopté, le projet de loi
devrait retourner à la Chambre des
communes pour un nouveau vote sur les
modifications [26].
Pour sa part, la présidente du
comité sénatorial, la libérale Mobina
Jaffer, soupçonne que le gouvernement
conservateur n’est pas pressé d’adopter
la législation :
« Les témoignages que nous
avons entendus de la population
transgenre étaient tout simplement
déchirants, et lorsque j’ai quitté les
audiences de ce comité, je me suis dit
que ce n’était pas le Canada que nous
voulons. (L’adoption de) ce projet de
loi était tout simplement la chose juste
à faire », a-t-elle témoigné [27].
Nous proclamons que l’espace de
la Loi est finalement un lieu interdit
pour les droits des personnes
transgenres. Le Sénat, actuellement
domaine des torys [28], est le seul
chemin de sortie pour que le C-279 soit
un article de la Loi canadienne sur les
droits de la personne. Le Sénat figure
dans ce contexte-ci un domaine
inhospitalier aux droits des personnes
transgenres ; il faut que le C-279 passe
pour que lesdites personnes soient
protégées au moins sur le plan légal ;
nous ne parlons pas ici de la protection
sociétale qui nécessite un changement
intégral du système de valeurs dominant,
ce qui pourrait, en tout cas, être mal
interprété par les prêtres de l’oracle
de Delphes [29].
Somme toute
À la lumière de ce qui précède,
il nous semble que les Atrides du Parti
conservateur, incapables d’établir une
intégration sociétale complète des
personnes gaies à l’intérieur – vu la
nature de l’idéologie conservatrice –
s’embarquent dans une nouvelle Iliade
pour protéger les droits desdites
personnes à travers les sept mers.
Pourtant, pendant que l’Atride John
Baird Voix-Sonore guerroie pour les
droits des personnes gaies devant les
murs de Troie, le glorieux Atride
Stephen Harper, maître du peuple,
s’abstient, comme Achilles, près des
bateaux, et garde le silence à propos du
mariage gai et du projet de loi C-279.
En vérité, M. Stephen Harper ne veut
rien dire, ayant peur que ses paroles
puissent déranger le sommeil profond des
dieux de l’Olympe [30].
En ce qui nous concerne, nous
levons la voix contre toute sorte de
discrimination, de persécution contre
les personnes gaies, que ce soit sur le
plan légal ou sur le plan sociétal. Rien
ne justifie de tels comportements sous
n’importe quelle circonstance.
L’interdiction de la propagande Pride en
Russie, la poursuite judiciaire des gais
en Iran et la peine de mort contre les
homosexuels en Ouganda constituent des
violations réelles des droits de
l’homme, et nous les condamnons haut et
fort.
Il reste à dire que l’Atride
John Baird Voix-Sonore, dans son Iliade
des droits des gais, ne cherche pas à
sauver Hélène, mais bien plutôt à
sacquer Troie. Nous dénonçons haut et
fort la peine de mort qui est une
barbarie, mais nous dénonçons aussi la
falsification d’informations lorsqu’elle
prépare l’opinion publique à la barbarie
de la guerre.
Enfin parla Diomède
Voix-Sonore : « Que personne n’accepte
ni le trésor d’Alexandre, ni même Hélène
; tout le monde sait, même les plus
naïfs, que déjà les Troyens sont aux
limites de la mort. » [31]
Fida Dakroub, P.H.
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fatwa for transsexuals. Consulté le
10 10, 2013, sur Salon: http://www.salon.com/2005/07/28/iran_transsexuals/
There is something peculiar
about the Bill on the Transgendered
(Bill C-279). (2013, 06 06).
Consulté le 10 10, 2013, sur REAL Women
of Canada:http://www.realwomenofcanada.ca/there-is-something-peculiar-about-the-bill-on-the-transgendered-bill-c-279/
Véran, S. (2013, 06 13). La
traque des homosexuels en Ouganda.
Consulté le 10 08, 2013, sur Le Nouvel
Observateur : http://teleobs.nouvelobs.com/la-selection-teleobs/20130612.OBS2937/la-traque-des-homosexuels-en-ouganda.html
Notes
[1] Date
d’une conférence de presse à Rio
de Janeiro, Brésil, pendant
laquelle M. Baird ministre a
cependant réitéré que la défense
des droits des minorités
sexuelles, des femmes et des
croyances religieuses faisait
partie des valeurs canadiennes.
[2] Allusion au personnage
de l’Atride Ménélas Voix-Sonore
dans l’Iliade d’Homère.
[3] Dans l’Iliade d’Homère,
les forces alliées grecques sont
décrites sous différents noms :
« Argiens », « Danaéens » et «
Achéens ».
[4] Homère, l’Iliade,
chant XIII, v. 837.
[6] Dans la mythologie
grecque, Héra ou Héré, fille des
Titans Cronos et Rhéa, est la
sœur et la femme de Zeus. C’est
aussi la sœur de Déméter,
d’Hadès, de Poséidon et
d’Hestia. Elle est la
protectrice de la femme et la
déesse du mariage, gardienne de
la fécondité du couple et des
femmes en couche. Elle est très
jalouse des infidélités de son
mari Zeus.
[9] Homère, l’Iliade,
chant VIII, v. 201.
[11] Homère, l’Iliade,
chant VI, v. 55.
[15] Voir les articles de
l’auteur sur la rupture d’Ottawa
avec Téhéran au CRM.
[24] Les cyclopes forment
une espèce de créatures
fantastiques dans la mythologie
grecque. Ce sont des géants
n’ayant qu’un œil au milieu du
front. Ils tirent leur nom de
leur père, Cyclope, fils
d’Ouranos.
[25] Poséidon est le dieu
des mers et des océans en furie,
ainsi que l’« ébranleur du sol »
— dieu des tremblements de terre
et des sources dans la
mythologie grecque. Les Romains
l’assimilent à Neptune.
[28] Des 105 sénateurs, le
Parti conservateur du Canada en
a présentement 60.
[29] L’oracle de Delphes fut
l’un des plus célèbres oracles
de la Grèce antique. Un rituel
précis était associé à la
consultation de la Pythie qui
rendait l’oracle du dieu
Apollon.
[30] M. Stephen Harper
pourrait proroger le débat
parlementaire sur le projet de
loi C-279. Voir aussi M. Stephen
Harper pourrait proroger le
débat parlementaire sur le
projet de loi C-279. Voir aussi
Baklinski, Ibid.
[31] Homère, l’Iliade,
chant VII, vers 400 – 402.
Docteur en Études
françaises (UWO, 2010), Fida
Dakroub est
écrivain et chercheur,
collaborateur régulier du Centre
de recherche sur la
mondialisation. Elle est
militante pour la paix et les
droits civiques.
Publié sur
Mondialisation.ca
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