Opinion
La démarche
onusienne de l'OLP a tué la
réconciliation interpalestinienne
Fadwa Nassar
Jérusalem,
Porte de Damas
Lundi 19 septembre
2011 De plus en plus de
voix palestiniennes s’élèvent contre
la démarche diplomatique de l’OLP et
de l’Autorité en vue de la
reconnaissance par l’ONU de l’Etat
de la Palestine, sur une partie de
la patrie occupée par les sionistes.
Différents arguments, politiques et
juridiques notamment, sont mis en
avant pour refuser et dénoncer cette
initiative venue des cercles
dirigeants de l’Autorité. Les
communiqués de personnalités,
d’associations et de mouvements, des
partis et organisations, insistent
sur un ou plusieurs arguments pour
rejeter en bloc l’initiative de
l’Autorité, l’accusant surtout
d’avoir abandonné en route les
principales revendications
palestiniennes, que sont la
libération de la Palestine et le
droit au retour des réfugiés mais
l’accusant aussi de manque de
transparence quant à la finalité de
la démarche : un Etat palestinien,
pour quoi faire ? Il reste cependant
un aspect des plus graves dans cette
démarche, celle d’avoir mis de côté
ou même tué le processus de la
réconciliation interpalestinienne,
mesure qui reste jusqu’à l’heure
présente une nécessité de la plus
haute importance pour faire face aux
sionistes et à leurs institutions
diverses, sécuritaires et
populaires. La situation dans la
ville d’al-Qods, menacée de
judaïsation et de nettoyage
ethnico-religieux, laisse craindre
le pire, si la réconciliation
interpalestinienne sur des bases
saines et claires n’est pas adoptée.
Il en est de même en Cisjordanie, où
les colons, bras exécutifs de
l’institution sioniste, sévissent
sans aucune retenue contre les
Palestiniens, et il en est de même
pour la bande de Gaza, pour les
Palestiniens de 48 et les
Palestiniens en exil, qui vivent
amèrement cet état de division dans
la société
palestinienne. Avant de se diriger
à l’ONU, le président Abbas a voulu
unifier les rangs palestiniens,
autour de sa démarche. Ce furent les
grandes déclarations amicales, les
diverses mesures prises par le
représentant du Fateh en faveur de
la réconciliation, les embrassades
lors du show du Caire avec des tas
de promesses et même un calendrier
fixé pour unifier le peuple
palestinien, non pas autour de la
démarche onusienne, mais pour
affronter les mesures sionistes sur
le terrain mais également
l’organisation de la vie politique
(élections entre autres) dans les
territoires de l’Autorité. Ce show
du Caire fut placé sous l’égide des
révolutions arabes, notamment celle
du peuple égyptien qui venait de
renverser Hosni Moubarak, défenseur
invétéré de la division
interpalestinienne. Les cercles de
Mahmoud Abbas ont réussi à utiliser
le show du Caire pour masquer leur
indigence politique, maintenir leur
démarche onusienne dans le flou le
plus total, empêchant du coup les
principaux intéressés, les
Palestiniens, de comprendre le
véritable enjeu : pendant plusieurs
mois, la direction de l’Autorité a
joué sur le refus américano-sioniste
de la démarche pour se présenter
comme un défenseur des droits
inaliénables du peuple palestinien.
Les déclarations des « onusiens » se
sont suivis sans se ressembler et
ils furent souvent contradictoires :
pourquoi se dirige-t-on à l’ONU et
qu’est-ce qui changera sur le
terrain ? Quelles sont les
compromissions faites ou à faire ?
De quel Etat parle-t-on au juste ? L’erreur des
organisations palestiniennes
hostiles à la démarche fut de donner
carte blanche à Mahmoud Abbas, lors
du show du Caire, sans contrepartie.
Même si la libération des résistants
et de leurs familles détenus dans
les geôles de l’Autorité figure en
bonne place dans les pourparlers
interpalestiniens, rien ne fut fait
à ce niveau, hormis les quelques
libérations qui ont eu lieu à
l’occasion de la fête qui a suivi le
mois de ramadan. Même à ce niveau,
les services sécuritaires de
l’Autorité de Ramallah n’ont pas
flanché : libérer quelques
responsables du Hamas à l’occasion de
la fête ne signifie pas
nécessairement une reconnaissance du
devoir de les libérer, ce ne fut
qu’une mesure de
« grâce présidentielle ». Alors que
les forces palestiniennes de la
résistance exigeaient la fin de la
coordination sécuritaire avec
l’occupant, celle-ci ne s’est jamais
arrêtée et les résistants et leurs
familles continuent à être
poursuivis, soit par les sionistes,
soit par l’Autorité. Le cas du
dirigeant du Jihad islamique, Bassam
Saadi, est plus qu’éloquent. Détenu
pendant presque dix ans par les
sionistes, il est libéré en début
d’année. Il est arrêté de nouveau,
avec plusieurs personnalités
politiques, dont Hussam Khadr, dès
l’annonce de l’entente
palestinienne. Mais les services
sécuritaires de l’Autorité font le
« sale boulot » en menaçant sa
famille et récemment, en arrêtant
Mahmoud Saadi, dirigeant du Jihad
islamique dans le camp de Jénine, et
proche parent de Bassam Saadi. Les
sionistes et les services
sécuritaires de l’Autorité
palestinienne continuent à se
partager la tâche de poursuivre les
résistants, ceux qui s’opposent à
l’occupation et agissent dans ce
sens. Au-delà de la
coordination sécuritaire des
services de Abbas-Fayyad avec les
sionistes, terme radouci pour parler
d’une collaboration de fait avec
l’ennemi, il ne semble pas que
l’Autorité de Ramallah ait conçu
quoi que ce soit pour s’opposer aux
hordes des colons agités par
l’institution sioniste, pour
protéger la population palestinienne
menacée dans son existence même et
pour permettre aux maqdisis de
résister à la judaïsation de leur
ville, de même qu’il ne semble pas
qu’il y ait des mesures concrètes
pour mettre fin au blocus illégal
contre Gaza, ni pour participer à la
campagne de délégitimation de l’Etat
sioniste, toutes mesures concrètes
qui donneraient vie à une
réconciliation palestinienne,
demeurée creuse jusqu’à présent. Ce n’est que
plusieurs mois après que Mahmoud
Abbas soit parvenu à utiliser leur
carte blanche pour ses manœuvres
douteuses, que plusieurs
organisations palestiniennes
insérées dans la lutte de
libération, commencent à douter,
puis à dénoncer la démarche
onusienne. Il y a probablement le
manque de transparence de
l’Autorité, au départ, mais il y a
surtout un manque de stratégie
politique, ce qu’a d’ailleurs
dénoncé le dernier rapport de
l’Institution Internationale d’Al-Quds,
qui a mis en cause l’incapacité des
organisations palestiniennes à
développer une stratégie de lutte
pour préserver l’arabité de la ville
d’al-Qods et protéger sa population.
Celles-ci ont plus ou moins béni,
lors du show du Caire, la démarche
onusienne, sans savoir de quoi il
s’agissait, se contentant du langage
rassurant de l’Autorité. Le
programme politique qu’elles avaient
proposé à la discussion pour sceller
l’entente palestinienne est resté
entre les mains d’une commission,
encore une autre, alors que sur le
terrain, elles ne font que riposter,
au coup par coup, aux déclarations
de l’équipe « onusienne ». Il est vrai que les
organisations palestiniennes ont
longtemps hésité à réagir, de
crainte de se voir accusées par les
responsables de l’Autorité et de
leurs fidèles de « faire le jeu de
l’ennemi », d’autant plus qu’elles
n’avaient pas réalisé tous les
enjeux cachés de cette démarche.
Mais à présent, alors que les
Palestiniens sont en majorité
mobilisés en faveur de cette
« reconnaissance » ou plutôt, c’est
ce que les médias veulent laisser
croire, les communiqués et les
déclarations, tout comme les
articles et les études, à ce propos,
laissent perplexes. Pourquoi avoir
tant attendu ? Et pourquoi rester
dans la réaction à la démarche
onusienne et ne pas mettre en place
un plan de bataille, collectif et de
masse, pour protéger al-Qods et la
Cisjordanie, briser le blocus contre
Gaza, empêcher la colonisation d’al-Naqab,
libérer les prisonniers
palestiniens, faire valoir les
droits inaliénables des réfugiés, en
attendant la bataille pour la
libération de la Palestine ?
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