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Opinion
Al-Quds: la mobilisation populaire empêche
la déportation des personnalités palestiniennes
Fadwa Nassar
Louisa Morganti
rencontre les députés palestiniens - Photo: CPI
Jeudi 15 juillet 2010
http://french.moqawama.org/...
En une dizaine de jours, les députés et l’ancien ministre
palestiniens qui se sont réfugiés dans les locaux de la
Croix-Rouge Internationale dans la ville d’al-Quds sont parvenus
à rassembler autour d’eux, de larges secteurs du peuple
palestinien, en Palestine occupée ou dans l’exil. La solidarité
avec les députés Ahmad Attoun, Muhammad Tawtah, Muhammad Abou
Tayr et l’ancien ministre Khaled Abou Arfeh s’est élargie
au-delà de la Palestine, avec les délégations étrangères qui
visitent quotidiennement la tente montée dans les locaux de la
Croix-Rouge (parlementaires européens, personnalités politiques)
ou qui se mobilisent dans les capitales arabes (Damas), ou
dénoncent dans leurs pays les mesures israéliennes à l’encontre
de la population maqdisie et plus précisément ses dirigeants
politiques.
Les députés de la ville d’al-Quds, Ahmad Attoun, Muhammad Tawtah,
Muhammad Abu Tayr et l’ancien ministre, l’ingénieur Khaled Abou
Arfeh avaient été kidnappés par l’occupant lors de la rafle
ayant visé les députés et ministres du Hamas, en 2007, en vue de
décapiter la classe politique palestinienne élue sur un
programme de lutte et de résistance à l’occupation. Sitôt
libérés de prison, les quatre personnalités reçoivent l’avis de
déportation, l’occupant leur fixant un mois pour se préparer à
abandonner leur ville, avec leurs familles. Ayant été libéré le
premier, le député Abu Tayr refuse sa déportation et se réfugie
dans sa propre maison, mais les forces de l’occupation
l’envahissent et le kidnappent une fois encore pour le mettre en
prison. Il est enfermé actuellement dans la prison de Moskobiyyé
et à chaque comparution devant le tribunal, les sionistes
exercent leur chantage habituel, le dernier étant de le libérer
s’il accepte le principe de sa déportation: pour revenir dans sa
ville natale, il devrait obtenir un permis délivré par les
autorités de l’occupation. C’est l’une des conditions effrontées
que le tribunal sioniste a proposées à Sheikh Abou Tayr, les
autres étant de lui retirer sa carte de résidence et le paiement
d’une importante somme d’argent, qui serait une garantie contre
son retour à al-Quds, sans autorisation. Le député maqdisi a
bien évidemment refusé car le permis délivré est en lui-même une
reconnaissance du droit d’"Israël" à la déportation. L’attitude
ferme du député Abu Tayr, qui ne reconnaît aucun droit
d’"Israël" sur la ville sainte d’al-Quds, dans sa partie
orientale ou occidentale, ni sur sa population millénaire, n’est
qu’un pas de plus dans la voie de la résistance adoptée par le
peuple palestinien depuis l’occupation britannique de la
Palestine, en 1920.
Quant aux deux autres députés, Ahmad Attoun et Muhammad Tawtah,
et l’ancien ministre Khaled Abou Arfeh, pour éviter leur
arrestation à l’instar du député Abu Tayr, lorsque l’échéance de
leur déportation s’est approchée, ils ont décidé de se réfugier
dans les locaux de la Croix-Rouge, à al-Quds, après que les
locaux de l’ONU leur aient été refusés, dévoilant une fois de
plus l’inefficacité sinon la collaboration de l’ONU avec
l’occupant.
Ce n’est pas la première fois que l’arme de la déportation est
utilisée par l’occupation sioniste, comme elle l’a été par
l’occupant britannique au temps du mandat, entre 1920 et 1948.
Les dirigeants palestiniens à l’époque avaient été déportés vers
les pays arabes et même la colonie britannique Malte, comme
l’honorable et regretté hajj Amine al-Hussaynî, le mufti d’al-Quds
et l’honorable martyr Abdel Qader al-Hussaynî, tombé en
défendant le village d’al-Qastal, aux portes d’al-Quds, en 1948.
Des centaines de dirigeants, personnalités et militants
palestiniens ont été déportés par les autorités sionistes,
depuis l’occupation de la Palestine en 1948, pour ne pas parler
de l’expulsion massive, brutale et criminelle de plusieurs
centaines de milliers de Palestiniens, en 1947-48, constituant
la Nakba.
La déportation des militants et combattants de la liberté est
une vieille arme utilisée par tous les colonialistes et
impérialistes dans le monde. La France l’a utilisée contre les
militants, même français, qui se battaient pour la liberté à
l’intérieur de ses propres frontières, comme elle l’a utilisée
contre les militants et dirigeants des pays qu’elle avait
colonisés. Mais pour "Israël", entité coloniale usurpatrice d’un
pays en entier, la déportation fait partie d’un ensemble de
mesures visant à poursuivre l’épuration ethnico-religieuse du
pays qu’il a occupé.
Lorsque les sionistes ont envahi la Palestine avant 1948, par
vagues successives, avec l’approbation directe de la
Grande-Bretagne, puis instauré leur Etat sur les ¾ du pays, ils
ont procédé méthodiquement à déporter toute la direction
palestinienne politique, religieuse, intellectuelle et
économique des villes côtières, Haïfa, Yafa et Akka, ainsi que
Beer Saba’, aux portes du Naqab, en vue de décapiter la société
palestinienne. En occupant la Cisjordanie et Gaza, y compris la
partie orientale d’al-Quds, en 1967, ils ont procédé de la même
manière. Il ne s’agissait pas seulement d’étouffer toute
revendication politique, mais d’empêcher toute possibilité de
survie pour les masses palestiniennes décapitées. Il a fallu
plusieurs années, malgré le pouvoir militaire instauré dans les
régions demeurées arabes, pour que la société palestinienne
trouve à nouveau ses repères dans l’entité sioniste, sa volonté
étant plus puissante et ses racines plus profondes et plus
coriaces que celles des envahisseurs.
La politique de déportation des Palestiniens n’est pas, pour les
sionistes, une simple mesure pour étouffer les revendications
politiques, mais une politique systématique pour faciliter
l’expulsion des Palestiniens de leur pays et procéder au
nettoyage ethnico-religieux qu’ils ont envisagé dès le début de
leur projet colonial. Outre les quatre députés et l’ancien
ministre, que les autorités de l’occupation menacent
aujourd’hui, il existe une liste de trois cent personnalités
maqdisies faisant partie de l’encadrement politique, culturel,
associatif, économique de la société palestinienne d’al-Quds,
toutes menacées de déportation, sans compter toutes les
personnalités qui ont été interdites de retourner dans leur
ville, qui vivent un exil forcé, victimes de lois qu’"Israël" a
promulguées pour les éloigner de leur pays, voulant se donner
des airs de légalité aux yeux d’une communauté internationale
complice, aveugle ou borgne.
Comme pour Yafa et Beer Saba’, en 1948, "Israël" entreprend
aujourd’hui le même nettoyage ethnico-religieux dans la ville
d’al-Quds. Il pourchasse sa population palestinienne, en
arrêtant et déportant, il détruit les maisons, il rase des
quartiers entiers, il souhaite effacer l’histoire, le présent et
l’avenir de la capitale palestinienne. Il planifie la
construction des colonies et l’extension de celles qui étouffent
déjà la ville et souhaite importer plus d’un million de juifs
pour remplacer les Palestiniens, ayant proclamé unilatéralement
que la ville palestinienne, arabo-musulmane d’al-Quds, serait
une ville juive, et de surplus, capitale de l’entité coloniale.
Mais c’est sans compter sur la volonté et la résistance du
peuple palestinien.
Même si Obama se plie devant Netanyahu, même si des responsables
palestiniens, genre Mahmoud Abbas, Ahmad Qray’ et Salam Fayyad,
devenus ou ayant toujours été des marionnettes entre les mains
des impérialistes, rencontrent les dirigeants sionistes ou
poursuivent des négociations, directes ou indirectes avec eux,
même si les services sécuritaires palestiniens de l’Autorité de
Ramallah sont loués par les dirigeants sionistes pour leur rôle
collaborateur contre la résistance et les résistants, l’état
sioniste semble être dans l’impasse face au formidable élan de
solidarité envers les personnalités menacées de déportation qui
se sont réfugiées dans les locaux de la Croix-Rouge. La police
sioniste et les garde-frontières menacent: ils encerclent le
siège de la Croix-Rouge, ils provoquent les familles des
personnalités, comme ils l’ont fait en pénétrant de force dans
la maison du député Attoun pour intimider et effrayer sa
famille, ils prolongent la détention de Muhammad Abu Tayr, de
jour en jour, ils arrêtent le frère du député Tawtah et des
députés du Fateh venus apporter leur soutien, avant de les
relâcher, sans pouvoir cependant mettre un frein à la
solidarité.
Ce nouvel épisode de la résistance populaire menée dans la ville
d’al-Quds se situe à l’intersection de deux batailles, au moins
: l’une contre la déportation des Palestiniens après le vote de
la loi 1650 par l’organe législatif sioniste, la Knesset, il y a
quelques mois, et notamment la déportation des prisonniers, dont
300 sont actuellement menacés. L’autre concerne le maintien du
caractère arabe et palestinien d’al-Quds. Bien que toutes les
mesures et lois prises par les sionistes sont illégales,
contraires au droit international et à toutes les législations
internationales et résolutions de l’ONU, il semble peu probable
que ce qui est désigné par « communauté internationale »
réagisse, comme elle nous a habitués, à commencer par l’ONU
elle-même, devenue une officine soumise aux Etats-Unis et au
sionisme. Les quelques protestations verbales ne changeront pas
la situation, "Israël" étant habitué à les jeter à la poubelle,
sans être inquiété pour autant. C’est, comme le disait récemment
un responsable de la coalition pour la défense d’al-Quds,
Muhammad Jadallah, sur la population maqdisie d’abord qu’il faut
compter pour faire reculer l’occupant, avec la participation des
Palestiniens de 48. Bien qu’extrêmement critique, la nouvelle
bataille autour d’al-Quds se présente avec des atouts entre les
mains des Palestiniens, le premier étant le visage hideux de
l’occupation et ensuite, la faible emprise de l’Autorité de
Ramallah sur la population maqdisie. Aujourd’hui, le visage
hideux de l’occupation se présente sous la forme des colons qui
s’abattent tels des vautours sur la ville sainte, des policiers
et garde-frontières sur-armés qui n’hésitent pas à tuer des
civils désarmés, des politiciens qui font la surenchère à qui
supprimera le mieux et le plus de Palestiniens, dont la dernière
trouvaille consiste à exiger l’adhésion des Palestiniens à leur
propre suppression. N’est-ce pas ainsi qu’il faut comprendre la
dernière déclaration de Lieberman, proposant l’équation « la
terre et la population en contrepartie de la paix », ou alors
l’exigence de prêter allégeance à l’occupation pour demeurer
dans al-Quds, comme cela a été formulé contre les personnalités
menacées de déportation ? Comme les Palestiniens de 48, les
Palestiniens d’al-Quds sont en train de forger leur propre
cohésion face aux menaces qui les guette, loin des calculs de
l’Autorité, la collaboration de ses services de sécurité avec
l’occupant et de ses appareils viciés et corrompus. L’attitude
exemplaire et unitaire de Hatem Abdel-Qader, responsable du
Fateh dans la ville d’al-Quds, est une invitation à tous ceux
qui, parmi les Palestiniens, ont été trompés par le passé du
Fateh, à se retrouver aux côtés de ceux qui résistent à
l’occupation et aux projets liquidateurs américains, européens,
arabes ou onusiens, de la question palestinienne.
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