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Opinion
La politique
étrangère européenne envers la question palestinienne
Reportage: Fadwa Nassar
Lundi 8 novembre 2010
C’est le titre de la conférence s’étalant sur deux journées que
le centre d’études et de consultation Zaytuna a organisé à
Beyrouth, les 3 et 4 novembre, avec la participation de nombreux
chercheurs venus d’environ vingt pays.
En 6 séances regroupées en thèmes principaux, cette conférence,
fort variée et diversifiée, est parvenue à permettre l’échange
sur certains aspects de cette politique étrangère et d’en
souligner quelques traits.
Trois remarques préliminaires ont été indiscutablement
approuvées :
1 - la politique étrangère européenne ne concerne pas uniquement
celle de l’Union européenne, mais la dépasse parfois pour
prendre en compte les politiques particulières d’Etats européens
ayant exercé un rôle prépondérant dans la région, comme la
Grande-Bretagne ou la France.
2- L’Europe et notamment certains de ses Etats sont pleinement
responsables de la tragédie palestinienne. Elle a un devoir
moral et politique envers le peuple palestinien qu’elle n’a pas
encore assumé.
3- La politique européenne est devenue de plus en plus
dépendante de celle des Etats-Unis, notamment depuis les années
90. Il n’y a pratiquement plus de politique européenne
indépendante dans la région, et notamment en Palestine. Mais
l’Europe est restée active en tant que financeur de la politique
américaine.
Concernant les bases et les motivations de la politique
européenne, des études ont mis en avant le poids de l’histoire
européenne pour expliquer pourquoi l’Europe a fondé et aidé
l’Etat sioniste. Mais l’histoire ne peut continuer à expliquer
les différentes étapes de la politique européenne envers le
conflit arabo-israélien. D’autres éléments entrent en jeu pour
expliquer l’alignement européen sur la politique
américano-sioniste, notamment la disparition du rôle arabe sur
la scène internationale. Il faut noter le rôle relativement
positif de l’Europe dans les années 70 avant d’être
progressivement écartée après les accords d’Oslo. Depuis
l’Intifada al-Aqsa, en 2000, l’Europe s’est largement engagée
aux côtés de l’agression sioniste contre le peuple palestinien
au moment où les peuples européens se démarquent de plus en plus
de la politique de leurs gouvernements, lançant même les mots
d’ordre de boycott de l’Etat sioniste. Le rôle des musulmans et
des Arabes n’est pas étranger à cette prise de conscience,
d’autant plus qu’ils appartiennent désormais au tissu social
européen. Mais la question qui se pose est de savoir si les
publics européens peuvent exercer une influence sur la politique
étrangère de leurs Etats ?
Lors de la première journée, la conférence a plutôt examiné la
politique européenne envers l’Etat sioniste. Une étude
économique a mis en relief le poids de l’aide économique
européenne dans la fondation et l’installation de la colonie
sioniste sur la terre de Palestine, notamment dans son aspect
productif, à travers les brevets d’invention et le secteur de la
recherche. Une autre étude a été consacrée aux relations
sécuritaires et militaires entre l’Europe et l’Etat sioniste et
leur influence sur les relations politiques. Le rôle du lobby
sioniste sur la politique européenne a également été étudié,
d’autant qu’il exerce un rôle puissant, même avant la création
de l’Etat sioniste.
La seconde journée a été consacrée à l’étude de la politique
européenne envers la Palestine, que ce soit l’Autorité
palestinienne de Ramallah ou les mouvements de la résistance,
comme le Hamas. Personne n’ignore le rôle économique de l’Europe
qui finance les institutions de l’Autorité palestinienne, mais
ce rôle prend des aspects dramatiques en finançant l’institution
sécuritaire, entièrement placée sous la direction
américano-sioniste. Ces forces sécuritaires palestiniennes, qui
jouent de plus en plus un rôle de répression envers la
résistance et tout mouvement de contestation palestinien, sont
considérées comme devant protéger l’Etat sioniste et non pas
protéger la société palestinienne. Au lieu de construire l’Etat
palestinien, le financement européen des forces sécuritaires
contribue plutôt à consolider l’Etat sioniste et à démanteler
toute structure sociale palestinienne.
Concernant la résistance, malgré l’ouverture politique de
quelques pays européens envers Hamas, les élections législatives
de 2006 ont fourni l’occasion à ces Etats de revenir à une
politique plutôt alignée sur les sionistes, puisqu’ils réclament
que Hamas accepte les conditions du Quartet, qui sont très
éloignées des constantes palestiniennes qui l’ont hissé au
pouvoir. Le siège inhumain et la guerre sanglante contre Gaza en
2008-2009 n’ont pas modifié cette politique pro-sioniste puisque
les Européens mettent sur le même plan le bourreau et la
victime.
C’est uniquement au niveau des peuples européens que les
changements sont visibles. De plus en plus, ils prennent
conscience de l’injustice historique qui a été faite, par leurs
propres gouvernements, envers le peuple palestinien. Si cette
prise de conscience est inégale, cependant, elle se généralise
dans la plupart des pays européens, et notamment là où les
communautés arabo-musulmanes agissent pour faire connaître la
cause palestinienne : il n’est pas étonnant de voir le rôle
grandissant de ces communautés, notamment des Palestiniens
d’Europe, dans la mobilisation pour lever le siège inhumain
contre Gaza. Même si les peuples européens ne parviennent pas à
faire changer la politique étrangère de leurs pays envers la
question palestinienne, ils sont cependant parvenus à susciter
des crises en portant plainte auprès des tribunaux européens
contre les responsables sionistes des massacres, interdisant à
ces responsables de pouvoir se déplacer librement. La menace
d’arrestation de plusieurs criminels sionistes en
Grande-Bretagne est au centre des discussions britanno-sionistes
ces derniers temps. De même, les sionistes dans certains pays
comme la France s’élèvent et accusent devant les tribunaux ceux
qui réclament le boycott de l’Etat raciste « d’Israël ».
L’offensive sioniste soutenue par le gouvernement français a
plutôt généralisé la mobilisation au lieu de l’affaiblir.
Il reste finalement à conclure que la politique étrangère
européenne est loin d’être équitable et qu’elle devra faire du
chemin pour admettre l’injustice que l’Europe a installée dans
la région, que ce soit par le plan de partage de la région, lors
des accords de Sykes-Picot, lors de la déclaration du
britannique Balfour, ou lors du vote injuste de l’ONU sur le
partage de la Palestine. Depuis cette date, malgré quelques
efforts à cause de la montée de la résistance, l’Europe a
conservé une politique fondamentalement coloniale.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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