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Opinion
Prisonniers
palestiniens lourdement condamnés:
la vengeance des tribunaux sionistes
Fadwa Nassar
Lundi 6 décembre 2010
Avant les années 90, les condamnations à perpétuité par les
tribunaux militaires de l’occupation étaient relativement moins
fréquentes qu’à présent. Non pas que les actes de résistance
étaient moins importants ou moins violents, mais parce que les
tribunaux sionistes essayaient encore, à cette époque, de
montrer qu’ils se souciaient quelque peu des normes
internationales lorsqu’ils se réunissaient et prononçaient leurs
condamnations. Déjà à cette époque, ces cours militaires, où
ceux qui présidaient n’étaient que des criminels passés à la
retraite, n’appliquaient pas les normes internationales de
justice, d’abord parce qu’elles n’ont jamais considéré les
prisonniers de la résistance comme étant des prisonniers de
guerre. Ne reconnaissant pas le peuple palestinien, ni le fait
qu’eux-mêmes occupent la Palestine, les sionistes ont instauré
leurs tribunaux militaires sur la base qu’il s’agit d’actes de «
violence » contre l’institution sioniste et sa population.
Malgré cette première faille dans le droit international, les
tribunaux avaient prononcé quelques condamnations à perpétuité
mais ne se privaient pas de prononcer des peines pouvant aller
jusqu’à 30 ou 40 années de prison.
Dès le début des années 90, et surtout avec l’Intifada al-Aqsa
déclenchée en septembre 2000 et le feu vert américain consistant
à considérer tout résistant comme un « terroriste »,
l’occupation va rejeter toute parodie de justice et ne plus
faire dans les détails : désormais, les résistants sont
allègrement condamnés à une ou plusieurs perpétuités, jusqu’à 67
perpétuités, comme la peine prononcée contre le prisonnier de
Jordanie, Abdallah Barghouty.
Une cour militaire où siègent des officiers criminels à la
retraite dont le seul désir est de se venger et de d’humilier,
parce qu’un peuple ose braver leur occupation. C’est la parodie
de « justice israélienne ». Mener une opération de la
résistance, la concevoir, la préparer ou bien même la désirer,
la rêver, en parler, deviennent des actes « criminels » et «
terroristes » aux yeux de l’occupant, qui lance ses troupes,
arrête, brutalise, interroge et torture, avant de jeter en
prison, avec des condamnations démesurées, juste pour épouvanter
et dissuader.
Parmi les 5000 prisonniers ayant été jugés par les tribunaux,
820 prisonniers ont été condamnés à la prison à vie et la
perpétuité, une ou plusieurs fois, d’après les statistiques du
mois de novembre 2010. Parmi eux, figurent cinq résistantes :
Ahlam Tamimi, de Ramallah, arrêtée le 14 septembre 2001,
condamnée à 16 perpétuités ; Sana’ Shehadé de la ville occupée
d’al-Qods, arrêtée le 25 mai 2002, est condamnée à 3 perpétuités
+ 31 ans, Qahira Saadi, de Jénine, arrêtée le 8 mai 2003,
condamnée à trois perpétuités, Du’â’ Jayyousi, de Tulkarm,
arrêtée le 7 juin 2002, condamnée à trois perpétuités et la
prisonnière Amina Jawad Muna, de Ramallah, arrêtée le 29 janvier
2001, condamnée à une perpétuité et qui est la plus ancienne
prisonnière.
Qui sont ces prisonniers, ces résistants qui ont osé affronter
l’occupation, en concevant, préparant, se préparant ou menant
des opérations armées contre la plus criminelle des occupations
dans le monde ? Qui sont ces prisonniers réclamés par la
résistance pour faire partie de de l’opération d’échange en
contrepartie du soldat sioniste capturé à Gaza en juin 2006 ?
Parmi les prisonniers palestiniens condamnés à perpétuité avant
l’Intifada al-Aqsa, se trouve le combattant Abdel Hadi Ghnaym,
originaire du camp de Nusayrat, dans la bande de Gaza. Le 6
juillet 1989, il monte dans le bus israélien n°405 se dirigeant
vers la ville occupée d’al-Qods, il maîtrise le véhicule et
l’entraîne dans une vallée. 16 Israéliens sont tués et des
dizaines sont blessés. Abdel Hadi a aujourd’hui 45 ans, il est
marié et son premier et seul fils Thaer, est né le jour même où
il menait son opération. Après avoir été longtemps torturé,
alors qu’il était blessé, pendant l’interrogatoire, il a été
condamné à 16 perpétuités et 480 années de prison, ce qui
équivaut, d’après les calculs dans les prisons sionistes, à 2064
années de prison ! Il devrait « être libéré » en l’an 4053…. Au
cours de son emprisonnement, qui dure depuis 21 ans, Abddel Hadi
a passé trois ans en isolement dans la prison de Ramleh, puisa
été transféré vers d’autres prisons, Ascalan, Eishel à Beer
Saba’, toujours dans des cellules isolées, pour un total de dix
ans d’isolement.
Le 6 juillet, Abdel Hadi a entamé sa 22ème année de prison. Il
fait partie des 40 noms que l’institution sioniste a refusé de
rendre en contrepartie du soldat sioniste, comme il a refusé la
libération de Ahlam Tamimi, Hassan Salameh, Na’il Barghouty,
Sami Jaradat, Amjad Ubaydu et Abdallah Barghouty, entre autres.
Le combattant Salameh Abdallah Muslih a été arrêté le 9 octobre
1993 et sa maison démolie. Il est né le 20 juillet 1969 à Beer
Saba’, et il est détenu dans la prison de Nafha, dans le désert
du Naqab. Il a été condamné à la perpétuité, accusé d’avoir tué
un colon dans la colonie Petah Tikva, en Palestine occupée en
48. Salameh avait vécu le massacre d’ouvriers palestiniens
à Uyun Qara, perpétré par un colon, le 20 mai 1990 : sept
ouvriers palestiniens avaient été froidement massacrés par le
colon Ami Buber. Il a alors mené une opération contre l’occupant
pour venger leur martyre.
Le combattant Tayseer Bardini a été arrêté le 29 novembre 1993
et condamné à la perpétuité. Il est né à Rafah, au sud de la
Palestine, en décembre 1969 et a assisté, enfant, à la
résistance armée et populaire contre l’occupant dans la bande de
Gaza. En 1986, il rejoint le mouvement de jeunesse du Fateh et
fut l’un de ses principaux animateurs dans l’école secondaire
Beer Saba’. Au cours de la première intifada, il participe
activement et est blessé plusieurs fois. Il a été arrêté
plusieurs fois entre 1987 et 1988. La seconde fois, il est
emprisonné pendant 9 mois dans la prison du Naqab. En 1990, il
poursuit ses études à la faculté des sciences et des
technologies et devient le responsable de la coordination de la
branche des Panthères Noires (Fuhud Soud) à Rafah. En 1991, il
est arrêté et interrogé sous la torture pendant 5 mois, sans
aucune reconnaissance de sa responsabilité au sein des comités
populaires. En 1992 et 1993, il est poursuivi par les forces de
l’occupation, accusé d’avoir tué un colon. Tayseer était
nettement opposé à la ligne du règlement et des négociations. Il
a poursuivi sa résistance militaire contre les forces de
l’occupation. Le 29 novembre 1993, suite à une bataille qui a
duré sept heures d’affilée avec l’occupation, où trois soldats
sionistes ont été blessés, Tayseer, blessé, se rend après avoir
épuisé ses munitions. Il a poursuivi ses études en prison en
s’inscrivant à l’université hébraïque libre (la seule autorisée
par l’occupant) en sciences politiques et économie. Il a été
placé pendant sept ans et demi en isolement sur les 19 ans
d’incarcération jusque là. Depuis, l’autorité carcérale le
déplace d’une prison à une autre, sans cependant parvenir à le
déstabiliser puisqu’il participe au mouvement national des
prisonniers et aux efforts de réconciliation entre les
organisations palestiniennes de la résistance sur des bases de
lutte.
Parmi les prisonniers d’al-Qods, 73 combattants, dont 27 avant
l’Intifada al-Aqsa, sont condamnés à la prison à vie. La peine
la plus lourde concerne le combattant Wael Mahmoud Qassem, de
Selwan, condamné à 35 perpétuités + 50 ans. Responsable de la
cellule combative de Selwan, il est né en 1971 et est marié et
père de quatre enfants. Dès la première intifada, il participe à
la vie associative et sociale de son quartier et sa ville. En
1989, il adhère au Hamas mais consacre une grande partie de son
activité à l’action sociale. Il fait ses études dans les écoles
de Selwan puis au lycée Rachadiyé dans al-Qods, et obtient son
diplôme en informatique à la faculté Ibrahimi dans al-Qods
également. En 2001, il adhère aux Brigades al-Qassam et commence
son activité sécuritaire en formant une cellule des Brigades
d’al-Qassam dans Selwan. Cette cellule parvient à mener des
opérations dans la ville d’al-Qods, comme l’opération de
l’université hébraïque et ailleurs en Palestine occupée, avant
d’être découverte.
Parmi les prisonniers de 48, nombreux sont ceux qui ont été
condamnés à la perpétuité (une ou plusieurs), accusés de
participer à la résistance armée de leur peuple : Ibrahim Hassan
Aghbariyé et son frère Muhammad Hassan Ighbariyé, de
Mcheyrafé, arrêtés en février 1992, ont été condamné à 3
perpétuités + 15 ans, Ahmad Ali Hussayn Abou Jaber, arrêté en
1986, du village de Kfar Qassem, a été condamné à une perpétuité
+ 10 ans. Muhammad Tawfiq Sulayman Jabbarine, d’Umm al-Fahem,
arrêté le 4 mars 1991, a été condamné à 3 perpétuités+ 15 ans.
Plus récemment, depuis l’intifada al-Aqsa, le combattant Ashraf
Nazmi Qayssi, de Baqa al-Gharbiya, a été arrêté en février 2005
et condamné à 5 perpétuités + 20 ans de prison. Le combattant
Samir Abou Mokh, de Baqa al-Gharbiya également, a été arrêté en
octobre 2005 et condamné à une perpétuité + 10 ans. Les
combattants Ibrahim Muhammad Bakri et son cousin Yassin Bakri,
du village Baane, en Galilée, ont été arrêtés le 8 et 15 août
2002 et condamnés à 9 perpétuités + 30 ans de prsion.
Certains de ces combattants condamnés à la perpétuité souffrent
de plusieurs maladies : ‘Imad Ata Zaarab, de Khan Younis, qui
est détenu depuis 18 ans dans la prison d’Eschel, dans le Naqab
occupé, et condamné à la perpétuité, a été atteint par le
cancer, deux ans après son arrestation. Raed Mohammad Darrabiyé,
du camp de Jabalya, condamné à perpétuité et détenu depuis neuf
ans, est également atteint par le cancer. Plusieurs autres
graves maladies touchent les prisonniers, notamment ceux qui ont
déjà passé plus de dix ans en détention. Mais ce qu’il faut
retenir, c’est la combativité et la persévérance de tous ceux
qui sont condamnés à de lourdes peines de poursuivre leur
combat. La majeure partie d’entre eux ont poursuivi leurs
études, obtenu des diplômes, participent aux activités
militantes et éducatives à l’intérieur des prisons, participent
à la vie politique du pays, dans l’espoir d’être libérés par des
échanges avec des soldats sionistes capturés. Appartenant à
plusieurs organisations de résistance, ils participent ensemble
à l’élaboration d’une ligne politique de résistance, en relation
avec leurs frères hors de prison. Leur rôle important dans la
lutte de libération, en prison et hors de prison, a amené
l’occupant à les isoler fréquemment de leurs frères, dans des
cellules conçues spécialement pour les couper du monde et les
humilier.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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