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RIA Novosti
Le message d'Obama
aux musulmans:
une nouvelle vitrine pour une vieille marchandise
Dmitri Babitch
Photo RIA Novosti
Vendredi 5 juin 2009 Le discours prononcé par le président
américain Barack Obama au Caire a confirmé qu'il était une
véritable pop star. Ce discours, dans lequel il s'adressait à un
milliard de téléspectateurs de pays musulmans, ne contenait, au
fond, rien qui signifie l'abandon des principales orientations
de la politique américaine au Proche-Orient et en Afghanistan.
Mais la vitrine (une prestigieuse université égyptienne) dans
laquelle Obama a présenté cette marchandise assez défraîchie
était idéale pour le marketing.
Le président américain a sévèrement montré du doigt Israël
pour la poursuite de la colonisation en Cisjordanie: mais cette
position avait été celle de toutes les administrations
précédentes depuis Bill Clinton. Il a promis de retirer les
troupes américaines d'Irak d'ici 2012, et les unités de combat
d'ici 2010. Mais l'administration précédente n'avait pas promis
de faire de l'Irak une colonie. Elle refusait, simplement, de
donner une date exacte pour le retrait. Quant à ses propos,
selon lesquels "les Etats-Unis ne prétendent ni à des bases sur
le territoire de l'Irak, ni à son sol, ni à ses ressources",
personne n'y croira, ni en Irak, ni dans d'autres pays
musulmans. Tout le monde sait qu'il y a des bases américaines au
Kosovo, en Arabie Saoudite et en Afghanistan, ainsi que dans
d'anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale. Tous ces
exemples illustrent éloquemment le vieux principe suivant: il
n'y a rien au monde de plus durable qu'une base militaire
américaine temporaire.
Néanmoins, Barack Obama a une qualité qui lui est propre: on
veut croire en lui. Lorsqu'il a prononcé son discours, les rues
du Caire, cette mégapole de 20 millions d'habitants, étaient
vides. Le public était, à la fois, sceptique et très intéressé.
A-t-il été déçu? Le fait est qu'Obama a exposé le problème
palestinien avec ses mots. Il a prononcé beaucoup de belles
paroles, y compris le mot "Palestine" (les présidents américains
avaient préféré employer jusqu'alors les termes "Autorité
palestinienne" ou "futur Etat palestinien"). Mais l'on sait bien
que le pouvoir réel est détenu à Gaza par les leaders du
mouvement islamique radical du Hamas et que les autorités
israéliennes essaient, tantôt par un blocus, tantôt par des
bombardements, de contraindre les Palestiniens à regretter leur
"choix démocratique" de 2007, qui avait donné une majorité de
voix au Hamas.
Pour l'instant, Obama se borne à des déclarations
symboliques, sermonnant les radicaux des deux parties et
appelant le Hamas à renoncer à la violence, à reconnaître les
accords antérieurs et le droit d'Israël à l'existence. Mais
voilà le hic: le mouvement du Hamas a été créé sur la base des
idées de la lutte armée, du refus de reconnaître les accords de
paix conclus en 1993 à Oslo et de la non reconnaissance
d'Israël. Renoncer à ces trois piliers équivaudrait aujourd'hui,
pour le Hamas, à l'abandon du rêve communiste par les bolcheviks
dans les années 1920.
Obama est parvenu, pour l'instant, à conserver les faveurs de
l'opinion publique américaine, lasse de l'administration Bush et
de ses deux guerres, en Irak et en Afghanistan. Mais les voix
des mécontents se font entendre de plus en plus fort aux
Etats-Unis. Les fondamentalistes chrétiens qui soutiennent
Israël et certains éléments conservateurs de la communauté juive
accusent Obama de faiblesse, comparant les frontières d'un
Israël sans colonies à celles d'Auschwitz. Pour étouffer ces
voix, Obama a besoin, aujourd'hui plus que jamais, d'avoir des
résultats: une amélioration, même infime, en Irak ou en
Afghanistan, un progrès sur la question du programme nucléaire
iranien.
Une des clefs pour résoudre ces problèmes est détenue par la
Russie, qui a une grande expérience des relations avec ces trois
Etats islamiques à problèmes. Son nom sera donc sûrement cité
dans le prochain discours qu'Obama adressera au monde islamique.
Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la
stricte responsabilité de l'auteur.
© 2008 RIA Novosti
Publié le 7 juin 2009
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