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Ha'aretz
Les colons de Hebron : la honte ordinaire
Danny Rubinstein
[les exactions des colons de Tel
Rumeida, au coeur de Hebron, continuent contre ce qui reste de leurs voisins palestiniens, sans que les
autorités israéliennes n'interviennent ou presque. Ce scandale, dont un
extrait vidéo
relativement anodin d'ailleurs, est passé sur une chaîne
israélienne, a assez duré. Le ministre de la défense Amir Peretz, qui a vu ce
petit film, aurait été "choqué"]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/813377.html
Ha'aretz, 15 janvier 2007
La semaine dernière, la chaîne 10 de télévision israélienne a
diffusé un court reportage vidéo filmé dans le quartier de Tel Rumeida à
Hebron, où l'on voit une femme appartenant à la communauté des colons juifs
de ce quartier, Yifat Alkobi, bousculer brutalement et insulter ses
voisins, membres de la famille palestinienne Abou Aisha. Il y a quelques
mois, B'Tselem, le Centre israélien d'information pour les droits de
l'homme dans les territoires occupés, avait fourni une caméra à la famille
Abou Aisha pour qu'elle puisse filmer ce qui se passait près de chez eux.
Ils disposent aujourd'hui de nombreux clips vidéo de ce genre. Ce qui est intéressant
dans celui-ci, c'est que la bousculade et les insultes ont eu lieu
alors qu'à quelques mètres de là, des soldats israéliens ont observé la
scène sans lever le petit doigt.
Personne ne s'est particulièrement ému de ces images, à
commencer par Yifat Alkobi elle-même, convoquée pour interrogatoire, mais qui n'est
même pas venue. Dans la ville, il y a un groupe d'observateurs
internationaux, appelé TIPH (Temporary International Presence in Hebron), qui a publié
un communiqué disant que le film ne contenait rien de nouveau.
"Depuis des années, nous publions des informations sur les harcèlements, les
biens endommagés, les destructions de bâtiments, les jets de pierres
et les fenêtres brisées, commis par les colons à l'encontre des
habitants arabes. Par le passé, nous nous sommes souvent adressés à l'armée et
à la police, sans résultats", disent les observateurs. Ils envoient leurs
rapports au gouvernement israélien, à l'Autorité palestinienne et aux
gouvernements des six pays qui ont envoyé des observateurs (Norvège, Italie, Suède,
Danemark, Suisse et Turquie). B'Tselem s'est aussi hâté de prévenir qu'il
ne fallait pas faire de Yifat Alkobi un bouc émissaire. Le fait est que
la responsabilité de ce qui se passe à Hebron incombe à tous les
gouvernements qui ont permis et continuent de permettre que ces scènes
honteuses se
produisent.
Les chiffres sont connus. Des milliers d'Arabes qui habitaient la
partie de Hebron sous contrôle israélien (selon l'accord passé par le
gouvernement de Benjamin Netanyahou [à Wye Plantation, ndt]), bien peu sont restés.
La famille Abou Aisha de Tel Rumeida habite une maison qui a été
surnommée "la maison cage" à cause des barreaux qui l'entourent, destinés
à la protéger des harcèlements des colons. Les autres familles arabes isolées
qui sont restées dans le quartier près des colons ont tendance à se
cacher de la même manière. En d'autres termes, les colons de Hebron ont réussi à
se débarrasser presque complètement de leurs voisins arabes, chose
que l'armée et la police n'ont rien fait pour empêcher, ce qui veut dire que,
dans les faits, ils ont aidé les colons.
La droite israélienne, qui soutient les colons de Hebron, a glissé
depuis longtemps sur la pente du racisme. Lors d'une réunion récente à
Jérusalem, un officier de police (juif) haut gradé, qui a quitté son
service, a dit à
des invités étrangers comment il devait agir à l'égard de
colons installés dans des quartiers arabes; qui refusent d'obéir aux ordres de
policiers arabes. "Vous êtes arabes, et nous ne vous parlons pas. Vous
n'avez qu'à
amener un policier juif", disent-ils. Les invités canadiens
furent choqués. L'un deux, haut fonctionnaire du gouvernement canadien, a dit que
quiconque oserait faire ce genre de remarque au Canada serait immédiatement
jeté en prison. Ici, cela passe sans problème.
Tous les colons ne ressemblent pas à ceux de Hebron. Il y a des
colons qui tentent d'établir des relations de bon voisinage avec les Arabes.
Mais les uns comme les autres se défendent des accusations de racisme et
de
dépossession en disant que telle a été la situation sur la
terre d'Israël depuis le début du sionisme. Tel-Aviv, elle non plus, n'a pas été
seulement bâtie sur du sable, et partout en Israël, de Dan au Nord à Beer
Sheva au
Sud, des Arabes ont été expulsés et dépossédés. Alors, que
leur reprochent les gens?
Quel que soit le cliché que véhiculent ces revendications et ces
arguments, ils sont pertinent aujourd'hui, quand de nouveaux plans politiques
surgissent après la fin d'Oslo. Dans le processus nouveau, s'il
est mis en
oeuvre, il n'y aura pas d'échappatoire et il faudra fixer une
frontière de principe. Et dans les négociations avec les Palestiniens, le seul
point de départ possible est la ligne Verte. Après 1967, et pendant plus
de 20 ans,
on a évoqué en Israël et dans la région une "option
jordanienne". Le Royaume de Jordanie dispose d'une capitale grande et animée, Amman, et de
grands territoires. Si des négociations avaient eu lieu avec la
Jordanie, le contrôle israélien sur une certaine portion des territoires
n'aurait pas été le même que dans le cadre de négociations avec les Palestiniens,
qui n'ont pas de capitale, et presque pas de territoires. C'est perdre son
temps que de parler avec les Palestiniens si nous n'abordons pas les négociations
avec pour principe la ligne Verte. Toute autre option est susceptible
de conduire au phénomène obscène des colons de Hebron et de Tel Rumeida.
Trad. : Gérard pour La Paix
Maintenant
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