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Les armées secrètes de l'OTAN (III)
Gladio : Pourquoi l'OTAN, la CIA et le MI6
continuent de nier
Danièle Ganser

Avant même sa
prise de fonction (le 2 juillet 2009) comme nouveau commandeur
suprême de l’OTAN (SACEUR), l’amiral James G. Stavridis s’est
discrètement rendu au SHAPE pour rencontrer les chefs des
réseaux stay-behind
Mardi 3 novembre 2009 Alors que
l’existence du gouvernement de l’ombre institué par les
États-Unis et le Royaume-Uni dans l’ensemble des États alliés
est attestée par des enquêtes judiciaires et parlementaires dans
les années 80-90, l’OTAN, la CIA et le MI6 continuent à nier.
C’est que Washington et Londres n’y voient pas un épisode
historique, mais un dispositif actuel (comme l’a montré
l’affaire des enlèvements en Europe et des vols secrets durant
l’ère Bush). Les armées secrètes de l’OTAN sont toujours
couvertes par le secret-Défense, parce qu’elles sont toujours
actives.
Cet article fait suite à:
1. « Quand
le juge Felice Casson a dévoilé le Gladio… »
2. « Quand
le Gladio fut découvert dans les États européens… »
Au moment des découvertes sur le réseau Gladio en 1990,
l’OTAN, la plus grande alliance militaire du monde,
regroupait 16 nations : l’Allemagne, la Belgique, le Canada,
le Danemark, l’Espagne, la France, la Grèce, l’Islande,
l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le
Portugal, le Royaume-Uni, la Turquie et les États-Unis, ces
derniers assumant un rôle de commandement. L’Alliance réagit
confusément aux révélations du Premier ministre italien
Andreotti et craignit pour son image lorsque les armées
stay-behind furent associées à des attentats, des actes
de torture, des coups d’États et d’autres opérations
terroristes perpétrés dans plusieurs pays d’Europe de
l’Ouest.
Le lundi 5 novembre 1990, après un long silence de près d’un
mois, l’OTAN nia catégoriquement les allégations d’Andreotti
concernant son implication dans l’Opération Gladio et ses liens
avec les armées secrètes. Le principal porte-parole de
l’Organisation, Jean Marcotta, affirma depuis le quartier
général du SHAPE, à Mons, en Belgique, que : « L’OTAN n’a
jamais envisagé de recourir à la guérilla ou à des opérations
clandestines ; elle s’est toujours occupée de questions
exclusivement militaires et de la défense des frontières des
pays Alliés [1]. »
Puis, le mardi 6 novembre, un autre porte-parole expliqua que le
démenti de la veille était faux. Il ne fournit aux journalistes
qu’un bref communiqué précisant que l’OTAN ne commentait jamais
les questions couvertes par le secret militaire et que Marcotta
aurait dû observer le silence [2].
La presse internationale critiqua amèrement ces cafouillages
dans la stratégie de relations publiques de l’alliance
militaire : « Pendant que de véritables séismes frappent le
continent entier, un porte-parole de l’OTAN apporte un démenti :
on ignore tout de Gladio et des réseaux stay-behind. Et voici
qu’un communiqué laconique vient ensuite démentir le démenti
"incorrect" et rien de plus [3] ».
Tandis que la crédibilité de l’OTAN s’ébranlait, les journaux
titraient « Une unité clandestine de l’OTAN "soupçonnée de
liens avec le terrorisme" » [4].
« Un réseau secret de l’OTAN accusé de subversion : La
Commission a découvert que Gladio, le bras armé clandestin de
l’OTAN en Italie, était devenu un repaire de fascistes
combattant le communisme au moyen d’attentats terroristes visant
à justifier un durcissement des lois. » [5]
« La bombe qui a explosé à Bologne provenait d’une unité de
l’OTAN » [6].
Un diplomate de l’OTAN, qui insista pour conserver l’anonymat,
justifia devant des journalistes : « Puisqu’il s’agit d’une
organisation secrète, je ne m’attends pas à ce que les réponses
abondent, même si la Guerre froide est terminée. S’il y a eu des
liens avec des organisations terroristes, ce genre
d’informations doit être enterré très profondément. Si ce n’est
pas le cas, qu’y a-t-il de mal à préparer le terrain pour la
résistance pour le cas où les Soviétiques attaqueraient ?
» [7]
Selon la presse espagnole, immédiatement après le fiasco de
l’opération de communication des 5 et 6 novembre, le secrétaire
général de l’OTAN Manfred Wörner convoqua les ambassadeurs de
l’Alliance Atlantique pour une réunion d’information à huis clos
sur Gladio, le 7 novembre. Le « Supreme Headquarters Allied
Powers Europe ou SHAPE, l’organe de commandement de l’appareil
militaire de l’OTAN, coordonnait les actions de Gladio, c’est ce
qu’a révélé le secrétaire général Manfred Wörner pendant un
entretien avec les ambassadeurs des 16 nations alliées de l’OTAN »,
put-on lire dans la presse espagnole. « Wörner aurait demandé
du temps pour mener une enquête afin de découvrir les raisons du
démenti formel » rendu public la veille par l’OTAN. « C’est
ce qu’il aurait annoncé aux ambassadeurs du Conseil Atlantique
réunis le 7 novembre, si l’on en croit certaines sources. »
L’officier le plus haut placé de l’OTAN en Europe, le général
états-unien John Galvin, avait confirmé que les allégations de
la presse étaient en grande partie fondées, mais que le secret
devait être gardé. « Au cours de cette réunion à huis clos,
le secrétaire général de l’OTAN a précisé que les gradés
interrogés, (il faisait référence au général John Galvin,
commandant en chef des forces alliées en Europe), avaient
indiqué que le SHARP coordonnait les opérations menées par
Gladio. Dorénavant, la politique de l’OTAN sera de refuser tout
commentaire sur les secrets officiels. » [8]
Selon des sources qui ont souhaité conserver l’anonymat, le
Bureau de Sécurité de l’OTAN aurait été directement impliqué
dans l’Opération Gladio [9].
Hébergé au quartier général de l’OTAN à Bruxelles, le mystérieux
Bureau de Sécurité fait partie intégrante de l’OTAN depuis la
création de l’Alliance en 1949. Sa mission consiste à
coordonner, superviser et appliquer les politiques de sécurité
de l’OTAN. Le directeur de la Sécurité est le principal
conseiller du secrétaire général pour les questions de
sécurité ; il dirige le Service de Sécurité du quartier général
et est responsable de la coordination générale de la sécurité au
sein de l’OTAN. Mais surtout, il est le président du Comité de
Sécurité de l’Alliance qui réunit régulièrement les chefs des
Services de Sécurité des pays membres pour discuter des
questions d’espionnage, de terrorisme, de subversion et d’autres
menaces, parmi lesquelles le communisme en Europe de l’Ouest,
qui pourraient représenter un danger pour l’OTAN.
En Allemagne, le chercheur Erich Schmidt Eenboom rapporta que
les patrons des services secrets de plusieurs pays d’Europe
occidentale, et notamment de l’Espagne, de la France, de la
Belgique, de l’Italie, de la Norvège, du Luxembourg et du
Royaume-Uni, s’étaient réunis plusieurs fois à la fin de l’année
1990, et ce, afin d’élaborer une stratégie de désinformation
pour contrer les nombreuses révélations sur Gladio [10].
Ces réunions se déroulèrent vraisemblablement au très secret
Bureau de Sécurité. « Le fait que les structures clandestines
de Gladio aient été coordonnées par un comité de sécurité
international composé uniquement de représentants des services
secrets », remarque le quotidien portugais Expresso,
« pose un autre problème : celui de la souveraineté nationale
de chacun des États ». Durant la Guerre froide, certains
services de renseignement agissaient hors de tout cadre
démocratique. « Il semble que plusieurs gouvernements
européens aient perdu le contrôle de leurs services secrets »
tandis que l’OTAN entretenait, elle, des liens très étroits avec
les services secrets militaires de chacun des États membres. « Il
paraît évident que l’OTAN applique un principe de confiance
restreinte. Selon cette doctrine, certains gouvernements ne
luttant pas assez activement contre le communisme, il est donc
inutile de les informer des activités de l’armée secrète de
l’OTAN. » [11].
Sous le titre « Manfred Wörner raconte le Gladio », la
presse portugaise publia des détails supplémentaires sur la
réunion du 7 novembre. « Le secrétaire général de l’OTAN,
l’Allemand Manfred Wörner a expliqué aux ambassadeurs des 16
pays alliés de l’OTAN la fonction du réseau secret - qui fut
créé dans les années cinquante afin d’organiser la résistance
dans l’éventualité d’une invasion soviétique. » Derrière des
portes closes, « Wörner a confirmé que le commandement
militaire des forces alliées, le Supreme Headquarters Allied
Powers Europe (SHAPE), coordonne les activités du “Réseau
Gladio”, mis sur pied par les services secrets des différents
pays de l’OTAN, par l’intermédiaire d’un comité créé en 1952 et
actuellement présidé par le général Raymond Van Calster, chef
des services secrets militaires belges », on apprit plus
tard qu’il s’agissait de l’ACC. D’après le journal, « la
structure a été bâtie en Italie avant 1947, puis des réseaux
similaires ont été créés en France, en Belgique, au Royaume-Uni,
aux Pays-Bas, au Luxembourg, au Danemark, en Norvège et en Grèce ».
« Le secrétaire général a également reconnu que le SHAPE
avait fourni de "fausses informations" en niant l’existence d’un
tel réseau secret, mais il a refusé de s’expliquer sur les
nombreuses contradictions dans lesquelles les différents
gouvernements s’étaient englués en confirmant ou niant la
réalité des réseaux Gladio dans leurs pays respectifs ». [12]
Au milieu de la tourmente, la presse tenta à plusieurs
reprises d’obtenir une explication ou, ne serait-ce qu’un
commentaire, de la plus haute autorité civile de l’OTAN, le
secrétaire général de l’OTAN Manfred Wörner. Mais, conformément
à la politique de l’Alliance qui consistait à ne pas se
prononcer sur les secrets militaires, Wörner rejeta toutes les
demandes d’interviews [13].
Le terme « secrets militaires » focalisa l’attention des
journalistes qui se mirent en quête d’anciens responsables de
l’OTAN à la retraite susceptibles de s’exprimer plus librement
sur toute l’affaire. Joseph Luns, un ancien diplomate de 79 ans,
qui avait occupé les fonctions de secrétaire général de l’OTAN
de 1971 à 1984 accorda un entretien téléphonique à des reporters
depuis son appartement de Bruxelles. Il prétendit n’avoir jamais
été informé de l’existence du réseau secret jusqu’à ce qu’il
l’ait récemment lue dans la presse : « Je n’en ai jamais
entendu parler et pourtant j’ai exercé quelques responsabilités
au sein de l’OTAN ». Luns admit toutefois avoir été briefé
« ponctuellement » à l’occasion d’opérations spéciales et
estima « peu probable mais pas impossible » que Gladio
ait pu exister à son insu [14].
« Le seul organisme international qui ait jamais
fonctionné, c’est l’OTAN, tout simplement parce qu’il s’agit
d’une alliance militaire et que nous étions aux commandes »,
répondit un jour le président états-unien Richard Nixon [15].
Il faisait remarquer à juste titre que, bien que l’OTAN ait son
siège européen en Belgique, son véritable quartier général se
trouve au Pentagone, à Washington. Depuis la création de
l’Alliance Atlantique, le commandant en chef de la zone Europe,
le SACEUR (Supreme Allied Commander Europe), exerçant ses
fonctions depuis son quartier général, le SHAPE, établi à
Casteau, en Belgique, avait toujours été un général états-unien.
Les Européens pouvaient, quant à eux, nommer le plus haut
responsable civil, le secrétaire général. Mais depuis la
nomination du général Dwight Eisenhower comme premier SACEUR, la
plus haute fonction militaire en Europe fut systématiquement
occupée par des officiers états-uniens [16]
Officier de la CIA à la retraite, Thomas Polgar confirma,
après la découverte des armées secrètes d’Europe de l’Ouest, que
celles-ci étaient coordonnées par « une sorte de groupe de
planification de guerre non conventionnelle » lié à l’OTAN [17].
Ses propos furent confirmés par la presse allemande qui souligna
que, durant toute la période de la Guerre froide, ce département
secret de l’OTAN était demeuré sous domination états-unienne. « Les
missions des armées secrètes sont coordonnées par la “Section
des Forces Spéciales”, située dans une aile du quartier général
de l’OTAN à Casteau placée sous haute surveillance », relata
un journal allemand. « Une porte grise en acier qui s’ouvre
comme un coffre-fort de banque et protégée par une combinaison
chiffrée, défend l’accès à toute personne non autorisée. Les
officiers des autres départements, qui sont invités à y entrer,
doivent dès l’entrée se présenter à un guichet sombre où ils
sont contrôlés. La Section des Forces Spéciales est dirigée par
des officiers britanniques ou états-uniens exclusivement et la
plupart des documents qui y circulent portent l’inscription
“American eyes only” (À l’intention du personnel US uniquement) » [18].
Pour contrer l’influence des partis communistes dans certains
pays d’Europe de l’Ouest, l’OTAN s’était livrée, dès sa création
au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, à une guerre secrète
non conventionnelle. D’après les découvertes de l’enquête
parlementaire belge sur Gladio, cette lutte aurait même été
engagée avant la fondation de l’Alliance, et coordonnée dès 1948
par le "Clandestine Committee of the Western Union" (CCWU), le
Comité Clandestin de l’Union Occidentale. Selon la presse,
toutes les « nations [participant à Gladio] étaient membres
du CCWU et assistaient régulièrement à des réunions par
l’intermédiaire d’un représentant de leurs services secrets.
Ceux-ci étaient généralement en contact direct avec les
structures stay-behind » [19].
Quand, en 1949, fut signé le Traité de l’Atlantique Nord, le
CCWU fut secrètement intégré au nouvel appareil militaire
international et opéra à partir de 1951 sous la nouvelle
appellation CPC. À cette époque, le quartier général européen de
l’OTAN était situé en France et le CPC avait son siège à Paris.
Comme le CCWU avant lui, le Comité assurait la planification, la
préparation et la direction des opérations de guerre non
conventionnelle menées par les armées stay-behind et les
Forces Spéciales. Seuls les officiers disposant des
autorisations de niveau supérieur étaient autorisés à pénétrer
au siège du CPC où, sous la surveillance des experts de la CIA
et du MI6, les chefs des services secrets des États d’Europe
occidentale se réunissaient plusieurs fois dans l’année afin de
coordonner les opérations de guerre clandestine menées dans tout
l’Ouest du continent.
Lorsqu’en 1966 le président de la République Française
Charles de Gaulle chassa l’OTAN de France, le quartier général
européen de l’Alliance militaire dut, à la colère du président
des États-Unis Lyndon Johnson, déménager de Paris à Bruxelles.
Dans le plus grand secret, le CPC s’installa lui aussi en
Belgique, comme le révéla l’enquête sur le Gladio belge [20].
L’expulsion historique de l’OTAN du territoire français offrit
alors un premier véritable aperçu des noirs secrets de
l’Alliance militaire. Pour le spécialiste des opérations
secrètes Philip Willan : « L’existence de protocoles secrets
de l’OTAN impliquant les services secrets des pays signataires
et visant à éviter l’accession au pouvoir par les communistes
fut divulguée pour la première fois en 1966, quand le président
de Gaulle décida de se retirer du commandement conjoint de
l’OTAN et dénonça ces protocoles comme une atteinte à la
souveraineté nationale » [21].
Si les documents originaux des protocoles anticommunistes
secrets de l’OTAN demeurent confidentiels, les spéculations sur
leur contenu ne cessèrent de se multiplier suite à la découverte
des armées secrètes stay-behind. Dans un article consacré
à Gladio, le journaliste américain Arthur Rowse écrivit qu’une
« clause secrète du traité initial de l’OTAN de 1949
stipulait que tout pays candidat à l’adhésion devait avoir
établi au préalable une autorité de Sécurité nationale chargée
d’encadrer la lutte contre le communisme par des groupes
clandestins de citoyens » [22].
Un spécialiste italien des services secrets et des opérations
clandestines, Giuseppe de Lutiis, découvrit qu’au moment
d’intégrer l’OTAN en 1949, l’Italie signa, outre le Pacte
Atlantique, une série de protocoles secrets prévoyant la
création d’une organisation non officielle « chargée de
garantir l’alignement de la politique intérieure italienne sur
celle du bloc de l’Ouest par tous les moyens nécessaires, même
si la population devait manifester une inclination divergente » [23].
L’historien italien spécialiste du Gladio Mario Coglitore a
également confirmé l’existence de ces protocoles secrets de
l’OTAN [24].
Suite aux révélations de 1990, un ancien officier du
renseignement de l’OTAN, qui veilla à conserver l’anonymat, alla
jusqu’à affirmer que ces documents protégeaient explicitement
les membres de l’extrême droite jugés utiles dans la lutte
contre les communistes. Le président des États-Unis Truman et le
chancelier allemand Adenauer auraient « signé un protocole
secret lors de l’adhésion de la RFA à l’OTAN en 1955, dans
lequel il était convenu que les autorités de l’Allemagne de
l’Ouest s’abstiendraient d’entamer des poursuites à l’encontre
des extrémistes de droite reconnus » [25].
Le général italien Paolo Inzerilli, qui commanda le Gladio
dans son pays de 1974 à 1986, souligna que les « Américains
omniprésents » contrôlaient le CPC secret qui était en
charge de la coordination de la guerre clandestine. Selon lui,
le Comité avait été fondé « sur ordre du commandant en chef
de l’OTAN en Europe. Il constituait l’intermédiaire entre le
SHAPE, le quartier général des puissances alliées d’Europe, et
les services secrets des États membres pour les question de
guerre non conventionnelle » [26].
Les États-Unis contrôlaient le CPC avec leurs vassaux
britanniques et français et constituaient avec eux une
"Commission Exécutive" au sein du Comité. « Les réunions se
succédaient au rythme d’une ou deux par an au quartier général
du CPC, à Bruxelles, et les questions à l’ordre du jour étaient
débattues entre la “Commission Exécutive” et les responsables
militaires », témoigna Inzirelli [27].
« La coordination des actions de notre réseau stay-behind
avec celles des structures clandestines analogues en Europe
était assurée par le CPC, le Coordination and Planning Committee
[Comité de Planification et de Coordination] du SHAPE, le
quartier général des puissances alliées d’Europe », décrivit
le général italien Gerardo Serravalle. Prédécesseur du général
Inzirelli, il avait commandé le Gladio en Italie entre 1971 et
1974 ; il raconta que « pendant les années soixante-dix, les
membres du CPC étaient les officiers responsables des structures
secrètes de la Grande-Bretagne, de la France, de l’Allemagne, de
la Belgique, du Luxembourg, des Pays-Bas et de l’Italie. Ces
représentants des réseaux clandestins se réunissaient chaque
année dans l’une des capitales européennes » [28].
Des hauts responsables de la CIA assistaient à chacune de ces
réunions. « Des représentants de la CIA étaient toujours
présents aux réunions des armées stay-behind », se souvient
Serravalle. « Ils appartenaient à l’antenne de l’Agence de la
capitale où se déroulait la réunion et ne participaient pas aux
votes » [[Ibid., p.79. ]]. « La “Directive SHAPE”
faisait office de référence officielle, si ce n’est de doctrine
pour les réseaux stay-behind alliés », explique Serravalle
dans son livre consacré à Gladio. Il précise également que les
enregistrements du CPC, qu’il a pu consulter mais qui demeurent
confidentiels, « portent [surtout] sur l’entraînement des
Gladiateurs en Europe, sur comment les réveiller depuis le
quartier général secret en cas d’occupation de l’ensemble du
territoire national et sur d’autres questions techniques telles
que, pour citer la plus importante, l’unification des différents
systèmes de communication entre les bases stay-behind » [29].
Parallèlement au CPC, un second poste de commandement secret
fonctionnant comme un quartier général stay-behind fut
créé par l’OTAN au début des années cinquante sous le nom d’ACC.
Comme le CPC, l’ACC était en lien direct avec le SACEUR,
lui-même sous contrôle états-unien. D’après les conclusions de
l’enquête belge sur Gladio, l’ACC aurait été créé en 1957 et
chargé de « la coordination des réseaux “stay-behind” en
Belgique, au Danemark, en France, en Allemagne, en Italie, au
Luxembourg, aux Pays-Bas, en Norvège, au Royaume-Uni et aux USA ».
Selon le rapport d’enquête belge, en temps de paix, les
fonctions de l’ACC « comprenaient l’élaboration de directives
à l’intention du réseau, le développement de ses capacités
secrètes et l’établissement de bases au Royaume-Uni et aux USA.
Dans le cas d’une guerre, il était censé préparer des actions
stay-behind conjointement avec le SHAPE ; de là, les
organisateurs devaient alors activer les bases clandestines et
préparer les opérations » [30].
Le commandant du Gladio italien Inzirelli affirme que « les
relations au sein de l’ACC étaient totalement différentes »
de celles existant au CPC. « L’atmosphère [y] était
clairement plus décontractée et amicale qu’au CPC. » L’ACC,
fondé sur « un ordre express du SACEUR au CPC » serait « devenue
une ramification » de celui-ci [31].
Il semble que cet organisme ait servi surtout de forum où l’on
se partageait le savoir-faire Gladio entre patrons de services
secrets : « L’ACC était un comité essentiellement technique,
un forum où l’on pouvait à loisir échanger des informations et
des expériences, évoquer les moyens disponibles ou à l’étude,
partager ses connaissances sur les réseaux, etc... » Le
général Inzerilli se souvient : « C’était un échange de bons
procédés. Chacun savait que s’il lui manquait un expert en
explosifs, en télécommunication ou en répression pour une
opération, il pouvait sans problème s’adresser à un confrère
étranger puisque les agents avaient reçu le même entraînement et
utilisaient le même type de matériel » [32].
Les transmetteurs radio baptisés Harpoon figuraient notamment
dans l’équipement de tous les membres de l’ACC. Ils avaient été
conçus et fabriqués sur ordre du comité de direction de Gladio,
au milieu des années 1980, par la firme allemande AEG Telefunken
pour un montant total de 130 millions de marks, en remplacement
d’un ancien système de communication devenu obsolète. Le système
Harpoon était capable d’émettre et de recevoir des messages
radio cryptés sur une distance de 6 000 km et permettaient donc
les communications entre les réseaux stay-behind situés de part
et d’autre de l’Atlantique. « Le seul équipement qu’ont en
commun tous les membres de l’ACC est le fameux transmetteur
radio Harpoon », révéla Van Ussel, un membre du Gladio belge
qui s’en était lui-même servi au cours des années 1980, alors
qu’il était un membre actif de l’organisation. Selon lui, « ce
système était régulièrement utilisé pour transmettre des
messages entre les bases et les agents (en particulier lors des
exercices de communication radio), mais il était avant tout
destiné à communiquer des renseignements en cas d’occupation » [33].
L’ACC disposait de bases dans tous les pays européens dont une
au Royaume-Uni, à partir desquelles les unités présentes dans
les territoires occupés pourraient être activées et commandées.
Apparemment, l’ACC éditait à l’intention des Gladiateurs des
manuels indiquant les procédures communes à suivre relatives aux
actions clandestines, aux communications radio basées sur le
cryptage et le saut de fréquence mais aussi aux largages aériens
et aux atterrissages.
L’ACC fonctionnait avec une présidence tournante d’une
période de deux ans, en 1990 celle-ci était assumée par la
Belgique. La réunion de l’ACC des 23 et 24 novembre se déroula
sous la présidence du général de division Raymond Van Calster,
patron du SGR, les services secrets militaires belges. Le
général Inzerilli se souvint que « contrairement au CPC,
l’ACC n’avait pas de direction établie et permanente. La
présidence du Comité était assumée pour deux ans et tournait
entre tous les membres, en suivant l’ordre alphabétique »,
pour cette raison, l’ACC n’était pas soumis à « la même
domination des grandes puissances ». Inzirelli affirma avoir
préféré travailler à l’ACC plutôt qu’au CPC contrôlé par les
États-uniens : « Je dois reconnaître, pour l’avoir moi-même
présidé pendant deux ans, que l’ACC était un comité
véritablement démocratique » [34].
Dans le cadre de toute recherche approfondie sur l’Opération
Gladio et les réseaux stay-behind de l’OTAN, les transcriptions
et enregistrements des réunions du CPC et de l’ACC s’imposent
comme des sources essentielles. Hélas, alors que des années se
sont écoulées depuis la découverte du réseau top secret, les
autorités de l’OTAN se bornent, comme en 1990, à opposer
constamment aux sollicitations du public le silence ou le refus.
Quand dans le cadre de nos propres recherches, nous contactâmes,
à l’été 2000, le service des archives de l’OTAN pour demander
l’accès à des informations supplémentaires sur Gladio et
notamment sur le CPC et l’ACC, nous reçûmes la réponse
suivante : « Après vérification de nos archives, il n’existe
aucune trace des comités que vous évoquez ». Lorsque nous
insistâmes, le service des archives nous répondit : « Je vous
confirme une nouvelle fois que les comités dont vous parlez
n’ont jamais existé au sein de l’OTAN. En outre, l’organisation
que vous appelez “Gladio” n’a jamais fait partie de la structure
militaire de l’OTAN » [35].
Sur quoi, nous appelâmes le Bureau de Sécurité de l’OTAN, mais
ne pûmes ni parler au directeur ni même connaître son identité
classée “confidentielle”. Mme Isabelle Jacobs nous informa qu’il
était hautement improbable que nous obtenions jamais des
réponses à nos questions sur un sujet sensible comme Gladio et
nous conseilla de transmettre notre requête par écrit via
l’ambassade de notre pays d’origine.
C’est ainsi qu’après que la Mission Suisse d’Observation à
Bruxelles eut transmis à l’OTAN nos questions relatives à
l’affaire Gladio, l’ambassadeur de Suisse Anton Thalmann nous
répondit qu’à son grand regret : « L’existence des comités
secrets de l’OTAN que vous mentionnez dans votre lettre n’est
connue ni de moi, ni de mon personnel » [36].
« Quel est le lien entre l’OTAN et le Clandestine Planning
Committee (CPC) et le Allied Clandestine Committee (ACC) ? Quel
est le rôle du CPC et de l’ACC ? Quel est le lien entre le CPC,
l’ACC et le Bureau de Sécurité de l’OTAN ? », telles étaient
nos questions : le 2 mai 2001, nous reçûmes une réponse de Lee
McClenny, directeur du service de presse et de communication de
l’OTAN. Dans sa lettre, McClenny prétendait que « Ni le
Allied Clandestine Committee, ni le Clandestine Planning
Committee n’apparaissent dans toute la documentation de l’OTAN,
confidentielle ou non, que j’ai consultée. » Il ajoutait :
« En outre, je n’ai pu rencontrer personne travaillant ici
qui ait eu entendu parler de l’un ou l’autre de ces deux
comités. J’ignore si de tels comités ont un jour existé à
l’OTAN, ce qui est sûr c’est que ce n’est pas le cas aujourd’hui » [37].
Nous insistâmes une fois encore et demandâmes : « Pourquoi le
porte-parole de l’OTAN Jean Marcotta a-t-il, le 5 novembre 1990,
catégoriquement nié tout lien entre l’OTAN et Gladio pour voir
ses propos démentis deux jours plus tard par un second
communiqué ? », ce à quoi Lee McClenny rétorqua : « Je
ne suis pas au courant de l’existence de liens entre l’OTAN et
l’Opération Gladio”. De plus, je ne trouve personne du nom de
Jean Marcotta parmi la liste des porte-parole de l’OTAN » [38].
Le mystère restait entier.
La CIA, l’Agence de renseignement la plus puissante du monde,
ne fut pas plus coopérative que la plus grande alliance
militaire du monde quand il s’agit d’aborder la délicate
question de Gladio et des armées stay-behind. Fondée en
1947, deux ans avant la création de l’OTAN, la CIA eut pour
principale tâche pendant la Guerre froide de combattre le
communisme sur toute la planète en menant des opérations
secrètes qui visaient à étendre l’influence des États-Unis. « Par
actions clandestines », le président Nixon indiqua un jour
qu’il entendait « ces activités qui, bien qu’elles soient
destinées à favoriser les programmes et politiques des
États-Unis à l’étranger, sont planifiées et exécutées de telle
sorte que le public n’y voit pas la main du gouvernement
américain » [39].
Historiens et analystes politiques ont depuis décrit en détail
comment la CIA et les Forces Spéciales états-uniennes ont, au
moyen de guerre secrètes et non déclarées, influencé l’évolution
politique et militaire de nombreux pays d’Amérique latine ;
parmi les faits les plus marquants, on peut citer le
renversement du président guatémaltèque Jakobo Arbenz en 1954,
le débarquement raté de la baie des Cochons en 1961, qui devait
amener à la destitution de Fidel Castro, l’assassinat d’Ernesto
Che Guevara en Bolivie en 1967, le coup d’État contre le
président chilien Salvador Allende et l’installation au pouvoir
du dictateur Augusto Pinochet en 1973, ou encore le financement
des Contras au Nicaragua, suite à la révolution sandiniste de
1979. [40]
Outre ses agissements sur le continent sud-américain, la CIA
est également intervenue à de nombreuses reprises en Asie et en
Afrique, notamment pour renverser le gouvernement de Mossadegh
en Iran en 1953, pour soutenir la politique d’Apartheid en
Afrique du Sud, ce qui conduisit à l’emprisonnement de Nelson
Mandela, pour assister ben Laden et al-Qaida en Afghanistan,
lors de l’invasion soviétique de 1979 et pour appuyer le leader
Khmer Rouge Pol Pot depuis des bases conservées au Cambodge,
après la défaite états-unienne au Vietnam en 1975. D’un point de
vue purement technique, le département des opérations secrètes
de la CIA correspond à la définition d’une organisation
terroriste donnée par le FBI. Le "terrorisme" est, selon le FBI,
« l’usage illégal de la force ou de la violence contre des
personnes ou des biens dans le but d’intimider ou de contraindre
un gouvernement, une population civile, ou un segment de
celle-ci, à poursuivre certains objectifs politiques ou sociaux » [41].
Quand, au milieu des années soixante-dix, le Congrès des
États-Unis découvrit que la CIA et le Pentagone avaient étendu
leurs pouvoirs presque au-delà de tout contrôle et l’avaient
outrepassé en de nombreuses occasions, le sénateur états-unien
Frank Church fit avec assez de clairvoyance ce commentaire : « La
multiplication des abus commis par nos services de renseignement
révèle un échec plus général de nos institutions fondamentales ».
Il présidait alors l’une des trois commissions du Congrès qui
furent chargées d’enquêter sur les agissements des services
secrets US, et dont les rapports, présentés dans la seconde
moitié des années soixante-dix, font aujourd’hui encore autorité
sur la question des guerres secrètes menées par Washington [42]
Cependant, les investigations du Congrès n’eurent qu’un impact
limité et les services secrets continuèrent, avec l’appui de la
Maison-Blanche, à abuser de leur pouvoir, comme le démontra le
scandale de l’Irangate en 1986. Cela amena l’historienne Kathryn
Olmsted à se poser cette « question cruciale » : « Pourquoi,
après avoir débuté leur enquête, la plupart des journalistes et
des membres du Congrès ont-ils renoncé à défier le gouvernement
secret ? » [43]
Alors qu’aux États-Unis se poursuit le débat sur l’existence
ou non d’un « gouvernement de l’ombre », le phénomène
Gladio prouve que la CIA et le Pentagone ont opéré à plusieurs
reprises hors de tout contrôle démocratique pendant la Guerre
froide mais également après l’effondrement du communisme et ce,
sans jamais rendre compte de leurs agissements. Lors d’une
interview accordée à la télévision italienne en décembre 1990,
l’amiral Stansfield Turner, directeur de la CIA de 1977 à 1981,
refusa catégoriquement d’évoquer l’affaire Gladio. Quand les
journalistes, qui avaient à l’esprit le grand nombre de victimes
des nombreux attentats perpétrés en Italie, se permirent
d’insister, l’ex-patron de la CIA arracha furieusement son micro
et hurla : « J’ai dit : pas de questions sur Gladio ! »,
mettant ainsi un terme à l’entretien [44]
D’anciens officiers de la CIA moins gradés acceptèrent plus
volontiers d’évoquer les secrets de la Guerre froide et les
opérations illégales de l’Agence. Parmi eux, Thomas Polgar, qui
prit sa retraite en 1981 après 30 ans de bons et loyaux
services. En 1991, il avait témoigné contre la nomination de
Robert Gates à la tête de la CIA, reprochant à celui-ci d’avoir
couvert le scandale de l’Irangate. Interrogé sur les armées
secrètes d’Europe, Polgar expliqua, en se référant implicitement
au CPC et à l’ACC, que les programmes stay-behind étaient
coordonnés par « une sorte de groupe de planification de
guerre non conventionnelle lié à l’OTAN ». Dans leurs
quartiers généraux secrets, les chefs des armées secrètes
nationales « se rencontraient tous les deux ou trois mois, à
chaque fois dans une capitale différente ». Polgar souligne
que « chaque service national le faisait avec plus ou moins
de zèle » tout en admettant que « dans les années
soixante-dix en Italie, certains sont allés même plus loin que
l’exigeait la charte de l’OTAN » [45].
Le journaliste Arthur Rowse, ancien collaborateur du
Washington Post, tira, dans un essai consacré au sujet « Les
leçons de Gladio » : « Aussi longtemps que le peuple
états-unien ignorera tout de ce sombre chapitre des relations
étrangères des USA, cela n’incitera pas véritablement les
agences responsables de cette situation à changer de
comportement. La fin de la Guerre froide n’a changé que très peu
de choses à Washington. Les États-Unis (...) attendent toujours
avec impatience un vrai débat national sur les moyens, les buts,
et les coûts de nos politiques fédérales de sécurité. » [46].
Spécialisés dans l’étude des opérations clandestines de la
CIA et des secrets de la Guerre froide, les chercheurs de
l’institut de recherches privé et indépendant National Security
Archive de l’université George Washington à Washington ont
déposé une requête basée sur le Freedom of Information Act
(FOIA) auprès de la CIA, le 15 avril 1991. D’après les termes de
cette loi sur la liberté d’information, tous les services du
gouvernement doivent justifier devant le peuple de la légalité
de leurs actions. Malcolm Byrne, vice-directeur de recherche au
National Security Archive, demandait à la CIA l’accès à « toutes
les archives concernant (...) les décisions du gouvernement
états-unien, probablement prises entre 1951 et 1955, concernant
le financement, le soutien ou la collaboration avec toute armée
secrète, tout réseau ou toute autre unité, créé dans le but de
résister à une possible invasion de l’Europe de l’Ouest par des
puissances sous domination communiste ou de mener des opérations
de guérilla dans des pays d’Europe occidentale dans l’hypothèse
où ceux-ci seraient sous l’emprise de partis ou de régimes
communistes, de gauche ou soutenus par l’Union soviétique ».
Byrne ajoutait : « Je vous prie d’inclure à vos recherches
tout document se rapportant à des activités connues sous le nom
d’"Opération Gladio", en particulier en France, en Allemagne et
en Italie » [47].
Byrne précisait à juste titre que « tous les documents
obtenus suite à cette requête contribueront à faire connaître au
public la politique étrangère des États-Unis au cours de la
période qui suivit la Seconde Guerre mondiale, ainsi que
l’impact de la connaissance, de l’analyse et de l’acquisition du
renseignement dans la politique états-unienne de l’époque ».
Mais la CIA refusa de coopérer et, le 18 juin 1991, elle fournit
la réponse suivante : « La CIA ne peut ni confirmer ni
infirmer l’existence ou l’inexistence d’archives répondant aux
critères de votre requête ». Quand Byrne tenta de contester
le refus de l’Agence de lui fournir des informations sur Gladio,
il fut débouté. La Centrale fonda son refus de coopérer sur deux
exceptions "fourre-tout" à la loi sur la liberté d’information
qui excluent les documents soit parce qu’ils sont « classés
"confidentiel" conformément à une décision de l’Exécutif dans
l’intérêt de la Défense nationale ou de la politique étrangère »
(Exemption B1), soit au nom des « obligations statutaires du
directeur de protéger la confidentialité des sources et méthodes
de renseignement, telles que l’organisation, les fonctions,
noms, titres officiels, revenus et nombre des employés de
l’Agence, conformément aux National Security Act de 1947 et CIA
Act de 1949 » (Exemption B3).
Quand les responsables européens tentèrent de se confronter
au gouvernement secret, ils n’eurent guère plus de chance. En
mars 1995, une commission du Sénat italien présidée par Giovanni
Pellegrino qui avait mené une enquête sur Gladio et sur les
attentats commis en Italie adressa une requête FOIA à la CIA.
Les sénateurs italiens demandaient l’accès à toutes les archives
relatives aux Brigades Rouges et à l’affaire Moro afin de
découvrir si la CIA avait, dans le cadre du programme
d’immixtion dans les affaires politiques internes du pays,
infiltré le groupe terroriste d’extrême gauche avant qu’ils
n’assassinent l’ancien Premier ministre et leader de la DCI Aldo
Moro en 1978. Refusant de coopérer, l’Agence s’abrita derrière
les clauses B1 et B3 et refusa, en mai 1995, tous les accès
demandés en ajoutant que ça ne « confirmait ni n’infirmait
l’existence ou l’inexistence dans les archives de la CIA des
documents recherchés ». La presse italienne souligna le
caractère embarrassant de ce refus et titra : « La CIA
rejette la demande d’assistance de la Commission parlementaire.
L’enlèvement de Moro, un secret d’État aux USA » [48].
La seconde demande de renseignements relatifs à Gladio
émanant d’un gouvernement européen fut adressée à la CIA par le
gouvernement autrichien en janvier 2006, après que des caches
d’armes “top secrètes” aménagées par l’Agence à l’intention de
Gladio aient été découvertes dans les alpages et les forêts du
pays pourtant neutre. Des représentants du gouvernement
américain répondirent que les États-Unis couvriraient les frais
occasionnés par l’exhumation et la récupération de l’équipement
des réseaux [49].
L’enquête autrichienne fut menée par les services du ministre de
l’Intérieur Mickael Sika qui livra son rapport final sur les
dépôts de munition de la CIA le 28 novembre 1997 en déclarant :
« On ne peut établir aucune certitude quant aux caches
d’armes et à l’usage auxquelles elles étaient destinées ».
En conséquence de quoi : « Afin de faire toute la lumière sur
cette affaire, il serait nécessaire de disposer des documents
s’y rapportant, et notamment ceux abrités aux États-Unis » [50].
Un membre de la Commission, Oliver Rathkolb de l’université de
Vienne, déposa donc une requête en FOIA dans le but d’obtenir
l’accès aux archives de la CIA. Mais en 1997, le comité de
divulgation de l’Agence opposa un nouveau refus motivé par les
mêmes exemptions B1 et B3 qui laissa aux Autrichiens l’amère
impression que l’agence américaine n’était tenue de rendre des
comptes auprès de personne.
Étant donné que c’est là l’unique moyen d’accéder aux
archives relatives à Gladio, nous déposâmes le 14 décembre 2000
une requête en FOIA auprès de la CIA. Deux semaines plus tard,
nous reçûmes une réponse évasive à notre demande « se
rapportant à l’"Opération Gladio" » : « La CIA ne peut ni
confirmer ni infirmer l’existence ou l’inexistence de documents
correspondant à votre requête ». En invoquant les clauses
restrictives B1 et B3, la coordinatrice chargée de l’information
et des questions de respect de la vie privée Kathryn I. Dyer
nous refusa l’accès aux informations sur l’Opération Gladio [51].
Nous fîmes appel de cette décision en rétorquant que : « Les
documents retenus doivent être publiés en vertu de la loi FOIA
sur la liberté d’expression car les clauses B1 et B3 ne peuvent
s’appliquer qu’à des opérations de la CIA encore tenues secrètes ».
En produisant les données recueillies au cours de nos
recherches, nous prouvâmes que ce n’était plus le cas et
conclûmes : « Si vous, Mme Dyer, invoquez les clauses
restrictives B1 et B3 dans ce contexte, vous privez la CIA de la
possibilité de s’exprimer sur des informations relatives à
l’affaire Gladio, qui seront de toute façon révélées, que la CIA
décide d’intervenir ou non » [52].
En février 2001, l’Agence nous répondit : « Votre appel a
été accepté et des dispositions seront prises pour qu’il soit
examiné par les membres du comité de divulgation de l’Agence.
Vous serez informé de la décision rendue. » Dans le même
temps, la CIA précisa que cette commission traitait les demandes
en fonctions de leur date de dépôt et que « en ce moment,
nous avons à examiner environ 315 appels » [53].
Notre requête portant sur le réseau Gladio fut ainsi mise en
attente et rangée en bas de la pile. Au moment de la rédaction
de cet ouvrage, la commission n’avait toujours pas rendu son
avis [54].
Après l’OTAN et la CIA, la troisième principale organisation
impliquée dans l’opération stay-behind était le MI6.
Celui-ci ne prit pas position sur l’affaire Gladio en 1990 en
raison d’une légendaire obsession du secret, l’existence de
cette Agence elle-même ne fut officiellement admise qu’en 1994,
avec la publication de l’Intelligence Services Act qui
établit que l’organisation avait pour missions d’obtenir du
renseignement et d’exécuter des opérations secrètes à
l’étranger.
Tandis que l’exécutif britannique et le MI6 se refusaient à
tout commentaire, Rupert Allason, membre du parti conservateur,
rédacteur de l’Intelligence Quarterly Magazine sous le
pseudonyme de Nigel West et auteur de plusieurs ouvrages sur les
services de sécurité britanniques, confirma, en novembre 1990,
au plus fort du scandale Gladio, lors d’un entretien
téléphonique accordé à Associated Press : « Nous étions, et
sommes toujours, fortement impliqués (...) dans ces réseaux ».
West expliqua que la Grande-Bretagne « a bien entendu
participé, aux côtés des États-uniens, au financement et au
commandement » de plusieurs réseaux et qu’elle était
également engagée dans le cadre de la collaboration entre le MI6
et la CIA : « Ce sont les agences de renseignement
britanniques et états-uniennes qui sont à l’origine du projet ».
West affirma qu’à partir de 1949, l’action des armées
stay-behind avait été coordonnées par la Structure de
Commandement et de Contrôle des Forces Spéciales de l’OTAN au
sein desquelles le Special Air Service (SAS) jouait un rôle
stratégique [55].
« La responsabilité de la Grande-Bretagne dans la mise en
place des réseaux stay-behind dans toute l’Europe est absolument
fondamentale », rapporta la BBC avec un certain retard dans
son édition du soir du 4 avril 1991. Le présentateur des
informations John Simpson accusa le MI6 et le ministère de la
Défense britannique de ne pas divulguer toutes les informations
dont ils disposaient sur le sujet « alors que les révélations
sur Gladio ont entraîné la découverte d’armées stay-behind dans
d’autres pays européens - en Belgique, en France, aux Pays-Bas,
en Espagne, en Grèce et en Turquie. Même dans des pays neutres
comme la Suède et la Suisse, cela a donné lieu à un débat
public. Dans certains cas, des enquêtes officielles ont été
diligentées. En revanche, en Grande-Bretagne, toujours rien.
Rien que les habituels communiqués du ministère de la Défense
qui ne souhaite pas commenter les questions de Sécurité
nationale » [56].
Simpson déclara qu’après la chute du Mur de Berlin les
Britanniques avaient pris connaissance des complots et des
opérations de terrorisme ourdis par la Stasi, la Securitate et
d’autres services secrets d’Europe de l’Est avec une horreur
mêlée de fascination. « Se peut-il alors que notre camp se
soit livré à des actions comparables ? Jamais ! »
commenta-t-il avec ironie avant d’attirer l’attention sur les
services de sécurité d’Europe occidentale : « Mais des
informations commencent à présent à filtrer concernant des abus
qui auraient été commis par la plupart des services secrets des
membres de l’OTAN. En Italie, une commission parlementaire a été
chargée d’enquêter sur les agissements d’une armée secrète créée
par l’État dans le but de résister à une éventuelle invasion
soviétique. L’enquête a permis de découvrir l’existence de
forces armées clandestines similaires dans toute l’Europe. Mais
le groupe italien, connu sous le nom de Gladio, est, lui,
soupçonné d’avoir participé à une série d’attentats terroristes » [57].
La BBC ne put obtenir aucune réaction des responsables du
gouvernement sur le scandale Gladio, la confirmation officielle
de l’implication du MI6 ne vint que des années plus tard et dans
un cadre plutôt inhabituel : un musée. En juillet 1995, une
nouvelle exposition permanente baptisée « Les guerres
secrètes » fut inaugurée à l’Imperial War Museum de Londres.
« Tout ce que vous pouvez voir dans cette exposition fait
partie des secrets les mieux gardés du pays », assurait-on
aux visiteurs à l’entrée. « C’est la première fois qu’ils
sont dévoilés au public. Et le plus important : tout est
véridique... la réalité est bien plus incroyable et passionnante
que la fiction. » Sur l’une des vitrines consacrées au MI6,
un commentaire discret confirmait que : « Les préparatifs en
vue d’une Troisième Guerre mondiale incluaient la création de
commandos stay-behind parés à opérer derrière les lignes
ennemies dans le cas d’une invasion soviétique de l’Europe de
l’Ouest ». Dans la même vitrine, une grosse caisse pleine
d’explosifs était accompagnée de la légende suivante : « Explosifs
conçus spécialement par le MI6 pour être cachés dans des
territoires susceptibles de passer à l’ennemi. Ils pouvaient
rester enterrés pendant des années sans subir la moindre
altération. » À côté d’un manuel consacré aux techniques de
sabotage pour commandos stay-behind, on pouvait lire : « Dans
la zone d’occupation britannique en Autriche, des officiers de
la Marine Royale furent spécialement détachés pour aménager des
caches d’armes en montagne et collaborer avec des agents
recrutés sur place » [58]
D’anciens officiers du MI6 interprétèrent à juste titre cette
exposition comme un signe qu’ils étaient à présent libres de
s’exprimer sur l’Opération Gladio. Quelques mois après
l’inauguration, les anciens officiers de la Marine Royale Giles
et Preston, les seuls agents du MI6 dont les noms étaient cités
dans l’exposition à côté d’une photographie prise « dans les
Alpes autrichiennes, 1953-1954 », confirmèrent à l’écrivain
Michael Smith qu’à la fin des années quarante et au début des
années cinquante, États-uniens et Britanniques avaient recruté
des unités stay-behind en Europe de l’Ouest en prévision
d’une invasion soviétique. Giles et Preston furent envoyés à
Fort Monckton, non loin de Portsmouth en Angleterre, où les
Gladiateurs partageaient l’entraînement des SAS sous l’égide du
MI6. Ils étaient formés au cryptage, au maniement des armes à
feu et aux opérations secrètes. « On nous faisait faire des
exercices, sortir au beau milieu de la nuit et faire semblant de
faire exploser des trains sans que le chef de gare ou les
porteurs ne nous repèrent », se souvint Preston. « On
approchait en rampant et on faisait semblant de fixer des
charges explosives sur le côté droit de la locomotive » [59]
Giles se remémora avoir pris part à des opérations de
sabotage sur des trains britanniques en service comme, par
exemple, l’exercice qui eut lieu à la gare de triage
d’Eastleigh : « Nous déposions des briques dans les
locomotives pour simuler des pains de plastic. Je me rappelle
les files et les files de wagons, entièrement recouverts d’une
épaisse couche de neige, arrêtés là au milieu des nuages de
vapeur. Des soldats patrouillaient avec des chiens. À un moment
donné, les gardes se sont approchés, j’ai alors dû me cacher
entre les cylindres des locomotives et attendre qu’ils passent.
Nous ôtions aussi le bouchon des réservoirs d’huile des essieux
pour y verser du sable, ce qui avait pour conséquence, au bout
de quelques dizaines de kilomètres, de les faire tous
surchauffer » [60].
Le fait qu’il s’agisse de trains publics en service ne semblait
pas gêner les deux agents : « Ce n’était pas mon problème »,
expliqua Giles, « nous ne faisions que jouer ». « J’ai
dû arpenter Greenwich pendant 10 jours pour apprendre à filer
des gens et à semer ceux qui me filaient, la réalité concrète du
boulot d’espion », raconta Preston. Puis, ils furent envoyés
en Autriche avec pour mission de recruter et de former des
agents et supervisèrent le réseau de « bunkers souterrains
remplis d’armes de vêtements et de matériel » mis en place
par « le MI6 et la CIA » à destination du Gladio
autrichien [61]
En visitant le quartier général du MI6 sur les bords de la
Tamise à Londres en 1999, il ne fut pas surpris outre mesure
d’apprendre que le MI6 a pour règle de ne jamais évoquer les
secrets militaires.
(À suivre…)
Daniele Ganser,
historien suisse, spécialiste des relations internationales
contemporaines. Il est enseignant à l’Université de Bâle.

Cet article constitue le troisième chapitre des
Armées secrètes de l’OTAN
© Version française : éditions Demi-lune (2007).
[1]
Quotidien britannique The European du 9 novembre 1990.
[2]
Ibid. Il semble que le représentant de l’OTAN qui apporta
le rectificatif soit Robert Stratford. Voir Regine Igel,
Andreotti. Politik zwischen Geheimdienst und Mafia (Herbig
Verlag, Munich, 1997), p.343.
[3]
Quotidien britannique The Observer du 18 novembre 1990.
[4]
Quotidien britannique The Guardian du 10 novembre 1990.
[5]
Ibid., 30 janvier 1992.
[6]
Ibid., 16 janvier 1991.
[7]
Agence de presse internationale Reuters, 15 novembre 1990.
[8]
Aucun auteur spécifié, « Gladio. Un misterio de la guerra fria.
La trama secreta coordinada por mandos de la Alianza Atlantica
comienza a salir a la luz tras cuatro decadas de actividad »
dans le quotidien espagnol El Pais du 26 novembre 1990.
[9]
Aucun auteur spécifié, « El servicio espanol de inteligencia
mantiene estrechas relaciones con la OTAN. Serra ordena indagar
sobre la red Gladio en Espana » dans le quotidien espagnol El
Pais du 16 novembre 1990.
[10]
Erich Schmidt Eenboom,
Schnüffler ohne Nase. Der BND. Die unheimliche Macht im
Staate (Econ Verlag, Düsseldorf, 1993), p.365.
[11]
Quotidien portugais Expresso du 24 novembre 1990.
[12]
Ibid.
[13]
Agence de presse internationale Reuters, 13 novembre 1990.
Quotidien britannique The Independent du 16 novembre
1990.
[14]
Agence de presse internationale Associated Press, 14 novembre
1990. Agence de presse internationale Reuters, 12 november 1990.
Agence de presse internationale Reuters, 15 novembre 1990.
[15]
Hebdomadaire britannique The Independent on Sunday du 21
juin 1998. Critique d’un ouvrage sur Nixon (Nixon in Winter) par
l’ancienne assistante de Nixon : Monica Crowley.
[16]
Ils furent :
1951–1952 Gén. Dwight D Eisenhower, US Army ;
1952–1953 Gén. Matthew B Ridgway, US Army ;
1953–1956 Gén. Alfred M Gruenther, US Army ;
1956–1962 Gén. Lauris Norstad, US Air Force ;
1963–1969 Gén. Lyman L Lemnitzer, US Army ;
1969–1974 Gén. Andrew J Goodpaster, US Army ;
1974–1979 Gén. Alexander M Haig Jr, US Army ;
1979–1987 Gén. Bernard W Rogers, US Army ;
1987–1992 Gén. John R Galvin, US Army ;
1992–1993 Gén. John M Shalikashvili, US Army ;
1993–1997 Gén. George A Joulwan, US Army ;
1997–2000 Gén. Wesley K. Clark, US Army.
2000-2003 Gén. Joseph Ralston, US Air Force ;
2003-2006 Gén. James L. Jones, US Marine Corps ;
2006-2009 Gén. Bantz J. Craddock, US Army ;
2009- Am. James G. Stavridis, US Navy.
[17]
Jonathan Kwitny, « The CIA’s Secret Armies in Europe » dans The
Nation, 6 avril 1992, p.445.
[18]
Hebdomadaire allemand Der Spiegel, n°47, p.20, 19
novembre 1990.
[19]
Pietro Cedomi, « Services Secrets, Guerre Froide et
‘stay-behind’ Part III. Répertoire des réseaux S/B » dans le
périodique belge Fire ! Le Magazine de l’Homme d’Action,
novembre/ décembre 1991, p.82.
[20]
Commission d’enquête parlementaire sur Gladio, tel que résumé
dans le périodique britannique Statewatch,
janvier/février 1992.
[21]
Philip Willan,
Puppetmasters : The Political Use of Terrorism in Italy
(Constable, Londres, 1991), p.27.
[22]
Arthur Rowse, « Gladio : The Secret US War to subvert Italian
Democracy » dans Covert Action Quarterly, n°49, Été 1994,
p.3.
[23]
Extrait de Willan, Puppetmaster, p.27.
[24]
Mario Coglitore (ed.), La Notte dei Gladiatori. Omissioni e
silenze della Repubblica (Calusca Edizioni, Padoue, 1992),
p.34. « L’existence des protocoles secrets de l’OTAN est un
fait avéré car de Gaulle les a dénoncés explicitement le 7 mars
1966 et le Parlement de la RFA a récemment admis qu’ils
existaient » (ibid.).
[25]
Périodique britannique Searchlight, janvier 1991.
[26]
Paolo Inzerili, Gladio. La Verità negata (Edizioni
Analisi, Bologne, 1995), p.61.
[27]
Inzerilli, Gladio, p.62.
[28]
Gerardo Serravalle, Gladio (Edizione Associate, Rome,
1991), p.78.
[29]
Ibid., p.78.
[30]
Commission d’enquête parlementaire sur Gladio, tel que résumé
dans le périodique britannique Statewatch,
janvier/février 1992.
[31]
Inzerilli, Gladio, p.63.
[32]
Ibid.
[33]
Michel Van Ussel : Georges 923. Un agent du Gladio belge
parle. Témoignage (Éditions La Longue Vue, Bruxelles, 1991),
p.139.
[34]
Inzerilli, Gladio, p.64.
[35]
Courriel d’Anne-Marie Smith du service des archives de l’OTAN à
l’auteur, 18 août 2000.
[36]
Lettre du chef de la mission suisse à l’OTAN, l’ambassadeur
Anton Thalmann, à l’auteur, datée du mai 2001.
[37]
Lettre de Lee McClenny, responsible du service de relation
presse et médias de l’OTAN, à l’auteur, datée du 2 mai 2001.
[38]
Ibid.
[39]
Presidential Directive, National Security Decision Memorandum
40, Responsibility for the Conduct, Supervision and Coordination
of Covert Action Operations, Washington February 17 1970. Signed :
Richard Nixon.
[40]
Pour découvrir un historique complet des opérations secrètes de
la CIA dans le monde depuis 1945, voir William Blum : Killing
Hope. US Military and CIA interventions since World War II
(Common Courage Press, Maine, 1995). Version française :
Les Guerres scélérates (Parangon, 2004).
[41]
Source :
www.terrorism.com
[42]
Les trois commissions étaient la Commission du Sénat présidée
par Frank Church, la Commission de la Chambre des Représentants
présidée par Ottis Pike et la Commission Murphy du Président
Ford.
1. Report of the House Select Committee on Intelligence
[Pike Committee], Ninety-fourth Congress, Publié par Village
Voice, New York City, février 1976.
2. Report of the Commission on the Organization of the
Government for the Conduct of Foreign Policy [Murphy
Commission], US Government Printing Office, Washington DC, June
1975.
3. Final Report, of the United States Senate Select Committe
to Study Governmental Operations with Respect to Intelligence
Activities [Church Committee], US Government Printing
Office, Washington DC, April 1976.
Celui qui peut être considéré comme le meilleur des trois
rapports, le Rapport final de la Commission Sénatoriale
d’Enquête sur les Opérations du Gouvernement en matière de
Renseignement, se compose de six volumes. Le premier traite
du « Renseignement Extérieur et Militaire, de la CIA, des
opérations secrètes et la question du contrôle démocratique des
services secrets ». Dans le second volume, intitulé « Activités
de Renseignement et Droits des Citoyens États-uniens » le
rapport Church révèlent de quelle manière la NSA et le FBI ont
violé la vie privée des citoyens états-uniens. Le troisième
volume, intitulé « Rapports Internes Complémentaires sur les
Activités de Renseignement et les Droits des Citoyens
États-uniens », prolonge l’analyse du précédent et affirme que
« contre-espionnage » est une appellation impropre pour
« opération clandestine intérieure ». Le quatrième
volume, intitulé « Rapports Internes Complémentaires sur le
Renseignement Extérieur et Militaire » présente un historique de
la CIA de 1946 à 1975. Le cinquième volume, intitulé
« L’Assassinat du Président John F. Kennedy et le Travail des
Agences de Renseignement », tente d’établir si les services
secrets US ont ou non conspiré pour entretenir le secret autour
de l’assassinat de JFK. Le dernier volume, intitulé « Rapports
Complémentaires sur les Activités de Renseignement », traite de
l’évolution historique et de l’organisation de la capacité de
renseignement nationale de 1776 à 1976.
Des extraits de ces rapports ont été publiés en français sous le
titre Les Complots de la CIA. Manipulations et assassinats
(Stock, 1976).
[43]
Kathryn Olmsted,
Challenging the Secret Government : The Post-Watergate
Investigations of the CIA and FBI (University of North
Carolina Press, Chapelhill, 1996), p.9.
[44]
Quotidien britannique The Independent du 1er décembre
1990.
[45]
Jonathan Kwitny, « The CIA’s Secret Armies in Europe » dans
The Nation , 6 avril 1992, p.445.
[46]
Arthur Rowse, « Gladio. The Secret US War to Subvert Italian
Democracy » dans Covert Action Quarterly, n°49, Été 1994.
[47]
Requête FOIA : « L’Operation ‘Gladio’ de la CIA », déposée par
Malcolm Byrne le 15 avril 1991. Requête FOIA n° 910113.
[48]
Quotidien italien Corriere della Sera du 29 mai 1995.
[49]
Magazine politique autrichien Zoom, n° 4/5, 1996 : « Es
muss nicht immer Gladio sein. Attentate, Waffenlager,
Erinnerungslücken », p.6.
[50]
Bericht betreff US Waffenlager. Oesterreichisches
Bundesministerium für Inneres. Generaldirektor für die
öffentliche Sicherheit. Mag. Michael Sika. 28 novembre 1997.
Vienne, p.10.
[51]
Lettre datée du 28 décembre 2000 et adressée par la CIA à
l’auteur concernant la requête FOIA F-2000-02528 portant sur
l’opération Gladio.
[52]
Lettre datée du 23 janvier 2001 et adressée par l’auteur à Mme Dyer
de la CIA.
[53]
Lettre datée du 7 février 2001 et adressée par la coordinatrice
des questions d’information et de respect de la vie privée
Kathryn I. Dyer à l’auteur.
[54]
Au moment de la mise sous presse de l’édition française, soit 6
ans après la demande, l’auteur attend toujours… (Note de
l’éditeur)
[55]
Agence de presse internationale Associated Press, 14 novembre
1990.
[56]
Télévision britannique. BBC Newsnight, 4 avril 1991, 22 h 30.
Reportage du journaliste Peter Marshall sur Gladio.
[57]
Ibid.
[58]
Imperial War Museum, Londres. Exposition sur les Guerres
Secrètes. Visitée par l’auteur le 20 mai 1999. Le 4 juin 1999,
l’auteur rencontra Mark Siemens, du département de recherche du
musée et en charge de l’exposition sur les Guerres Secrètes, qui
souligna que l’unité secrète SOE, créée pendant le Seconde
Guerre mondiale, était le prédécesseur des stay-behinds
Gladio. L’auteur ne parvint à obtenir du MI6 aucune information
supplémentaire sur le phénomène.
[59]
Michael Smith, New Cloak, Old Dagger : How Britain’s Spies
Came in from the Cold (Gollancz, Londres, 1996), p.117. Basé
sur des entretiens avec Simon Preston le 11 octobre 1995 et
Michael Giles le 25 octobre 1995.
[60]
Smith, Dagger, p.117.
[61]
Ibid., p.118.
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