Lancement de la campagne Internationale pour la libération de
George Ibrahim Abdallah : enfin, Beirut se réveille Cirepal
George Ibrahim Abdallah
Vendredi 30 avril 2010
Ce fut une rencontre politique et juridique franco-libanaise
exceptionnelle ce jeudi 29 avril, à l’hôtel al-Safir à Beirut,
pour le lancement de la campagne internationale pour la
libération du prisonnier libanais George Ibrahim Abdallah,
injustement détenu depuis 26 ans, dans les prisons françaises.
Ont participé à cette rencontre
l’avocat de George, le militant français Jacques Vergès, et
l’ancien ministre français des affaires étrangères, Roland
Dumas, ainsi que le président du parti NPA, Alain Poujoulat,
ainsi qu’un grand nombre de personnalités libanaises,
palestiniennes et internationales : parmi celles-ci, le
représentant du général Michel Aoun, George Nakhlé, le
représentant du président du conseil des députés, Muhammad
Khawaja, les anciens ministres Bishara Merhej et Issam Nu’man,
le militant Anis Naccache, directeur du centre de recherches
Aman, le membre du bureau politique du Hezbollah, Ahmad Milli,
les deux prisonniers libérés Samir Kintar et Anwar Yassine.
C’est par le message vocal envoyé
par le prisonnier George Abdallah de sa prison française que la
conférence a débuté : « chers amis, camarades, frères et
sœurs, les murs honnis et les mesures prises m’empêchent d’être
en liaison directe avec vous, mais les hommages à la fermeté
derrière les barreaux arrivent toujours aux résistants, quelles
que soient les conditions difficiles, et quelles que soient les
distances.
Mes hommages les plus chaleureux
et mes sincères remerciements à votre mouvement solidaire. Votre
rencontre aujourd’hui me fait chaud au cœur et me donne
confiance dans la victoire, puisque chacun de vous porte un
aspect de cette résistance qui, lorsque tous ces aspects se
rencontrent et agissent de concert, ce qui est en effet le cas,
constituent la réponse historique à tous les effets de l’attaque
impérialiste actuelle. Un rang uni derrière le fusil de la
résistance, et un affrontement ferme de tous ceux qui mettent en
doute sa légitimité. Vous savez tous que le but direct des
forces impérialistes, d’Israël et de leurs collaborateurs dans
la région est précisément le fusil de la résistance, la décision
de résister et de respecter sa légitimité, mais aussi tout ce
qui met en avant le rôle créatif de l’unité des masses et de
leurs avant-gardes combattantes. Vous savez et vous voyez que
celui qui vise le fusil de la résistance vise aussi et en même
temps, l’unité du mouvement des masses et agit par tous les
moyens pour briser tous les liens d’unité du peuple et de ses
masses opprimées, plus particulièrement. Ceci est clair au
Liban, en Palestine et en Irak. Le fusil de la résistance a
fermement tenu, au Liban, il a libéré la terre et a recouvré la
souveraineté. Quelle fut l’attitude des impérialistes ? Elle a
été et est toujours occupée à fomenter des troubles et des
complots contre la résistance et les hommes de la résistance, au
nom de la terre et de souveraineté. C’est leur voie et leur
nature. La riposte naturelle à ceux-là consiste à activer le
mouvement des masses, en mettant en avant leurs revendications.
Elle consiste aussi à s’accrocher au fusil de la résistance et à
la décision de résister. La riposte naturelle consiste à
affirmer encore plus l’unité du sort qui lie les Libanais aux
Palestiniens. Isoler le peuple palestinien et les masses
palestiniennes n’a entraîné que des catastrophes à tous. Ce qui
se déroule aujourd’hui en Palestine, la colonisation, la
répression, les préparatifs à une autre Nakba, ne concerne pas
le peuple palestinien seul, mais nous concernent tous, non pas
par solidarité fraternelle ou sympathie, seulement, mais parce
que cela nous concerne tous, et au même degré, car la
confrontation qui se prépare définira l’avenir de toutes les
entités de la région, le Liban étant l’une d’elles. Vivent dans
l’illusion ceux qui pensent pouvoir vivre en sécurité et
s’épanouir sur les ruines du peuple palestinien et des masses
palestiniennes, ils vivent dans l’illusion ceux qui pensent que
l’insistance de Netanyahu et de Lieberman et de leurs semblables
à propos de la judéité d’Israël n’est qu’un mot d’ordre
insignifiant ayant juste un rôle raciste. Evidemment, la réponse
naturelle et nécessaire aujourd’hui consiste à s’accrocher pour
imposer, par tous les moyens, le droit au retour, base et
fondement de la question palestinienne. S’accrocher à l’uité du
peuple palestinien et réclamer aux forces responsables de mettre
fin à l’état de division, cette division entre la Cisjordanie et
la bande de Gaza, qui est une catastrophe. Les flambeaux de la
liberté sont les citadelles de la dignité, nos prisonniers et
prisonnières, à la ferme détermination, ont matérialisé, par
leur mouvement, l’unité et les mécanismes de la confontration
avec l’ennemi.
Pouvons-nous, dans ces conditions ne pas prendre en compte la
position de la Turquie, qui affirme actuellement sa solidarité
avec notre cause première, alors qu’elle était un des piliers de
l’Etat sioniste dans la région ? Pouvons-nous négliger
l’importance de l’alliance syro-iranienne pour faire face à
l’impérialisme ? Au moment où les forces impérialistes essaient
de profiter de toute occasion pour se ruer sur nos peuples,
soutenues par les forces de la réaction dans la région.
La fermeté des révolutionnaires est la condition existentielle
pour rassembler autour d’eux une solidarité révolutionnaire, et
surtout une condition vitale pour la solidarité avec eux-mêmes,
en tant que militants prisonniers. En cette période, les
convictions anti-impérialistes et anti-capitalistes sont
devenues des accusations suffisantes, et des preuves
criminelles, devant les tribunaux européens, et notamment
lorsque cela se rapporte aux militants du Moyen-Orient. Après
avoir été condamnés aux peines les plus lourdes, les militants
révolutionnaires sont détenus toute leur vie tant qu’ils ne se
repentent pas ou ne s’agenouillent pas. Il ne s’agit pas
seulement d’un fanatisme ou d’une vengeance de la part de ceux
qui sont responsables de l’appareil de l’Etat, mais ces
pratiques sont plutôt un reflet de la logique générale d’une
justice qui est au service du système impérialiste en crise, qui
porte sa propre vision envers les révolutionnaires de nos
peuples. Le mot d’ordre de la bourgeoisie actuelle, c’est la
soumission volontaire et le regret, pour obtenir la liberté,
leur mot d’ordre ne faisant que dévoiler la prostitution de la
justice bourgeoise. En cette période de crise, je suis de plus
en plus certain que cette justice n’est en fait composée que de
mesures administratives soumises, en fin de compte, au rapport
de forces entre les forces de la révolution solidaires autour
des révolutionnaires emprisonnés d’une part, et entre les forces
de la réaction voulant les garder en prison et les soumettre à
toutes formes de chantage.
A bas les projets impérialistes et leurs
valets dans la région, et la victoire aux masses résistantes de
notre peuple. Hommage et gloire à tous nos martyrs. Ensemble
vers la victoire. Avec mes chaleureuses salutations. Georges
Abdallah. »
Messages de Marwan Barghouty et
d’AhmadSaadate
De sa prison de Haddarim, en Palestine occupée, Marwan Barghouty
a salué la conférence, en son nom et au nom de ses frères
prisonniers, et a exprimé sa solidarité avec le militant George
Abdallah, affirmant qu’ils réclament du gouvernement français la
libération immédiate de George et leur solidarité avec sa juste
cause, pour laquelle il s’est longtemps sacrifié en résistant à
l’occupation sioniste des terres libanaises et palestiniennes.
Pour sa part, le représentant du FPLP au Liban, Marwan Abdel Al
a lu un message du secrétaire général du FPLP, le prisonnier
Ahmad Saadate, qui se trouve actuellement en isolement dans la
prison Ramon, en Palestine occupée, disant : « les partisans de
la liberté dans le monde sont solidaires avec la juste cause de
George et réclament des autorités françaises sa libération
immédiate. Le train de l’histoire va de l’avant et l’histoire de
l’oppression impérialiste et coloniale ne reviendra pas, quels
que soient leurs noms et quelle que soit leur puissance et leur
domination des peuples opprimés.
L’avocat militant Jacques Vergès
L’avocat qui a défendu Abdallah dès son arrestation, Jacques
Vergès, a exprimé sa joie de se retrouver au Liban en se
rappelant la première visite qu’il a faite au pays, lorsqu’il
était envoyé par le gouvernement algérien pour défendre le
prisonnier Hijazi, combattant palestinien, en Palestine occupée,
et qu’il en fut alors expulsé vers le Liban. Il a accusé de
mensonge la ministre française de la justice, Michelle
Alliot-Marie qui a déclaré, lors de sa récente visite au Liban,
que George Abdallah est un criminel. « Car le procureur général
ne cesse de dire qu’il faut enfermer George Abdallah à cause de
ses opinions et de sa position nationale. Par cette attitude, le
gouvernement français proclame clairement qu’il est hostile à la
résistance palestinienne et libanaise ». « Je ressens de la
honte, a-t-il poursuivi, parce que la France du général de
Gaulle est devenue un terrain pour Israël. Il est honteux que la
France du général de Gaulle soit soumise à l’administration
américaine. Il y a une lettre, en possession de mon ami Roland
Dumas, signée par la ministre américaine des affaires
étrangères, Condoliza Rice, qui réclame le maintien de la
détention de George Abdallah. C’est le style du maître qui
ordonne son valet… George n’est qu’un combattant de la liberté
qui fait face à l’occupation. C’est un homme intelligent,
fermement attaché à ses opinions et positions. Il lui suffit de
renier ses convictions pour être libéré. Mais le maintien de
George Abdallah en détention est un cancer sur la face de la
France, et nous nous battons pour que les dirigeants français
soient dignes de leur peuple. »
Maître Vergès a demandé à l’assemblée de faire un effort pour
que le Liban officiel réclame la libération de George Abdallah,
prenant exemple sur l’Iran : « Dans cette salle se trouve parmi
vous un ami, le militant Anis Naccache, que le gouvernement
iranien a pu libérer des prisons françaises. Vous direz
probablement que l’Iran est un pays puissant et qu’il a des
intérêts, mais le Liban est puissant, aussi, la France a des
intérêts au Liban et il suffit que les autorités libanaises
réclament la libération de George Abdallah en proposant de lui
ouvrir les portes. »
Quant à l’ancien ministre français des affaires étrangères,
Roland Dumas, il a affirmé que toutes les conditions sont
réunies pour la libération de George Abdallah, sauf celle de son
reni de sa cause. « Son dossier ne montre qu’une seule chose :
c’est un grand militant » a-t-il affirmé, espérant revenir au
Liban pour saluer George Abdallah dans son pays.
Pour le député Nawwar Sahili, du bloc de la fidélité à la
résistance, George Abdallah est un symbole de la résistance, et
« nous sommes certains que George Abdallah sera bientôt
libéré ». Abu Imad Rifa’i, représentant du mouvement du Jihad
islamique au Liban, a salué en George Abdallah le représentant
de cette jeunesse arabe qui a consacré sa vie à la cause
palestinienne et la juste cause de la nation. Il a réclamé sa
libération immédiate des prisons françaises, en insistant sur la
nécessité, pour les autorités françaises, de se débarrasser des
pressions sionistes et américaines à propos de cette cause.
Quant à Alain Pouloulat, dirigeant au NPA, il a déclaré que son
parti s’engageait à la libération immédiate de George Abdallah
et qu’il était prêt à faire partie de la campagne internationale
pour sa libération, et de coopérer avec toutes les organisations
et partis libanais et arabes pour ce faire.
La déclaration de Beirut
Après de nombreuses interventions de personnalités politiques et
religieuses, ainsi que des militants de la cause des prisonniers
(Muhammad Safa et sheikh Atallah Hammoud), qui ont réclamé qu’un
effort soit fait auprès des officiels libanais pour les placer
face à leurs responsabilités et auprès des autorités françaises,
rappelant que le Liban n’était plus un pays sous mandat
français, la déclaration de Beirut, au nom des participants, a
été lue et approuvée.
« Déclaration de Beirut (29 avril 2010)
Nous, les participants à la conférence de lancement de la
campagne internationale, juridique et civile, pour la libération
du prisonnier libanais détenu dans les prisons françaises,
George Ibrahim Abdallah, conférence tenue à Beirut le 29 avril
2010, avec la participation de personnalités arabes et
internationales, politiques et juridiques, intellectuelles et
académiques, nous proclamons ce qui suit :
« Premièrement : Nous sommes fiers du grand militant George
Abdallah, qui a passé plus de 26 ans détenu dans les prisons
françaises, et dont le maintien de la détention est arbitraire,
contraire aux lois internationales, et une violation des
règlements de la juridiction française. Est-ce que le pouvoir
judiciaire français, qui s’inspire des principes de la
révolution française, veut appliquer la justice ou se venger ?
Deuxièmement : L’assemblée considère que la non libération de
George Abdallah, bien qu’il réponde aux conditions exigées pour
sa libération, depuis 1999, est une décision politique dont le
gouvernement français assume les responsabilités tant sur le
plan juridique que moral. L’assemblée réunie réclame que le
pouvoir judiciaire français prouve son indépendance et son refus
des pressions américaines et israéliennes. L’assemblée
renouvelle sa demande aux autorités françaises de libérer
immédiatement George Abdallah.
Troisièmement : les gouvernements libanais successifs (hormis le
dernier gouvernement du président Salim El-Hoss) ont négligé la
cause de George Abdallah, et ce manquement intentionnel ne peut
être compris que comme un comportement considérant que les
autorités françaises exercent un mandat sur le Liban. C’est
pourquoi nous appelons les autorités libanaises à une
intervention sérieuse auprès des autorités françaises et exiger
la libération immédiate de George Abdallah. Au cas où les
autorités françaises ne suivent pas, nous appelons à une
proposition de résolution devant la commission des droits de
l’homme de l’ONU, dénonçant le maintien de sa détention
arbitraire.
Quatrièmement : La campagne internationale pour la libération de
George Abdallah sera le creuset rassemblant les différents
comités ou les initiatives libanaises, arabes et internationales
qui tendent à la libération de George Abdallah. Cette campagne
se poursuivra de manière ascendante, au Liban et en France,
prenant différentes formes, rassemblements ou manifestations, et
la campagne empêchera que cette cause soit négligée par les
agendas politiques libanais ou français.
Cinquièmement : l’assemblée
réunie appelle les organisations non gouvernementales concernées
par les droits de l’homme, les partis, les syndicats et les
médias, à examiner la situation juridique de George Abdallah, et
notamment le procès inique auquel il a été soumis, et les
pressions exerçées sur le pouvoir judiciaire français pour
empêcher sa libération, et notamment en 1999, à signer la
pétition exigeant sa libération, et à écrire à ce propos au
gouvernement français et à l’Union européenne. »
En espérant que cette campagne se poursuive, que les initiatives
se multiplient, qu’elles soient officielles ou populaires,
jusqu’au retour de George Abdallah dans son pays, qui attend le
retour d’un héros.
Au moment où se déroulait cette
conférence, consacrée à George Abdallah, les personnalités
présentes avaient également à l’esprit la lourde condamnation
récente prise par le pouvoir judiciaire égyptien à l’encontre du
combattant exemplaire Sami Shihab (Muhammad Mansour, de son vrai
nom) et de ses frères, accusés d’avoir soutenu la résistance du
peuple palestinien à Gaza.
En effet, le tribunal
exceptionnel égyptien a condamné Sami Shihab à 15 ans de prison
ferme, alors qu’il a condamné Muhammad Qabalan et d’autres
militants à la perpétuité, rien que parce qu’ils ont décidé
d’apporter une aide concrète à la résistance palestinienne.
Aujourd’hui, parler de résistance et d’aide à la résistance
devient un crime dans l’Egypte soumise aux Etats-Unis et à
Israël de Hosni Moubarak. Alors qu’il n’y a rien de plus naturel
que d’affirmer et d’agir pour soutenir nos frères en Palestine,
dans toute la Palestine occupée, alors qu’il s’agit du premier
devoir des peuples arabes et musulmans, avant d’être celui des
peuples libres dans le monde, le soutien à la résistance est
devenu un acte criminel.
Nous sommes certains que Sami
Shihab et ses frères ne resteront pas longtemps en prison.
Sayyid Hassan Nasrullah l’a d’ailleurs affirmé, répondant à une
station télévisée koweitienne : « cette affaire est politique,
et nous la réglerons au moyen des voies politiques ». Suite à la
condamnation de ces nobles militants, héros de la nation arabe,
Sayyid Nasrullah a témoigné sa solidarité avec leurs familles en
leur promettant de faire ce qu’il faut pour mettre fin à cette
honteuse condamnation.
George Abdallah, Sami Shihab,
Yahya Skaf, Samir Kintar, Anwar Yassin, et surtout hajj Imad
Mughnieh et des milliers de soldats inconnus, martyrs, blessés
ou sur le terrain, le Liban a de quoi être fier de sa
participation à la lutte pour libérer la Palestine.
Cirepal (Centre d'Information sur la Résistance en Palestine)
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