Opinion
Un
habitant de la ville d’Alep dit sa
douleur et sa lassitude face aux
mensonges colportés par les médias
Christos
Anesti
Lundi 25 mars 2013
Résignation et lassitude
résument assez bien l’état d’esprit
actuel des habitants d’Alep
En effet, les Alépins se sont résignés :
A voir leur ville coupée en deux parties
avec l’afflux de centaines de milliers
de déplacés qui ont envahi les zones «
sûres », sans se lamenter. (Et le flux
continue : des petites camionnettes
pleines de gens et quelques meubles et
matelas circulent dans les rues à la
recherche d’un abri)
A entendre le bruit assourdissant des
rafales de mitrailleuses et des tirs de
canons, sans broncher et des avions,
sans lever la tête.
A vivre constamment sous la menace
d’obus de mortier qui tombent n’ importe
où, de tirs de snippers qui tuent
n’importe qui et de voitures piégées qui
explosent n’importe quand, sans avoir
peur.
A être des cibles de kidnappings qui ont
lieu quotidiennement, sans se cacher.
A être privés du courant électrique et
de l’eau courante (2 à 4 heures par jour
seulement), du téléphone portable et de
l’internet (réseau très fantaisiste), et
du téléphone fixe (coupures fréquentes),
sans se plaindre.
A subir des embouteillages monstres sur
le peu de routes encore ouvertes dans
les quartiers « sûrs » (la plupart des
autres routes et rues étant fermées à la
circulation pour cause de sécurité), et
à devoir souvent rentrer chez eux à pied
parce que les routes conduisant à leurs
quartiers ont été fermé par des milices,
sans rouspéter. (Nous avons vu des
jeunes porter leur vieux père ou grand
père sur le dos et monter a Cheikh
Maksoud !)
A rentrer chez eux dès le coucher du
soleil (18 h maintenant) et n’en sortir
que le matin, transformant Alep en
ville-fantôme, sans pouvoir se divertir.
A voir tous les trottoirs envahis par
des étals et des marchands ambulants qui
vendent n’importe quoi pour pouvoir
survivre, sans se plaindre que leur
ville soit devenue un grand village.
A croiser, tous les jours, la pauvreté
et de plus en plus de mendiants dans les
rues sans se révolter.
A constater que l’économie est
complètement ruinée, les usines
démantelées et volées et les commerces
brûlés sans désespérer. Et, de plus, ils
sont las :
Las de ne pas apercevoir un brin de
solution à des événements qui durent en
Syrie depuis 2 ans (15 mars 2011) et à
Alep depuis 8 mois (23 juillet 2012).
Las de voir la Syrie, nommée « berceau
de la civilisation » par la communauté
internationale et Alep, la plus ancienne
ville toujours habitée du monde,
détruites, leurs trésors archéologiques
volés, leur tissu social effiloché, la
sécurité, qui y régnait et que les
autres nous enviaient, disparue, et la
coexistence entre les différentes
communautés du pays et la tolérance
remplacées par un fanatisme religieux
importé.
Las de devoir
démentir tous les mensonges colportés
par les medias étrangers.
Las de voir les
grandes puissances proposer une solution
négociée entre les deux parties tout en
récusant l’une d’elle et de décider
d’armer une partie en « armes défensives
et non-létales » comme si ces dernières
pouvaient exister.
Malgré ce contexte assez sombre, nous, «
les Maristes Bleus » continuons trois
écoles de Cheikh Maksoud. Nous y allons
quotidiennement passer la journée avec
eux pour accompagner les mères,
divertir, éduquer et instruire les
enfants (projet : I learn), distribuer
les denrées pour le petit déjeuner et le
souper, apporter chaque jour un repas
chaud à midi, soigner les malades, nous
occuper de l’hygiène et de l’état
sanitaire, sans oublier le lait pour les
enfants et les nourrissons ainsi que les
couches. Des vêtements et des chaussures
sont donnés à l’occasion. Depuis 2
semaines, le repas de midi que nous
distribuons tous les jours aux déplacés
dont nous avons la charge nous est
fourni gratuitement par une association
caritative musulmane « Al Ihssan » qui
prépare dans ses locaux des dizaines de
milliers de repas par jour pour les
déplacés des écoles. A l’occasion de la
fête des Mères, que nous célébrons en
Syrie le 21 Mars, nous avons organisé,
avec leurs enfants, une fête pour les
Mamans déplacées.
Nous poursuivons toujours notre projet «
le Panier de la Montagne » qui consiste
à fournir un panier alimentaire mensuel
aux chrétiens du quartier de Cheikh
Maksoud qui sont sans ressources à cause
des événements. Ils sont 300 familles.
Mercredi 27, aura lieu la distribution
du 8ème panier mensuel et, à cette
occasion, chaque famille recevra aussi
un kilo de viande pour que Pâques soit
aussi une fête. Nous
n’oublions pas non plus les familles
démunies qui habitent ailleurs que le
quartier de Cheikh Maksoud et que nous
soutenons depuis 25 ans dans le cadre de
notre association « l’Oreille de Dieu ».
Récemment, nous, Les Maristes, avons
pris l’initiative de proposer une
réunion à toutes les associations
caritatives qui portent secours aux
chrétiens démunis d’Alep. Les
responsables des 13 associations se sont
rencontrés deux fois pour se connaître
et pour coordonner leur action, recouper
leurs listes, et harmoniser les secours.
Dans notre quotidien de plus en plus
difficile, nous sommes consolés par
plusieurs lueurs d’espoir et d’Espérance
:
Nos bénévoles continuent leur engagement
avec nous malgré qu’il soit devenu de
plus en plus périlleux d’aller à Cheikh
Maksoud, les accès sont parfois bloqués,
des obus y tombent souvent et des
snippers font parfois des victimes.
Les Syriens dans leur majorité refusent
la violence et aspirent à l’arrêt des
hostilités et à retrouver le climat
fraternel d’autrefois.
Nous sommes émerveillés par ce réseau de
solidarité qui s’est tissé autour de
nous tant au niveau local que national
ou international. Nous ne pouvons assez
remercier tous ceux qui, par des
pensées, des messages ou des dons nous
ont manifesté leur amitié, leur
solidarité et leur amour.
Pour terminer, et à l’occasion de
l’élection du pape François, nous
voulons partager avec vous cette prière
de St François d’Assise :
Seigneur, faites de moi un instrument de
votre Paix !
Là où il y a de la haine, que je mette
l’amour.
Là où il y a l’offense, que je mette le
pardon.
Là où il y a la discorde, que je mette
l’union.
Là où il y a l’erreur, que je mette la
vérité.
Là où il y a le doute, que je mette la
foi.
Là où il y a le désespoir, que je mette
l’espérance.
Là où il y a les ténèbres, que je mette
votre lumière.
Là où il y a la tristesse, que je mette
la joie. O maître,
que je ne cherche pas tant
A être consolé……..qu’à consoler ;
A être compris……..qu’à comprendre ;
A être aimé…………..qu’à aimer ;
Car :
C’est en donnant…..qu’on reçoit ;
C’est en s’oubliant…..qu’on trouve ;
C’est en pardonnant…..qu’on est pardonné
;
C’est en mourant….qu’on ressuscite à la
vie éternelle A
l’occasion de Pâques, nous voulons vous
dire que nous croyons en l’Espérance
chrétienne, sans quoi, la foi n’est que
paroles et la charité n’est qu’aumône.
Nous croyons que la lumière jaillira des
ténèbres et qu’après la mort il y a la
résurrection et la vie.
Bonnes Pâques
Christos Anesti
Pour « les Maristes
Bleus » (*)
24 Mars 2013
(*) Nous ne divulguons pas de nom
pour des raisons de sécurité
Le
dossier Syrie
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