Nicolas Bedos:
histoire d'un suicide médiatique en direct Chris Lefebvre
Lundi 8 novembre 2010
Il en était conscient, averti, prévenu. Vendredi soir
dernier, dans sa chronique hebdomadaire au sein de l’émission de
Franz-Olivier Gisbert, Nicolas Bedos n’a pas sourcillé en lisant
sur son prompteur ses propres mots, défilants en ordre de
bataille sous le regard médusé, ou le rire gêné de tous.
La semaine critique, c’est le nom de l’émission en
question qui, pour l’occasion, recevait entre autres Michel
Rocard, Elisabeth Lévy et Alain Finkielkraut. C’est dire s’il
fallait du cran au jeune Bedos, qui décidemment tient beaucoup
de son père, pour se livrer à cet exercice périlleux en cette
compagnie. En cause ? Une critique franche et directe de la
politique menée par l’Etat d’Israël, ainsi que du business
éhonté existant autour de la Shoah. Le tout en direct sur le
service public s'il vous plait. Le téléspectateur lambda,
formaté à l’idéologie dominante depuis l’achat de sa télévision,
a eu bien des raisons de se frotter les yeux, perturbé qu’il
était par cette chronique fracassante et décalée.
Au départ, l’humoriste oriente son papier sur la critique d’un
film récent, Elle s’appelait Sarah, film utilisant avec
excès, comme tous ses semblables, « la mémoire de la shoah
afin de renflouer les caisses lacrymales du cinéma français »,
grâce bien entendu au « devoir de mémoire, qui dispense au
passage le cinéaste de faire preuve du moindre talent, et lui
permet de se hisser vers le million d’entrées en raflant les
écoliers d’aujourd’hui pour les parquer de force dans des salles
de cinéma pédagogiques ».
Et Bedos de poursuivre, avec encore plus de brio et d’audace :
« Jeudi je fais un nouveau rêve, celui dans lequel je
pourrais dégueuler sur Netanyahou et sur la politique menée par
l’Etat d’Israël sans que personne ne me traite d’antisémite (…)
ou d’antisémite inconscient qui, au fond de lui, n’ose le dire
consciemment mais rêve de voir pendus : Patrick Bruel, Primo
Lévy, Pierre Bénichou et ce qui reste d’Ariel Sharon (…) moi qui
suis tellement con que je n’ai pas saisit cette notion très
subtile selon laquelle s’indigner devant une politique honteuse
c’est vouloir du mal à tous les juifs de la planète ».
Un coup de fouet, une décharge électrique, un rayon de soleil
sur le PAF. Quel plaisir de se délecter des sourires crispés
d’Elisabeth Lévy, et mieux encore, de l’air effondré du grand
Finkielkraut qui, comme par un heureux hasard, venait justement
présenter un nouveau livre consacré à - devinez quoi –
l’extermination des juifs par les nazis (« L’interminable
écriture de l’extermination »). Nicolas Bedos médaillé d’or du
courage médiatique de l’année ? L’humoriste a toutes ses
chances. Dommage que ce dernier finisse tout de même par en
placer une contre Dieudonné, sur un ton malgré tout un brin
ironique.
Malheureusement, et vous l’aurez compris, ce genre de courage
n’est pas tellement salué et récompensé dans les médias
français. Au contraire, il est même bien souvent sanctionné. La
sanction en question étant une action en justice menée par la
flopée habituelle d’associations « antiracistes », qui n’en
manquent pas une pour contribuer au business mémoriel, ou
encore, plus classique, une disparition totale des écrans, avec
un dénigrement et une diabolisation en guise d’accompagnement.
C’est donc à se demander pourquoi le fils Bedos en est arrivé à
se tirer une balle dans le pied, en scandant la vérité à qui
voulait bien l’entendre en direct sur le service public (France
2). Qu’importe, mieux vaut la sincérité et le courage que
l’hypocrisie et la lâcheté. Un coup de maître à saluer aussi
ouvertement que possible.
Question : ce probable suicide médiatique sera-t-il logiquement
suivi des habituelles conséquences ? Les symptômes pourraient
apparaitre très prochainement. Le premier, inquiétant, étant
déjà en cours. En effet, les médias ont très peu parlé de cette
sortie héroïque – pour ne pas dire pas du tout. Pour le reste,
il faudra patienter. En attendant, un grand bravo bien mérité
pour Nicolas Bedos, en lui souhaitant de ne pas céder à la
pression et de tenir la barre, emporté par le courage et la
fougue de la jeunesse.
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