Opinion
Le calendrier de
Netanyahu
Charles Enderlin
Charles
Enderlin
Samedi 29 septembre
2012
Lorsque les
Iraniens auront enrichi 240 kg d’uranium
à 20%, ils seront très proches d’un
enrichissement à 90% et pourront obtenir
la quantité nécessaire pour fabriquer
l’arme atomique. Au rythme actuel, cela
pourrait se produire d’ici six à neuf
mois. C’est la ligne rouge que Benjamin
Netanyahu a tracé dans son discours de
jeudi devant l’Assemblée générale des
Nations Unies. Ainsi, il a d’abord calmé
l’administration américaine qui
craignait une intervention israélienne
avant les élections de novembre aux
Etats Unis. Donc, à priori, pas de
guerre avant – apparemment- le mois de
mars. Surtout, il a voulu se donner du
temps. Ce délai permettra peut-être aux
sanctions internationales de faire leur
effet et d’amener les Ayatollahs à
renoncer au nucléaire militaire.
En Israël, l’état-major, le Mossad et le
Shin Beth sont contre une frappe en
Iran, sans la participation des Etats
Unis. Ils pourraient changer d’avis
s’ils ont la preuve qu’il n’y a pas
d’autre choix. Par exemple si les
Iraniens sont sur le point d’acquérir
l’arme nucléaire alors que Washington a
décidé de laisser faire et Israël se
retrouve seul. Il faut rappeler, à ce
stade que, jamais dans le passé, Israël
n’a lancé d’opération militaire sans
l’accord d’au moins plusieurs généraux
et des patrons des renseignements. En
l’occurrence Netanyahu et Ehoud Barak,
le ministre de la défense, sont seuls à
prêcher l’intervention unilatérale. Et
puis, six mois ne seraient pas de trop
pour préparer l’arrière israélien. Près
de la moitié de la population n’a pas de
kits NBC. La plupart des abris doit être
mis en état. Il faudra également
persuader le public israélien de la
justesse d’une opération qui pourrait
déboucher sur une guerre régionale avec
des centaines de morts, des milliers de
blessés, des milliards de dégâts, une
économie sinistrée. Sans parler des
conséquences internationales et des
réactions dans le monde arabe et, bien
sûr, l’éventualité d’un échec, l’Iran
accélérant la mise au point du
nucléaire. Jusqu’à présent l’opinion
public est partagée. Selon le dernier
sondage plus de la moitié des Israéliens
craint qu’une guerre mette en danger
l’existence même de l’état.
D’autres considérations de politique
intérieure ont aussi pu jouer dans
l’établissement du calendrier présenté
par Netanyahu à l’ONU. Il envisage de
dissoudre le parlement et d’organiser
des élections anticipées. Selon les
sondages, le Likoud a toutes les chances
de l’emporter alors que son taux de
popularité dépasse largement celui de
tous ses adversaires, à gauche et au
centre. Cela, en dépit du budget
d’austérité qu’il veut faire adopter au
cours des prochaines semaines. La
coalition droite-religieux
nationalistes-orthodoxes sortirait
renforcée du scrutin et aurait la
majorité absolue au parlement. Le
scrutin, placé sous le signe de la
menace iranienne, lui donnerait ainsi la
légitimité de prendre la décision
fatidique et les généraux auront du mal
à s’y opposer. Les Israéliens pourraient
donc aller voter en février ou mars
prochain. Mais, en six mois tout peut
arriver. Et puis, il ne faut jamais
faire des paris sur le résultat
d’élections en Israël. Les électeurs
israéliens ont montré qu’ils peuvent
surprendre.
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