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L'EXPRESSIONDZ.COM
A 24 HEURES DE LA PRÉSIDENTIELLE TUNISIENNE
Ben Ali veut
un score record
Brahim Takheroubt
Le président Zine El Abidine Ben
Ali
Samedi 24 octobre 2009
Sourd au «tapage médiatique», Tunis soutient que le
changement démocratique «doit s’accomplir progressivement et à
pas sûrs...» Hier, à minuit, ont été
clôturées les festivités électorales en Tunisie. Demain, près de
5 millions de votants se rendront aux urnes pour élire un
nouveau président de la République et les membres du Parlement.
En 2004, 4,8 millions de Tunisiens ont pris part à l’élection
présidentielle. Près de 500.000 jeunes prendront part pour la
première fois à ces élections qui se dérouleront dans près de
12.000 centres de vote répartis à travers le pays. À 24 heures
du scrutin présidentiel tout est fin prêt. La seule inconnue en
suspens reste évidemment le score du président sortant, Zine El
Abidine Ben Ali. Les membres de l’exécutif du puissant parti au
pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD),
qui, selon ses dirigeants, compte plus de deux millions
d’adhérents, ne veulent pas se contenter de merles là où il y a
des grives. «Nous voulons le score le plus fort possible pour
prouver notre suprématie.» Lors de la dernière élection
présidentielle en 2004, Ben Ali avait officiellement raflé la
mise en récoltant 94,4% des voix. Un quasi-unanimisme autour de
«l’artisan du changement» que justifient ses partisans
par un bilan économique qui fait rougir bien des pays africains
autrement plus nantis que la «petite» Tunisie. «Montrez
de quoi vous êtes capables!», semblent dire non sans fierté,
ses partisans qui exhibent à tout bout de champ le bilan «largement
positif» du successeur celui qui «a sauvé le pays de la
déliquescence». Deux décennies ont suffi au successeur de
Lahbib Bourguiba démis en 1987 pour «sénilité», pour
hisser la Tunisie au rang de pays émergent, aujourd’hui
qualifiée de «dragon de l’Afrique». «Ensemble pour
relever les défis», tel est le slogan du président sortant.
Pour ses partisans, le principal défi est celui de faire entrer
la Tunisie dans l’arène des pays développés.
Quatre candidats et
un opposant
Au pouvoir depuis 22 ans, le président en exercice, Ben Ali, âgé
de 73 ans, brigue un cinquième mandat consécutif, le dernier
théoriquement, et il est quasiment assuré de remporter haut la
main cette élection face à trois autres candidats de
l’opposition. Le président candidat aura pour adversaires trois
dirigeants de l’opposition. Deux sont qualifiés par la presse
tunisienne de modérés en ce sens qu’ils sont considérés comme
proches du pouvoir. Cependant, les trois prétendants à la
magistrature suprême du pays ne se font pas d’illusions quant à
l’issue du scrutin. Mohamed Bouchiha, le chef du Parti de
l’unité populaire (PUP), avoue que sa candidature vise à «contribuer
à l’évolution de la vie politique» en Tunisie et sans plus.
Ancien journaliste et professeur d’histoire et géographie, âgé
de 60 ans, il présente son parti comme «une force de
proposition et de compromis». Lors de son dernier meeting à
la Maison de la culture Ibnou Rachiq, où il a rassemblé environ
500 personnes, Bouchiha n’a pas manqué de vanter les mérites du
président dans son oeuvre de construction de la Tunisie. C’est
sa deuxième participation à la présidentielle après celle de
2004 durant laquelle il a obtenu 166.629 voix. C’est un record
en soi puisqu’il a été le premier opposant à avoir franchi la
barre des 1% dans une élection présidentielle.
Pratiquement sur la même longueur d’onde, le dirigeant de
l’Union démocratique unioniste (UDU), Ahmed Inoubli, prône «une
nouvelle génération de réformes politiques» pour promouvoir
les libertés et consacrer le respect des lois.
L’expérience
algérienne fait peur
Cet avocat de 51 ans développe un discours panarabiste qui prend
racine dans le passé glorieux de la lointaine Umma arabe. Son
cheval de bataille: le contrôle du pouvoir exécutif par le
Parlement et la révision du Code électoral. Il propose également
«l’abolition du Code de la presse pour garantir la liberté
d’expression et d’opinion en Tunisie». Le leader du
mouvement Ettajdid (Le Renouveau ex-Parti communiste), Ahmed
Brahim, est incontestablement le candidat le plus sérieux aux
yeux de l’opinion tunisienne après Ben Ali. Ahmed Brahim se
démarque des deux précédents candidats par sa verve et son sens
critique envers le pouvoir. Il se défend d’ailleurs de faire de
la figuration en se présentant comme «un vrai candidat de
l’opposition démocratique» et entend «traiter d’égal à
égal» avec le candidat du parti au pouvoir. Pour les
observateurs politiques, cet universitaire de 63 ans est
téméraire en dépit des rapports de force qui ne sont pas en sa
faveur. «Je suis conscient que l’alternance n’est pas pour
demain, mais au moins que le pays entende des voix différentes»,
soutien t-il à chacune de ses sorties sur le terrain. C’est un
candidat sérieux mais qui est loin de bousculer Ben Ali dans son
fauteuil présidentiel. A son arrivée au pouvoir en 1987, Ben Ali
avait limité à trois le nombre de mandats présidentiels en
abrogeant ainsi la présidence à vie instituée par Bourguiba.
Cette limitation a été supprimée en 2002 par voie référendaire
et l’âge de la candidature à la présidence repoussé de 70 à 75
ans. Cela étant, la Tunisie n’est pas au bout de ses peines.
Envié et vilipendé parfois de manière pavlovienne, le régime de
Ben Ali fait face à une critique acerbe des médias étrangers.
«Jamais la Tunisie n’a été la cible d’autant de critiques
souvent injustifiées», fait remarquer un diplomate tunisien
qui voit dans «ces critiques souvent injustifiées une volonté
de créer de toutes pièces une zizanie à l’intérieur de la
Tunisie». «Comme si la stabilité sociale et politique de
notre pays dérange certains», regrette ce jeune diplomate.
Les officiels tunisiens répliquent et affirment que les
accusations des ONG, relayées par les médias étrangers «ne
collent pas avec la réalité tunisienne». Sourd à «ce
tapage médiatique» Tunis soutient que le changement
démocratique doit s’accomplir «progressivement et à pas sûrs
pour prémunir le pays des revers qui ont été néfastes à d’autres
pays». L’expérience de l’ouverture démocratique en Algérie
fait véritablement peur.
Brahim Takheroubt, envoyé spécial à Tunis
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Publié le 24 octobre 2009 avec l'aimable autorisation de l'Expression
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