Opinion
La Maison Blanche
organise des réunions pour discuter
d'une plus grande implication en Syrie
Bill Van
Auken
Samedi 15 juin 2013
La Maison Blanche d'Obama organise des
réunions cette semaine pour discuter des
mesures à prendre pour s'impliquer plus
profondément dans la guerre qu'elle
soutient pour obtenir un changement de
régime en Syrie et consolider les
positions faiblissantes des forces
soi-disant "rebelles" qui luttent pour
faire tomber le gouvernement du
président Bashar el-Assad.
Obama a demandé à
ses plus haut conseillers « d'envisager
toutes les options possibles qui
réaliseraient nos objectifs consistant à
aider l'opposition syrienne à répondre
aux besoins essentiels du peuple syrien
et accélérer la transition politique
vers une Syrie post-Assad, » a déclaré à
l'agence de presse AFP la porte-parole
du Conseil sur la sécurité nationale,
Bernadette Meehan.
Le ministre des
Affaires étrangères John Kerry, qui
devait retourner au Moyen-Orient pour
des négociations avec le gouvernement
israélien et l'Autorité palestinienne, a
annulé ce voyage pour rester à
Washington durant les discussions sur
les plans de guerre en Syrie. D'après
des responsables qui ont parlé sous le
couvert de l'anonymat à l'Associated
Press, les propositions envisageables
comprennent l'armement direct des
milices qui se battent pour le compte
des États-Unis en Syrie. Jusqu'à
présent, Washington a maintenu le
prétexte de ne fournir qu'une aide
humanitaire et des armes « non-létales »
à ces bandes armées.
En réalité, la CIA
et le Pentagone ont joué un rôle
indispensable dans l'organisation de
l'achat et de l'envoi d'armes en Syrie,
avec les monarchies réactionnaires du
Qatar, d'Arabie saoudite et des Émirats
arabes unis finançant le tout. L'un des
principaux envois récents venait de
Croatie. Washington a arrangé le
transfert aux "rebelles" Syriens de 3000
tonnes d'armes venant des guerres
balkaniques des années 1990, ainsi que
d'autres stocks européens et l'Arabie
saoudite a payé la facture.
La Grande-Bretagne
et la France envisagent également d'agir
plus directement pour armer les milices
syriennes, après avoir réussi à revenir
sur l'embargo de l'Union européenne sur
ce type d'envoi d'armes au début du
mois. Le ministre des Affaires
étrangères britannique William Hague a
annoncé que la Chambre des communes
voterait sur la question avant l'envoi
d'armes britanniques.
Également à l'ordre
du jour des discussions à la Maison
Blanche, il y a une proposition
d'imposer une zone d'interdiction
aérienne, méthode utilisée en Libye il y
a deux ans pour déclencher une guerre de
grande envergure impliquant les USA et
l'OTAN pour un changement de régime.
Cette proposition a été avancée avec
force par le Sénateur républicain John
McCain et d'autres au Congrès, mais a
suscité des mises en garde de la part de
commandants militaires américains pour
qui une action de ce type en Syrie
impliquerait une intervention majeure de
l'armée américaine.
Le déclenchement
d'une telle campagne en Syrie, qui a des
défenses aériennes bien plus modernes
que celles qu'avait la Libye,
déclencherait une campagne de
bombardement intense avec des pertes
civiles substantielles. De plus, alors
que Washington pouvait se cacher
derrière la résolution de l'ONU
autorisant la zone d'interdiction
aérienne en Syrie, la Russie et la Chine
ont clairement dit qu'elles bloqueront
toute résolution de ce type concernant
la Syrie.
D'après les
responsables américains cités par l'Associated
Press, « Obama évolue vers un accord
pour l'envoi d'armes à des unités
rebelles modérées et préalablement
évaluées. » L'usage de la force aérienne
américaine contre les forces du
gouvernement Syrien est « maintenant
débattu plus sérieusement, » mais,
disent les responsables, « est bien
moins probable en ce moment précis . »
Ce qui anime cette
évolution vers une intervention plus
forte, c'est le désespoir à Washington
de voir ses marionnettes en Syrie subir
une série de reculs militaires. Ces
forces sont dominées par des milices
islamistes, dont le front Al Nusra, qui
s'est officiellement affilié à Al Qaïda.
L'armée syrienne,
aidée par des combattants du Hezbollah,
le mouvement des milices chiites
libanaises, est parvenue la semaine
dernière à repousser les milices anti-Assad
de la ville de Qousseir, près de la
frontière libanaise, privant les
"rebelles" d'une voie
d'approvisionnement essentielle en armes
et en combattants étrangers.
Maintenant, les
forces du gouvernement syrien semblent
prêtes à lancer de nouvelles offensives
pour chasser les milices anti-régime
d'Homs, au Nord de Qousseir, et d'Alep,
deuxième plus grande ville du pays et
important centre de commerce près de la
frontière turque. La consolidation du
contrôle du gouvernement sur Homs
priverait les "rebelles" soutenus par
les Américains de leur capacité à opérer
au Sud du pays, et une victoire à Alep
et dans les environs couperait leurs
lignes d'approvisionnement en provenance
de Turquie.
Les discussions à
la Maison Blanche sur l'intervention en
Syrie se déroulent dans le cadre d'un
déploiement majeur des forces
américaines à portée de frappe aérienne
en Syrie. Des exercices intitulés
Eager Lion ont commencé en Jordanie
cette semaine, avec 4 500 soldats
américains, troupes des Marines et
marins participant aux côtés de 3 000
soldats jordaniens et de 500 soldats
supplémentaires d'autres pays, dont la
plupart sont membres des soi-disant «
amis de la Syrie. »
Profitant de la
couverture fournie par ces exercices,
des missiles Patriot américains, des
chasseurs F-16 et d'autres armes de
pointe sont en train d'être déployés sur
le territoire jordanien, juste de
l'autre côté de la frontière syrienne.
Alors que les exercices militaires se
terminent le 20 juin, les forces
américaines et les armes vont rester en
place.
Le chef
d'état-major jordanien, le général de
division Awni el-Edwan, s'exprimant lors
d'un point presse commun avec le général
de division Robert Catalanotti du
commandement central de l'armée
américaine, a déclaré d'une manière peu
convaincante, « Ces exercices n'ont rien
à voir avec des développements régionaux
autour de la Jordanie. » Il a éludé les
questions sur le déploiement américain
permanent en Jordanie, en déclarant, «
Les missiles Patriot et les chasseurs
F-16 font partie de l'entraînement dans
un contexte purement militaire. Les
maintenir en Jordanie exige une décision
politique avec laquelle nous, les
militaires, n'interférons pas. »
À la suite du
retournement de la situation militaire
en défaveur des "rebelles" soutenus par
les États-Unis, Washington et les forces
qu'il soutient en Syrie ont retardé le
projet d'une conférence « Genève 2 »,
qui était apparemment soutenu par la
Russie et les États-Unis, pour négocier
un accord politique à ce conflit qui
dure depuis deux ans.
L'Associated Press
a déclaré que « les succès militaires d'Assad
semblent en grande partie vider de leur
sens les tentatives de paix dans le
court terme. » Le New York Times
et d'autres sections des médias ont fait
des déclarations similaires, révélant le
fait que l'unique but des négociations à
Washington était d'imposer un changement
de régime. Selon Washington, maintenant
ce n'est pas le moment pour la « paix, »
mais plutôt pour une escalade de la
guerre afin de changer les faits sur le
terrain.
Derrière les
prétentions humanitaires et les larmes
de crocodile pour le « peuple syrien, »
le gouvernement Obama poursuit des
intérêts stratégiques et commerciaux de
grande portée dans sa tentative de faire
tomber le régime d'Assad, et il se
prépare à tuer des dizaines, sinon des
centaines, de milliers de Syriens en
plus pour les atteindre.
Si Washington et
les médias occidentaux ont imputé la
débâcle des "rebelles" au rôle de
quelques milliers de combattants du
Hezbollah ou à l'aide venant de Russie
et d'Iran, la réalité est que, quels que
soient les griefs des Syriens contre le
régime actuel, ils sont encore plus
hostiles aux soi-disant rebelles et les
craignent davantage.
Ces forces sont de
plus en plus dominées par des
islamistes, dont une grande partie sont
des combattants étrangers entrés dans le
pays. L'Observatoire syrien des droits
de l'Homme, une organisation anti-Assad
installée à Londres, a indiqué récemment
que 2 219 combattants étrangers ont été
tués dans cette guerre, ce qui suggère
que le nombre d'étrangers combattants en
Syrie doit être de l'ordre de dizaines
de milliers.
L'observatoire a
également indiqué ce week-end un
incident à Alep qui souligne la raison
pour laquelle il existe une telle haine
envers ces forces qui sont acclamées par
la plupart de la pseudo-gauche en
occident comme des « révolutionnaires
Syriens. » D'après ce rapport, des
"rebelles" islamistes ont entendu un
jeune de 14 ans qui vendait du café dans
la rue, Mohammed Qatta, congédier un
client en utilisant une expression
populaire syrienne, « même si [le
prophète] Mohammed revenait à la vie, je
ne le ferais pas. »
Les islamistes ont
accusé le gamin de blasphème, l'ont
emmené et fouetté. Ils l'ont exposé
devant la foule, où il y avait ses
parents, et ont annoncé son « crime » et
sa condamnation à mort. Puis ils l'ont
abattu d'une balle dans la bouche
pendant que sa mère les suppliait de la
tuer elle, plutôt que son fils.
Dans un entretien
vidéo affiché par le groupe d'opposition
Alep Media Center, la mère de l'enfant
pleurait, « Pourquoi ont-ils tué mon
fils ? Nous ne sommes ni pour ni contre
personne dans ce conflit. Que Dieu les
punisse. »
(Article original
paru le 11 juin 2013)
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Publié le 15 juin 2013 avec l'aimable
autorisation du WSWS
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