Opinion
Libye : la
«démocratie» à l'œuvre
Badis
Guettaf
Samedi 7 janvier
2012
De toute
évidence, des Libyens, au moins ceux qui
ont cru depuis le début à la
«révolution» de l’Alliance atlantique,
se sont mis à prendre au sérieux la
«victoire» de la «démocratie». Ils
manifestent, surtout à Benghazi, contre
la bande interlope qui fait office de
pouvoir dans le pays. Ils ont raison. On
leur a dit que l’OTAN les aidait à se
libérer de la tyrannie de Mouammar Kaddafi et que la liberté allait
fabriquer une «Nouvelle Libye», ils ne
font, donc, que revendiquer ce qu’on
leur a promis. Ils disent ceci : «Nous
ne connaissons même pas tous les membres
du Conseil». Ce qui est, quand même,
bizarre pour une instance qui est censée
être représentative du peuple et que la
«communauté internationale» a reconnue
et portée à bout de bras, comme unique
légitimité, du temps où les bombes
pleuvaient pour ouvrir la route devant
les «révolutionnaires». Pour bien faire,
l’ex-ministre de la Justice de Kaddafi,
devenu président par la suite, par la
grâce de la «révolution», a promis que
les noms allaient être publiés sur un
site Internet, encore en construction.
Il faut comprendre, par là, que la
publication d’une feuille avec la liste
des quidams est un exercice difficile et
qu’il faut attendre que la cybernétique
soit au point, pour que soient enfin
connus des types qui ont entre leurs
mains le destin du pays. De plus, une
fois que les bombardiers ont liquidé
tous leurs ennemis et leur ont fait
place nette les «révolutionnaires», qui
avaient pris l’habitude de tirer devant
les caméras d’Al Jazeera, se mettent à
s’entretuer, à faire régner la terreur
de l’arbitraire et, en prime, à faire le
coup de main et le coup de feu contre
les gendarmes tunisiens, aux frontières.
Ceux qui manifestent s’étonnent, aussi,
que la bande au pouvoir, se réunisse à
huis clos. D’autant que ledit président
a parlé de «magouilles et de
détournements d’argent public de la part
de certains nouveaux responsables». Une
façon d’avouer que la prédation des
miettes, que l’ONU/OTAN consent à
distiller a commencé, en attendant la
grande ripaille. Là il y a une raison de
plus d’en vouloir à l’armée médiatique,
qui a si bien mobilisé ses moyens pour
abattre l’Etat libyen, de ne pas avoir
poursuivi sa guerre «démocratique». Il
serait bien qu’elle tente, au moins, de
nous convaincre que tout va pour le
mieux pour le peuple, à Syrte, à Béni
Walid, à Brega, à Tripoli et même à
Benghazi. Il serait bien, de même,
qu’elle nous montre l’efficacité du CNT
dans la gestion des affaires et sa
popularité réelle. Malheureusement, elle
n’en fait rien. La Libye a disparu des
écrans, ce qui s’y passe ne nous
intéresse plus, pas plus que la frénésie
des affaires qui doivent redémarrer. Si
on a droit à des zooms sporadiques sur
les «milices», c’est qu’il sera
peut-être utile, si cela tourne mal, de
garder la main. Ces «milices» qui,
visiblement, n’ont pas l’intention de
continuer à faire de la figuration,
maintenant qu’on a dit à tout le monde
qu’elles avaient «libéré» le pays. Elles
semblent plutôt faire «comme si… » Et il
sera difficile de les convaincre du
contraire et de leur faire rendre les
armes.
B.G.
Publié sur
Le jour d'Algérie
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