Opinion
France :
l'atlantisme dévoilé
Badis
Guettaf
Samedi 2 juin 2012
La
formation d’un gouvernement projette,
naturellement, sous les feux de
l’actualité de ses femmes et de ses
hommes. Leur vie privée et leur histoire
personnelle, aussi. Le gouvernement
concocté par le président français,
François Hollande, n’a pas échappé à la
règle. Ce faisant, la presse friande
d’originalité, a découvert un fait
troublant. Sur huit socialistes
sélectionnés, en tant que «Young
Leaders», (François Hollande l’a été en
1996), cinq sont fait ministres. «Young
Leaders» est un produit de la
French-American Foundation–France (FAF),
créée en 1976 par les présidents Ford et
Giscard d’Estaing, à l’occasion du
bicentenaire des Etats-Unis, en vue
«d’améliorer les relations entre la
France et les Etats-Unis». Sur le site
de cette organisation on peut lire ceci
: «Le processus de sélection Young
Leaders est très compétitif et attire
chaque année davantage de candidatures.
Cette sélection prestigieuse crée et
entretient un réseau informel d’hommes
et de femmes appelés à occuper des
postes clefs dans l’un ou l’autre pays».
L’importance de la FAF dans le
dispositif du pouvoir étatsunien est
révélée par le fait que l’un de ses
présidents, John Negroponte (1997 et
2001), fut nommé par George Bush en tant
que premier directeur coordonnant tous
les services secrets américains (DNI),
dirigeant l’US States Intelligence
Community (le FBI et la CIA en font
partie). Du coup, la nomination de
Pierre Moscovici, Marisol Touraine,
Aquilino Morelle, Arnaud Montebourg et
Najat Vallaud-Belkacem, ne passe pas
inaperçue et fait se poser des questions
sur la mainmise des Etats-Unis sur le
pouvoir politique en France. Dans le
gouvernement de Nicolas Sarkozy, les
Young Leaders étaient Alain Juppé,
Valérie Pécresse, Nathalie Kosciusko-Morizet,
Laurent Wauquiez, Jeannette Bougrab. Des
élus à cette distinction, il n’y aurait
que seuls 4% qui ne sortent pas de l’ENA
ou qui ne seraient pas titulaires d’au
moins un diplôme Bac+5. Dans sa page de
présentation la FAF est fière de
souligner qu’elle compte «parmi les
anciens Young Leaders de nombreux
ministres du gouvernement actuel et des
précédents, plusieurs hauts responsables
de la presse écrite ou parlée, des
présidents d’entreprises cotées au CAC
40 ou des secteurs de services et de
haute technologie, mais aussi des
artistes, écrivains, scientifiques...»
et la FAF, dans l’un de ses rapports,
juge qu’elle doit assurer une fonction
de «reproduction sociale» de la «classe
dominante»… dans un pays où la simple
notion de leadership renvoie aux
«diplômes» et non aux qualités
intrinsèques de la personne comme c’est
souvent le cas outre-Atlantique. Ce qui
justifie d’après elle de viser en
priorité «ces acteurs influents» qui
portent la «pensée dominante». D’aucuns,
étonnés de la sérénité de la
Maison-Blanche après l’élection
présidentielle, trouveront
l’explication. Difficile après cela de
contredire ceux qui parlent de la
volonté du capitalisme international de
tisser sa toile d’araignée sur le monde.
Aux dernières nouvelles, des voies et
moyens d’inscrire l’Afrique, qui a
«cessé d’être une chasse gardée», dans
le dispositif de captation des élites.
B.G.
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