Ha'aretz
L'Autorité palestinienne face à la colonisation
Amira Hass
Amira Hass De hauts responsables de l'Autorité
Palestinienne peuvent, sans conteste, déclarer que les
constructions de colonies continuent malgré toutes les
protestations et toutes les condamnations - pas uniquement les
leurs. L'Europe proteste, la Paix Maintenant proteste, les
Nations Unies protestent et même Condolezza Rice proteste
parfois, sans parler de l'élite israélienne.
Les colonies continuent de progresser, ainsi que le nombre de
routes interdites aux Palestiniens.
Les responsables de l’Autorité Palestinienne
vous dirons que les tactiques contradictoires de négociations et
protestations – les roquettes Qassam, les opérations de guérilla
et les attaques suicides – n’ont pas aidé les évènements. En
fait, ils ont simplement donné des excuses à Israël pour
confisquer de la terre.
Nous devons rappeler que l’évacuation des
colonies de la bande de Gaza a été une manœuvre intelligente
pour accélérer la séparation politique entre la Cisjordanie et
Gaza ; cela a été présenté déguisé en « début de retrait ».
Les condamnations formulées par l’Autorité
Palestinienne servent en interne uniquement. Elles permettent de
dire aux Palestiniens que leurs représentants sont dans le même
bateau que le peuple affaibli qui souffre de l’occupation, de la
même manière que la lutte armée sert à montrer aux Palestiniens
quelle est la véritable organisation qui sait se venger. Les
condamnations de l’Autorité Palestinienne montrent à quel point
elle est ridicule et inefficace. Cela montre également à Israël
et aux Palestiniens que, quel que soit le nombre de colonies qui
seront construites, il y aura toujours un partenaire palestinien
pour prendre place dans le spectacle du « processus de paix ».
Les négociations et la lutte armée ne sont pas
les seules manières de combattre l’occupation. Il faut demander
à l’Autorité Palestinienne pourquoi elle n’a pas adopté la
résistance non-violente de Mahatma Ghandi –pas en ce qui
concerne les millions de Palestiniens qui luttent sans arme
contre des méthodes d’oppression sophistiquées et modernes.
Les protestations auraient un autre impact si
les protestataires organisaient une révolte publique calculée
contre les tactiques israéliennes d’annexion.
Les occasions ne manquent pas.
Il y a des centaines de barrières en béton qui
bloquent les entrées des villages. L’Autorité Palestinienne
pourrait envoyer un bulldozer pour en retirer une chaque jour.
Les hauts responsables pourraient venir : Mahmoud Abbas ou
quelqu’un de son bureau, des chefs de l’organisation de la
sécurité, des membres du comité central de l’OLP, des
responsables du Fatah, des ministres et des directeurs généraux.
Il existe des routes interdites aux voitures
palestiniennes. Les officiels de l’Autorité Palestinienne et des
résidents de Cisjordanie pourraient former un long convoi de
voitures et conduire sur ces routes. Beaucoup d’Israéliens se
feraient une joie de les accompagner.
La construction et le développement sont
interdits dans la zone C. Le bureau de planification palestinien
pourraient exiger que les ministères palestiniens désignés
établissent des lignes électriques, préparent les
infrastructures pour relier les villages en adduction d’eau,
creusent des citernes pour y collecter l’eau, construisent des
écoles, des cliniques et des maisons. Et même peut-être creuser
des puits. Tout ce que les autorités d’occupation interdisent de
faire sur 60% de la Cisjordanie. Ici aussi, il y aura un nombre
conséquent d’Israéliens opposés à l’occupation qui seraient
prêts à les rejoindre.
L’Administration civile viendra et détruira
tout. Et on reconstruira. Les hauts responsables qui seront
présents pendant ces travaux seront arrêtés. Ou même plus.
Est-ce seulement aux habitants de Bil’in d’être arrêtés pour
leur lutte sans arme contre l’occupation ?
Il existe des centaines de mesures de cette
sorte, qui pourraient remplacer le plan gouvernemental officiel
palestinien et qui sortirait le leadership de leur « soit disant
Etat » et qui le ramènerait à la lutte pour la libération. Il
est vrai que ces mesures n’arrêteront pas la colonisation mais
elles permettraient d’en finir avec le status quo qui arrange si
bien Israël : l’expansion des colonies, des négociations sans
fin, des protestations et des tirs. Il existe une possibilité
pour changer les relations distendues entre les gens et leurs
représentants pour créer une nouvelle diplomatie palestinienne.
Mais il est aussi vrai qu’une telle vision a
peu de chance d’aboutir. L’actuelle Autorité Palestinienne et la
tête de l’OLP se sont habituées à vivre comme une nomenclatura.
Ils mélangent les intérêts de leurs propres citoyens avec leur
statut cérémonial confortable ; un statut qui leur est donné en
remerciement pour bien vouloir participer au spectacle de
respectabilité écrit par les Américains et les Européens et dont
bénéficie Israël.
Amira Hass / Haaretz 13/3/2008
Voir en ligne :
www.france-palestine.org
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