Nul
doute parce qu’il est désormais
clair, même pour certains de nos
médias longtemps malvoyants et
malentendants [6), que c’est l’État
et le peuple syriens qui doivent
systématiquement être sacrifiés sur
l’autel des ambitions hégémoniques
de certaines « grandes » puissances
et de leurs alliés médiocres. Mais
pour autant est-ce que le recours
criminel aux armes chimiques, après
tant d’autres crimes non moins
barbares, modifie l’équation sur
laquelle repose le peuple et l’État
syriens ? Le Général Hoteit répond à
la question [NdT].
Certains ont été surpris devant
l’utilisation d’armes chimiques par les
bandes de terroristes sévissant en Syrie
et sont même allés jusqu’à désapprouver
les réactions des chancelleries
occidentales, lesquelles ne se
contentent plus de déformer les faits
avant de les exploiter pour aller encore
plus loin dans leur agression, mais
s’arrogent le droit de nommer un
Américain d’origine syrienne [un certain Ghassan Hitto,
inconnu des syriens [7], NdT]
à la tête d’un gouvernement de
l'Opposition syrienne baptisé «
le gouvernement d’intérim » ! Nous
sommes donc face à une
« escalade programmée de l’agression
anti-syrienne » et pour situer le niveau
réel de ces derniers événements, il nous
faut revenir aux aspects fondamentaux du
sujet.
L’un de ces aspects concerne
naturellement l’identité de ceux qui ont
usé de l’arme chimique ; identité
évidente pour tout observateur qui
accepte de constater les évidences. La
première découle du fait que le missile
sol-sol chimiquement chargé, qui a été
lancé sur Khan el-Assal près d’Alep, a
visé une région entièrement contrôlée
par l’Armée nationale syrienne dont la
population a unanimement rejeté les
prétendus rebelles armés aussi bien
syriens qu’étrangers, et a témoigné de
son attachement indéfectible à l’État
syrien et à son gouvernement actuel
légitimement élu. La deuxième est en
rapport avec le « timing » de l’attentat
survenu à un moment critique qui a
révélé l’incapacité des bandes armées à
modifier l’équilibre des forces en leur
faveur, de telle sorte qu’elles puissent
effectivement réussir à contrôler ne
serait-ce qu’une région du pays et à en
interdire l’accès aux forces
gouvernementales pour s’offrir une
quelconque légitimité, et ce en dépit de
tout leur armement et des moyens
logistiques mis à leur disposition !
Ceci sans oublier une troisième
évidence : celle de la crise notoire
vécue par les soi-disant oppositions
syriennes, séparées entre extérieure et
intérieure, qui ne se rencontrent que
par leur « hostilité au régime », pour
tout de suite se disperser devant « la
soif du pouvoir ».
Tout cela
nous permet d’affirmer
que les terroristes ont eu recours à
l’arme chimique par décision d’un
commandement suprême [USA], avec la
coopération et la complicité d’un
triangle
régional [Qatar,
Arabie saoudite, Turquie] et d’un binôme
européen [France,
Grande Bretagne], qui ne sont donc que
des exécutants, pour atteindre
les objectifs suivants :
1.
Dépasser la crise structurelle et le
handicap sur le terrain dont souffre la
prétendue opposition syrienne et
introduire une nouvelle arme dans la
bataille, pour atteindre l'équilibre
rêvé par « le front des agresseurs »
comme nous l’a expliqué le ministre
français des Affaires étrangères,
Laurent Fabius, qui « ne peut accepter
le déséquilibre actuel » entre un État
souverain et des mercenaires inféodés à
l’étranger, et qui considère que « lever
l’embargo sur les armes [à destination
de l’opposition syrienne] est le seul
moyen qui reste pour faire bouger
politiquement la solution » ! [4]. Mais
les règles de la guerre nous ont
toujours enseigné qu’un adversaire,
incapable d’atteindre ses objectifs,
demande des renforts et/ou introduit une
nouvelle arme sur le champ de bataille.
Et c’est justement le cas des
mercenaires armés incapables de
contrôler la situation d'ensemble en
dépit de renforts humains incessants qui
ont atteint les 135000 hommes armés,
rendus à 65000, sous les coups de
l'Armée nationale syrienne et aussi du
fait de l’évolution de leur
environnement qui n’est plus dupe de
leurs motivations. Coincés politiquement
et militairement, il ne leur restait
plus qu’à faire usage des armes
chimiques pour faire exploser la
situation et ainsi récupérer l’équilibre
tant rêvé.
2. Satisfaire la volonté des dirigeants
de l’OTAN, et particulièrement de la
Turquie, par l’envoi d’un message fort à
la Syrie lui signifiant que leurs
menaces à répétition de fournir des
« armes létales » à la dite opposition
syrienne sont sérieuses et que les
autorités syriennes feraient bien d’en
tenir compte et de réviser leurs
calculs, comme l’ont déclaré plus d'un
responsable occidental… Les calculs qu’à
leur avis la Syrie est censée réexaminer
portent sur la détermination du
gouvernement syrien et du Président Al-Assad
de ne s’en remettre qu’aux seules
décisions du peuple et de refuser les
diktats étrangers d’où qu’ils viennent,
notamment ceux qui consistent à en
désigner les dirigeants en contournant
le verdict des urnes. D’ailleurs, la
désignation d’un citoyen américain,
d’origine syrienne, comme premier
ministre d’un gouvernement fantoche
n’est qu’un avant goût de ce que les
Occidentaux voudraient imposer à la
Syrie ; ce que le peuple syrien refuse,
ainsi que ses autorités nationales et
patriotes. Là encore, il ne leur restait
plus qu’à faire usage des armes
chimiques pour faire pression,
intimider, voire terroriser les
autorités syriennes afin qu’elles
abandonnent leurs principes de
gouvernance, de souveraineté et
d’indépendance.
3. Permettre aux dirigeants US de tester
concrètement la direction syrienne du
point de vue cohésion et sang froid, en
particulier, tout en la poussant à
répondre à ce crime commis par les
bandes armées à sa solde par un crime de
même nature. En d’autres termes, pousser
la direction syrienne à répondre par une
attaque chimique contraire, au cas où
ils échoueraient à l’accuser de l’avoir
elle-même perpétré. Ainsi les US
auraient le prétexte suffisant pour
intervenir militairement sous la
couverture de diverses organismes
internationaux ou régionaux et
réussiraient enfin à « faire tomber le
régime » qui a résisté et qui est
toujours capable de résister, malgré le
nombre considérable des agresseurs et la
violence extrême de l'agression ; ce qui
a fait que la Russie les a clairement
prévenu que « sa chute était
impossible » !
La décision d’utiliser le gaz sarin est
une décision de la direction US prise il
y a deux mois dans le but de s’en servir
comme prétexte à intervention. Les
rapports de la chaine CNN sur ce gaz
prétendument utilisable par Damas, aux
abois, se sont multipliés depuis le
début de l’année [8] et révèlent que ce
dernier argument s’est évaporé comme les
précédents, car la cohérence syrienne
sur les plans politique, médiatique et
politique a fait échouer certains des
objectifs essentiels de ses ennemis.
Certes, les résultats de cet acte
criminel sont lourds de conséquences,
notamment par le nombre de victimes
syriennes [26
tués, dont 16 militaires, et 86 blessés,
au 20 Mars 3013, NdT]. Il
n’empêche que ses répercussions vont
dans le sens opposé à la volonté des
États-Unis. En effet :
1. La condamnation internationale de
cette attaque chimique, par de prétendus
opposants pour la liberté, a quelque peu
embarrassé les dirigeants occidentaux et
a particulièrement révélé l’hypocrisie
des dirigeants US qui, après avoir
affirmé qu’ils ne savaient pas qui des
rebelles ou des autorités syriennes
avait usé de ces armes, se sont lancés
dans une fuite en avant en déclarant
« qu'ils n'accepteront pas que le régime
utilise des armes chimiques » ; ce qui
revient à admettre implicitement qu'ils
acceptent, encouragent, voire ordonnent
aux bandes armées d’en faire usage !
Bien que nous soyons convaincus que les
dirigeants US ne s’imposent aucune
restriction d’ordre légal, moral, ou
humaniste, nous pensons néanmoins que
cette situation dans laquelle ils se
sont empêtrés pourrait les empêcher
d’invoquer l’usage des armes chimiques
pour pousser la communauté
internationale à intervenir
militairement en Syrie.
2. Quant à la dite opposition syrienne,
nous pouvons dire que
ce crime dépasse le simple
embarras et constitue un énorme scandale
qui ne manquera pas de les diviser
encore plus qu’ils ne le sont, surtout
que les victimes sont principalement des
femmes et des enfants, dont une petite
fille qu’ils n’ont pas pu ne pas
entendre dire : "C’est cela leur liberté
? Puisse Dieu ne jamais les exaucer ! ».
3. Reste les « ourbanes » qui se
réunissent encore sous l’égide d’une
prétendue Ligue arabe et sur lesquels
nous ne nous attarderons pas, sinon pour
dire que leur silence équivaut à un aveu
de reconnaissance de complicité dans ce
crime répréhensible et condamnable par
toute personne saine d’esprit douée d’un
minimum de noblesse, autant de termes
exclus de leur dictionnaire.
Finalement, bien que le recours aux
armes chimiques par le front des
agresseurs « sous direction US »
signifie une importante escalade dans la
violence contre la Syrie, il a été
incapable de créer une brèche dans sa
défense militaire et n'a en rien assuré
l'équilibre des forces que les US
cherchent désespérément avant de
s’asseoir à la table des négociations.
Au contraire, les USA ont perdu des
cartes que ne compensera certainement
pas la nomination d’un citoyen américain
d’origine syrienne à « la tête d'un
gouvernement intérimaire ». Ni lui, ni
l’attentat criminel par armes chimiques
n’auront réussi à atteindre leurs
objectifs, tout comme ils ne modifieront
pas les paramètres essentiels de
l’équation sur laquelle repose l’Etat
syrien et sa légitimité.
Amin Hoteit
21/03/2013
Article original : Al-tayyar
هل تغيّرت المعادلة السورية بعد
الكيماوي؟!
http://www.tayyar.org/Tayyar/News/PoliticalNews/ar-LB/syria-after-chemical-pb-8119.htm
Article traduit de
l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour
Mondialisation.ca
Notes :
[1] Entrevue intégrale du président
syrien avec le Sunday Times
http://www.mondialisation.ca/entrevue-integrale-du-president-syrien-avec-le-sunday-time/5325236
[2] Des
terroristes testent l’effet de gaz
toxiques, de fabrication turque, en
territoire syrien.
http://www.youtube.com/watch?v=k_IIARKNXQI&feature=youtu.be
[3] SYRIA: US-NATO Backed Al
Qaeda Terrorists Armed with WMDs.
Chemical Weapons against the
Syrian People
http://www.globalresearch.ca/syria-us-nato-backed-al-qaeda-terrorists-using-wmds-chemical-weapons-against-the-syrian-people/5327507
[4]
Syrie :
Fabius veut armer "rapidement"
l'opposition
http://www.dailymotion.com/video/xy6zt5_syrie-fabius-veut-armer-rapidement-l-opposition_news
[5] Syrie : pour Fabius, "Assad ne
mériterait pas d'être sur la terre"
http://lci.tf1.fr/monde/moyen-orient/syrie-pour-fabius-assad-ne-meriterait-pas-d-etre-sur-la-terre-7460516.html
[6] En Syrie, armes à double tranchant
http://blog.mondediplo.net/2013-03-19-En-Syrie-armes-a-double-tranchant
[7] Syrie : le premier ministre de
l'opposition refuse tout dialogue avec
Assad
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2013/03/19/ghassan-hitto-elu-premier-ministre-interimaire-par-l-opposition-syrienne_1850209_3218.html
[8] Syria's chemical weapon potential: What is it, and what are the health
risks?
http://edition.cnn.com/2012/12/07/world/meast/syria-chemical-weapons-qa/
Le Docteur Amin Hoteit est
libanais, analyste politique, expert en
stratégie militaire, et Général de
brigade à la retraite.
Le
dossier Syrie
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