Aux sources du chaos mondial actuel
2ème partie
Aux sources du sionisme
III - Israël, du mythe à l'histoire
Aline de Diéguez
Lundi 29 mars 2010
"L'organisation sociale des hommes ressemble
beaucoup à celle des rats qui, eux aussi, sont, à l'intérieur de
la tribu fermée, des êtres sociables et paisibles mais se
comportent en véritables démons envers des congénères
n'appartenant pas à leur propre communauté."
Konrad Lorenz ,
L'agression, une histoire naturelle du
mal
1 -
Il était une fois un ciel vide et une
terre toute petite...
2 -
Le dieu de la tribu
3 - Du polythéisme à l'hénothéisme. Une déité mixte
4 - Les fondements religieux du
comportement d'Israël
5 -
Où l'on voit Samson essayer d'ébranler les colonnes du temple
6 - Religion et morale
7 - Où l'on comprend que la "bibliothèque
de Babel" de Jorge Luis Borges situe Israël dans le cosmos
8 - Où l'on suit de hardis explorateurs se lançant
à l'assaut du mythe
9 - Où l'on découvre comment le mythe crée un corps
collectif et le pérennise
10 - Où l'on assiste à la chute du mythe dans la
politique. Il était une fois Israël ...
11 - Une question de
psychophysiologie
12 - Où l'on observe le "peuple
élu" confronté à l'insurrection morale des peuples du monde
13 - Où l'on
verra le mythe prendre la forme d'une montgolfière cosmique
1 -Il était une fois
un ciel vide et une terre toute petite…
Afin d'essayer de
comprendre les racines religieuses et anthropologiques du drame
de la Palestine et le chaos que cette tragédie provoque dans la
politique internationale, je suis remontée le plus haut possible
dans l'étude de la naissance des mythes qui structurent
aujourd'hui encore les actions et la mentalité d'Israël.
Il ne s'agit nullement d'une étude
théologique
du contenu du judaïsme. Je n'ai pris en considération que les
éléments du dogme qui se traduisent aujourd'hui encore par des
conséquences politiques
sur le terrain - à savoir les notions de "terre
promise"
et de "peuple
élu".
Ces deux faveurs du dieu national ont scandé l'arrière-monde
mythologique du judaïsme antique. Elles sont le pivot autour
duquel tourne tout l'édifice des récits bibliques et
talmudiques, lesquels ne font qu'illustrer les péripéties liées
à la réalisation de ces deux "promesses"
du Dieu Jahvé. Concentrées à l'origine dans les cinq Livres du
Pentateuque
- ou Thora
dans la terminologie juive - et notamment dans le
Deutéronome,
le plus ancien des récits bibliques, ces
deux notions sont la pierre d'angle sur laquelle repose tout
l'édifice psychologique du
judaïsme politique dont le
sionisme
contemporain est l'héritier direct.
C'est pourquoi il est absurde de prétendre que le sionisme n'est
qu'une idéologie politique sans rapport avec la Bible.
Certes, tous les peuples se donnent une
origine para-mythologique et se réfèrent à une histoire
légendaire originelle plus ou moins riche, plus ou moins
originale, mais toujours fondatrice de leur existence et de leur
identité; car l'unificateur mythique est le créateur et le
gardien de l'identité des groupes humains. L'empire romain
s'était inventé l'histoire de Romus et de Rémulus nourris par
une louve afin d'autojustifier son installation sur les collines
du mont Palatin par une manière d'intervention divine. La
civilisation grecque est née de la légende homérique qui a
mythologisé la guerre de Troie. L'empereur du Japon est réputé
être le "fils du soleil".
Le "messianisme"
révolutionnaire d'une France "patrie
des droits de l'homme" a remplacé
celui des rois, dont le "sang bleu"
d'origine christique en faisait "la
fille aînée de l'Eglise" depuis le
baptême de Clovis. Mais toutes ces mythologies nationales
demeurent abstraites, non belliqueuses ou exclusivistes et ne
débordent pas sur le territoire des voisins.
En revanche, les Etats-Unis, peuplés, à
l'origine de leur existence en tant qu'Etat par des protestants
calvinistes dont l'esprit était modelé par l'Ancien Testament,
se sont proclamés la "nouvelle
Jérusalem" ou le "nouveau
Canaan". Ils se vivent, à l'instar
des Israéliens, comme un nouveau "peuple
élu" laboratoire d'un futur
mirobolant. Leur nouveau Moïse -
Thomas Jefferson, auteur de la
Déclaration d'indépendance des
États-Unis - affirmait que cette
nation était "the world's best
hope". Bien que se proclamant
athée, mais en réalité franc-maçon déiste, Jefferson partageait
la mythologie biblique de ses contemporains et voyait dans le
nouvel Etat un fanal pour les autres peuples.
En conséquence, l'Etat né sur les terres
indiennes s'est donné pour devise: "Per
aspera ad astra".
Il s'est immédiatement employé à exterminer systématiquement les
habitants autochtones qui vivaient sur ces terres depuis la nuit
des temps. Derrière l'étendard du "Manifest
Destiny" et de la mission
évangélique de porteurs des valeurs d'un "Bien"
et d'un "Mal"
censés universels, mais définis par leurs soins, les nouveaux
missionnaires se sont approprié les terres et les richesses, et
continuent aujourd'hui leur "mission
civilisatrice" sous le prétexte de
délivrer le monde de l'oppression des tyrans et tout en se
proclamant les messagers du Progrès et de Démocratie. C'est
ainsi que leur avant-dernier président, G.W. Bush, n'avait pas
hésité à affirmer urbi et orbi:
"Nous sommes exceptionnellement
bons. Nous sommes le peuple élu."
L'installation des colons originaires
d'Europe et notamment d'Angleterre sur les terres du Nouveau
Monde et celle des colons juifs en Palestine présentent donc un
parallélisme saisissant. Elle explique l'alliance psychologique
étroite et profonde entre une Amérique baignant dans une
religiosité vétéro-testamentaire - qu'elle soit dirigée par un
Clinton, un Bush ou un Obama - et l'Etat sioniste actuel. Elle
ne peut donc se réduire à la seule influence, certes très
importante, des généreuses contributions financières destinées à
influencer ou à corrompre les décideurs politiques ou
économiques et offertes par les groupes de pression de l'AIPAC
ou de la loge maçonnique B'nai Brith réservée aux membres qui
peuvent attester de leur appartenance au judaïsme.
2 - Le dieu de la
tribu
J'ai poursuivi mon exploration du fleuve
du temps et j'ai suivi à la trace l'histoire stupéfiante de la
tribu qui, depuis la nuit des temps s'est éprouvé si différente
du reste de l'humanité qui l'environnait qu'elle s'est sculpté
progressivement, laborieusement au fil des péripéties politiques
auxquelles elle a été mêlée, la statue du dieu spécifique auquel
elle a prêté les mêmes sentiments de répulsion et de haine à
l'égard des autres humains que ceux qu'elle éprouvait elle-même.
Puis, elle a ordonné à la statue: "Et
maintenant marche devant nous…."
Code destiné à règlementer la multitude de
rites à observer si l'on veut maintenir les bonnes dispositions
du Dieu envers la communauté, le
Deutéronome est aussi et avant tout
un texte politique,
adapté aux circonstances
politiques de l'époque.
Ezéchias et son petit-fils Josias étaient
de grands rois et de fins politiques et ils savaient d'instinct
qu'il est beaucoup plus efficace pour tout pouvoir de faire
passer ses lois par le détour d'un Dieu unique et que la
pluralité des dieux de l'époque présentait un grave inconvénient
pour le pouvoir. C'est pourquoi le premier texte rédigé de la
Thora
- le Deutéronome -
pullule de commandements concrets
concernant à la fois l'exécration des autres dieux et la gestion
quotidienne d'une cité : le statut des dettes entre les
particuliers, la répartition des terres, la manière dont il
convient de se partager le butin conquis sur les voisins, le
statut des esclaves ou celui des femmes enlevées lors des
rezzous en dehors des frontières. Mais il s'agit également d'un
code civil qui fait interdire par la voix du Dieu les vices qui
rendraient impossible la vie policée d'une cité - le meurtre, le
vol, l'adultère, l'irrespect à l'égard des parents - ainsi que
toutes les formes de débauche individuelle - la paresse, la
luxure, la goinfrerie, etc. Cependant il était prévu que ces
vices auraient toute licence de s'exprimer à l'égard des
étrangers qu'on avait le droit de massacrer et de voler; il
était également permis de faire des femmes enlevées lors des
campagnes militaires des maîtresses ou des esclaves.
"Lorsque
Jahvé, ton Dieu, t'aura fait entrer dans le pays dont tu vas
prendre possession, et qu'il aura chassé devant toi beaucoup de
nations, les Héthéens, les Gergéséens, les Amorrhéens, les
Chananéens, les Phéréséens, les Hévéens et les Jébuséens, sept
nations plus nombreuses et plus puissantes que toi, et que
Yahweh, ton Dieu, te les aura livrées et que tu les auras
battues, tu les voueras à l' anathème, tu ne concluras pas
d'alliance avec elles et tu ne leur feras point de grâce."
(Dt 7, 1-3)
"Jahvé, ton Dieu, enverra même sur eux
les frelons, jusqu'à ce que soient détruits ceux qui auront pu
échapper et se cacher devant toi. Tu ne t'effrayeras point à
cause d'eux; car Jahvé, ton Dieu, est au milieu de toi, Dieu
grand et terrible! Jahvé, ton Dieu, chassera peu à peu ces
nations devant toi; tu ne pourras pas les exterminer
promptement, de peur que les bêtes sauvages ne se multiplient
contre toi." (Dt 20-23)
Petit commentaire
de ces versets:
"Le
pays dont tu vas prendre possession... "
: traduite en langage "historique", cette
phrase du Deutéronome
nous apprend que les Hébreux israélites étaient des envahisseurs
en voie de sédentarisation qui se cherchaient un territoire afin
de se fixer .
"Il [le
dieu] aura chassé devant toi
beaucoup de nations": attribuer au
dieu ses désirs et ses actions est un procédé psychologique
classique utilisé par tous les auteurs de textes théologiques.
La phrase révèle par ailleurs que le territoire choisi était
déjà habité par de nombreuses "nations"
qui s'y étaient fixées
antérieurement. En application de l'immémorial "syndrome
du coucou" qui consiste pour un
intrus à s'installer dans le nid d'autrui, tout en
s'auto-innocentant de toute mauvaise intention, les
nouveaux-venus réussirent à s'approprier les lieux. Une pratique
drastique de "purification
ethnique" s'ensuivit au détriment
des habitants autochtones. Ce premier brigandage victorieux
devient une action divine et préfigure la politique des
sionistes du XXe siècle.
"Tu ne leur feras point de grâce"
: les habitants de Gaza et les prisonniers
dans les geôles israéliennes peuvent certifier que ce
commandement est aujourd'hui scrupuleusement respecté.
On voit à quel point rien n'a changé et à
quel point les principes du
Deutéronome originel sont
rigoureusement mis en pratique aujourd'hui tant en Cisjordanie
qu'à Gaza, notamment celui, vicieux et hypocrite, qui conseille
l'extermination en douce et par petits paquets: "Tu
ne pourras pas les exterminer promptement, de peur que les bêtes
sauvages ne se multiplient contre toi
"(Dt 20,23) . Surtout ne pas réveiller les dormeurs de la "communauté
internationale" et autres
rédacteurs de rapports Goldstone, ces "bêtes
sauvages" qui ont le mauvais goût
de n'avoir pas apprécié la beauté du feu d'artifice des bombes
au phosphore blanc illuminant le ciel de Gaza.
Feu d'artifice au phosphore blanc sur Gaza en
janvier 2009
3 - Du polythéisme à l'hénothéisme, une
déité mixte
La religion hébraïque originelle n'était
nullement une religion universelle. Le polythéisme était la
règle et Jahvé, un dieu parmi d'autres, a cohabité pendant des
siècles avec ses collègues, y compris à l'intérieur du petit
Royaume de Juda et chaque divinité était honorée en un lieu
particulier, principalement sur des hauteurs. A l'époque toutes
les tribus possédaient leur dieu protecteur. Les Moabites
avaient Camos -
orthographié parfois
Kemosh - les
Tyriens avaient Melqarth, Hadad
était la divinité de Bagdad et
Jahvé,
successeur du Jéhovah
célébré dans le royaume du nord, devint le protecteur militaire
de la tribu des Béni-Israël. Son culte fut localisé à Jérusalem
où il supplanta les autres divinités particulières.
Du polythéisme primitif, cette religion a
conservé le dieu local. Elle a progressivement suivi le
mouvement d'évolution qui fut celui de tous les autres dieux
vers le monothéisme, mais un monothéisme particulier puisque,
dans le Deutéronome,
il est demeuré racial et déclaré dieu unique du royaume de Juda
par Ezéchias, puis par Josias. Il n'est devenu un Créateur
cosmique - donc, en principe, universel - que dans les
Livres
rédigés ultérieurement, après l'exil en Babylonie, comme nous le
verrons plus loin.
On aboutit alors à la bizarrerie
théologique, donc anthropologique, d'un groupe humain qui se
déclare protégé par un dieu particulier, mais néanmoins
cosmique, lequel ignorerait superbement les autres peuples et
aurait créé le ciel et la terre uniquement en vue d'en assurer
la jouissance à ses seuls adorateurs hébreux. Cet
hénothéisme
(heno=un)
est un stade intermédiaire entre le polythéisme et le
monothéisme. Le monde existe pour Israël et le reste de la
planète doit lui être subordonné.
Les autres dieux nationaux de l'époque
avaient probablement la même mentalité que Jahvé. Comme lui, ils
n'avaient en vue que le bien de la nation dont ils assuraient la
prospérité. Mais la vitalité des théologiens yahvistes, la
psychologie de ce groupe humain et le talent littéraire des
auteurs du récit ont su garder ce dieu-là en vie alors que tous
les dieux rivaux ont disparu avec la défaite politique des
villes et des royaumes qu'ils n'avaient pas su protéger. En
effet, il était admis que la défaite d'une ville tantôt signait
l'acte de décès de son dieu, tantôt était considérée comme le
signe de la volonté du dieu de punir son peuple .
La description des frontières de la "Terre
Promise" correspond d'ailleurs aux
limites des terres connues par les Judéens du -VIIe siècle. Dans
leur esprit, c'était donc la terre entière que Jahvé leur aurait
"promise".
Voilà bien la preuve absolue de sa puissance exceptionnelle par
rapport aux autres divinités. Mais ce désir est surtout un
puissant révélateur de la psychologie de la population qui s'est
crue - et qui continue de se croire - la bénéficiaire de ce
cadeau.
4 - Les fondements
religieux du comportement de l'Etat d'Israël établi en Palestine
La légitimation psychologique et
anthropologique dont se réclame Israël afin de s'auto-inocenter
de ses exactions et de justifier aux yeux du monde entier son
installation à la force du poignet et à la pointe des missiles
en incitant par tous les moyens des immigrants juifs de venir
peupler la Palestine est
religieuse.
Son dieu
particulier, Jahvé, aurait donné cette terre à leur tribu et cet
acte de donation oral serait tombé dans l'oreille d'un chef
nommé Moïse. Un contrat aurait d'abord été consigné sur un
morceau de granit, qui s'est révélé moins durable que la pierre
de basalte noir du code d'Hammurabi. Mais par un nouveau miracle
du dieu, l'acte d'acquisition a pu être reconstitué après moult
siècles par une sorte de scribe-notaire aussi informé de la
tractation que s'il avait assisté à l'évènement. Tout le monde
peut en prendre connaissance, puisque la "session
immobiliaire" reproduite dans son
intégralité est scénarisée dans les textes sacrés de cette
tribu.
C'est sur le
fondement de ce scénario que les représentants officiels de
l'actuel Etat d'Israël clament sur tous les tons que "La
terre a été donnée par Dieu aux juifs",
et que, par conséquent, il ne peut y avoir de compromis avec les
Palestiniens, qui sont priés de déguerpir.
[1]
Même si la plupart des dirigeants de cet
Etat ne sont pas des religieux pratiquants, tous sans exception
se réclament des deux axiomes religieux qui structurent le "retour
du peuple élu" sur sa
"terre promise".
C'est sur cette fiction théologique digne
d'Alice au pays des merveilles
que repose la certitude des
sionistes d'aujourd'hui que la terre de Palestine leur a été
donnée par leur dieu. C'est au nom de ce roman fantastique que
les émigrants venus de tous les continents chassent les
habitants autochtones de leur patrie et cherchent à faire
coïncider le pays de leurs rêves religieux avec le pays réel. Ce
genre d'Etat porte un nom : c'est une
théocratie raciale
ou
communautariste.
A partir de 1945,
s'y est ajoutée une instrumentalisation officielle des
souffrances subies en Europe durant la IIe guerre mondiale: "Pendant
deux générations, notre politique étrangère a fait de
l'Holocauste son principal instrument. La mauvaise conscience du
monde déterminait son attitude à l'égard d'Israël. (…) Toute
critique des actions de notre gouvernement était automatiquement
qualifiée d'antisémitisme et réduite au silence
", écrit un connaisseur juif de la politique de cet Etat.
[2]
Les conséquences politiques immédiates de
la réfutation historico-archéologique de la folle prétention des
nouveaux immigrants seraient évidemment considérables. Pour
utiliser une métaphore biblique. Samson ébranlant les colonnes
du temple imaginaire ferait voler le rêve sioniste en éclat et
réduirait l'édifice théologico-médiatique tout entier à l'état
de ruine.
C'est pourquoi
les Israéliens de l'intérieur et les juifs de la diaspora
refusent les analyses d'exégèse biblique et les découvertes
archéologiques scientifiques avec autant de virulence que
l'Eglise des XVe et XVIe siècle les découvertes de Copernic et
de Galilée.
5 - Où l'on voit Samson essayer d'ébranler
les colonnes du temple
Décrypter les métaphores relatées dans le
texte biblique tel qu'il nous est parvenu, afin d'accéder à la
réalité historique originelle que le récit a triturée,
mâchouillée et métamorphosée pour les besoins de la mobilisation
psycho-théologique du groupe, tel est le travail de fourmi
auxquels se consacrent les Argonautes de la vérité. Mais il leur
faut, pour cela, quitter les brillances et les fausses évidences
des représentations offertes sur le devant de la scène du
théâtre mental sur lequel s'agitent les marionnettes, et
pénétrer dans les coulisses et les sous-sols des motivations
conscientes et inconscientes des scripteurs talentueux de la
fiction, afin de démêler les ficelles qui mettent en branle le
gigantesque mécanisme qui mouline la pseudo "vérité"
et qui crée, depuis deux millénaires et demi, l'illusion qu'il
s'agit d'un texte historique
.
L'exemple
d'Abraham et de son périple est particulièrement révélateur de
la manière dont ont procédé les rédacteurs des livres bibliques.
Des tribus d' Hébreux nomades ont certes
pérégriné dans cette région durant la préhistoire et les débuts
des temps historiques. Mais le nom générique d'"Hébreux"
- les Ibrim
, "ceux de
l'autre côté", "ceux qui ont passé
le fleuve [Euphrate]" -
s'appliquait à l'origine à de nombreuses peuplades : Ammon,
Edom, Moab, Ismaël, Jébuséens, Madianites, etc. pour ne citer
que celles qui se trouveront évoquées beaucoup plus tard dans
les textes bibliques. Ainsi, des dizaines de tribus hébreux plus
ou moins nomades erraient, commerçaient, trafiquaient,
guerroyaient, établissaient et rompaient des alliances entre
elles dans la région allant de la Syrie à la Phénécie - la
région côtière exceptée, les nomades n'aimaient pas la mer en
laquelle ils voyaient un manque, un vide de la création. On en
trouve une trace jusque dans l'Apocalypse
(21,1) . Dans un monde parfait, la
mer aura disparu: "Puis je vis un
nouveau ciel et une nouvelle terre; car le premier ciel et la
première terre avaient disparu, et la mer n'était plus."
Toutes ces peuplades parlaient des
dialectes proches les uns des autres et se comprenaient
parfaitement. En revanche, les Kenaanis ou Chananéens, beaucoup
plus influencés par la civilisation et les moeurs des Egyptiens,
étaient haïs par les groupes hébreux, bien qu'ils parlassent un
idiome semblable au leur.
Ces
tribus nomades se rattachaient au mythe d'un même père
fondateur. Ab-Orham,
devenu Ab-ram,
"le haut Père",
ou Abraham,
"le Père de beaucoup de peuples",
était une sorte de patriarche
éponyme mythique, d'origine assyrienne, commun à tous les
nomades de la région. Lorsque le récit de la
Genèse
trouvera sa rédaction
définitive, les scribes du temps de l'exil babylonien des
Judéens au -VIe siècle jetteront toutes leurs forces dans
l'entreprise qui consistait à donner au petit groupe de la tribu
des Béni-Israël un statut suréminent par rapport à tous les
groupes concurrents. C'est ainsi qu'Isaac - nom éponyme et
symbole des Béni-Israël - sera le fruit miraculeux de deux
vieillards légendaires soudain reverdis. En revanche, ces mêmes
scribes affecteront aux groupes tribaux voisins et rivaux les
pires turpitudes et des origines subalternes ou méprisables
telles la légende d'Agar et de son fils Ismaël (Gen.16,
17) - nom éponyme des Ismaélites - ou l'histoire des autres
"fils" d'Abraham - c'est-dire des tribus qui se réclament de sa
descendance - avec une nouvelle femme, Qetoura, si insignifiante
que les auteurs se sont contentés de donner un nom (Gen.25)
sans aucun autre renseignement sur sa personne. Il faut y voir
un procédé classique destiné à montrer que les autres peuplades
de la région alliées ou rivales des Beni-Israël, ne méritent pas
qu'on s'attarde à leur généalogie ou à leur descendance. Sans
oublier les nations nées de la fornication incestueuse de Loth
et de ses filles (Gen.
19) .
Lorsqu'elles choisirent de se
sédentariser, ces tribus se taillèrent le territoire qui
correspondait à leur puissance et à leurs alliances. La province
convoitée par les Béni-Israël était déjà peuplée; il a donc
fallu conquérir le territoire et expulser les premiers
occupants. Il faut évidemment oublier la légende de Josué et ses
trompettes miraculeuses. Les envahisseurs israélites
guerroyèrent alors victorieusement contre les Amorrhéens, les
Moabites, puis les Cananéens déjà installés dans cette région .
Traduit ultérieurement en langage biblique, cet épisode est
devenu, comme je l'ai cité ci-dessus
(n° 2):
Lorsque Jahvé, ton Dieu, t'aura fait
entrer dans le pays dont tu vas prendre possession, et
qu'il aura chassé devant toi beaucoup de
nations...
" (Dt 7, 1) C'est donc le généralissime en chef divin qui s'est
chargé du travail, nous dit le texte.
S'étant divisés en deux branches rivales,
les Israélites établis au sud, dans la région de ce qui
deviendra le "Royaume de Juda" et qui aura Jérusalem pour
capitale, ne représentaient qu'une toute petite partie de
l'actuelle Palestine. C'est là que fut conçu le dieu protecteur
qui n'aimait qu'Israël, un dieu qui ne pensait qu'à sa nation
bien-aimée, un dieu "d'une
partialité révoltante pour Israël",
d'une "dureté affreuse pour les
autres peuples", comme l'écrira
Ernest Renan.
Les moeurs rustiques et cruelles de
l'époque transparaissent sous la teinture théologique de la
notion de "désobéissance aux
commandements du dieu" puisque dans
Ezéchiel (20,
25-26) il est fait état de sacrifices d'enfants commandés par un
dieu-Moloch sadique qui châtiait "son" peuple en le forçant à se
punir lui-même: "C'est pourquoi je
leur ai donné des lois qui leur étaient funestes et des
commandements qui ne pouvaient les faire vivre. Je les ai
souillés par leurs offrandes quand ils sacrifiaient tous leurs
premiers-nés, pour les frapper de stupeur afin qu'ils
reconnaissent que je suis l'Eternel».
Quant au Royaume du Nord - l'Israël
originel - il a disparu de l'Histoire avec la fin de la Maison
des Omrides au VIIIe siècle avant notre ère. Sa florissante
capitale, Samarie, fut détruite par le puissant empire assyrien
en -722. Le petit Royaume de Juda, autour de la cité-Etat de
Jérusalem a connu un certain éclat pendant une courte période au
septième siècle avant notre ère. Il survécut en paix pendant
cent vingt ans en se reconnaissant vassal des Assyriens,
c'est-à- dire en acceptant de payer un tribut annuel. Mais le
brassage des populations en Samarie et en Judée au fil des
tribulations politiques de la région et des invasions par les
grands empires voisins, ainsi que la présence immémoriale
d'autres ethnies sur les lieux rendent les prétentions
théologiques et génétiques des actuels immigrants venus du monde
entier et fondées sur les fictions
bibliques, politiquement farfelues
et historiquement infondées.
Seules la nullité politique et la pauvreté
culturelle de l'indéboulonnable homme à la petite moustache
grise qui "préside"
aux destinées de la Cisjordanie, son ignorance de l'histoire des
peuples, des religions et des mentalités théologiques, ainsi que
sa reptation obséquieuse devant Israël, les USA et les Européens
qui le maintiennent au pouvoir à bout de bras et à coups de
millions de dollars, bien que son mandat ait expiré depuis
longtemps, lui ont fait reconnaître humblement "le
droit du peuple juif sur la terre d'Israël"
devant l'AIPAC (American Israel
Public Affairs Committee), lors de
l'interrogatoire de conformité cachère sous forme de
questions/réponses que trente hauts responsables du lobby
sioniste américain lui ont fait subir le 10 juin 2010.
Abbas reconnaît "
le droit du peuple juif sur la terre
d'Israël "
La collaboration
est un puits sans fond.
Le grand Jean de La Fontaine avait percé
Mahmoud Abbas à jour dans sa fable
Le Loup et le Chien
. Lorsque le loup, alléché par les rondeurs, fruits des agapes
du molosse qui a croisé son chemin, et envieux de la prospérité
du dogue "aussi puissant que beau",
lui demande, candidement
- Que me faudra-t-il faire ?
- Presque rien, dit le Chien, donner la chasse aux gens
Portants bâtons, et mendiants;
Flatter ceux du logis, à son Maître complaire:
Moyennant quoi votre salaire
Sera force reliefs de toutes les façons:
Os de poulets, os de pigeons,
Sans parler de mainte caresse.
Le Président auto-proclamé de "l'Autorité"
palestinienne accepte que sa milice "donne
la chasse" aux résistants en
coordination avec l'occupant et il est allé promener aux USA son
embonpoint de mangeur de reliefs de poulets, d'os de pigeons et
son cou pelé par la corde de la servitude et les caresses de ses
maîtres.
6 - Religion et
morale
Une religion ne détermine nullement le
niveau moral d'une société, c'est
au contraire le niveau moral du groupe qui prédétermine et dicte
les formes que prend sa religion.
L'illusion du "peuple
élu" n'est d'ailleurs pas propre au
judaïsme; on la trouve même dans les croyances de tribus
archaïques de Nouvelle-Zélande. On en comprend aisément les
motivations psychologiques. En effet, la puissance de conviction
qu'exerce une idée ou une croyance ne réside nullement dans le
fait qu'elle relaterait des évènements qui seraient réellement
arrivés. Elle est crue vraie et s'impose grâce à la force de
séduction qu'elle exerce sur les esprits et aux avantages que le
groupe en escompte. Comment ne pas accepter avec enthousiasme de
faire partie d'une tribu si exceptionnelle qu'un dieu aurait
fait de vous ses chouchous et vous aurait fait un gigantesque
cadeau foncier ici et maintenant? Un cadeau immédiat,
parfaitement palpable et autrement alléchant qu'une félicité
potentielle dans un au-delà virtuel conditionné par la
disparition de votre propre carcasse. Et peu importent les
incohérences du récit s'il fait de vous un heureux propriétaire
terrien.
Le mythe est auto-actif.
Il EST celui qui EST
pour reprendre la déclaration attribuée à Jahvé - "Je
suis celui qui est" ( Exode 3,14).
Véritable axiome, sa réalité est tout entière contenue dans son
affirmation. Le récit censé le démontrer n'a nul besoin de
vraisemblance ou de cohérence. Il n'est là que pour théâtraliser
l'axiome fondateur et en explorer toutes les facettes. Car
le mythe est un théâtre. C'est ce
théâtre psychique qui fait sens dans les esprits et entraîne la
conviction par l'intermédiaire de son scénario.
Ainsi, au sujet d'un événement aussi
capital pour le christianisme que l'est la croyance à la vie
éternelle, et donc à la résurrection des corps, l'apôtre Paul
dans sa Lettre aux Corinthiens
(15,14-15) affirme bien que la
croyance précède le fait et en fournit le code d'interprétation
: "S'il n'y a point de
résurrection des morts,
Christ non plus n'est pas ressuscité. Et
si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc
vaine, et votre foi aussi est vaine."
Le postulat de la résurrection de
tous les morts est donc premier et
conditionne les déductions théologiques en chaîne, interprétées
à la lumière du mythe: l'affirmation de la résurrection du
Christ à partir de la constatation que le cadavre n'est plus
dans son tombeau; puis arrivent les prédicateurs chargés de
diffuser la "bonne nouvelle"
et enfin se répand la foi des fidèles.
Le mythe n'a pas non plus besoin de
logique. Le récit emporte dans son flot les contradictions, les
incohérences, les innombrables absurdités et les cruautés
grossières qui pullulent dans le récit biblique. Ce n'est pas le
lieu de les énumérer toutes ici, je n'en retiens que deux. Au
sujet d'un point fondamental - la "rencontre"
de "Moïse" avec Jahvé au cours de laquelle le dieu est censé
avoir dicté la loi - on peut trouver à quelques lignes
d'intervalle deux affirmations qui se contredisent. Il n'est pas
équivalent de "dialoguer"
face à face, donc en égaux, ou d'apercevoir furtivement une
forme de dos, ou encore de se sentir à l'ombre d'une gigantesque
"main divine".
"Jahvé
parlait à Moïse face à face, comme un homme parle à son ami."
(Exode,
32,10)
"
Tu ne peux voir ma face, car l'homme ne peut me voir et vivre !
Voici un endroit près de moi ; tu te tiendras debout sur le
rocher. Et quand passera ma gloire, je te mettrai dans le creux
du rocher et je te couvrirai de ma main jusqu'à ce que je sois
passé. Puis je retirerai ma main et tu me verras de dos ; mais
ma face, on ne peut la voir. " (Exode,
33 , 20-23)
Pour s'imposer, le mythe doit s'incarner.
Encore fallait-il concevoir un chef et un scénario susceptibles
de soutenir tout un arsenal de rites, d'obligations,
d'interdits, de cérémonies, de dogmes qui forment l'essence des
religions primitives.
Toutes les grandes évolutions religieuses
se sont faites sous la houlette d'une personnalité éminente,
dont les origines seraient surnaturelles et dont la vie serait
parsemée de miracles. Mais un héros central ne donne toute sa
mesure que porté par une fiction suffisamment convaincante et
envoûtante, destinée à rassembler tout le groupe sous sa
bannière. D'où l'invention d'un passé glorieux auquel se
référer, des gonflements d'évènements minuscules, moult
manifestations de la volonté de votre Dieu domestique en votre
faveur, d'exhortations à l'obéissance, de condamnations
méprisantes des autres dieux, d'exécrations des autres peuples:
rien de tel pour souder les énergies de la communauté et
stimuler les enthousiasmes.
Un premier effort de structurer la
théologie israélite autour de ce qui est communément appelé la "loi
mosaïque" a été entrepris du temps
du roi Josias au - VIIe siècle.
Voir : -
L'invention du
"peuple élu" et de la "Terre Promise",
30 mars 2010
C'est d'ailleurs entre le -VIIe siècle et
le -Vème siècle avant notre ère que sont nés sur la terre
entière tous les grands mouvements spirituels ou religieux qui,
aujourd'hui encore, nourrissent la foi et l'espérance de leurs
disciples, chacun d'eux étant le miroir et réflecteur de la
société dont il était issu. L'Inde eut le prince
Gautama
vénéré comme Bouddha
- l'Eveillé;
la Chine connut avec Confucius
son éducateur moral et avec Lao
Tseu une voie, un chemin, un
Tao vers la
sagesse; Zoroastre,
que Nietzsche appellera
Zarathoustra, fut le précurseur
d'un monothéisme moral qui influença le christianisme,
Socrate et
son disciple Platon
furent les éducateurs à la fois moraux et intellectuels de la
Grèce.
C'est dans cet environnement religieux
mondial que naquit la religion dite "mosaïque"
et que fut rédigée la première version du récit doublement
fictif d'une épopée symbolique qui, dans un texte appelé
Deutéronome
- la deuxième loi - raconte des évènements censés s'être
déroulés environ un millénaire et demi avant d'être couchés par
écrit avec la précision journalistique exemplaire d'un témoin
visuel en dépit du fabuleux décalage dans le temps. La
Première loi
était censée, elle, avoir été dictée
directement à Moïse lui-même par le Dieu personnel de cette
tribu sur un fragment de montagne au cours des nombreuses
rencontres de dos ou face à face. Des vestiges de cette
Première loi
auraient été miraculeusement retrouvés
dans les souterrains par les lévites lorsque le roi Josias a
procédé à l'embellissement du Temple de Jérusalem commencé par
son grand père Ezéchias.
Voir : -
L'invention du
"peuple élu" et de la "Terre Promise",
30 mars 2010
Si un rouleau de parchemin ou de cuir
avait bien été découvert du temps de Josias, comme certains
historiens le sous-entendent, il ne pouvait s'agir que de
l'énumération d'un corpus
législatif très bref, conçu et rédigé à l'époque d'Ezéchias et
non de Moïse, bien qu'il soit aujourd'hui appelé "loi
de Moïse". Comme toutes les
législations antiques - la loi des
douze tables publiée à Rome sur
douze tables d'airain entre -450 et -451 et qui a régi la vie
des Romains jusqu'au premier siècle ou la
loi de Moïse qui aurait été conçue
du temps
d'Ezéchias, le premier roi
législateur et réformateur religieux du Royaume de Juda - ces
codes législatifs se sont inspirées du
Code d'Hammourabi
rédigé deux mille ans avant notre ère. De nombreux articles de
la loi de Moïse et de la loi de Babylone concordent, d'autres
ont été adaptés aux conditions sociales de la société judéenne.
Stèle de basalte noir érigée par le roi
Hammurabi de Babylone dans les dernières années de sa vie,
au XVIII è siècle av. J.-C.
7 - Où l'on comprend que la "bibliothèque
de Babel" de Jorge Luis Borges situe Israël dans le cosmos
Une nouvelle du grand auteur argentin
Jorge Luis Borgès invite le lecteur à le suivre dans une
promenade à l'intérieur d'une bibliothèque tellement fantastique
qu'elle contient la totalité des livres que l'esprit humain peut
produire en combinant les vingt-cinq lettres de l’alphabet. Dans
ses rayonnages se trouve consigné "tout
ce qu'il est possible d'exprimer, dans toutes les langues."
Tout et son contraire,
le capharnaüm des connaissances et
des erreurs humaines: "l'histoire
minutieuse de l'avenir, les autobiographies des archanges, le
catalogue fidèle de la Bibliothèque, des milliers et des
milliers de catalogues mensongers, la démonstration de la
fausseté de ces catalogues, la démonstration de la fausseté du
catalogue véritable, l'évangile gnostique de Basilide, le
commentaire de cet évangile, le commentaire du commentaire de
cet évangile, le fait véridique de ta mort, la traduction de
chaque livre en toutes les langues, les interpolations de chaque
livre dans tous les livres."
Ce monument fabuleux symbolise la totalité
de l'univers sensible et les vains efforts des hommes afin de
trouver un sens à leur vie et au monde. Ses rayonnages en forme
d'hexagones régulièrement disposés autour d'un puits central "figurent
l'infini", mais un infini trompeur,
grâce à une "glace qui double
fidèlement les apparences". Des "puits
sphériques appelés lampes assurent l'éclairage".
Or "ces globes émettent une
lumière insuffisante" quoique
"incessante": les humains, suggère
le grand Argentin, sont des fourmis tenaces, mais la loupiote
cérébrale insuffisante dont ils disposent confirme que leurs "connaissances"
sont un leurre multiplié à l'infini par des miroirs et tous ces
pseudo savoirs n'aboutissent, en réalité, qu'à un gigantesque
désordre.
Les usagers de cet univers-bibliothèque "interminable"
croient que l'ensemble aurait la forme d'une sphère, symbole de
la perfection, car "ce livre
cyclique, c'est Dieu". La "perfection"
est sa qualité intrinsèque mais, comme le prétendra Anselme dans
sa démonstration de l'existence de la divinité, la perfection de
Dieu s'accompagne de son existence: si Dieu est parfait, alors
il existe car l'existence est le corollaire nécessaire de la
perfection. CQFD.
Plongés dans une semi obscurité, les
locataires de ce labyrinthe interprètent les tableaux qui se
présentent à leur regard de la même manière que les prisonniers
de la caverne de Platon, dont la nouvelle de Borgès est
visiblement une petite soeur métaphorique. "Pour
les idéalistes, les salles hexagonales sont une forme nécessaire
de l'espace absolu. (...) Quant aux mystiques, ils prétendent
que l'extase leur révèle une chambre circulaire avec un grand
livre également circulaire à dos continu, qui fait le tour
complet des murs ; mais leur témoignage est suspect, leurs
paroles obscures." Borgès ne croit
pas que l'extase soit le meilleur chemin de la connaissance.
Mais de leurs côté, les humains ordinaires ne jouissent que de "lumières
insuffisantes" et sont condamnées à
l'imperfection, à la confusion et à la finitude. Pour échapper à
cet état misérable, ils inventent avec frénésie des paradis
délectables dans lesquels coulent des fleuves de lait et de miel
et des enfers sadiques remplis de flammes et de tortures.
Le mythe biblique de la tour de Babel
détruite par un Dieu colérique et jaloux qui aurait condamné les
humains à la "confusion des
langues" parce qu'ils se seraient
avisés de s'organiser sans lui, court en filigrane dans la
nouvelle de Borgès.
Cependant l'attrait du mystère des confins
de l'univers, qui seraient le lieu de résidence de Dieu, taraude
les hommes et fait naître en eux un désir incoercible de
s'échapper des hexagones mentaux dans lesquels ils sont
cantonnés ou attachés à un banc, à l'instar des prisonniers de
la caverne de Platon. Tels de nouveaux Icare, ils rêvent
d'atteindre d'un bond la circonférence de la sphère et de
participer à la félicité divine. Aussi tentent-ils par tous les
moyens de quitter "l'élégante
provision d'étagères, de tomes énigmatiques, d'infatigables
escaliers" afin de s'approcher de
la lumière du soleil de la vérité.
Par les allusions bibliques nombreuses
dont elle est parsemée comme d'autant de petits cailloux blancs,
la nouvelle de Borgès ouvre à une lecture métaphorique du destin
du "peuple élu".
Après avoir bétonné le petit hexagone psychique dans lequel il
s'est enfermé à triple tour, ce peuple l'a transformé en une
casemate militaire hérissée d'interdits et de menaces à
l'encontre des hexagones habités par d'autres rêveurs d'absolu,
par d'autres créateurs d'univers oniriques. Il en a
soigneusement bouché les meurtrières, puis il a condamné la
porte et tous se sont tous mis à crier en choeur, avec une
fureur dont leurs écrits portent la trace, qu'eux seuls ont
capturé l'absolu, qu'ils sont un peuple si exceptionnel qu'eux
seuls ont réussi à bondir jusqu'à la circonférence de la sphère.
Ils affirment qu'ils ont donc emprisonné la perfection divine et
l'ont si puissament arrimée à leur petit hexagone mental qu'ils
sont parvenus à en devenir les possesseurs exclusifs. Toute la
lumière du monde est désormais la possession privée des
habitants d'un unique petit hexagone mental et le reste de
l'univers est condamné à tâtonner dans les ténèbres.
Ces privilégiés ont pris soin de consigner
minutieusement cet évènement dans les kilomètres de rayonnages
dont ils ont tapissé les murs de leur hexagone depuis plus de
deux millénaires. Ils y célèbrent le bonheur d'être à la fois
les chouchous et les propriétaires exclusif de la divinité. D'un
même élan, ils ont légalisé l'adéquation entre l'étendue du pays
mental qu'ils souhaitaient s'attribuer et celui que foulaient
leurs pieds: voilà, proclamèrent-ils à tue-tête, c'est là notre
"terre promise",
l'absolu nous l'a donnée en nue propriété. La preuve? Un de nos
ancêtres s'est entretenu avec Dieu, de dos ou de face, l'affaire
est en suspens, mais son témoignage est néanmoins irréfutable
puisqu'il est consigné en toutes lettres dans nos livres, lisez
donc.
Puis ils affirmèrent que le l'absolu,
qu'ils avaient attaché avec de lourdes chaînes d'or
confectionnées grâce aux bénéfices de leur esprit industrieux,
leur avait ordonné de faire un grand ménage et de bouter hors de
leur vue les intrus qui auraient eu l'audace de prétendre qu'ils
sont chez eux depuis des temps immémoriaux. Nous sommes dans
notre droit, c'est écrit dans nos livres clament-ils en choeur:
"Jahvé, ton Dieu, chassera
peu à peu ces nations devant toi...".
C'est pourquoi, aujourd'hui encore, le
cerveau de l'actuel Premier Ministre d'Israël, M. Benjamin
Netanyahou, embrumé de vapeurs bibliques, le conduit à
identifier les Iraniens aux Amalécites et à vouloir répéter
compulsionnellement l'antique guerre des Hébreux contre les
tribus rivales. Les armées de Jahvé sont sur le pied de guerre
et ses représentants sur la terre fanfaronnent qu'il est deux
minutes avant minuit et le début d'un holocauste nucléaire.
Le véritable
adversaire des Palestiniens, c'est le Jahvé qui a été enfermé
dans l'hexagone cérébral des Judéens et qui demeure, aujourd'hui
encore, tapi dans le cerveau reptilien archaïque des Israéliens
sionistes.
8 - Où l'on suit de
hardis explorateurs se lançant à l'assaut du mythe
Je me suis donc attachée à suivre pas à
pas les différentes étapes de la rédaction des livres de la
bibliothèque mythique dans lesquels les Judéens se vantent
d'avoir scrupuleusement consigné les péripéties de leur
rencontre avec l'absolu divin en essayant de préciser, chaque
fois que c'était possible, à quelle date ces vénérables
grimoires avaient été rédigés et à quel moment s'étaient
produits les quelques rares événements vraisemblables évoqués et
présentés comme "réellement
historiques", alors qu'il s'agit de
la transposition, sur le mode héroïque et grandiloquent,
d'événements minuscules dont l'histoire réelle n'a pas gardé la
moindre mémoire. Malgré toute leur empathie pour le judaïsme les
auteurs de La Bible dévoilée
- Israel Finkelstein et Neil Asher Silberman - concluaient que "l'image
que l'on se fait de Jérusalem à l'époque de David, et davantage
encore sous le règne de son fils, Salomon, relève, depuis des
siècles, du mythe et de l'imaginaire romanesque.
"(p.208) "Il s'agit de la peinture
d'un passé idéalisé, d'une sorte d'âge d'or nimbé de gloire."
(p.201)
Voir :
La Bible et l'invention de
l'histoire d'Israël, 5
mars 2010
Il faut donc lire la Bible comme on lit l'Iliade
et l'Odyssée.
Presque tout y est inventé. "Toutes
les impressionnantes constructions attribuées par le passé à
Salomon furent en fait réalisées postérieurement par le Royaume
d'Israël" écrit
Shlomo Sand
dans un ouvrage récent , Comment
le peuple juif fut inventé, p. 235)
Le véritable miracle réalisé par ce petit
peuple, c'est que, le christianime ayant grandi et prospéré sur
ce terreau imaginaire et que l'islam ayant également repris
quelques-uns de ses mythes, le plomb de la fiction biblique
s'est transmué durant deux millénaires dans l'Occident chrétien
et dans l'Orient musulman, en or de la vérité historique.
Certes, depuis un siècle, les exégètes n'acceptaient plus comme
"parole d'évangile",
si je puis dire, le récit biblique en bloc et en relevaient les
incohérences, les contradictions, les similitudes avec les
légendes des empires voisins.
Plus personne ne croit, comme l'écrivait
encore Bossuet en 1689, dans son
Discours sur l'histoire universelle,
que le monde a été créé en l'an 4000 avant
notre ère, mais deux siècles plus tard, en 1887, Ernest Renan
considérait encore, dans sa volumineuse
Histoire du peuple d'Israël,
que les épisodes relatés dans les
Rois, les
Chroniques
ou les Juges
seraient "historiques"
au sens de l'historiographie moderne. Il a fallu attendre la fin
du XXe siècle et le début du XXIe, à partir des travaux
d'historiens, de linguistes, d'archéologues comme Finkelstein et
Silberman, mais aussi grâce aux minutieuses analyses à la fois
historiques et exégétiques - beaucoup moins célèbres, mais très
importantes - du bibliste italien
Mario Liverani dans son ouvrage
Oltre la Bibbia, Storia antica di
Israele de 2002,
publié en 2006 par les éditions
Bayard sous le titre La Bible et
l'Invention de l'histoire, pour que
l'histoire redevienne l'histoire et la légende la légende et
pour que la réalité scientifique finisse par s'imposer... dans
les cercles érudits seulement pour l'instant. Plus récemment,
l'ouvrage de Shlomo Sand, Comment
le peuple juif fut inventé, paru
chez Fayard en 2008, qui a connu un succès considérable dans le
monde et déchaîné les passions en Israël, a confirmé et prolongé
sur le plan politique, les analyses des prédécesseurs.
Admettre que le monde a cru dur comme fer
à des légendes exige une révolution copernicienne des mentalités
que peu d'individus sont prêts à accepter et surtout pas les
habitants du nouvel Etat surgi en Palestine et pour lesquels la
fiction biblique est le fond de commerce messianique à partir
duquel ils s'auto-justifient d'être là où ils sont. L'habitude
de transformer un récit imaginaire en vérité historique se
pousuit sous nos yeux. De 1947 à une époque récente, les
gouvernements sionistes successifs ont réussi à imposer une
image idyllique du nouvel Etat et à enfouir dans les caves des
archives les crimes monstrueux sur lesquels Israël s'est édifié.
Car elles sont nombreuses les
organisations terroristes sionistes qui ont sévi en Palestine
avant la création officielle de l'État d'Israël ou depuis cette
création. Il y eut d'abord le Ha-Shomer
(la Garde) , la première
organisation paramilitaire clandestine, avant la première guerre
mondiale et qui devint la Haganah
(la Défense) entre les deux
guerres. Créée en 1920, cette armée clandestine comptait à
l'origine 15 000 membres mais finit par former une armée de 160
000 combattants parfaitement équipés. A partir de 1941, elle
comptait une "compagnie de choc",
le Palmach,
de 6 000 unités prêtes à tout. Cette organisation militaire
sioniste n'hésitait pas à s'attaquer même aux Juifs
antisionistes - c'est elle qui a assassiné en 1924 le poète et
journaliste juif De Haan.
Puis il y eut l'Irgoun
forte de 5 000 hommes spécialisés
dans les attentats à la bombe contre les forces britanniques et
les Arabes de 1935 à 1939. Elle redevint active en 1944 et
le Likoud
en est l'héritier. Il y eut également
le Lehi
(ou groupe Stern)
. Dissidence de l'Irgoun cette organisation a multiplié, elle
aussi, les attentats, les exécutions sommaires et les extorsions
de fonds. Yitzhak Shamir, chef du
Lehi, a fait assassiner
Lord Moyne
grand ami de Churchill, ambassadeur d'Égypte et envoyé spécial
de Churchill en Palestine. Aujourd'hui est toujours active en
Israël l'organisation terroriste sioniste
mista'arebim
et des membres du
Mossad
déguisés en diplomates opèrent dans quasiment tous les pays
importants du monde.
Parmi les victimes les plus connues des
organisations terroristes juives, citons l'assassinat en 1948,
du comte Folke Bernadotte,
envoyé spécial de l'ONUet de son assistant français le
Colonel Serrot, abattus dans leur
voiture prise en embuscade à Jérusalem par une équipe de quatre
tueurs; toujours en 1948, le
Vicomte De Tapia, Consul d’Espagne
à Jérusalem, est tué dans un attentat de la Haganah contre
l’Hôtel Sémiramis de Jérusalem (dont le propriétaire était un
Arabe) en compagnie de vingt autres civils; en 2010, le
dirigeant du Hamas Mahmoud Al-Mabhouh
est étouffé par un oreiller à Dubaï. Il semble que depuis les
jours heureux où les terroristes juifs faisaient sauter comme à
la parade des trains, des hôtels, des autobus, des pipe-line,
des camions, des camps militaires anglais, les tueurs du Mossad
aient quelque peu perdu la main, car il s'y sont mis à
vingt-sept pour réussir l'exploit d'éliminer un seul homme... et
se sont fait repérer. Le talent se perd!
Mais d'innombrables personnalités moins
connues sur la scène internationale, notamment des Palestiniens
par centaines, ont été assassinés par ces groupes terroristes.
Mme Tzippi Livni fut membre d'un de ces commandos agissant à
l'étranger, dans la grande tradition des organisations
terroristes juives. "Nous avons
montré au monde que nous sommes prêts à devenir fous,
» jubilait-elle après les massacres commis durant l'agression
contre Gaza en janvier 2009 oubliant que
Nemesis, la
déesse de la vengeance, celle qui punit l'hubris
des fous, a déjà commencé à faire tourner la roue de la fortune
qu'elle tient à la main.
Némésis statue en marbre du IIe siècle, Villa
Getty
Déportations, empoisonnements, utilisation
d'armes biologiques, de gaz invalidants, assassinats individuels
ou de masse, la liste des "opérations"
de ces puissantes organisations terroristes qui ont sévi en
Palestine depuis 1920 aurait révélé que derrière la façade d'un
"Etat Potemkine"
démocratique grouillaient les pires corruptions et s'entassaient
des piles de cadavres, si les historiens avaient pu travailler
librement. Pendant que les tueurs s'activaient à chasser les
habitants originels et à raser les villages, "le
monde" regardait ailleurs. On
comprend pourquoi le premier ministre israélien Benjamin
Netanyahu et son gouvernement ont senti le danger et ont décidé
de porter de 50 à 70 ans le temps de maintien du statut
confidentiel des archives de l'État. Israël voit clairement que
la révélation publique de ses crimes passés serait dévastatrice
pour son image. "Si les gens
savaient ce que nous avons fait, ils nous pourchasseraient dans
les rues, et ils nous lyncheraient"
a pu écrire le rabbin anti-sioniste WEISSMANDL dans son ouvrage
Sefer Min Hametzar.
Rien de nouveau
sous le soleil. La fiction qui a permis de scénariser la
religion juive dans l'antiquité est utilisée aujourd'hui pour
blanchir la politique sioniste et réécrire l'histoire. Comme des
millions de documents sont archivés tant en Israël que dans de
nombreux pays du monde, il s'agit d'empêcher par tous les
moyens, y compris par le vote de lois liberticides, que les
historiens puissent les consulter librement et rétablissent une
vérité dérangeante. De plus, il faut laisser au roman
fantastique le temps de pervertir les esprits et aux petites
mains qui opèrent dans l'ombre celui de détruire les pièces les
plus compromettantes.
J'ai essayé de mettre en évidence
l'influence que les évènements politiques qui se sont déroulés à
l'intérieur et à l'extérieur de cette tribu dans l'antiquité ont
exercée sur la formulation des récits bibliques. Réciproquement,
il était important de montrer comment des récits théologiques
mythiques ont structuré en retour la psychologie des Judéens de
l'antiquité, et comment ils continuent d'influencer l'action
politique de l'Etat actuel - dans les jeux de miroir à l'infini
qu'évoque la nouvelle de Borges. Baignant dans les brumes
théologiques de leur fiction biblique, des immigrants venus des
quatre coins du monde rêvent d'imposer à la planète entière le
droit pour eux seuls de remonter le cours du temps, d'incarner
leurs fantasmes et d'anéantir deux mille ans d'histoire des
peuples du monde.
9 - Où l'on découvre
comment le mythe crée un corps collectif et le pérennise
Une grande partie de la difficulté réside
dans la définition du mot "historique".
Qu'est-ce qui est "historique"
dans une religion? A partir du moment où
le mythe crée l'histoire,
parce que l'histoire véritable est celle qui se déroule dans les
têtes, le mythe est
une forme de l'histoire. La
religion politique commence lorsque
les croyants prétendent extraire le mythe de leur cervelle,
habiller de chair et d'os les personnages qui gazouillent dans
leur cervelle et les faire marcher sur la terre, l'arme à la
main.
Les recherches archéologiques et
historiographiques les plus récentes ont établi que les grands
héros du récit deutéronomique censés constituer les fondements
d'une "histoire authentique du
peuple hébreu" - Abraham, Moïse,
Josué - sont des personnages mythiques construits à partir d'un
caléidoscope de légendes empruntées aux grands empires voisins,
Egyptiens ou Assyriens. Repeints aux couleurs locales et adaptés
aux mentalités tribales du moment, ils n'ont jamais eu davantage
d'existence historique
concrète que Zeus, Hermès ou Athéna.
Voir :
La Bible et l'invention de
l'histoire d'Israël,
5 mars 2010
Mais à partir du moment où
le mythe crée l'identité du groupe,
parce qu'il s'est enkysté dans les psychismes d'une manière
indéracinable, non seulement il est constitutif de la
personnalité privée de chaque croyant, mais il crée un
corps collectif
si puissant que même des membres qui n'adhèrent plus aux rites
et aux prescriptions de cette religion continuent à se réclamer
de leur "judéité".
Israël est un seul corps
et chaque unité est une parcelle de ce corps. Cette notion sera
reprise par la doctrine chrétienne. L'Eglise est le
Corpus Domini
et chaque membre de l'Eglise est une parcelle du corps de Dieu.
Aucune preuve historique ne convaincra les
Israéliens qu'ils vénèrent des héros symboliques et que leur
arrière-monde psychique repose sur un roman. Les juifs
continueront à commémorer la fuite de leurs ancêtres hors
d'Egypte et à croire que la mer Rouge s'est ouverte afin de
faciliter leur passage, car cette mythologie est une
rationalisation nécessaire et une justification politique de
leur destin passé et de leur histoire présente. "Si
Jahvé ne nous a pas donné cette terre, nous sommes des brigands"
proclament les plus lucides.
Cette fiction nationale héroïque était
destinée, à l'origine, à galvaniser les énergies et à permettre
l'apparition d'un sentiment national qui fait de la tribu un
seul et même corps psychique homogène, donc efficace et
innocent. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle cette
mythologie a été inventée. Rien n'a changé et le comportement
tribal instinctif est au fondement du soutien quasi unanime des
habitants d'Israël à la politique de leur gouvernement, y
compris à ses exactions les plus repoussantes, comme le monde
entier a pu en être le témoin au moment du bombardement du camp
de concentration de Gaza en décembre 2008, de l'invasion du
Liban en juillet 2006 ou du massacre de volontaires de la paix
sur le Mavi Marmara le 31 mai 2010, pour ne citer que les plus
récents, qui ont enfin débarqué dans l'actualité mondiale.
Des étudiants d'université manifestent
leur soutien à l’armée pendant les attaques contre Gaza en
décembre 2008
Un bel exemple de solidarité tribale est
donné par l'épisode du caporal
Shalit, fait prisonnier au cours
d'une embuscade tendue par les résistants de Gaza alors que
celui-ci n'a pas été capturé alors qu'il baguenaudait
bucoliquement dans la nature, un bouquet de fleurs à la main,
mais pendant qu'il participait, sur un char, à une de ces
opérations illégales de l'armée israélienne dont on sait combien
elles sont toujours meurtrières pour les civils palestiniens.
Depuis lors une mobilisation en vue de récupérer cet unique et
obscur représentant d'une troupe qui n'hésite pas, par ailleurs,
à tuer sans sommation des civils des deux sexes et même des
enfants, d'une population dont ils cherchent à s'approprier les
terres, donne lieu à des manifestations multiples et variées
tant à l'intérieur des frontières de l'Etat que dans la diaspora
mondiale.
En quoi ce caporal est-il plus précieux
que les milliers de résistants palestiniens qui croupissent dans
les geôles israéliennes, parmi lesquels un grand nombre de
femmes, d'adolescents et même d'enfants pour que des politiciens
européens et même des chefs d'Etat se mobilisent en sa faveur?
C'est qu'il est un membre de la
tribu. Bien qu'il ne soit qu'un
obscur individu anonyme, un prisonnier de guerre sans valeur
particulière, certainement beaucoup mieux traité que les
milliers de Palestiens raflés dans leurs villages, comme on en
voit chaque jour des images, puisqu'il représente une monnaie
d'échange précieuse, le monde entier retentit de lamentations
sur son sort. Le corps collectif de la société israélienne se
sent amputé par la détention de cette unique unité. Ce corps
psychique tribal souffre et saigne. Seule la récupération de ce
prisonnier de guerre permettrait au "corps
collectif" de cicatriser sa
blessure. Mais ce "corps collectif"
si sensible à la détresse d'un unique individu adulte, parce
qu'il est juif, trouve tout naturel que
des centaines d'enfants soient détenus et
soumis à des tortures sexuelles dans ses geôles, parce qu'ils
sont palestiniens et que des hommes
et des femmes soient maltraités d'une manière sadique.
En effet, qui, dans cette tribu si
merveilleusement soudée et solidaire de tous ses membres aurait
l'idée saugrenue de s'indigner de ce que certains d'entre eux
soient spécialisés dans la rafle de gamins de dix ans dans leurs
écoles? Gifles, coups de pied, coups de poing, coups de crosse
de fusil ou de bâton sont le traitement courant. Mais des
tortures plus sévères sont réservés aux récalcitrants: suspendus
par les bras jusqu'à provoquer des luxations des épaules ou
attachés pendant des heures dans des positions inconfortables,
les yeux bandés. Il s'agit de dissuader cette graine de "terroristes"
de jeter méchamment des pierres sur les gentils soldats
israéliens - comme ceux de la photo ci-dessous - qui rasent les
maisons de leurs parents, cherchent à leur extorquer des
renseignement sur leurs proches, matraquent et tuent impunément.
Chez quelques-un(e)s de ces tortionnaires mâles et femelles, un
début d'humanité commence à pointer le bout de son nez et des
aveux écrits ou filmés expriment des remords tardifs . Mais ils
n'ont pour l'instant aucune influence sur mentalité générale de
la société israélienne et sont même considérés comme "anti
patriotiques".
Enfant palestinien raflé dans
son école
J.-H. Rosny aîné avait anticipé la
situation de Shalit dans son roman d'aventures
La Guerre du feu.
Les Wah avaient atteint, écrit-il, un
stade d'évolution supérieur à celui des tribus environnantes.
Des hordes plus violentes et plus énergiques les avaient peu à
peu repoussés dans des territoires de plus en plus hostiles,
mais, en dépit de leur faiblesse numérique - ou peut-être à
cause d'elle, précisément - les Wah "risquaient
tout pour délivrer un des leurs pris, cerné ou tombé dans un
piège. Cette solidarité (...) qui jadis avait immensément accru
leur puissance, les conduisait parfois à
de sinistres aventures."
La "libération
du caporal Shalit" n'était-elle pas
l'un des principaux objectifs avancés afin de justifier la "sinistre
aventure"
du bombardement du ghetto de Gaza et ses 1
500 morts?
La solidarité tribale est allégorisée par
la fiction biblique présentée dans le
Livre d'Esther particulièrement
vénéré par les juifs, bien que le nom de Jahvé n'y soit jamais
cité.
Une jeune orpheline qui a caché son
origine ethnique est devenue reine de Perse grâce une beauté
exceptionnelle. Au péril de sa propre vie et en compagnie de son
cousin Mardochée, elle aurait réussi à déjouer un complot et à
sauver tous les juifs de Babylone qu'un méchant premier ministre
perse voulait exterminer sans raison.
Aucun des événements relatés dans ce récit
n'est historique, bien qu'il situe l'action durant la
déportation d'une partie des Judéens à Babylone après la déroute
militaire de Megiddo et la mort du roi Josias en -598. Rédigée
probablement par le scribe Esdras, cette fiction raconte la
délivrance in extremis
de la "communauté"
d'un massacre imaginaire. Elle continue depuis près de
vingt-cinq siècles d'être joyeusement commémorée chaque année
dans une fête dont le nom, Pourim,
est une simple reprise des
Pûrim
babyloniennes qui fêtaient le retour du printemps. C'est
la
grande fête de la solidarité communautaire, à la fois carnaval
pour les enfants et joyeuses extravagances et transgressions
pour les adultes, par laquelle la "communauté"
fête symboliquement la puissance de son "corps
collectif" et savoure la volupté
d'une vengeance par procuration, puisqu'ayant "échappé"
à un massacre potentiel, les juifs ont été autorisés, dans la
fiction biblique du Livre d'Esther,
à exterminer réellement tous ceux qu'ils considéraient comme
leurs ennemis.
Les rabbins
qui proclament aujourd'hui qu'il est "licite
de tuer les bébés et les enfants"
des "ennemis d'Israël"
car, disent-ils, "il est clair
qu'ils nous porteront préjudice lorsqu'ils auront grandi"
se situent dans la continuité directe du
Livre d'Esther
et de son massacre préventif, ce qui prouve que sur un "corps
collectif" en
béton armé le passage des siècles ne produit pas la moindre
érosion.
[3]
10 - Où l'on
assiste à la chute du mythe dans la politique. Il était une fois
Israël ...
Dans son
ouvrage "Mon père était un
combattant de la liberté, l'histoire de Gaza telle qu'on ne vous
l'a jamais racontée", l'écrivain
palestinien Ramzy Baroud
raconte une expédition punitive de la troupe israélienne dans un
camp palestinien de la bande de Gaza: "Les
soldats avaient pour habitude de demander à celui qui avait été
désigné pour un tabassage: "Tu écris avec quelle main?" et lui
cassaient ce bras-là d'un coup de batte, puis ils cassaient
l'autre bras et ensuite les jambes."
[4]
J'ai longuement décrit, dans de nombreux
textes de mes Chroniques de la
Palestine occupée, la barbarie de
l'Etat d'apartheid israélien. Il faudrait un volume plus épais
que la Bible pour collationner les innombrables formes que prend
la sauvagerie d'une soldatesque omniprésente jour et nuit aussi
bien en Cisjordanie occupée qu'aux frontières du goulag de Gaza
dont elle contrôle en réalité chaque centimètre carré.
Voir,
entre autres, -
Le
territoire, les rats et les hommes
On ne peut que constater, une fois de
plus, la remarquable homogénéité psychique de la quasi-totalité
du "peuple élu".
Elle se manifeste par des applaudissements enthousiastes aux
exactions de son armée contre des civils.
Ainsi, le 5
juin 2010, le gouvernement a décidé de décorer de la médaille
d'honneur le membre de l'unité du commando marin qui s'est
révélé l'assassin le plus efficace au cours de l'abordage en
haute mer de la flottille internationale de la Liberté par des
commandos-pirates armés jusqu'aux dents. A lui tout seul il a,
en effet, réussi l'exploit de tuer à bout portant , d'une balle
dans la nuque ou entre les yeux, six des neuf victimes
officielles parmi les volontaires pacifistes désarmés qui
voguaient sur le cargo turc Mavi
Marmara en
direction du camp de concentration de Gaza.
[5]
Le Mavi
Marmara, navire amiral de la "Flottille de la Liberté", attaqué
par les commandos de marine israéliens (PHOTO:
MENAHEM KAHAN, AFP)
Enfermés dans le bunker d'un tribalisme
bétonné par un dieu qui lui aussi "tue,
ment, trompe et vole pour le plus grand bien d'Israël",
comme l'écrivait Renan, et bien qu'ils se proclament
officiellement les habitants d'un Etat laïc, les Israéliens
manifestent un soutien sans faille aux crimes contre des civils
- enfants et nourrissons compris - ainsi qu'aux lois qu'un
sadisme législatif particulièrement ingénieux et d'une
imagination raciste confondante parviennent à concocter.
Les tueurs du Mavi Marmara ont été
accueillis en héros par des vivats et des rodéos de véhicules
klaxonnant dans les rues des grandes villes.
Scènes de liesse à Tel-Aviv pour fêter le
retour des tueurs des volontaires de la paix
Je dis bien
habitants et non citoyens, car cet
Etat présente une autre particularité mondiale, celle de
hiérarchiser, en fonction de leur appartenance religieuse, les
occupants du territoire qu'il a investi. Nul "citoyen
universel" n'y existe. Au sommet de
la pyramide sociale trônent les "Juifs",
ornés de la majuscule qui leur accorde le bénéfice de la
nationalité raciale et qui les distingue des
juifs, sans
la majuscule révérentielle, utilisée lorsqu'il est question des
adeptes de la religion fondée sur les textes de la
Thora. Une
soixantaine d'autres "nationalités",
et notamment la masse des indigènes, habitants autochtones et
authentiques possesseurs de la terre palestinienne regroupés
sous le vocable d'"Arabes",
barbotent dans un marécage législatif filandreux et confus,
subtilement hiérarchisé dans lequel les "Russes"
ont un peu plus de droits que les "Arabes",
mais nettement moins que les "Juifs".
Les
contacts sociaux ou politiques entre les différents groupes
raciaux sont quasi inexistants à l'intérieur même des frontières
de cet Etat.
[6]
L'apartheid
ne régit donc pas seulement les rapports entre l'occupant et les
occupés, il est également omniprésent dans la vie quotidienne à
l'intérieur des frontières officielles de l'Etat. Il se
manifeste même entre les "Juifs"
cachères et les ceux qui le sont
moins, c'est-à-dire entre les immigrants originaires des régions
talmudiques d'Europe centrale, d'Ukraine, de Russie et du
Caucase - les Askhenazes -
et ceux qui proviennent d'Afrique du nord
et des autres pays musulmans du Moyen Orient - les
Séfarades
- contaminés, semble-t-il, par la pollution arabe.
[7]
Il
s'épanouit dans des règlements administratifs sadiques qui
témoignent d'une inventivité et d'une fertilité qui suscitent
une stupeur admirative par le degré de malfaisance qu'ils sont
capables de produire à l'égard des "non-Juifs".
[8] Mais, ô ironie de
l'histoire et retour du boomerang, une nouvelle forme
d'apartheid est en train de naître à l'intérieur même du groupe
des "Juifs"
de la première catégorie. Les juifs orthodoxes hyper religieux,
ignorants comme des carpes dans tous les ordres utiles à la vie
en société - et auxquels Ben Gourion avait accordé le privilège
de vivre sans travailler afin de consacrer leur vie à l'étude la
Thora
et du Talmud -
refusent tout contact physique avec le
reste de la société, y compris avec les autres juifs, impies à
leurs yeux, et exigent des écoles spéciales pour leurs nombreux
enfants. La libération de toute obligation militaire, une
démographie galopante - chaque famille comptant huit à dix
enfants - ainsi que l'attrait d'une vie oisive semblable à celle
des lévites judéens du temps de Josias, ont assuré la prospérité
et augmenté l'arrogance de cette partie de la population juive
d'Israël qui compte déjà 600 000 membres, soit près d'un quart
de la population ethniquement "pure".
Manifestation de colons ultra-orthodoxes
S'y ajoute
la catégorie des "colons",
les pires prédateurs. Une masse de 475 000 individus originaires
du monde entier, jeunes et vigoureux, fanatisés par l'idéologie
sioniste, dépourvus de tout sens moral inné et armés jusqu'aux
dents, harcèle jour et nuit les Palestiniens de Cisjordanie et
de Jérusalem, détruit leurs maigres cultures, incendie des
maisons, coupe ou brûle de merveilleux oliviers centenaires,
vole sans vergogne tout ce qui est à sa portée - une vidéo
montre la manoeuvre qui semble bien rôdée de quatre chenapans
juifs de la colonie voisine en train de subtiliser un mouton
lors du transit d'un maigre troupeau conduit par un berger
palestinien. Un membre caché des groupes de solidaires qui
essaient de protéger les Palestiniens a pu filmer la scène.
[9]
Bien que les 144 colonies qui les
hébergent soient toutes
illégales et construites sur des terres volées, non seulement
leurs exactions ne sont jamais sanctionnées, mais ils sont armés
et officiellement protégés par l'armée, dont ils sont devenus
l'une des composantes les plus actives. On peut les identifier
aux fameux "frelons"
évoqués ci-dessus par le texte du
Deutéronome. Chargés implicitement
par une administration complaisante de dégoûter les Palestiniens
de continuer de vivre sur la terre de leurs aïeux, ils
s'acquittent de leur mission avec zèle.
Soldats originaires des
colonies de Cisjordanie en prière
Ainsi, comme les
fameux trains sur les panneaux de la SNCF, un apartheid peut en
cacher un autre. Victime de la mentalité ségrégationniste de ses
habitants, l'Etat d'Israël se trouve confronté à des apartheids
internes en forme de poupées russes.
Plus surprenant encore, des sites juifs
parmi les plus officiels en arrivent à justifier la judéité par
la génétique
[10]
et, ironie de l'histoire, à se réclamer eux-mêmes d'un racisme
biologique. Des publicités invitant les amateurs à se livrer à
une recherche de "gènes
juifs"
fleurissent sur internet. [11]
Quant à l'Etat d'Israël lui-même, il
s'agite frénétiquement sur la scène internationale afin
d'obtenir la reconnaissance de sa légitimité comme "Etat
juif" sur un fondement "biblico-génético-matrilinéaire".
Quel paradoxe de voir les représentants
d'un Etat qui justifie l'appropriation de la Palestine par le
matraquage médiatique mondial d'un rappel des persécutions
racistes dont ses membres ont été victimes en Europe, en arriver
à se réclamer, avec une innocence stupéfiante, d'un tribalisme
génétique et à s'auto-justifier à partir de la biologie. Quelle
ironie de l'histoire de voir une population dont les ancêtres
ont été victimes en Espagne et au Portugal, durant les XVè et
XVIe siècles, de la fameuse politique de la
limpieza de sangre,
la "pureté de sang",
qui bannissait de toutes les fonctions politiques et
administratives même les convertis au christianisme soupçonnés
d'une ascendance juive, se réclamer à leur tour de ce principe
contre les "goys"
et les "arabes"!
Mais au moment où la politique d'un Etat
est dictée par ses chromosomes, on quitte l'histoire universelle
des humains pour choir dans une variante du comportement animal.
Si le tribalisme biologique est le déterminant majeur de la
politique d'un Etat, ne devient-il pas légitime d'étudier la
politique israélienne à la lumière des observations éthologiques
de Konrad Lorenz dans son Histoire
naturelle du mal et de la comparer
au comportement démoniaque des rats envers des congénères
n'appartenant pas à leur propre espèce?
11 - Une question
de psychophysiologie
Car
toujours revient la même question lancinante: pourquoi les Juifs
aujourd'hui, les Judéens hier, considèrent-ils comme
physiquement et psychiquement indispensable à leur équilibre
corporel et mental de s'isoler des humains qui ne font pas
partie de leur ethnie et donc à édicter des lois tribales qui
leur font rejeter aussi violemment que les rats, les humains qui
ne partagent ni leur patrimoine génétique, ni leur arrière-monde
psychique? Israël est aujourd'hui le seul endroit sur la planète
entière dans lequel un racisme officiel et revendiqué s'épanouit
et se développe au vu et au su de tous, et au mépris de toutes
les lois internationales. "Les
personnes qui souhaitent obtenir la nationalité israélienne
devront prêter allégeance à Israël comme « Etat juif et
démocratique » et plus seulement à l’Etat d’Israël, comme c’est
le cas aujourd’hui",
Vous voulez la nationalité ? Déclarez qu’Israël est un Etat
juif, rapporte
le site de l'ambassade de France en Israël.
[12]
Ainsi, il y
a quelques années, un colon juif originaire de France qui venait
de débarquer dans la patrie de son coeur a cru bon de fêter son
"retour"
en poignardant de sang-froid un chauffeur de taxi arabe après
une course. Lorsque la police l'a interrogé: "Je
n'ai rien ressenti (...) C'était comme abattre un animal",
avait déclaré aux enquêteurs israéliens Julien Soufir, 25 ans,
qui a reconnu s'être rendu à Jérusalem pour trouver un chauffeur
de taxi palestinien dans l'intention "de
tuer un Arabe parce qu'il était arabe".
[13]
Le Monde
du 14 août 2010 rapporte dans une toute petite bulle qu'un colon
de Cisjordanie de 29 ans, auteur de quatre assassinats de
Palestiniens avec un poignard et de sept autres agressions
anti-arabes a été condamné par un tribunal israélien à une peine
vraiment trop féroce: 15 jours d'assignation à résidence
dans sa propre maison,
soit 1jour, 8heures, 36 minutes et 21secondes par Palestinien
poignardé à mort. Le monde entier a partagé avec la "communauté
juive" le
soulagement de voir que jeudi 12 août 2010, M. Haïm Pearlman a
retrouvé une totale liberté d'action.
[14]
Le 16 mars 2010, au cours de violents
affrontements à Jérusalem-Est, le photographe Ammar Awad de
l'agence américaine Reuters, a saisi une scène particulièrement
révélatrice de la mentalité et du "courage"
de l'armée auto-proclamée "la plus
morale du monde".
Arrêter des enfants et des adolescents,
les soumettre à des tortures sexuelles, les utiliser comme
boucliers humains lors des répressions des manifestations ou des
opérations de guerre sont des comportement habituels et
solidement ancrés dans les pratiques de cette milice. Mais cette
fois, les célèbres FID (Forces
israéliennes de Défense)
ont eu une idée géniale: comme la vie d'un seul juif est, comme
on doit le savoir, plus précieuse que des milliers de vies de
représentants d'autres nations - voir le verdict Haïm Pearlman -
et que celle d'un arabe ne vaut même pas qu'on use sa salive à
en parler, aucune précaution n'est surperflue afin d'assurer la
sécurité des inestimables forces anti-émeutes, pourtant équipées
de gigantesques boucliers, armées et casquées comme une troupe
de Martiens et accompagnées de lourds véhicules militaires.
Eurêka, pourquoi ne pas kidnapper une
toute petite fille sur le chemin de l'école avec son petit
cartable sur le dos et se cacher derrière ce bouclier
protecteur? Une petite fille palestinienne, c'est de la graine
de terroriste, il n'y a donc pas à la ménager car, comme
l'écrivent les éminents rabbins auteurs de la
Thora du roi
dans des extraits publiés par
Haaretz "attaquer
des non-juifs" peut
"freiner leurs inclinations malignes"!
Ce serait donc pour son bien et au nom de la morale que les FID
s'abritent derrière une petite écolière. On comprend enfin
pourquoi l'armée israélienne se proclame "la
plus morale du monde"! Elle tue les
Palestiniens pour leur bien.
Seuls des esprits mal intentionnés
pourraient juger qu'il s'agit d'une obscénité morale et que les
FID sont des lâches. [15] Mais pourquoi s'arrêter en si bon
chemin et ne pas utiliser des berceaux remplis de nourrissons?
Il y a tant de marmaille palestinienne grouillante "d'inclinations
malignes" !
Courageux petit bouclier
humain (© Photo Ammar Awad/Reuters)
Je
n'évoque que pour mémoire la guerre sauvage menée contre la
prison de Gaza. Il n'a pas fallu moins de cinq cents pages à un
co-religionnaire, le juge sud-africain Goldstone, pour
collationner les innombrables crimes de guerre commis par l'Etat
sioniste durant trois semaines, mais approuvés quasi unanimement
par la population qui non seulement n'a éprouvé - et n'éprouve
toujours pas - la moindre pitié, la moindre honte ou le moindre
remords, mais s'est montrée, au contraire contrariée et furieuse
devant l'arrêt du carnage avant qu'il soit complet.
Voir :
L'axe de l'apocalypse se rue à
l'assaut du camp de concentration de Gaza,
Toutes les guerres charrient leurs
cortèges de massacres, mais les
guerres à la fois coloniales et religieuses
sont les plus cruelles car lorsque la
colonisation se fait au nom d'un dieu, la barbarie n'est freinée
par aucune loi humaine et par aucune inhibition. L'issue ne peut
en être que l'extermination de l'ennemi, car les prédateurs
messianiques prétendent qu'ils obéissent à "une
autre loi", qu'à celle des
institutions internationales qui encadrent la politique mondiale
et tentent de canaliser le comportement des hommes de troupe sur
le terrain.
Qu'est-ce que cette "autre
loi" dont se réclame Israël ? Où et
comment a-t-elle été élaborée, comment s'est-elle durcie dans
les cervelles et dans les cœurs jusqu'à aboutir à l'espèce de
soupe idéologique aujourd'hui appelée
sionisme et
composée d'un brouet messianico-colonialiste cuisiné à partir
d'une interprétation littérale du
Deutéronome dans lequel barbotent
librement préceptes bibliques, rapines, violences, tortures et
toutes les formes de sadisme dont sont capables les hommes quand
ils considèrent que tout leur est permis sur la terre et qu'ils
obéissent aux commandements d'un Dieu?
A la poubelle, la
Déclaration universelle des Droits de
l'Homme de l'Assemblée générale des
Nations Unies de 1948; ignoré le
Pacte international relatif aux droits civils et politiques
de l'Assemblée Générale de 1977;
méprisé le Droit international
humanitaire (DIH) ainsi que le
Droit international des droits de
l'homme (DIDH). Quant à la
Quatrième Convention de Genève
qui protège les civils en temps de guerre, l'agresseur la tient
pour un chiffon de papier et, dérision suprême, se considère en
état de légitime défense et en impute les obligations aux
victimes. Son ambassadeur en France les avait en son temps
dédaigneusement qualifiées de "rituelles".
Sûr de son
impunité, Israël fanfaronne et ne lit même plus les 67
résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies qui le
condamnent expressément.
Voir :
Ils ont crucifié Marianne... Les
nouveaux exploits de Tartuffe en Palestine
Cet Etat ne signe ni le
Traité de non- prolifération des armes
nucléaires, ni celui d'interdiction
de leurs essais, tout en s'agitant
frénétiquement et en faisant agir les innombrables groupes de
pression qu'il possède sur la planète entière afin de faire
condamner une arme potentielle qui serait construite dans un
avenir indéterminé par une puissance rivale de la région.
12 - Où l'on observe le "peuple élu"
confronté à l'insurrection morale des peuples du monde
Quant au traité sur
le droit de la mer,
le monde entier a pu voir le cas qu'il en a fait durant la nuit
du 31 mai 2010 lorsqu'il a envoyé ses commandos de marine
investir les navires de la "Flottille
de la Liberté" dans les eaux
internationales et assassiner de sang-froid une dizaine de
pacifistes désarmés. Laisser des blessés se vider de leur sang
jusqu'à ce que mort s'ensuive ou rouer de coups de pied un
blessé agonisant avant de l'achever de quatre balles dans la
tête, voilà le genre d'exploit pratiqué par les commandos de cet
Etat et que révèlent quelques vidéos qui ont échappé à la razzia
des escadrons de la mort qui se sont livrés, de nuit et en haute
mer,à un acte de piraterie, sur la flottille de volontaires
humanitaires voguant vers la prison de Gaza.
Non
seulement ils étaient munis d'une liste de passagers à tuer,
mais ils ont de surcroît procédé à un cambriolage en règle. Tels
de vulgaires pirates de la mer, la troupe israélienne a
dépouillé systématiquement tous les parlementaires et les
volontaires internationaux, y compris ceux qui gisaient dans
leur sang, le crâne explosé. Les agresseurs ont fait main basse
sur leurs bagages, leurs effets personnels et jusqu'aux
chaussettes qu'ils avaient aux pieds, comme en témoigne
l'écrivain suédois Henning Mankell
présent sur le navire grec
Sophia.
[16]
Henning Mankell
lors d'une conférence de presse à Berlin après sa participation
à la flottille d'aide à Gaza
et son expulsion d'Israël. (Reuters/Tobias Schwarz)
Camescopes,
appareils photos, ordinateurs et même cartes de crédit, argent
liquide, bijoux, passeports tout a été volé. En bons voyous,
certains soldats ont utilisé des cartes de crédit volées pour
leur usage personnel, achats d'i-pod et d'autres babioles
électroniques.
[17]
A côté du comportement de
l'armée israélienne, les pirates somaliens font figure de
gentils adeptes des principes de Baden-Powell.
L'histoire est facétieuse. Un des
lobbyistes les plus actifs dans la défense d'Israël et du
sionisme sur la planète entière avait prononcé, la veille, avec
des trémolos dans la voix, un hymne à la gloire d'une armée dans
laquelle il avait voulu entrer en son jeune âge. "Je
n'ai jamais vu une armée aussi démocratique, qui se pose autant
de questions morales. Il y a quelque chose d'inhabituellement
vital dans la démocratie israélienne."
M. Béhachel Lévy est décidément un grand
humoriste.
Mais malgré la censure tacite des journaux
et des télévisions, la complicité des grandes agences de presse
comme AFP, Reuters ou Associated Presse et malgré les efforts
des innombrables petites mains qui officient dans les médias
occidentaux et se contentent de relayer la version israélienne,
la vérité se fraie son chemin.
[18]
Au moins avec Israël le monde n'a jamais
de surprise: le pire est toujours sûr. Ainsi, après le massacre
opéré par les troupes d'assaut sur le
Mavi Marmara,
cet Etat a accepté, à la suite des pressions internationales,
pourtant d'une grande modération, de nommer une "Commission
d'enquête" dont le résultat est
connu d'avance, puisqu'il est contenu dans son énoncé. En effet,
la pseudo "enquête"
doit, précise le texte officiel, "préserver
la liberté d'action de nos soldats"
et "prouver que nos actions
étaient de caractère défensif et donc justifiées".
CQFD.
Le Père Ubu aurait adoré ce genre d'"enquête".
Mais aucun ridicule, aucun mensonge ne
découragent l'armée innombrable des membres potentiels de cet
Etat dispersés sur la planète entière. Comme ils occupent des
places stratégiques dans les médias de tous les pays du monde
leur force de frappe est immense et avec une énergie que ne
freine aucun scrupule et ne décourage aucun mensonge, ils
s'évertuent à peindre en rose l'Etat bien-aimé, leur véritable
patrie. "Des matinées entières,
ils s'étaient immobilisés devant ce portrait, s'émerveillant de
sa beauté…"
Ils savaient au fond de leur cœur que cet
Etat était devenu "monstrueux et
repoussant", "en
proie à une corruption particulière, pire que celle de la mort",
que, de semaine en semaine, de mois en mois, d'année en année,
sa figure devenait "bestiale,
flasque, immonde", mais ils
refusaient de l'admettre. Ils cachaient "son
masque de turpitude et de laideur"
sous des draperies de mensonges de velours rouge, essayant
d'imposer un "universel respect"
pour "la seule démocratie au
Moyen-Orient", la "lumière
parmi les nations", la "nation
au-dessus de toutes les nations"
qui, grâce à son ingéniosité, avait fait "refleurir
le désert".
Mais pendant que les aèdes du sionisme
chantaient leur extase, derrière son mur hérissé de bombes et de
missiles nucléaires, "un visage
hideux dans le clair-obscur grimaçait sur la toile".
"La corruption et l'ignominie"
donnaient à cet Etat "le visage
d'un satyre". (Oscar Wilde,
Le portrait de Dorian Gray)
Une fois encore,
un grand écrivain se révèle un prophète. On voit comme Oscar
Wilde a su décrire l'évolution de l'Etat d'Israël et son passage
du mythe à la réalité.
La sous-lieutenante israélienne Eden Abargil :
"L'armée, la meilleure période de ma vie"
Il semble que la pression internationale
ait fini par avoir raison de l'arrogance de l'Etat hébreu.
Celui-ci a été contraint d'accepter que quatre membres - dont un
Turc et un Israélien - désignés par l'ONU enquêtent sur les
exactions des commandos juifs. Mais sachant que le Président est
un Néo-zélandais, l'ancien premier ministre Geoffrey Palmer très
favorable par principe à Israël, et que le vice-Président, le
Colombien Alvaro Uribe, ancien Président de la République, est
un sioniste déclaré, il faudra beaucoup de mordant au
représentant turc pour s'imposer face au bloc de ses trois
collègues afin de donner une chance à la vérité. Quant au
Premier Ministre, M. Benjamin Netanyahu, il proclame haut et
fort au nom de l'Etat d'Israël, qu'il est "fier
du courage exceptionnel des soldats".
Car la liste des forfaits de cet Etat ne
s'arrête pas à ses crimes sur la flottille de la Liberté: il
poursuit la construction d'un mur d'apartheid malgré la
condamnation de la Cour
Internationale de Justice.
L'extension des colonies bat son plein au grand jour ou
hypocritement. Selon son appréciation des rapports de forces et
en vue de conquérir de nouveaux territoires, il bombarde ses
voisins libanais, syriens, gazaouis, irakiens. Jour après jour
et par petits paquets, il assassine des Palestiniens en
Cisjordanie, à Gaza ou au Liban sans compter l'action de
commados de tueurs "éliminant",
comme ils disent, des personnalités gênantes.
Le comble
de la barbarie mécanisée est atteint avec l'installation du
système électronique Spot and
Shoot (Repère et Tire) . Devant des
écrans "des femmes soldats,
situées loin de là dans une salle d’opération, ont la
responsabilité de cibler et d’actionner les tirs des
mitrailleuses télécommandées installées sur des tours de guet
tous les quelques mètres le long de la grille électronique qui
encercle Gaza."
[19]
Spot and Shoot: Une tueuse en
action
Des
militaires femmes sont préférées pour ce genre d'assassinat
électronique afin d'économiser les mâles, utilisés de préférence
dans les confrontations musclées ou sanglantes. Quand ces
femelles-tueuses, qui éprouvent visiblement une véritable
jouissance à humilier des hommes arabes, retournent à une vie
civile normale après les deux années durant lesquelles elles se
sont livrées à des assassinats télécommandés ou à torturer des
prisonniers, quelle est leur psychologie? Mlle Eden Abargil -
dont le prénom constitue une véritable dérision - a donné une
réponse à cette question: «
Je hais les Arabes et je leur
souhaite le pire. Je serais heureuse de tous les tuer, même de
me livrer à une véritable boucherie».
(Eden Abergil sur Facebook).
[20] Abou Ghraib
bis repetita.
Si cette activité-là est normale, alors
pourquoi s'étonner et s'indigner du comportement des gardiens
des camps de concentration nazis? Quelle est la mentalité d'un
pays dans lequel tous
ses membres - les hommes pendant trois ans et les femmes pendant
deux ans - ont été, au moment charnière de leur existence où ils
entrent dans la vie adulte, des tueurs et des meurtriers
potentiels entraînés dès la petite enfance au maniement des
armes? Et cela depuis soixante-trois ans, c'est-à-dire depuis
trois générations. Bourreaux et bourrelles, est-ce là la
nouvelle mission du "peuple élu"?
Formation des tueurs de demain: des colons
juifs entraînent leurs enfants au maniement des armes
Il semble que le gouvernement israélien
soit particulièrement prévoyant dans la formation de ses
tortionnaires. Comme chacun sait, plus l'éducation est précoce,
plus le "professionnel"
est performant. C'est pourquoi l'armée "morale"
fait appel à des volontaires lycéens afin de les entraîner dès
l'adolescence à harceler les familles palestiniennes et à
considérer comme une fête le fait d'écraser au bulldozer leurs
maisons. Après les maisons, les humains? Le conducteur de
l'engin qui a écrabouillé sans état d'âme l'héroïque Rachel
Corrie a déjà montré la voie.
C'est ainsi qu'on voit des gamins de
quinze ans intégrés dans la "garde
civile israélienne" rigoler à
vandaliser les biens, à détruire et à souiller les photos de
famille, les meubles et le linge. Même les nazis, qui servent
habituellement de référence de la barbarie moderne, n'étaient
jamais allés si bas dans la corruption morale des enfants et
n'avaient pas directement utilisé les mouvements de "Jeunesse
hitlérienne" dans la persécution
des juifs. On devine que tous les Abergil mâles et femelles
n'attendent que l'occasion pour assouvir la "haine"
qu'ils ont aspirée depuis l'enfance et pour se livrer à la "véritable
boucherie" à laquelle rêve cette
jeune personne, qui n'est certainement pas un cas isolé.
Des jeunes lycéens volontaires de la police
israélienne fouillent dans les biens d’une famille d’al-Arakib
et se vautrent dans ses meubles (photos Ata Abu Madyam of Arab
Negev News)
Dans son ouvrage
Vaincre Hitler : Pour un judaïsme plus humaniste et
universaliste (Fayard 2008)
Avraham Burg,
ancien Président de l'Agence Juive et ancien Président de la
Knesset, devenu français en 2007, analysant la mentalité des
Israéliens révèle à quel point ils sont devenus racistes. Les
inscriptions "Mort aux Arabes",
"Arabes=Nazis"
sont devenues banales. "Sommes-nous
totalement happés par cette effroyable ressemblance avec nos
bourreaux?", écrit-il. Tous ces
exemples montrent combien Hanna Arendt avait raison de parler de
la "banalité du mal".
Burg critique violemment
l'instrumentalisation par Israël du génocide nazi et imagine les
mécanismes destinés à sortir Hitler et le nazisme de la tête des
Israéliens. Or, vaincre Hitler,
c'est, certes, vaincre la référence constante au nazisme et
surmonter enfin la complaisance morbide à la faveur de laquelle
les Israéliens se posent en victimes professionnelles, y compris
lorsqu'ils agressent et tuent des Palestiniens ou des Libanais
par centaines. Mais Vaincre Hitler,
c'est aussi en finir avec la célébration morbide de l'holocauste
et les pèlerinages compulsionnels à Auschwitz. Et surtout,
Vaincre Hitler, c'est refuser l'idée
que la mémoire d'un massacre puisse légitimer la conduite
actuelle de la politique et la mentalité de la société
israélienne.
Car Vaincre
Hitler, c'est avant tout
vaincre la fascination pour Hitler
et tuer le bourreau qui habite aujourd'hui de nombreux
Israéliens et qui se donne impunément libre cours.
Vaincre Hitler,
c'est réveiller la conscience des poupées-tueuses qui officient
paisiblement devant leur écran aseptisé et déclenchent un
missile assassin d'un clic négligent.
Vaincre Hitler,
c'est tenter de guérir de la paranoïa d'une grande partie de la
population et de ses dirigeants qui se traduit par une
surestimation pathologique de soi-même subsumée dans la notion
d'élection divine. La conséquence en est la méfiance et le
mépris pour le reste des humains dont la Thora et le Talmud sont
remplis et qui sont aujourd'hui concrétisés dans d'innombrables
lois racistes. Guérir de la paranoïa, c'est cesser de rejeter en
permanence sur ses victimes la responsabilité de ses propres
crimes. Car c'est toujours pour "se
défendre" qu'Israël tue, blesse,
torture, vole des terres, détruit des maisons, dévaste les
vergers, ravage et brûle des récoltes, attaque ses voisins et
envoie des bombes de tout calibre et de toutes natures, y
compris des bombes à fléchettes interdites par le droit
international, au milieu de zones résidentielles grouillantes
d'enfants afin de provoquer des blessures atroces.
Vaincre Hitler,
c'est cesser d'être un meurtrier qui, avec constance se proclame
innocent et victime.
Comment les Israéliens habités par l'hubris
de leur puissance et de leur
"exceptionnalité" peuvent-ils s'imaginer qu'un racisme brutal et
inhumain leur permettra de s'implanter durablement dans la
région? Comment se fait-il qu'ils soient à ce point aveuglés par
un nationalisme orgueilleux qu'ils croient que les missiles et
les bombes, même nucléaires, seront suffisants pour leur assurer
une présence pérenne dans la région et qu'ils ne voient pas que
chaque "succès militaire"
contre des civils désarmés est une défaite morale qui sape les
fondements de leur Etat, l'isole du reste du monde et constitue
un pas supplémentaire en direction de son auto-destruction.
13 - Où l'on verra le mythe prendre la
forme d'une montgolfière cosmique
Reflet de la
société, la religion s'adapte aux changements historiques. La
défaite des armées du roi Josias, puis celle de ses successeurs
face aux grands empires environnants - Egypte, empire assyrien,
empire perse, puis empire grec d'Alexandre le Grand et enfin
empire romain - qui ont abouti à la disparition définitive de
l'histoire du monde d'un Royaume de Juda indépendant, berceau du
dieu Jahvé, a profondément influencé l'évolution du récit
biblique.
A cette occasion entreront en scène deux
personnages déterminants dans l'histoire politico-religieuse des
Judéens - Ezéchiel et Esdras - les véritables rédacteurs des
quatre Livres de la Thora qui font remonter l'histoire de la
Judée à l'origine de la création du monde et qui sont censés
précéder le Deutéronome
rédigé pourtant plus de deux siècles auparavant, mais modifié à
cette occasion. Il s'agit là d'un procédé littéraire classique
que connaissent tous les auteurs contemporains de bandes
dessinées. Mais pas seulement. Ainsi après avoir écrit le
Pantagruel,
Rabelais a rédigé l'histoire du père de son héros, le
Gargantua.
L'illogisme de la
déité mixte que ce peuple s'est donnée - à la fois déité
communautaire et créateur cosmique - est la cause profonde de la
claudication du peuple qui s'en réclame dans l'histoire des
sociétés dans lesquelles les migrations l'ont conduit. A partir
du moment où les Judéens n'ont plus été enfermés dans leur
petite province et où les défaites politiques ont disséminé une
partie de ses élites et du peuple au sein des autres nations, la
confrontation entre un groupe humain marchant derrière ce
dieu-là, miroir de sa représentation suprématiste et autiste du
monde et de lui-même, et le reste des hommes qui n'avaient
aucune raison d'accepter leur relégation dans un statut
subordonné, ne pouvait qu'être explosive. Elle le fut durant
deux mille ans. Elle continue de l'être, comme on le voit jour
après jour en Palestine occupée.
Car l'histoire du judaïsme et l'histoire
des juifs sont inextricablement emmêlées.
En effet, les vicissitudes de l'histoire
des hommes ont profondément influencé l'histoire de
l'élaboration du Dieu Jahvé, et inversement, les innombrables
commentaires des textes fondateurs auxquels les talmudistes se
sont consacrés durant des siècles, ont, en retour, bétonné les
cerveaux d'une manière si indélébile qu'aujourd'hui, les
immigrants venus des quatre coins du monde et issus d'ethnies
qui n'avaient jamais eu le moindre rapport avec les Hébreux
originels, mais majoritairement porteurs de la mentalité
rabbinique, se sont révélés inassimilables aux peuples restés
sur leurs terres depuis toujours et convertis à d'autres dieux.
Car le judaïsme rabbinique fondé sur les commentaires de la
Thora a fini par triompher de l'hébraïsme biblique que les
prophètes avaient réussi, non sans mal, à adoucir et à
universaliser.
Notes:
[1] Saed Bannoura,
Le
vice-Premier ministre israélien, lors d'une réunion informelle :
" Jérusalem a été promise par Dieu aux juifs "
http://www.protection-palestine.org/spip.php?article9141
[2] Uri Avnery,
L'Eclair (A
Flash of Lightning)
http://zope.gush-shalom.org/home/en/channels/avnery/1276942826
[3] "La
Torah du roi": Il faut tuer les non-juifs, même les bébés
http://soutien-palestine.blogspot.com/2010/08/la-torah-du-roi-il-faut-tuer-les-non.html
[4] Ramzy
Baroud,
Tu écris avec quelle main ?
http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=8611
[5] Georges Stanechy,
Flottille de La
Liberté : L’Impunité des Assassins…
http://stanechy.over-blog.com/categorie-10061806.html
[6]
Jonathan Cook,Peu
de recours pour la petite fille arabe rejetée d'une crèche de
jour
israélienne
http://www.femmesennoirmontbrison.com/ext/http://electronicintifada.net/v2/article10701.shtml
[7]
Leila
Mazboudi, Pots de vin et chantage
à l'ONU pour la création " d'Israël "
http://www.almanar.com.lb/NewsSite/NewsDetails.aspx?id=138529&language=fr
[8]
Rory
McCarthy, La Zone C remplit
d'effroi les Palestiniens, alors que des maisons sont détruites
http://www.france-palestine.org/article8748.html
[9]Colons
en train de voler des moutons aux Palestiniens (Vidéo)
http://www.europalestine.com/spip.php?article5269
[10]
Il y
a, aujourd'hui, une évidence précise d'un matériel génétique
commun à tous les juifs et pas seulement pour les Cohanim.
http://www.lamed.fr/index.php?id=1&art=372
[11]
Etes-vous juif? Avez-vous des racines juives? Etes-vous un
Ashkénaze? Etes-vous un Levi ou un Cohen?
http://www.igenea.com/index.php?content=40&adwords=gofrfr_s_juifs&cli=fr&gclid=CPyg4-3ElaICFc6X2AodgwivEA
[12] Vous
voulez la nationalité ? Déclarez qu’Israël est un Etat juif /
Eli Berdenstein – Maariv Revue de la presse israélienne du
service de Presse de l’ambassade de France en Israël vendredi 16
juillet 2010
http://www.ambafrance-il.org/REVUE-DE-PRESSE-Vendredi-16.html
http://www.desinfos.com/spip.php?page=article&id_article=19740
[13]
Nouvel Obs.com 12/6/07
Voir aussi: Un colon extrémiste: le Shin Beth m'a incité à
assassiner des Palestiniens
[14] Haim
Perlman, accusé de meurtre et d'agression de palestiniens,
assigné à résidence pour 15 jours...
http://www.iba.org.il/world/?lang=fr&entity=667152&type=1
[15]
Chahid Slimani, La Marche de la
Résistance et de la Dignité …
Voir
http://chahidslimani.over-blog.com/article-la-marche-de-la-resistance-et-de-la-dignite-49049543.html
[16]
Les survivants témoignent : Le
Rapport d'IHH sur les Meurtres à bord du Mavi Marmara
http://www.freegaza.org/fr/temoignages-depuis-les-prisons-israeliennes
[17] Myriam
Abraham, Des Parlementaires
Allemands Déposent Plainte Pour Crimes De Guerre Contre Israël -
Enquête : Israël Veut Etre Juge Et Parti
http://www.planetenonviolence.org/Des-Parlementaires-Allemands-Deposent-Plainte-Pour-Crimes-De-Guerre-Contre-Israel-Enquete-Israel-Veut-Etre-Juge-Et_a2214.html
[18] Myriam
Abraham: BHL Fait L'Eloge
De La Démocratie et De L'Armée Israélienne
http://www.planetenonviolence.org/BHL-Fait-L-Eloge-De-La-Democratie-et-De-L-Armee-Israelienne-Freedom-Flotilla-Attaquee-3eme-IntiFada_a2201.html
[19] Jonathan Cook, Israel inaugure
l'assassinat télécommandé
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=14117&type=analyse&lesujet=Armement%20isra%E9lien
[20] Myriam
Abraham : Le racisme, la haine, la folie meurtrière sioniste a
un visage, celui d’EDEN ABERGIL
http://www.planetenonviolence.org/Le-Racisme-La-Haine-La-Folie-Meurtriere-Sioniste-A-Un-Visage-Celui-D-EDEN-ABERGIL_a2254.html
Bibliographie:
Mario
Liverani,
La Bible et l'invention de l'histoire, 2003,
trad. Ed. Bayard 2008
Israël
Finkelstein et Neil Asher Silberman,La Bible dévoilée. Les
nouvelles révélations de l'archéologie, 2001 ,trad. Ed.
Bayard 2002
Israël
Finkelstein et Neil Asher Silberman,
Les rois
sacrés de la Bible, trad.Ed.Bayard
2006
Ernest Renan,
Histoire du peuple d'Israël, 5 tomes, Calmann-Lévy
1887
Douglas Reed , La Controverse de Sion
Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé,
Fayard 2008, coll. Champs Flammarion 2010
Avraham Burg, Vaincre Hitler : Pour un judaïsme plus
humaniste et universaliste , Fayard 2008
Jorge Luis Borges, Fictions
Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray
Jean de La Fontaine,
Fables
J.H. Rosny Aîné,
La Guerre du feu
Jacques Attali:
Les Juifs, le monde et l'argent, Histoire
économique du peuple juif. Fayard, 2002
le 27 août 2010
3ème partie:
II - L'invention des notions de «peuple
élu» et de «terre promise»
2ème partie: I - Aux sources du sionisme : De Moïse à Netanyahou
1ère Partie :Du Système de la Réserve fédérale au camp de
concentration de Gaza
A
suivre : La bunkerisation psychique d'un peuple: les
rédacteurs de la Bible Josias et Esdras
Publié le 27 août 2010 avec l'aimable autorisation de Aline de Diéguez
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