Aux sources du sionisme
XI - "Nous sommes
un peuple..."
Aline
de Diéguez
Mercredi 14 mars
2012
"
Aussi
longtemps qu'on ne le prend pas au
sérieux, celui qui dit la vérité, peut
survivre dans une démocratie.
"
Nicolas Gomez
Dàvila "
"Ce qu'il y a
de terrible quand on cherche la vérité,
c'est qu'on la trouve "
Rémy de Gourmont
Après avoir enlevé une à une les
tuniques alliacées de la mythologie
religieuse sur laquelle s'est construit
le sionisme, et examiné l'évolution de
la fiction religieuse au cours des
siècles, j'arrive au cœur germinatif de
l'idéologie: le peuple.
Je sais combien il est plus que délicat
d'aborder une question aussi sensible
après la tempête provoquée par l'ouvrage
d'un membre de cette communauté,
Shlomo Sand, L'invention du
peuple juif. Qu'est-ce qu'une
kamikaze extérieure à la communauté
juive vient faire dans cette galère,
dira-t-on, alors que l'accusation
d'antisémitisme est au bout du chemin et
le gourdin destiné à assommer
l'aventurier audacieux déjà levé?
Aux innocents les mains pleines. Ayant
croisé un jour dans mes lectures,
l'œuvre du philosophe et moraliste
colombien, mais parfaitement inconnu en
Europe, Nicolas Gomez Dàvila
(1913-1994), un disciple
hispano-américain de Montaigne et des
moralistes du XVIIe siècle, j'ai aimé
certains de ses aphorismes et notamment
celui, particulièrement pessimiste pour
les institutions démocratiques que j'ai
cité en exergue. Je me suis sentie
rassurée, persuadée que mon
insignifiance sera mon plus efficace
bouclier.
1-
Petit exercice de déductions délirantes
Axiome : "Nous sommes un
peuple", affirment haut et fort les
sionistes.
En effet nous
possédons une langue qui nous est
propre, un dieu rien que pour nous et
aussi loin que nous remontons dans le
temps nous nous sommes toujours sentis
différents des autres ethnies. En
conséquence, il existe bien un "peuple
juif".
Corollaire n°1 : Nos ancêtres
ont pérégriné in illo tempore sur
le territoire que nous foulons
aujourd'hui. Ce territoire est notre
bien le plus sacré, cadeau de notre dieu
Jahvé, notre protecteur et notre agence
immobilière. Cette parcelle du globe
terrestre nous appartient donc en propre
et le décret divin qui nous en a rendus
propriétaires est et sera valable
jusqu'à la fin des temps. Personne ne
nous retirera de l'esprit que nous
sommes dans notre droit.
Corollaire n°2 : Notre absence
de deux mille ans est une microscopique
péripétie qui ne délégitime en rien nos
droits inaliénables et éternels sur
notre territoire ancestral. Ce que notre
Dieu nous a donné est donné jusqu'à la
fin des temps. Les hommes ne peuvent
reprendre ce qu'un Dieu a donné. Nous ne
sommes pas des immigrants, mais
d'authentiques propriétaires d'un bien,
revenus s'installer chez eux. Donc, tout
ce qui a été construit ou planté sur
notre terre nous appartient et nous
avons le droit d'exproprier les intrus.
Dehors les squatteurs!
Corollaire n°3 et conséquences en
chaînes de la jurisprudence sioniste
actuellement mise en pratique:
Des descendants de Gaulois vaincus par
Jules César et emmenés à Rome comme
esclaves, en même temps que
Vercingétorix, n'ont aucune raison
d'être moins justifiés de récupérer des
terres et des biens "ancestraux"
que les populations se réclamant de la
religion judaïque. Ne serait-il pas
raciste de dénier aux dieux Teutates,
Sequana, Tarannis ou
Cernunnos - et au "peuple gaulois"
- ce qui est reconnu au dieu Jahvé
et au "peuple juif"? Auvergnats
cramponnez-vous, une tempête immobilière
se prépare.
Sequana, déesse
gauloise des sources de la Seine
De même, si un
groupe de quidams déclare descendre des
Burgondes, au nom de quelle "injustice
raciste" et de quel inacceptable "deux
poids, deux mesures" lui
refuserait-on d'exiger, lui aussi,
l'expulsion des Bourguignons actuels de
Dijon ou d'Avallon, afin de s'installer
commodément dans leurs maisons et dans
leurs meubles? Bourguignons, gare à
vous, l'œil du cyclone approche.
Les Serbes ne
sont-ils pas légitimés à continuer de
réclamer le Kosovo, berceau de leur
nation et la Russie l'ancien duché de
Kiev qui vit la naissance de la nation
des "Russ" originels?
Les Judéens
n'étant pas la seule ethnie à s'être
expatriée, volontairement dans son
immense majorité - seule la ville de
Jérusalem leur a été interdite par les
Romains durant quelques décennies - avis
aux innombrables ethnies et tribus ,
Hyksos, Scythes, Mèdes, Goths, Vandales,
Ostrogoths, Alains, Celtes et tutti
quanti qui ont grouillé durant les
temps antiques et qui ont été chassées
de leurs terres au gré des vicissitudes
de l'histoire ou qui ont jugé bon, un
jour ou l'autre, de pérégriner sur la
boule ronde: la jurisprudence sioniste
offre à leurs descendants une fabuleuse
source d'enrichissement. Une mine à
exploiter. Un magnifique "chaos
créateur" se profile à l'horizon,
n'est-il pas vrai? Proudhon ne disait-il
pas que "la propriété c'est le vol"?
Voir
19 - Le sionisme, une chutzpah
cosmique
2 - La frénétique
recherche de la pureté génétique
Afin de tenter d'écarter l'horrible
perspective culturaliste introduite par
Shlomo Sand dans son célèbre
ouvrage L'invention du peuple juif
- ouvrage qui a failli ébranler les
colonnes du temple et qui, pour ce
motif, fut accueilli de manière
hystérique en Israël - des "chercheurs"
juifs se sont en effet lancés sur le
sentier de la guerre et, eurêka,
auraient réussi à ramener la question de
l'existence et de la nature du peuple
juif sur un terrain familier, le terrain
ethnique. Ces généticiens affirment que
leurs études auraient prouvé une
convergence génétique entre tous les
juifs, quelle que soit aujourd'hui leur
origine géographique. Selon leurs
analyses, il existerait bien une unicité
raciale de tous les juifs contemporains.
Bien que ces "découvertes"
sensationnelles soient demeurées plutôt
discrètes, puisque seuls les quotidiens
français Le Figaro et
italien La Repubblica s'en
sont fait l'écho, et d'une manière
strictement informative et plutôt
évasive, il serait désormais avéré que
les deux grandes souches de la diaspora
juive dans le monde auraient une seule
et même racine originelle: l'Italie de
l'empire romain. En conséquence, les
juifs n'auraient jamais bougé de Judée
et ceux qui auraient eu la bougeotte ne
se seraient déplacés qu'en direction de
Rome et jamais dans une autre direction.
Puis, ils se
seraient divisés en deux colonnes, une
colonne, composée des plus aguerris aux
basses températures se serait dirigée
plutôt vers le nord du bassin
méditerranéen et aurait donné naissance
à la branche des juifs ashkénazes
- et les plus costauds aurait continué
leur pérégrination jusqu'en Europe
centrale ; et la seconde colonne, plus
frileuse, aurait préféré s'installer
dans les régions ensoleillées du bassin
sud de la même mer et serait à l'origine
des juifs séfarades d'Afrique du
nord. Ainsi, tous les juifs du monde
seraient bien les descendants des
populations "chassées" de
Palestine et emmenées en esclavage à
Rome après la destruction du temple par
les Romains en l'an 70 et aucun sang
étranger ne serait jamais venu polluer
la pureté de la souche originelle.
[1]
Carte des routes
présumées de l'émigration génétique
juive
Ainsi serait infirmée la thèse
méchamment calomnieuse de Shlomo Sand.
Il existerait bien, non seulement un
peuple juif, mais une ethnie
juive génétiquement homogène.
Hélas, toutes les médailles ont un
revers. En voulant écarter l'horrible
perspective, à leurs yeux, d'être un
peuple d'immigrants hétérogène, les
sionistes se placent eux-mêmes sur le
terrain glissant de la génétique.
Voulant prouver qu'ils forment un groupe
génétiquement différent des autres
peuples de la terre, ils donnent du blé
à moudre aux pires racistes en imposant
une vision biologique de leur communauté
et ne se rendent pas compte qu'ils
fournissent aux antisémites les armes et
les arguments qu'ils prétendent
combattre. Mais, peu importe,
peuvent-ils répondre, si telle est bien
la vérité. En effet. Comme l'écrivait
judicieusement Rémy de Gourmont, "quand
on cherche la vérité, on la trouve".
C'est bien pourquoi j'ai poursuivi
patiemment mes recherches.
Mais on peut d'ores et déjà remarquer
qu'on retrouve encore et toujours, à
travers une initiative de cette nature,
la pulsion obsessionnelle de s'assurer
de la pureté raciale des lignées dont le
virus a été inoculé de manière,
semble-t-il définitive, dans la psyché
des Judéens par Esdras et Néhémie.
Voir:
5 - La théocratie
ethnique dans le chaudron de l'histoire
Les maladies se déclarent lentement.
Elles incubent et cheminent
souterrainement avant de se manifester
au grand jour. Le virus a couvé pendant
les millénaires de la dispersion, mais
la maladie a maintenant explosé au grand
jour en Palestine occupée. Alors le
monde détourne la tête et feint
d'ignorer le calvaire d'un peuple
martyrisé. "Il y a des violences de
chaque côté", sussure-t-il
suavement. Afin de se donner bonne
conscience, il convoque sur le devant de
la scène tel ou tel tyranneau qu'il
avait comblé de ses cajoleries et de ses
embrassades il y a peu. Pendant ce
temps, le bourreau infatigable poursuit
depuis des décennies son oeuvre de mort
dans les coulisses et personne n'ose
piper mot.
La colonie pénitentiaire sioniste ne
vient-elle pas d'engranger d'un seul
coup, en ce seul jour du 10 mars 2012,
une vingtaine de cadavres? Qui a fait le
compte du nombre total d'enfants et
d'adultes palestiniens assassinés ou
estropiés ne serait-ce que depuis que le
sionisme s'est déclaré légitimement
installé au coeur du monde arabe? A
combien se monte-t-il, si l'on y ajoute
les massacres commis durant le
demi-siècle qui a précédé cette
main-mise officielle du sionisme sur la
Palestine?
Gaza, 10 mars
2012, Elimination d'un dangereux groupe
de terroristes palestiniens
par "l'armée
la plus morale du monde"
Comment ne pas voir que ce genre de
recherche sur la génétique est destiné à
conforter sur le terrain un nationalisme
xénophobe et un féroce apartheid censé
justifié par les différences biologiques
que révèlerait la génétique?
Ainsi, pour adhérer à la fiction
narrative du sionisme, nous devrions
admettre que, sous la conduite éclairée
d'un Moïse des temps modernes,
transportant sous son bras les nouvelles
"tables de la loi" contenues dans
le célèbre ouvrage de l'antisémite
repenti, Theodor Herzl,
L'État des Juifs (Der
Judenstaat), un peuple juif,
génétiquement homogène, bien que
dispersé sur la planète entière durant
deux millénaires - mais contre sa
volonté, est-il martelé - se serait un
beau jour, et avec un bel ensemble,
miraculeusement rassemblé à partir des
confins de la Chine, de l'Inde, de
l'Afghanistan, des pentes de l'Himalaya,
de la Cordillière des Andes ou des bords
de la Volga et aurait refait, en sens
inverse, le voyage de retour en
direction de la "terre de ses
ancêtres" sous la houlette de ses
nouveaux prophètes.
Tel le Moïse légendaire, le père de la
patrie, le grand, l'immense, le
gigantesque Theodor Herzl a été empêché
d'entrer dans la terre de Canaan
demeurée vide depuis le départ de ses
propriétaires légitimes, mais
soigneusement entretenue et exploitée
par des armées d'anges et de séraphins
jardiniers, agriculteurs, maçons et
tutti quanti, envoyés par un Jahvé
paternel qui veillait sur le confort
futur de son peuple bien-aimé, puisque
sur cette terre vide, paraît-il, il n'y
avait
personne d'autre pour effectuer le
travail et que tout devait être prêt
pour le grand retour des chouchous de
Jahvé.
Là, un
Josué fringant - David Grün, alias Ben
Gourion - attendait le Moïse chenu à la
frontière de la "terre promise",
prêt à prendre son élan et à déferler,
avec ses troupes, sur la Palestine, afin
de prendre possession d'un pays
miraculeusement doté de villes, de
ports, de villages, d'une agriculture
florissante, et de tous les biens
nécessaires à une vie sociale agréable
et confortable, tout cela afin que les
temps s'accomplissent et qu'un "peuple
juif" exclusivement composé de
descendants du peuple chassé par les
méchants Romains après qu'ils eurent
détruit la maison de Jahvé, pût enfin se
reposer sur sa terre sacrée. Merci qui?
" Et lorsque le
Seigneur ton Dieu t'aura
fait entrer dans la
terre qu'il a promise
avec serment à tes
pères, Abraham, Isaac et
Jacob, et qu'il t'aura
donné de grandes et de
très bonnes villes que
tu n'auras point fait
bâtir, des maisons
pleines de toutes sortes
de biens, que tu n'auras
point construites, des
citernes que tu n'auras
point creusées, des
vignes et des plants
d'oliviers que tu
n'auras pas plantés, et
que tu seras nourri et
rassasié de toutes ces
choses … " (Dt
6, 10-12)
|
3
-
Le grand lamento du sionisme
"Nous sommes un
peuple…
"Regardez-nous: juif yéménite ou juif
de Pologne, juif roumain ou juif
d'Algérie, juif de Lituanie, de Russie
ou d'Arabie, juif de Patagonie, du
Pérou, d'Inde, d'Afghanistan ou de
Chine, nous sommes non seulement un seul
et même peuple, mais une seule et même
âme, une seule et même ethnie. Nos gènes
l'attestent.
Juifs des bords du
Gange
Des méchants et des envieux disent que
notre régime politique est un canada dry
de démocratie. Nous leur clouons le bec
en entonnant à gorge déployée notre
hymne favori, repris en cœur par nos
innombrables amis dans le monde entier,
selon lequel nous sommes la "seule
démocratie du Moyen Orient".
Douillettement à l'abri derrière une
démocratie Potemkine que nous savons
vendre comme personne au reste du monde,
nous luttons avec une patience tenace,
apprise durant nos millénaires d'exil,
contre les indigènes sans titre,
accrochés à leurs masures et à leurs
lopins comme des moules à leur bouchot.
Certains hérétiques ignorants nous
demandent de partager notre terre bénie
avec ces usurpateurs, ou pire encore, de
les accueillir parmi nous. Quelle
horreur! Ce serait un sacrilège et un
crime contre notre Dieu dans le premier
cas et une épouvantable souillure dans
le second. Tu ne laboureras pas avec un
boeuf et un âne ensemble, nous a bien
recommandé notre Dieu. ( Dt 22,10).
Comme il est omniscient, il sait qu'on
ne doit pas lier les ânes avec les
chevaux. Or, nous sommes de fringants
pur sang et méprisons les ânes, ces
animaux qui prennent parfois une forme
humaine. Un de nos anciens
co-religionnaires passé à l'ennemi a
conservé quelque chose de notre esprit
et de nos principes et il a fermement
recommandé aux Corinthiens de ne pas se
mettre sous le joug d'une infidèle. (Paul,
2 Cor, 6,4).
Nous n'aimons pas les Arabes, ces
infidèles - d'ailleurs, nous n'aimons
aucun non-juif, notre Talmud nous
le recommande - mais nous haïssons
particulièrement ceux d'entre eux qui
ont l'outrecuidance de se baptiser
Palestiniens. La Palestine n'existe pas
et les Palestiniens sont un peuple
inventé comme vient de le déclarer un de
nos grands amis d'outre-Atlantique. Ce
sont des usurpateurs et des squatteurs
sans titres de notre terre, celle que
notre Dieu nous a donnée en propre. Car
nous nous honorons de posséder un Dieu
pour nous tout seuls, un Dieu qui a
parlé à nos ancêtres. Deux autres Dieux
se sont inspirés du nôtre, mais nous
nous gaussons sous cape, et nous nous
chuchotons entre nous que les copies ne
valent pas l'original. C'est pourquoi
notre religion n'a jamais été pour nous
un décor ou une superstructure. Elle est
le pilier de notre essence et notre
raison d'être depuis les origines.
Nous nous méfions des goys car nous
avons expérimenté leur ingratitude dans
notre chair. L'un de nos grands amis de
l'Hexagone nous a prévenus lorsqu'il a
affirmé que certains d'entre nous "s'inquiètent
de voir les juifs prendre le risque
d'être haïs pour services rendus".
Pour que tout soit clair, il a précisé
la nature des "services rendus"
et je préfère lui donner la parole: "Comme
les prêts ( que nous faisons aux
goys exclusivement, jamais entre nous )
sont de très courte durée - un an ou
moins - et à des taux d'intérêt très
élevés, de l'ordre de 50 à 80%,
l'accumulation va très vite." Voilà
qui est bien dit.
[2]
Un détail nous chagrine, il se dit ici
et là que nous aurions accueilli en
notre sein des convertis qui ne seraient
pas de notre sang. Gros mensonge ! Nous
avons toujours été fidèles aux sages
principes énoncés par nos prophètes
Esdras et Néhémie. Pas de mélanges.
Notre ethnie est si pure que chacun
d'entre nous pourrait remonter jusqu'à
un héroïque ancêtre revenu du cruel exil
à Babylone et même au-delà. Tous les
Juifs du monde sont issus de la seule
souche judéenne. D'ailleurs certains de
nos dirigeants ne présentent-ils pas
aujourd'hui une morphologie typiquement
moyen-orientale? Regardez le glabre
Benjamin Netanyahou ou l'imposante
matrone Tzippora Livni: grands, blonds,
yeux bleus, teint rosé, brachycéphales,
système pileux maigrelet, large bassin,
on voit au premier coup d'œil qu'ils
sont de purs descendants de nos
ancêtres, les hommes du désert, les
rudes Hébreux antiques conducteurs de
chameaux …sur les bords de la Volga! Ce
père et son fils, présentés ci-dessous,
ne sont-ils pas, eux-aussi d'une
ascendance typiquement moyen-orientale?
Juifs des bords du
Yang tsé Kiang
Nous méprisons de toutes nos forces
Shlomo Sand, cet historien pervers, qui
essaie de faire croire au monde que le
peuple juif n'existe pas, qu'il aurait
disparu depuis belle lurette s'il
n'avait été augmenté par des conversions
de peuples entiers, de berbères ou de
sauvages cosaques. Foutaises. Mais nous
pouvons désormais confondre ce juif
animé par la haine de soi: des
généticiens comme nous les aimons sont
parvenus à écraser cette thèse infâme et
à prouver que nous avons su préserver
intact notre patrimoine génétique. Et
c'est ainsi que Jahvé est grand. "
Voir:
V - La théocratie
ethnique dans le chaudron de
l'histoire
4 - Boomerang
Il est imprudent
de faire souffler le vent de la
génétique dans les voiles de la
recherche d'une pureté raciale, car il
peut y avoir des bourrasques inattendues
et ébouriffantes. Ainsi dans son numéro
du 27 janvier 2012, l'hebdomadaire
Le Point, reprend étude
publiée dans "American Journal of
Human Genetics" qui révèle que
tous les hommes - hormis un groupe resté
sur place en Afrique - ont effectué un
passage de plusieurs milliers d'années
en Arabie heureuse, avant qu'elle devînt
un désert. Tous les hommes, donc y
compris les ancêtres des Hébreux. Adam
serait-il un arabe ou pire encore, un
africain? Ciel!
Voilà que
l'ADN mitochondrial sur lequel les
généticiens juifs s'étaient fondés afin
de prouver l'unicité de l'ethnie revient
en boomerang sur les tenants de la race
pour prouver que tous autant que nous
sommes, Européens, Américains,
Esquimaux, Chinois, Papous, Juifs
ashkénazes ou sépharades, Arabes,
Mongols ou Patagons, nous possédons ce
même ADN mitochondrial car nous
descendons d'ancêtres communs qui ont
peuplé durant des millénaires le paradis
sur terre qu'était la fertile péninsule
arabique de l'époque avant de se
disséminer progressivement, et de proche
en proche, sur la terre entière.
[3]
On peut donc en
conclure qu'il ne faut pas chercher dans
la génétique la séparation des juifs
d'avec le reste du monde. Mais le
mystère de cette séparation qui s'est
maintenue durant deux millénaires reste
une énigme anthropologique. Car , il
n'en demeure pas moins vrai que si, de
nos jours, on peut invoquer la
solidarité d'un groupe ou l'éducation
des enfants, ces motivations
n'expliquent pas pourquoi ce groupe
humain-là s'est, à un certain moment de
son évolution, inventé pour miroir ce
dieu-là, qui lui a permis de théoriser
et de bétonner au fil des siècles le
sentiment de différence qui l'habitait.
5 - Retour à
l'histoire réelle
Contrairement à la
narration sioniste qui tend à faire
croire que les Judéens ont occupé la
totalité du territoire qui correspond à
la Palestine actuelle, ces provinces
n'ont jamais formé un ensemble uni. Dès
les temps les plus reculés, le
territoire était divisé entre contrées
très différentes les unes des autres, la
Judée, la Samarie, la
Galilée et l'Idumée, dont la
singularité, façonnée par la géographie
a été accentuée par les vicissitudes de
l'histoire.
Les quatre
provinces de Palestine, 1er siècle
La
Judée, région aride, autour de
Jérusalem, berceau du dieu Jahvé depuis
le retour de Babylone, était
exclusivement habitée par des
israélites, descendants des nomades
Hébreux qui s'étaient sédentarisés dans
cette région. En tant que groupe
politiquement organisé, leur présence
est avérée sur ce petit territoire
durant un millénaire, c'est-à-dire,
globalement, entre les règnes de David
et d'Hérode.
En fait de "royauté",
le "Royaume de David" se résumait
à Jérusalem et ses environs qui n'était,
durant cette période qu'un gros bourg, à
peine plus important que les villages
voisins, avec des habitations
disséminées. Ce fut le point de départ
de ce qui devint le "Royaume de Juda",
mais n'était qu'une ville-Etat, devenue
la Judée après le retour de Babylone.
Voir :
I - La Bible et
l'invention de l'histoire
d'Israël
En effet, le
pompeux mot "royaume" renvoie, en
l'espèce, à un espace exigu, car le chef
de chaque gros bourg se donnait le titre
de "roi". C'est ainsi que le
texte biblique évoque les guerres de
conquête des Hébreux contre
d'innombrables "rois" de la
région, et que le Moïse imaginaire de la
fiction biblique est censé avoir
combattu contre les cinq rois de Mâdian
: Évi, Réqem, Sour, Hour et Réba (Nb,
31, 7-11)
" Ils
s'avancèrent contre Madian,
selon l'ordre que l'Éternel
avait donné à Moïse; et ils
tuèrent tous les mâles. Ils
tuèrent les rois de Madian avec
tous les autres, Évi, Rékem,
Tsur, Hur et Réba, cinq rois de
Madian; ils tuèrent aussi
par l'épée Balaam, fils de Beor.
Les enfants d'Israël
firent prisonnières les femmes
des Madianites avec leurs petits
enfants, et ils pillèrent tout
leur bétail, tous leurs
troupeaux et toutes leurs
richesses. Ils incendièrent
toutes les villes qu'ils
habitaient et tous leurs enclos.
Ils prirent toutes les
dépouilles et tout le butin,
personnes et bestiaux. "
|
Quant à
l'Iduméen Hérode, dernier souverain du
petit territoire, bien que converti au
judaïsme, il détestait l'esprit et les
coutumes juives autant qu'il était
lui-même détesté par la caste religieuse
et redouté par le peuple pour sa cruauté
et son impiété. Hérode, le roi
shakespearien, fut néanmoins le seul de
ses dirigeants qui parvint à donner un
éclat architectural et économique à une
région engluée dans une bigoterie
religieuse d'un autoritarisme despotique
qui freinait tout essor économique et
culturel de la région.
A sa mort,
Jérusalem et la Judée furent placées
sous l'administration directe de Rome et
l'autorité d'un procurateur dont le plus
connu est Ponce Pilate, lequel
s'est rendu célèbre en livrant Jésus à
la vindicte les Pharisiens. Sept ans
après la mort d'Hérode le Grand, il ne
restait plus de ses grandioses
réalisations architecturales à Jérusalem
que le morceau de mur de soutènement du
gigantesque parvis destiné à accueillir
les dizaines de milliers de pèlerins et
connu de nos jours sous le nom de "mur
des lamentations".
Il est
remarquable qu'un millénaire de présence
juive en Palestine n'ait laissé la trace
d'aucune activité culturelle et
civilisationnelle au moment où, comme
l'écrit l'historien- politologue Hédi
Doukhar, le foyer syro-mésopotamien
inventait la roue, l'urbanisme, les
techniques agricoles, l'écriture,
l'alphabet syllabique, les
mathématiques, la science musicale,
l'Algèbre, l'astrologie, la médecine.
[4]
Il avait fallu attendre un souverain du
1er siècle avant notre ère
étranger à la Judée, et amoureux de la
civilisation grecque, pour que Jérusalem
et toutes les autres villes de Judée
fussent embellies. Hérode fit, en effet,
construire des théâtres, des
amphithéâtres, des hippodromes dans
toutes les villes de Judée. Il
reconstruisit Samarie et créa un port
magnifique à Césarée avec un temple sur
une colline, au fond du port qui, vu de
la haute mer créait un tableau
somptueux.
Voir:
V - La théocratie
ethnique dans le chaudron de l'histoire
La Samarie
est le
seul territoire occupé à l'origine par
les Hébreux que se soit jamais dénommé "Royaume
d'Israël". Entre le -IXe siècle et
l'an -722, la province fut, du temps de
la dynastie des Omrides, un royaume
prospère. Mais en - 722 la riche
province de Samarie fut ravagée par
l'incursion des armées assyriennes
conduites par le roi Sargon II. Vaincue,
elle fut complètement vidée de ses
habitants hébreux originels et ne se
remettra jamais de ce désastre. Cette
invasion signait l'acte de décès d'un
Royaume d'Israël indépendant.
Les Assyriens avaient trouvé une méthode
radicale d'éviter la renaissance de
mouvements nationalistes: ils
déportaient en bloc tous les
habitants des contrées conquises et les
remplaçaient manu militari par le
transfert de populations originaires
d'une autre province soumise. C'est
ainsi que la Samarie fut repeuplée
par des Babyloniens tandis que
l'élite du royaume omride ainsi qu'une
grande partie de sa population furent
conduits à Babylone. Une proportion plus
faible émigra en direction du sud,
augmenta d'autant la population de Juda
et favorisa enfin son décollement
économique grâce à l'apport d'habiles
artisans.
L'empire assyrien n'avait pas
l'intention de créer un désert
économique dans les provinces conquises,
si bien que les déportations croisées se
faisaient par groupes familiaux et même
par villages entiers. Mario Liverani
cite dans son excellent ouvrage La
Bible et l'invention de l'Histoire,
des documents assyriens qui révèlent
à quel point l'empire assyrien était
méticuleusement et puissamment organisé:
"Des gens des quatre parties du
monde, de langue étrangère et de
dialectes incompréhensibles, habitants
des montagnes et des plaines, (…) je les
transportai, sur l'ordre d'Assour, mon
Seigneur, et par la puissance de mon
sceptre. Je les fis devenir une seule
langue et je les installai là. Comme
scribes et surveillants, je leur
assignai des Assyriens, capables de leur
enseigner la crainte de Dieu et du roi."
(Liverani, p. 206)
C'est ainsi que les furent créés les
Samaritains, vomis par les textes
bibliques, même lorsqu'ils adoptèrent la
religion jahviste, mais dont les
Evangiles louent la charité et
la générosité. Descendants des colons
assyriens dans leur immense majorité,
ils étaient exécrés par les Judéens bien
qu'ils eussent fini par adopter la
religion jahviste. Mais ils n'avaient
ethniquement rien à voir avec les
fameuses "douze tribus d'Israël"
et n'étaient pas des Hébreux.
D'ailleurs ils n'ont pas participé à la
grande guerre de l'an 70 contre l'empire
romain qui conduisit à la destruction du
temple et de la ville de Jérusalem. Les
Romains n'avaient donc aucune raison de
les emmener en esclavage ou de les
contraindre à quelque exil que ce soit.
On peut donc légitimement en conclure
qu'ils n'ont jamais bougé de leurs
terres depuis le VIIIe siècle avant
notre ère et que les résidents
Palestiniens actuels de cette province
sont les descendants directs de ces
populations.
Voir
II - L'invention
des notions de "peuple élu" et
de "terre promise"
Quant à la Galilée, tout à
fait au nord de la région, elle comptait
une population mélangée, composée
essentiellement des Cananéens originels
demeurés dans la contrée après l'arrivée
des tribus d'Hébreux, auxquels s'étaient
joints des immigrants des cités
voisines, lorsqu'une partie de sa
population fut transportée en Assyrie
avec celle des Samaritains.
"Du temps
de Pékach, roi d'Israël,
Tiglath-Piléser, roi d'Assyrie,
vint et prit Ijjon,
Abel-Beth-Maaca, Janoach,
Kédesch, Hatsor, Galaad et la
Galilée, tout le pays de
Nephthali, et il emmena captifs
les habitants en Assyrie."
(2
R15,29)
|
Il s'agissait donc d'une population très
mélangée - des Phéniciens, des Syriens,
des Arabes et même des Grecs - dans
laquelle l'élément hébreu était peu
présent. D'ailleurs les textes bibliques
attestent que la majorité de la
population n'était pas juive puisqu'on y
trouve, à propos des habitants de cette
province, des expressions comme "Galilée
des nations" ou "Galilée
des Gentils" (Juges 1,
30-33; 4.2 - Isaïe 9, 1),
dénominations méprisantes qui signifient
que les Judéens ne considéraient pas les
Galiléens comme des co-religionnaires et
que leur jahvisme abâtardi à leurs yeux,
les reléguait au rang de "Gentils",
c'est-à-dire d'étrangers.
Gentils, goyim,
nations
sont dans la bible des termes
pratiquement synonymes et s'appliquent à
des peuples étrangers, non israélites,
par opposition aux Judéens, seuls
dépositaires de la véritable piété.
"Nephthali
ne chassa point les habitants de
Beth-Schémesch, ni les habitants
de Beth-Anath, et il habita
au milieu des Cananéens,
habitants du pays." Juges,
1,30)
"Si les temps passés ont couvert
d'opprobre le pays de Zabulon et
le pays de Nephthali, les temps
à venir couvriront de gloire la
contrée voisine de la mer, au
delà du Jourdain, le
territoire des Gentils."
Isaie 9,1
"Toutefois, les ténèbres ne
régneront pas toujours sur la
terre (…): si les temps passés
ont couvert de mépris le
territoire de Zabulon et de
Nephthali, les temps à venir
couvriront de gloire la région
voisine de la mer, la région
située de l'autre côté du
Jourdain, la Galilée à la
population étrangère."
Isaïe 8,23
"De Ptolémaïs ( …) de Tyr et de
Sidon, on s'est coalisé contre
nous avec toute la Galilée
des Nations pour nous
exterminer." 1Maccabées,
5,15
|
Le plus célèbre des Galiléens est sans
conteste Jésus, le fondateur du
christianisme. Onze de ses compagnons
étaient également des Galiléens, seul le
douzième, Judas, était un Judéen.
Contrairement à l'idéologie communément
admise de nos jours, Jésus n'était donc
pas un Judéen, donc un Juif, mais un
Galiléen, c'est-à-dire un Palestinien
dans la dénomination politique
contemporaine.
Une controverse existe sur le lieu de sa
naissance, bien qu'il fût établi que ses
parents étaient originaires du petit
village de Nazareth. Selon deux
évangélistes, Marc et Jean , Jésus
serait né, comme ses frères et sœurs, à
Nazareth.
- "Jésus vint de Nazareth,
ville de Galilée, et se fit
baptiser par Jean dans le
Jourdain."
Marc 1, 9
- "Peut-il venir de
Nazareth quelque chose de bon?"
Jean, 1, 46 (paroles des
Pharisiens rapportées par Jean)
|
Luc, situe sa naissance à Bethléem et
cherche visiblement à lui donner une
ascendance royale:
"
Joseph aussi monta de la
Galilée, de la ville de
Nazareth, pour se rendre en
Judée, dans la ville de David,
appelée Bethléhem, parce qu'il
était de la maison et de la
famille de David."
Luc, 2,4
|
Quant à Mathieu, il ne sait pas trop,
c'est tantôt Bethléem (Mt 2,1), tantôt
Nazareth (Mt13,54-55):
"Jésus étant né à Bethléem
en Judée, au temps du roi
Hérode, voici des mages d'Orient
arrivèrent à Jérusalem."
Mt 2,1
"Il retourna (après avoir quitté
Jérusalem) dans la ville où il
avait vécu. Il enseignait ses
concitoyens dans leur synagogue.
Son enseignement les remplissait
d'étonnement, si bien qu'ils
disaient : d'où tient-il cette
sagesse et le pouvoir
d'accomplir ces miracles ?
N'est-il pas le fils du
charpentier ? N'est-il pas le
fils de Marie, et le frère de
Jacques, de Joseph, de Simon et
de Jude ! Ses sœurs ne
vivent-elles pas toutes parmi
nous?"
Mt 13,54-55
|
Pourquoi ces contradictions? L' objectif
des évangélistes n'était pas de faire
œuvre d'historiens, mais de prosélytes.
Il s'agissait de convaincre en premier
lieu les juifs que Jésus était bien le
messie annoncé par leurs textes.
"Je
n'ai été envoyé qu'aux brebis
perdues de la maison d'Israël."
Mt,
15-24)
"N'allez pas vers les païens, et
n'entrez pas dans les villes des
Samaritains; allez plutôt vers
les brebis perdues de la maison
d'Israël."
Mt 10,5-6)
|
Or, pour cela, le statut de Galiléen
natif de Nazareth était rédhibitoire car
le prophète Michée avait prophétisé que
le Messie devait naître à Bethléem et
nulle part ailleurs.
" Et
toi, Bethléhem Éphrata, petite
entre les milliers (de villes)
de Juda, de toi sortira pour moi
Celui qui règnera sur Israël, et
dont l'origine remonte aux temps
anciens, aux jours de
l'éternité. "
Michée,
5,1
|
C'est ce même Matthieu qui, tout seul,
rapporte l'épisode dit du "massacre
des innocents" (Mt 2, 13-23). En
effet, dans l'épisode des rois mages
venus apporter leurs offrandes d'or,
d'encens et de myrrhe à l'enfant-roi qui
venait de naître et qu'un ange avait
annoncé comme futur "roi des juifs",
Hérode, présenté comme un fou
sanguinaire aurait fait tuer, dans
Bethléem et dans la Judée entière, tous
les enfants de moins de deux ans. Or
l'alibi d'Hérode le Grand est en béton
armé: il était mort depuis quatre ans
lorsque Jésus est né. Il n'a donc pas pu
essayer de tuer "le divin enfant".
C'est donc à cette occasion que fut
inventé le prétexte de lier la naissance
de Jésus à un recensement qui permettait
de transporter les parents, dont la mère
sur le point d'accoucher, de Nazareth à
Bethléem. Or, un recensement exigé par
les Romains en vue d'imposer une
augmentation du tribut à payer à
l'empire a bien eu lieu en l'an 6. Le
souverain régnant était alors Hérode
Archelaüs, ce qui permettrait de
conclure, soit que, près d'un siècle
après les évènements à une époque de
transmission essentiellement orale, il y
a eu confusion entre Hérode le Grand et
son successeur Hérode Archelaüs et que
l'évangéliste a choisi le plus célèbre
des deux, soit qu'il faut supposer que
Jésus serait né en l'an 6, soit, plutôt,
qu'il n'y a jamais eu de projet de
boucherie de bébés en Judée et qu'il
s'agit d'un ragot rapporté par Matthieu
ou d'une invention nécessaire afin de
justifier le transport de la petite
famille de Galilée en Judée afin de "naturaliser
Judéen" le futur "divin enfant"
et de faire coïncider sa naissance avec
les prophéties de Michée et d'Isaïe.
C'est donc pour des raisons qui n'ont
rien à voir avec la vérité historique -
et dont la rationalité est strictement
d'ordre catéchétique et pastoral - qu'
aucun texte de l'époque, autre que celui
du seul évangéliste Mathieu, ne fait la
moindre allusion à un massacre de bébés
qui aurait été programmé ou aurait eu
lieu à l'époque et auquel l'enfant Jésus
aurait échappé de justesse.
C'est bien pourquoi il est imprudent et
même absurde d'assimiler quelque texte
religieux que ce soit à un manuel
d'histoire et on peut raisonnablement en
conclure que Jésus est bien né à
Nazareth en Galilée, mais qu'il n'était
pas suffisamment "casher" pour
être accepté comme messie par les
religieux pharisiens - et même par les
sadducéens plus modérés - de Jérusalem.
Le texte de l'évangéliste Mathieu a été
rédigé entre l'an 80 et l'an 90, soit un
bon demi-siècle après la mort de Jésus.
Le rédacteur a eu tout loisir d'aménager
la biographie de celui qui devenait le
messie annoncé dans les textes
prophétiques avec la prophétie de
Michée, afin de la rendre compatible
avec sa mission et son destin.
Voilà qui permet d'expliquer en partie
la haine tenace que lui ont vouée de son
vivant les Pharisiens, leur insistance
hystérique auprès de Ponce Pilate afin
qu'il fût crucifié et la poursuite de
cette haine depuis deux mille ans,
puisque le Talmud lui
réserve le triste sort de bouillir en
enfer dans une marmite d'excréments !
Gittin 57a. dit que "Jésus est
dans l'enfer, bouillant dans des
excréments chauds ".
Une quatrième région, l'Idumée
, semble avoir été peuplée par des
populations présentées comme était de
même origine que les Hébreux. Or, les
Iduméens ont toujours été de féroces
ennemis de la Judée, bien qu'aucun texte
historique fiable ne renseigne sur les
causes de cette haine. Ils ont
d'ailleurs participé à l'invasion de
Jérusalem par Nabuchodonosor et ont fait
partie, avec des Samaritains, des
Galiléens et d'autres peuples voisins,
des immigrants venus occuper les places
laissées vides par les exilés à
Babylone. Les ancêtres du roi iduméen
Hérode n'ont tous été convertis de
force qu'au deuxième siècle avant
notre ère, après une défaite devant les
guerriers du roi hasmonéen Jean Hyrcan
1er. Ce fut la première conversion d'une
province et d'une population entière au
judaïsme.
En conclusion, les quatre provinces qui
composaient l'ère géographique dans
laquelle a évolué l'histoire de la Judée
antique n'ont à aucun moment constitué
un territoire politiquement et
psychologiquement uni, les Judéens ayant
toujours détesté et méprisé cordialement
les habitants des trois autres
provinces. Quant à la composition
ethnique de ces provinces, elle
ressemble à celle de tous les autres
peuples de la terre - elle est le
résultat d'un mélange de populations et
d'un brassage que l'obsession de la
pureté génétique née dans la petite
Judée n'a pas pu empêcher de se produire
dans la réalité, même si le virus de la
pureté raciale est demeuré actif dans
les cervelles.
6 - Population de la
Judée
Les Judéens originels n'étaient
nullement attachés à leur terre. Des
familles nombreuses, un pays pauvre,
sans agriculture, sans commerce, sans
industrie - surtout avant l'époque
hellénistique - ont favorisé dès les
temps les plus anciens une émigration de
masse en direction notamment de l'Egypte
et de la Syrie. D'ailleurs, à l'époque,
le livre de la Genèse n'était
pas rédigé, si bien que les Judéens
n'ont appris qu'après le retour des
émigrés de Babylone, et lorsque le
prêtre Esdras leur eut lu l'ensemble des
rouleaux de la Thora
rédigés durant l'exil, qu'ils étaient
propriétaires de ce confetti de terre
par la grâce d'un miraculeux décret issu
d'un bureau des hypothèques surnaturel,
délivré en rêve à un ancêtre dont ils
n'avaient jamais entendu parler
jusqu'alors. "Quand le soleil fut
couché, il y eut une obscurité profonde;
et voici, ce fut une fournaise fumante,
et des flammes passèrent entre les
animaux partagés. En ce jour-là,
l'Eternel fit alliance avec Abraham."
(Gn 15, 17-18)
Voir
X - La chimère du
grand Israël
Durant la période hellénistique, la
ville égyptienne d'Alexandrie n'était
pratiquement peuplée que de juifs. Seule
la période du règne de Josias avait
représenté une époque de stabilité et de
prospérité et avait bénéficié d'une
émigration de Samaritains qui avaient
préféré la fuite en direction de Juda
plutôt que la déportation en Babylonie.
Nabuchodonosor,
lui, n'avait pas vidé la Judée de tous
ses habitants comme Sargon II l'avait
fait pour la Samarie. En revanche, il y
eut, à côté de l'exil imposé au roi, à
sa cour et à l'ensemble des notables,
une importante émigration de confort: "Comme
le bruit se répand parmi les communautés
dispersées que la situation à Babylone
est bien meilleure qu'en Judée, beaucoup
viennent même rejoindre volontairement
les premiers déportés" écrit
Jacques Attali.
[5]
Il précise qu' "aux
artisans, techniciens, hauts
fonctionnaires militaires et civils du
début s'ajoutent maintenant des
commerçants, des artisans, des
agriculteurs, des pêcheurs , des maçons
venus participer à tous les travaux
lancés par le monarque." Et il
ajoute: "Ils s'y comptent vite en
centaines de milliers", sans
craindre l'exagération, tellement il a à
cœur de démontrer la vitalité et
l'intelligence des membres de sa
communauté.
[6]
Il s'étend d'ailleurs complaisamment sur
les délices de la vie à Babylone et sur
les fortunes accumulées par certains,
alors que, dans le même temps, le
prophète Ezéchiel se lamentait et
dénonçait les perfides "bergers"
d'Israël, qui "s'engraissaient
eux-mêmes et n'engraissaient pas le
troupeau". Ils "ne
guérissaient pas les malades et
n'allaient pas à la recherche des
égarés" ajoute-t-il. Ézéchiel
promettait à son peuple que son Dieu "rassemblerait
le troupeau dispersé et le ramènerait
dans leur pays et les ferait paître sur
les montagnes d'Israël." Mais le
"troupeau", rétif,
estimait que les pâturages mésopotamiens
étaient nettement plus gras et plus
appétissants que ceux de l'aride Judée.
C'est ainsi que la
majorité des Judéens n'avaient pas du
tout envie d'être ramenés dans leur pays
aride et pauvre et n'a pas considéré que
"l'or des Babyloniens"
était "une souillure" (Ez.
7,19-20) . Ils ont donc fait la
sourde oreille aux injonctions du
prophète Sophonie, qui clamait que les
deux métaux précieux que sont l'or et
l'argent "ne peuvent sauver
l'homme" (So. 1,18) et
ils ont si bien apprécié l'exil à
Babylone, que très peu d'entre sont
revenus dans la province ruinée après la
promulgation de l'édit de Cyrus. "Les
Juifs créent leur propres banques et se
font payer en bétail, en bijoux, en
esclaves, en revenus du sol. Certains
deviennent très riches (Néhémie 7-67-69)
et sont admis à la cour du roi
Nabuchodonosor", se félicite
Attali.[7]
Dans son ouvrage sous-titré
Histoire économique du peuple juif,
ce premier dirigeant de BERD (La Banque
européenne pour la reconstruction et le
développement, créée en 1991) - fonction
de laquelle il a d'ailleurs été remercié
à la suite de dépenses somptuaires et
d'un train de vie pharaonique aux frais
de l'institution - cet ex-dirigeant de
la BERD, dis-je, présente une sorte de "légende
dorée" flatteuse et mythologique des
relations que les Juifs ont entretenues
à travers les âges, et entretiennent
aujourd'hui encore, avec le commerce de
l'argent, donc avec la banque, et avec
l'accumulation des richesses. L'auteur
ne va-t-il pas jusqu'à écrire: "Peuple
élu, ses richesses n'ont de sens que si
elles contribuent à la richesse de tous
les autres. (…) Toute richesse doit être
partagée avec le reste du monde"?
Voilà, n'est-ce pas, un programme
alléchant dont on guette avec
impatience, depuis deux mille ans, la
plus petite ombre de commencement de
mise en œuvre.
Néanmoins, cet
ouvrage est important en ce qu'il un des
rares rédigé en français qui ose
théoriser les rapports entre le
judaïsme, l'argent et le rôle de la
diaspora, bien à l'abri de son statut de
membre éminent de la communauté qu'il
décrit: "D'abord,
la richesse reste bienvenue. Dieu,
auteur de tous les biens a donné la
terre aux hommes pour qu'ils la mettent
en valeur et en fassent leur patrimoine
commun. En particulier l'argent, machine
à transformer le sacré en profane, à
libérer des contraintes, à canaliser la
violence, à organiser la solidarité
(entre juifs) , à faire face aux
exigences des non-juifs, constitue un
excellent moyen de servir Dieu. (…)
Devenir riche est le signe d'un devoir
divin."
[8]
Ces quelques lignes, qui s'appliquent
parfaitement à la situation politique
actuelle, suffisent à comprendre l'abîme
psychologique, source de tous les
malentendus et de tous les conflits
entre la mentalité des communautés
juives baignant dans la psychologie
talmudique décrite ci-dessus, et
majoritairement installées durant des
siècles au milieu de sociétés
chrétiennes pour lesquelles, au
contraire, c'était la pauvreté
qui était le moyen le plus approprié de
servir Dieu. Servir Dieu en cherchant à
devenir riche pour les uns, servir Dieu
en restant pauvre, pour les autres? Le
choc des mentalités était inévitable.
"Je vous le dis, il est
plus aisé pour un chameau
d'entrer par le trou d'une
aiguille, que pour un riche
d'entrer dans le royaume de
Dieu." Mt 19, 24
"C'est
pourquoi je vous dis : Ne vous
faites pas tant de souci pour
votre vie, au sujet de la
nourriture, ni pour votre corps,
au sujet des vêtements. La vie
ne vaut-elle pas plus que la
nourriture, et le corps plus que
les vêtements? Regardez les
oiseaux du ciel : ils ne font ni
semailles ni moisson, ils ne
font pas de réserves dans des
greniers, et votre Père céleste
les nourrit." Mt 6,
25-32
|
Il est difficile de se faire une idée
précise de l'importance de la population
dans ces provinces du temps d'Esdras et
de Néhémie, les grands épurateurs de
Galiléens, de Samaritains et d'Iduméens,
lors de leur retour de Babylone,
c'est-à-dire à l'époque charnière dans
l'histoire de ce peuple, lorsque fut
imposé le corpus de la Thora
et où fut introduite la notion
d'alliance gagée sur la possession d'un
territoire.
Voir V - La
théocratie ethnique dans le
chaudron de l'histoire
En effet, tous les chiffres fournis par
le texte biblique ou par les historiens
juifs qui reprennent les chiffres
trouvés dans les ouvrages de Flavius
Josèphe, sont fantaisistes et nettement
exagérés. Or, six siècles après
l'émigration des fameuses foules de "centaines
de milliers" vers la Babylonie
qu'annonce Attali, il faudra attendre le
grand bâtisseur que fut le roi iduméen
Hérode le Grand, né en -73, pour que la
capitale de la Judée connût, durant
quelques années seulement, une
prospérité, des embellissements et un
prestige semblables à ceux des autres
grandes cités du bassin méditerranéen.
Ainsi, du temps d'Hérode le grand -
c'est-à-dire au meilleur de son
développement - Ernest Renan estime que
la population permanente de Jérusalem se
situe entre 40 000 et 60 000 habitants,
soit l'équivalent de petites villes
comme Alençon ou Montauban. Jérusalem,
capitale d'une province ex-centrée de
l'empire romain, faisait pâle figure à
côté de la capitale de l'empire qui, à
cette époque, dépassait déjà le million
d'habitants. La capitale de la Judée
n'était une ville grouillante qu'au
moment des grands pèlerinages et pouvait
alors compter, durant une courte
période, jusqu'à un demi-million et plus
de pèlerins. C'est la raison pour
laquelle Hérode avait imaginé de
construire une gigantesque esplanade
devant le temple, afin d'accueillir la
foule des émigrés qui affluait de toutes
les villes du bassin de la Méditerranée
au moment des grandes fêtes religieuses.
Attali, lui, dans l'ouvrage cité
ci-dessus et se référant à l'Encyclopaedia
judaica, estime à sept millions
la population juive dans le monde à
cette époque, dont deux millions dans
l'ensemble de la Palestine, un million à
Rome et le reste réparti sur le pourtour
de la Méditerranée. Compte tenu de
l'état de l'économie de la province et
en recoupant ces données avec celles
fournies par les sources non juives, si
on enlève un zéro à ces chiffres, on ne
doit pas être loin de la réalité.
Wikipedia évalue à huit mille le
nombre de juifs vivant à Rome du temps
de l'empereur Auguste, né en 63 avant
notre ère.
[9]
Mais certains historiens modernes
avancent le chiffre de trente mille. Ce
chiffre semble plus vraisemblable.
7 - Emigration juive
dans les villes du bassin de la
Méditerranée
"Ils ont touché
toute ville, il ne serait pas facile de
trouver un endroit de la terre qui n'ait
pas reçu cette tribu et n'ait pas été
dominé par elle."
Cette inscription grecque de Strabon,
datant du premier siècle et citée par
Renan (t.V, p.225), montre que
l'omniprésence de Judéens dans tous les
grands centres des bords de la
Méditerranée est un fait établi bien
avant la destruction du temple et
l'interdiction de résider à Jérusalem,
interdiction qui ne touchait qu'une
toute petite proportion de la population
totale. La Syrie tout entière était à
moitié juive écrivait Philon (
In Flacc., §7) et les Juifs y
jouissaient des mêmes droits que la
population autochotone. Mais le
prosélytisme était tel que Flavius
Josèphe se réjouissait de ce que "toutes
les femmes de Damas étaient juives"
(in Contre Apion, II, XX,2).
C'était également le cas à Rome:
Ovide se moque des femmes converties
à la religion juive: il conseille aux
séducteurs d'assister aux cérémonies
juives où elles se rendent en grand
nombre: "Nec te praetereat [...]
culta Iudaeo septima sacra Syro."
(Ovide, Ars amatoria, 1,
75-76) : "Ne laisse pas
échapper les cérémonies du septième jour
célébrées par le
juif syrien"
, sous-entendant que c'était un lieu
propice pour les rencontres.
Les affirmations dénonçant l'importance
numérique des Juifs sont certainement
exagérées compte tenu de ce qu'on sait
de la population d'origine. Mais le
nombre ne fait pas le pouvoir et
l'influence. Or, la Rome de l'époque
était le centre du monde et son pouvoir
d'attraction pourrait se comparer à
celui de Wall Street ou de la City
aujoud'hui, car ce sont les réseaux
d'influence qui créent l'impression
d'omniprésence. Il suffit, en effet, de
se référer à la situation actuelle aux
Etats-Unis ou en Europe pour mieux
comprendre la situation qui a prévalu à
Rome. Les Européens n'ont-ils pas
découvert avec stupeur qu'un "Parlement
juif européen" vient de voir le
jour? Soutenu officiellement par le
Conseil représentif des institutions
juives de France, ce parlement
confessionnel siège dans les murs mêmes
du véritable Parlement européen. La
presse est demeurée d'un mutisme
remarquable sur la naissance de cet Ovni
et son objectif. Un "peuple
dominateur et sûr de lui"
s'organiserait-il sur le territoire
européen, pendant que dans une France
qui ne compte que un pour cent de Juifs
officiellement déclarés par rapport à
l'ensemble de sa population, un
organisme communautaire privé réussit
l'exploit de convoquer chaque année
l'ensemble de sa classe politique,
gouvernement compris, à une sorte de
cérémonie d'allégeance déguisée en repas
convivial.
Or, des communautés juives nombreuses et
organisées étaient présentes en Syrie, à
Chypre, en Asie Mineure, en Grèce et
dans les îles grecques, en Crète, en
Cyrénaïque, en Crimée. "La
sibylle d'Alexandrie représente Israël
comme remplissant les terres et les mers"
(Renan, t.V, p.224).
Le livre des Maccabées se fait l'écho de
cette omniprésence:
" Lucius,
consul des Romains, au roi
Ptolémée, salut. Les
ambassadeurs des Juifs, nos
amis, sont venus vers nous, pour
renouveler l'amitié et
l'alliance antérieure, envoyés
par Simon, prince des prêtres,
et par le peuple des Juifs. Ils
ont aussi apporté un bouclier
d'or de mille mines. Il nous a
donc plu d'écrire aux rois et
aux contrées, pour qu'ils ne
leur fassent aucun mal, qu'ils
n'attaquent ni eux, ni leurs
villes, ni leur pays, et qu'ils
ne portent pas secours à ceux
qui combattent contre eux. Or il
nous a paru bon de recevoir
d'eux le bouclier. Si donc
quelques pervers de leurs pays
se sont réfugiés chez vous,
livrez-les à Simon; prince des
prêtres, afin qu'il se venge
d'eux selon sa loi. Les mêmes
choses furent écrites au roi
Démétrius, à Attale, à
Ariarathès, à Arsacès, et dans
toutes les contrées: à
Lampsaque, aux Spartiates, à
Délos, à Mynde, à Sicyone, en
Carie, à Samos, en Pamphylie, en
Lycie, à Alicarnasse, à Coos, à
Side, à Aradon, à Rhodes, à
Phasélis, à Gortyne, à Gnide, en
Chypre et à Cyrène."
(I Maccabée, 15,22)
|
La première attestation de l'existence
de Juifs à Rome remonterait à 139 av.
J.- C.. Mais à cette date leur
immigration était vigoureusement
combattue: "Le préteur força des
Juifs, qui s'efforçaient de corrompre
les mœurs romaines par l'introduction du
culte de Jupiter Sabazius, à retourner
chez eux." Les Romains peu
curieux des divinités étrangères,
confondaient Sabazios, divinité
d'Asie Mineure avec Jahvé Sabaoth.
Mais l'ostracisme ne dura pas et les
Juifs furent particulièrement nombreux à
Rome à partir du temps d'Hérode : la
guerre de 66 - 74, menée par Titus puis
Vespasien, celle de 132 - 135 menée par
Hadrien provoquèrent une affluence de
prisonniers, d'esclaves ou d'émigrés
volontaires. A Rome, les groupes de
captifs juifs amenés par Pompée à la
suite de la prise de Jérusalem et de la
destruction du temple et destinés, comme
il était d'usage, à figurer dans la
cérémonie de son triomphe, furent
rapidement affranchis.
Laborieux, patients, solidaires,
habiles, les Juifs ont été appréciés de
presque tous les gouvernants de
l'antiquité, aussi bien des successeurs
d'Alexandre du temps de la domination
hellénistique que des empereurs romains
qui leur ont longtemps accordé un statut
privilégié. Ils formaient souvent une
classe-tampon entre les dirigeants et le
peuple. En revanche, et pour les raisons
mêmes qui les faisaient apprécier par
les maîtres, ils n'étaient pas aimés par
les populations. C'est pourquoi la
cohabitation des immigrants juifs avec
les populations locales a toujours été
houleuse. Evitant tout contact qui
aurait permis une assimilation à la
nation-hôte, ils n'entretenaient des
relations qu'avec les dirigeants qu'ils
servaient avec zèle. Ils s'adonnaient
exclusivement à des activités
commerciales, sources d'enrichissement
rapide, comme on l'a vu théorisé par
Jacques Attali. Mais ce comportement
suscitait des jalousies tenaces et
provoquait l'hostilité du peuple. "L'opinion
universelle était qu'ils professaient
une haine féroce contre celui qui
n'était pas de leur secte." (Juvénal,
Satires, XIV, 96-106)
C'est ainsi qu'à
Alexandrie, à Antioche, en Asie Mineure,
à Cyrène, à Damas et dans les villes non
juives de Palestine - Césarée, Ascalon,
Acre, Tyr - on a assisté à des violences
et même de véritables guerres entre
Juifs et non-juifs. Comme l'écrit
prudemment Attali, "la fortune ne
doit pas être foncière, car elle est
alors trop visible, créatrice de
jalousies, difficile à céder pour celui
qui peut avoir à partir au plus vite.
Aussi doit-elle rester fluide : le métal
précieux est sa meilleure forme, la
terre sa plus mauvaise. "
[10]
Les Romains étaient tolérants en matière
de religion. Chaque groupe étranger
vivait selon ses coutumes et sa religion
et se trouvait regroupé dans ses propres
quartiers qu'on appelait des collegia.
Les synagogue jouaient le rôle de
collegia et exerçaient une certaine
juridiction sur leurs membres (voir
Renan, t.V, p. 231). Mais il était
interdit de pratiquer sa religion en
dehors de son quartier. En fait, la
synagogue intervenait uniquement dans
les litiges qui pouvaient se régler à
l'amiable, mais sur toutes les questions
concernant l'ordre public, les
communautés juives étaient soumises à la
loi romaine.
Néanmoins, les Romains ont acccordé aux
Juifs des privilèges exceptionnels. Même
lorsqu'ils devinrent citoyens romains,
ils étaient exemptés du service
militaire - à cause de leur refus de
combattre le jour du sabbat - et il
était interdit de citer un Juif en
justice ce jour-là. L'empereur Auguste
faisait même retarder les distributions
gratuites de blé lorsqu'elles tombaient
le jour du sabbat. Ces privilèges
exaspéraient les citoyens romains et le
luxe ostentatoires de certains Juifs
enrichis dans le commerce finirent par
provoquer une haine féroce.
Très rapidement, les empereurs romains,
notamment César et Auguste, interdirent
les collegia, tout en maintenant
les privilèges de la synagogue, laquelle
pouvait librement disposer des fonds
qu'elle récoltait. C'était pour les
membres de cette communauté un grand
honneur d'être désigné comme envoyé
spécial, apostolus, afin de
porter la caisse à Jérusalem. Cet argent
était, dit Philon, "la base
de la piété de la nation" (De
monarchia, l.c.) Mais les envois
d'argent que les communautés juives
faisaient à Jérusalem - dons et
rétributions diverses destinés à
l'entretien matériel du culte -
devinrent très vite la source de heurts
avec l'autorité romaine.
Par extension, le nom fut donné aux
douze apostoli - envoyés spéciaux
- de Jésus chargés de prêcher la bonne
nouvelle de sa parole - l'Évangile.
C'est d'ailleurs à partir des synagogues
que le christianisme a pris son élan et
le Juif Saül, devenu Paul après sa
conversion, courait de synagogue en
synagogue afin de récolter l'argent
destiné à l'entretien des "saints
de Jérusalem", c'est-à-dire des
premières communautés chrétiennes
composées des Juifs qui avaient entendu
la "bonne nouvelle" - l'Evangile
- et avaient accepté la "nouvelle
loi".
L'affaire des caisses juives est
restée célèbre en raison de la
plaidoirie - Pro Flacco -
que prononça Cicéron en défense
de son ami Pomponius Flaccus,
gouverneur d'Asie, lequel fit confisquer
les caisses juives en Asie mineure en
-59 . "Tous les ans, de l'or était
régulièrement exporté à Jérusalem pour
le compte des Juifs, d'Italie et de
toutes nos provinces. Flaccus prohiba
par édit les sorties d'or d'Asie. Qui
donc, juges, pourrait ne pas l'approuver
sincèrement? L'exportation de l'or, plus
d'une fois auparavant, et
particulièrement sous mon consulat, a
été condamnée par le Sénat de la façon
la plus rigoureuse. S'opposer à cette
superstition barbare a été le fait d'une
juste sévérité, et dédaigner pour le
bien de l'État, cette multitude de
Juifs, parfois déchaînés dans nos
réunions, un acte de haute dignité.
" (Cicéron, Pro Flacco)
On a là un bel effet de manche d'habile
avocat, qui évoque d'une manière
grandiloquente le "bien de l'Etat"
oubliant de préciser que Flaccus s'est
purement et simplement approprié cet
argent, qu'il était également accusé de
diverses autres escroqueries et de
détournements de fonds et qu'en l'espèce
les Juifs avaient bien raison de
protester.
Les expatriés juifs ne se contentaient
pas de se livrer à un lucratif commerce
et à organiser leur vie d'une manière
quasiment autonome autour des
synagogues, protégés, à l'origine, par
les lois romaines qui leur avaient
accordé l'isonomie. On remarquera que
l'actuel Etat d'Israël, lui, la refuse à
ses minorités et notamment aux
Palestiniens.
Les immigrés juifs dans l'empire romain,
et notamment à Rome, se livraient à un
ardent prosélytisme. Renan explique
finement les conditions politiques
favorables qui ont permis, à la religion
judaïque de se développer et de faire
tache d'huile dans l'empire romain: "Une
révolution profonde se faisait dans les
sentiments religieux du monde antique.
Le paganisme gréco-latin devenait
insipide. On cherchait de toutes part un
aliment au besoin de croire et
d'aimer que la vieille mythologie ne
satisfaisait plus." (Renan, t. V,
p.243) C'est ainsi que se
développèrent dans l'empire des cultes
préfigurateurs du monothéisme - cultes
d'Isis, de Mithra ou de Sérapis. Dans
cette atmosphère de ferveur et de
recherche spirituelle, le judaïsme
rencontra, lui aussi, un succès
considérable et provoqua une énorme
masse de convertis, notamment de femmes
- les hommes se contentant souvent du
titre "d'amis du judaïsme". Ils
rechigaient à se livrer à la
circoncision, acte particulièrement
repoussant pour un Grec ou un Romain de
l'époque.
Loin des pratiques rituelles rigoureuses
imposées par les Pharisiens en Judée,
ces nouveaux convertis au judaïsme,
augmentés de la masse des "craignant
Dieu" non circoncis, comme on les
appelait, étaient séduits par l'idée de
l'adoration d'un Eternel invisible et
incorporel, beaucoup plus spirituel que
la rigoureuse religion nationale
romaine. C'est dans ce milieu de Juifs,
qui n'avaient évidemment aucun rapport
avec le patrimoine génétique des
immigrés judéens, que se développa le
christianisme. Ultérieurement, les lois
romaines réprimèrent durement aussi bien
le judaïsme que le christianisme
naissant, entre lesquels les Romains ne
faisaient pas de différence, lorsqu'ils
eurent l'impression que le fanatisme
religieux de ces "sectes" mettait en
péril l'esprit et la stabilité politique
et sociale d'un empire romain
viscéralement étranger à toute
propagande et à tout prosélytisme
religieux.
Dès lors, comment ne pas se gausser de
la prétendue homogénéité génétique
"découverte" aujourd'hui entre "tous les
Juifs" qui auraient émigré en direction
de la capitale de l'empire romain, après
avoir été "chassés" de leur pays par les
méchants Romains et qui, après avoir
fait un petit stage à Rome, auraient
repris leur élan migrateur et se seraint
disséminé dans le monde entier? (Voir
ci-dessus).
Il est dommage que, afin de réfuter la
thèse sacrilège de Shomo Sand, les
sionistes aient mis sur pied un scénario
pseudo scientifique aussi absurde et
aussi aisément démenti par l'histoire de
la région.
Il est convient, en outre, de rappeler
qu'une importante diaspora de
Samaritains existait également à Rome.
Mais les deux groupes ne se mélangeaient
pas, chacun avait ses propres synagogues
car, même en exil, la même haine qu'en
Palestine continuait à en faire des
ennemis irréductibles.
8 - Bernard Lazare et
son "Histoire de l'antisémitisme"
Personne n'a mieux que Bernard Lazare
(1865-1903) expliqué les causes de
l'antisémitisme dans son ouvrage :
L'Antisémitisme, son histoire et ses
causes, P., éd. Léon Chailley,
1894.
Bernard Lazare
Ce journaliste, écrivain, dramaturge,
défenseur acharné de la première heure
de Dreyfus fut le premier utilisateur de
l'exclamation "J'accuse"
dans un article. L'expression a été
reprise, avec quel succès, par un Emile
Zola qui a oublié d'en reconnaître la
paternité à l'homme de coeur qui a
consacré sa trop courte vie à se lancer
le premier dans le combat pour la vérité
et à essayer de comprendre le destin de
la tribu à laquelle il se rattachait par
son père.
Avant d'entreprendre, dans le prochain
texte, un grand voyage en direction des
plaines asiatiques, je donne la parole à
cet esprit généreux et lucide, militant
anarchiste qui, après l'épreuve d'un
montage mensonger et d'une crapulerie
qui déchaînèrent un antisémitisme
virulent dont fut victime le capitaine
Alfred Dreyfus, s'engagea corps et âme
dans sa défense, devint un nationaliste
juif, et soutint même un temps un
Theodor Herzl, qui se révéla plus
antisémite, s'il se peut, que les pires
antisémites non juifs, mais finit par
prendre ses distances avec lui.
Une expérience particulièrement
révélatrice du degré de fanatisme
anti-juif de M. Herzl a été
organisée dans les rues de Tel-Aviv:
un journaliste lisait à des jeunes
gens et à des jeunes filles arrêtés
au hasard dans la rue, des phrases
prononcées par cet homme, auquel les
sionistes dressent un piédestal, et
leur demandait d'en citer l'auteur.
TOUS répondirent HITLER. Or, ces
paroles particulièrement
repoussantes bien dignes, en effet,
du Führer allemand, avaient été
prononcées par M. Theodor HERZL, le
"père" d'Israël, un des fondateurs
du sionisme.Puis la camera prit un
petit recul et un gigantesque
portrait du célèbre barbu est apparu
sur la façade d'un immeuble. Seule
une jeune fille courageuse, demanda
avec indignation que cette vérité
fût enseignée dans les écoles
israéliennes. Tous les autres,
incrédules, puis négateurs,
refusèrent de déboulonner
la statue et répondirent qu'il vaut
mieux cacher la vérité!
[11]
"Les
Juifs d'aujourd'hui n'ont plus rien
à voir avec leur patrie historique.
Si les Juifs devaient y retourner un
jour, ils s'apercevraient dès le
lendemain qu'ils ont depuis
longtemps cessé d'être un peuple",
écrivait Theodor Herzl avant son
revirement à cent quatre-vingts
degrés.
[12]
Quant à Bernard Lazare, il ne renia
jamais son ouvrage sur
L'antisémitisme, son histoire et ses
causes et, avant de mourir,
il accepta expressément qu'il fût
réédité. Son aspiration à la
justice, à la vérité et à la liberté
étaient plus fortes que les
solidarités communautaires et les
idéologies, fussent-elles sionistes.
"Partout
où les Juifs, cessant d'être une
nation prête à défendre sa liberté
et son indépendance, se sont
établis, partout s'est développé
l'antisémitisme ou plutôt
l'antijudaïsme. (…) Si cette
hostilité, cette répugnance même, ne
s'étaient exercées vis-à-vis des
Juifs qu'en un temps et en un pays,
il serait facile de démêler les
causes restreintes de ces colères;
mais cette race a été, au contraire,
en butte à la haine de tous les
peuples au milieu desquels elle
s'est établie. Il faut donc, puisque
les ennemis des Juifs appartenaient
aux races les plus diverses, qu'ils
vivaient dans des contrées fort
éloignées les unes des autres,
qu'ils étaient régis par des lois
différentes, gouvernés par des
principes opposés, qu'ils n'avaient
ni les mêmes mœurs, ni les mêmes
coutumes, qu'ils étaient animés
d'esprits dissemblables ne leur
permettant pas de juger également de
toutes choses, il faut donc que les
causes générales de l'antisémitisme
aient toujours résidé en Israël même
et non chez ceux qui le
combattirent.
(…)
Quelles vertus ou quels vices
valurent au Juif cette universelle
inimitié? Pourquoi fut-il tour à
tour, et également, maltraité et haï
par les Alexandrins et par les
Romains, par les Persans et par les
Arabes, par les Turcs et par les
nations chrétiennes? Parce que
partout, et jusqu'à nos jours, le
Juif fut un être insociable.
Pourquoi était-il insociable? Parce
qu'il était exclusif, et son
exclusivisme était à la fois
politique et religieux, ou, pour
mieux dire, il tenait à son culte
politico-religieux, à sa loi."
Bernard Lazare précise bien, et
c'est le point capital de sa
démonstration, que l'insociabilité
des Juifs avait et a toujours pour
origine leur obéissance à un "culte
politico-religieux", à une "loi"
qui leur étaient propres. Or, la "loi"
politique qui régit minutieusement
la vie quotidienne et sociale de
cette communauté est contenue, non
pas seulement dans la Thora,
mais principalement dans le
Talmud, comme le démontre la
suite de l'ouvrage de ce penseur à
l'esprit ouvert et généreux.
A l'heure où l'Etat des anciens
parias est devenu à son tour un
cruel bourreau qui persécute et
martyrise sans pitié un peuple tout
entier au nom d'une mythologie dont
on peut suivre la cristallisation,
un homme aussi honnête et lucide,
aurait probablement été désespéré de
voir ce qu'est devenue l'idéologie à
laquelle il a un temps adhéré.
Dans le prochain texte j'analyserai
les conditions de la rédaction du
Talmud et la manière dont
a fonctionné le gouvernement central
auquel il a donné naissance. Je
montrerai comment ce gouvernement
central a maintenu d'une poigne de
fer l'unité psychique des groupes
dispersés dans le monde entier en
tissant un lien permanent entre eux
et en empêchant toute tentative
d'assimilation aux sociétés dans
lesquelles vivaient ces communautés,
comment le mouvement sioniste
moderne est né et a prospéré sur ce
terreau et comment il s'est
développé en un puissant mouvement à
la fois religieux et politique qui
s'est concrétisé en une ruée de
colons fanatisés en direction de la
Palestine.
En même temps, j'essaierai
d'éclairer quelque peu l'influence
de deux mille ans d'incubation
talmudique sur la création d'un
arrière-monde collectif qui se
heurte au mystère anthropologique de
la volonté obstinée de la majorité
de ce groupe humain de s'éprouver,
aujourd'hui comme hier et
certainement comme demain, séparé du
reste de l'humanité et de provoquer,
par son comportement, le rejet qu'il
déplore en accusant le monde entier
d'antisémitisme, tout en ne pouvant
s'empêcher de le provoquer.
Notes
[1]
Démenti à Shlomo Sand:
le génome révèle que les deux
branches de la diaspora juive sont
parties d'Italie
http://www.restitution.be/communique-201101041749.html
[2]
Jacques Attali, :
"Les juifs ont toutes les raisons
d'être fiers de cette partie de leur
histoire", propos recueillis par
Eric Conan
http://www.denistouret.fr/ideologues/index.html
[3]
Frédéric
Lewino, Civilisation :
nous sommes tous des Arabes !
http://www.lepoint.fr/actu-science/histoire-de-l-homme-nous-sommes-tous-des-arabes-27-01-2012-1424481_59.php
[4]
Hédi Doukhar,
Un tournant dans la bataille
de Syrie
http://hedidh.blogspot.com/2012/02/un-tournant-dans-la-bataille-de-syrie.html
[5]
Jacques
Attali Les Juifs, le Monde
et l'Argent.
p.68, livre de poche
[6] Ibid., p.69
[7] Attali, Ibid.,
p. 69
[8] Attali, Ibid.,
p. 69
[9]
http://fr.wikipedia.org/wiki/Auguste
[10] Attali,
Ibid.p.147
[11]
Theodor
Herzl, antisémite: Voir les
vidéos :
http://soutien-palestine.blogspot.com/2010/12/theodore-herzl-le-cote-antisemite-du.html
[12]
Charles
Zorgbibe,
Theodor Herzl
l'aventurier de la terre promise,
p. 55
Bibliographie
Professor Abdel-Wahab Elmessiri:
The function of outsiders
:
http://weekly.ahram.org.eg/1999/435/op2.htm
The kindness of strangers:
http://weekly.ahram.org.eg/1999/436/op2.htm
A chosen community, an exceptional
burden :
http://weekly.ahram.org.eg/1999/437/op5.htm
A people like any other :
http://weekly.ahram.org.eg/1999/438/op5.htm
Learning about Zionism:
http://weekly.ahram.org.eg/2000/476/eg6.htm
Mario Liverani,
La Bible et l'invention de l'histoire,
2003, trad. Ed. Bayard 2008
Israël Finkelstein et Neil Asher
Silberman,La Bible dévoilée. Les
nouvelles révélations de l'archéologie,
2001 ,trad. Ed. Bayard 2002
Israël Finkelstein et
Neil Asher Silberman,
Les rois sacrés de
la Bible, trad.Ed.Bayard 2006
Arno J. Mayer, De leurs socs, ils
ont forgé des glaives, Histoire critique
d'Israël, Fayard 2009
Ernest Renan, Histoire du peuple
d'Israël, 5 tomes, Calmann-Lévy
1887
Bernard Lazare,
L'Antisémitisme, son histoire et ses
causes,
éd. Léon Chailley, 1894.
Douglas Reed , La Controverse de
Sion
Shlomo Sand, Comment le peuple
juif fut inventé, Fayard 2008,
coll. Champs Flammarion 2010
Avraham Burg, Vaincre Hitler :
Pour un judaïsme plus humaniste et
universaliste , Fayard 2008
Ralph Schoenman, L'histoire cachée
du sionisme, Selio 1988
Israël Shahak,
Le Racisme de
l'Etat d'Israël
, Guy Authier,
1975
Karl Marx, Sur la question juive
SUN TZU, L'art de la guerre
Claude Klein,
La démocratie
d'Israël,1997
Jacques Attali: Les Juifs, le
monde et l'argent,
Histoire économique du peuple juif.
Fayard, 2002
14
mars 2012
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