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Electronic Intifada

Le monde se tait tandis que
des fascistes rejoignent le gouvernement israélien

Ali Abunimah

Propagande officielle de l’UE s’affichant dans l’aéroport de Dublin et clamant que 
« l’Union Européenne œuvre partout pour la paix, la sécurité et la stabilité » (Photo : Ali Abunimah / EI
)

The Electronic Intifada, 24 octobre 2006

http://electronicintifada.net/v2/article5874.shtml

Par une démarche effrayante mais attendue depuis longtemps, le Premier Ministre israélien, Ehoud Olmert, a fait entrer le parti Yisrael Beiténou dans la coalition gouvernementale. Le chef du parti, Avigdor Lieberman, est censé devenir vice premier ministre et, en tant que « Ministre des menaces stratégiques », être un membre clé du « cabinet de sécurité » israélien en charge du dossier iranien.

Yisrael Beiténou est un dangereux parti extrémiste aux tendances fascistes qui a ouvertement préconisé le « transfert » de Palestiniens, y compris le transfert de villes arabes d’Israël vers une future entité palestinien de type Bantoustan. Il a fait comprendre qu’un Etat à la suprématie juive était plus important qu’un Etat démocratique. Le parti, dont la base la plus solide se recrute parmi les immigrants russes amenés en Israël dans les années 90, a fait une percée lors des dernières élections israéliennes de cette année, enlevant onze des 120 sièges du Parlement israélien.

L’été dernier, Israël a lancé une désastreuse guerre de destruction contre le Liban, et il maintient, contre les Palestiniens des Territoires occupés, son état de siège et ses attaques qui ont tué près de trois cents personnes en trois mois et laissé des centaines de milliers de personnes sans nourriture, ni eau en suffisance, ni électricité. Lieberman a plaidé en faveur de mesures encore plus dures et plus criminelles à l’encontre des Palestiniens et des voisins d’Israël.

Il est consternant de voir l’Union Européenne, acteur clé au plan international, résolue à maintenir des relations chaleureuses et normales avec ce gouvernement extrémiste, lui accordant ainsi légitimité et encouragement.

« Vous comprendrez que nous ne pouvons pas nous immiscer dans la constitution d’un gouvernement étranger. C’est là une matière dont seul l’Etat concerné est responsable », a écrit Cristina Gallach, porte-parole officielle de Javier Solana, le Haut représentant européen pour la politique étrangère, dans un courriel répondant à la question de savoir si l’UE imposerait des sanctions à Israël au cas où Yisrael Beiténou rejoindrait le gouvernement.

Cristina Gallach ajoutait que « Nous pensons que tant Israël que les Palestiniens sont conscients de la responsabilité qu’ils ont dans la création de conditions favorables à la réactivation du Processus de Paix avec pour but ultime la constitution de deux Etats vivant côte à côte, en paix et dans la sécurité ». En dehors de ce genre de platitudes mielleuses et cyniques, la porte-parole de Javier Solana n’a donné aucun signe d’une préoccupation de l’UE concernant les scandaleux développements politiques internes à Israël dont il ne fait aucun doute qu’ils amèneront d’autres violences, d’autres escalades, d’autres souffrances inutiles.

Dans une interview accordée en septembre à un quotidien israélien [Hazofe], le leader de Yisrael Beiténou, Lieberman, déclarait : « La vision que j’aimerais avoir ici, c’est le ferme établissement de l’Etat juif et sioniste… La démocratie a toute ma faveur, mais lorsqu’il y a contradiction entre valeurs démocratiques et valeurs juives, les valeurs juives et sionistes sont plus importantes. » (Scotsman, 23 octobre 2006 [i])

Outre son adoption du nettoyage ethnique, Lieberman a une longue histoire d’incitation à la discrimination, à la haine et à la violence contre les Palestiniens, à l’intérieur de l’Etat juif et sous occupation militaire israélienne à Jérusalem Est, en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Lorsqu’il a rempli la fonction de Ministre des Transports au sein d’un précédent gouvernement, Lieberman a appelé à ce que tous les prisonniers palestiniens détenus par les autorités israéliennes d’occupation soient noyés dans la Mer Morte et il s’est offert à fournir les bus (« Lieberman attaqué pour avoir suggéré de noyer des prisonniers palestiniens », Haaretz, 11 juillet 2002 [ii]). Il a proposé de priver de leur citoyenneté et d’expulser tout citoyen palestinien d’Israël qui refuserait de signer un serment de loyauté envers l’Etat juif sioniste (« Un Etat juif démographique », Haaretz, 28 juin 2002 [iii]).

En 2002, Lieberman a déclaré : « Je n’hésiterais pas à envoyer, pour 48 heures, l’armée israélienne dans toute la zone A [la zone de Cisjordanie placée prétendument sous le contrôle de l’Autorité Palestinienne – Note d’ A. Abunimah]. Détruire le fondement de toute infrastructure militaire de l’Autorité, tous les bâtiments de la police, les arsenaux, tous les postes des forces de sécurité… Ne pas laisser une pierre sur une autre. Tout détruire. » Il a également suggéré au cabinet israélien que la force aérienne bombarde systématiquement tous les centres commerciaux, les stations d’essence et les banques dans les Territoires occupés (The Independant, 7 mars 2002). Et il a proposé de bombarder le barrage d’Assouan en Egypte, en dépit du traité de paix signé entre ce pays et Israël en 1979. Que proposera-t-il de faire à l’Iran ?

Le professeur Ze’ev Sternhell, de l’Université Hébraïque, spécialiste du fascisme et du totalitarisme, était cité par le quotidien Scotsman pour avoir dit de Lieberman qu’il était « peut-être le politicien le plus dangereux dans l’histoire de l’Etat d’Israël. »

Il faut une action urgente pour enrayer la menace croissante qu’Israël représente pour la paix et la sécurité internationales. Au lieu de faire quoi que ce soit en ce sens, le bureau du Haut représentant européen a établi une nouvelle norme basse, n’offrant que conciliation et complaisance à l’extrémisme et à l’apartheid israéliens. La prétention européenne à ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures de gouvernements étrangers sert seulement à couvrir une couardise politique et l’absence de volonté de résister à Israël et à ses partisans ; elle est en parfaite contradiction avec ce qui s’est fait dans d’autres cas, passés ou présents.

Il saute aux yeux que depuis qu’en janvier dernier, au cours des élections les plus libres qui se soient jamais tenues dans le monde arabe, les Palestiniens sous occupation ont élu le Hamas pour diriger l’Autorité Palestinienne, l’UE s’est ingérée dans leurs affaires de la façon la plus irresponsable, imposant un état de siège complet et une coupure de l’aide qui ont directement pénalisé la population palestinienne, entraînant faim et privations. Cet état de siège vise explicitement à forcer l’Autorité conduite par le Hamas à abandonner la plateforme sur laquelle celui-ci a été élu, ou à le contraindre à quitter complètement le pouvoir. (L’UE prétend vouloir que le Hamas reconnaisse Israël et mette fin à la violence, alors que le Hamas a observé une trêve unilatérale de 22 mois, cessant les attaques contre Israël, et alors que ses dirigeants ont multiplié les déclarations en faveur d’un accord à long terme avec Israël sur la base d’une égalité et d’une reconnaissance mutuelle et non pas unilatérale.) L’Union Européenne, sous la responsabilité personnelle de Solana, a orchestré cette ingérence flagrante dans le développement de la démocratie palestinienne, ainsi que le châtiment de ceux qui tentaient de la mettre en pratique.

En 2000, les pays de l’UE ont pris une mesure sans précédent en imposant des sanctions diplomatiques à l’un de ses propres Etats membres, l’Autriche, après que le Parti de la Liberté, d’extrême droite, ait rejoint le gouvernement à la suite des élections. Bien que beaucoup de voix aient critiqué cette ingérence de l’UE dans les affaires intérieures d’un pays démocratique, l’un des partisans des sanctions à s’être fait le plus entendre ne fut autre que Javier Solana qui, en cette occasion, déclara : « Je pense que l’Europe a donné un très bon exemple de ce qu’en des matières importantes – des choses qui doivent s’accorder avec des principes, des valeurs – il n’y a pas de possibilité de compromis. » (« Des sanctions frappent l’Autriche », Reuters, 4 février 2000).

Mais lorsqu’il s’agit pour les Etats membres de l’UE de prendre leurs responsabilités en exigeant qu’Israël rende compte de l’escalade de ses violations à l’encontre de l’Accord d’Association UE-Israël, de la Quatrième Convention de Genève, de nombreuses résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU et de convenances humaines élémentaires, on ne trouve plus nulle part ces principes dont Solana et tant d’autres puissants sont tellement fiers de pouvoir se vanter.

Dans ce vide moral et politique, il est encore plus urgent d’entendre l’appel de la société civile palestinienne à rejoindre une campagne générale grandissante de boycott, de désinvestissement et de sanctions.

Ali Abunimah est co-fondateur de ‘The Electonic Intifada’ et l’auteur de « One Country - A Bold Proposal to End the Israeli-Palestinian Impasse » (Metropolitan Books, 2006)

 

(Traduction de l’anglais : Michel Ghys)


[i] http://thescotsman.scotsman.com/international.cfm?id=1565582006

[ii] www.haaretz.com/hasen/pages/ShArt.jhtml?itemNo=315541

 


Source : Michel Ghys


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