Opinion
Les 20 ans du CUF!
Alexandre Latsa
©
Alexandre Latsa
Mercredi 12 octobre
2011
"Un autre
regard sur la Russie" par Alexandre
Latsa
Lundi dernier, j’étais à Moscou dans
un des quartiers que je préfère. Je
sortais juste du métro Trubnaya et
j’allais traverser la place du même nom
quand j’ai eu la surprise de recevoir un
appel téléphonique de Marek Halter. Une
vraie surprise, j’ai d’abord cru à un
canular: Je ne le connaissais pas et je
ne savais pas qu’il avait mon numéro de
portable, ou que quelqu’un le lui avait
transmis.
Il souhaitait juste me rappeler
que le collège universitaire de France
en Russie fêtait ses 20 ans le
lendemain, et qu’il était important
qu’un maximum de gens en soient informés
parce que cet évènement est un symbole
important du dialogue franco-russe.
Beaucoup de lecteurs savent qui est
Marek Halter. Cet intellectuel et homme
public français est très connu en
France. En tant que romancier, il
s’est distingué en publiant de nombreux
ouvrages qui mettent en scène l’histoire
du peuple juif. Par contre, peu de
gens savent que la relation de Marek
Halter avec la Russie est très ancienne.
Pendant la deuxième guerre mondiale, il
a du fuir la Pologne en compagnie de ses
parents, pour se réfugier à Moscou puis
à Kokand, une petite ville de la
république socialiste soviétique
d'Ouzbékistan. En 1945, alors que Marek
Halter avait 9 ans, il aura le
"privilège" de participer au
9 mai à Moscou et d’offrir des
fleurs à Joseph Staline.
La relation de Marek Halter avec la
Russie ne s’est pas arrêtée là. En 1991,
c'est-à-dire juste après l’effondrement
de l’URSS, il a créé deux collèges
universitaires francophones en Russie,
l’un à Moscou, et l’autre à
Saint-Pétersbourg. De quoi
s’agissait-il, à l’époque? "Marek
Halter a eu l’idée qu’on pourrait
incarner la Perestroïka et le changement
d’humeur en URSS par une invitation
systématique de chercheurs, de
professeurs, d’écrivains, d’artistes,
pour que les Russes entendent de
nouvelles voix auxquelles ils n’étaient
pas habitués"
rappelle l’historien Marc Ferro. Le
Collège Universitaire Français de Moscou
est un établissement public et gratuit,
soutenu en France par le Ministère des
Affaires Étrangères et Européennes, le
Ministère de l'éducation Nationale, le
Ministère de l'enseignement Supérieur et
de la Recherche et des universités
françaises partenaires. Il délivre une
formation et un diplôme en deux ans dans
différentes disciplines comme le droit,
l’histoire, la sociologie, la
littérature ou encore la philosophie. Le
site internet du CUF, comme on
l’appelle à Moscou, apprend au lecteur
que "l’établissement a été fondé en 1991
à l'initiative de l'académicien et prix
Nobel russe Andrei Sakharov et de
l'écrivain et homme public français
Marek Halter (...) mais aussi qu’il a
été conçu pour être un espace
d'ouverture, d'excellence et d'échange".
Aujourd’hui l’établissement
fonctionne grâce à une coopération
fructueuse entre la faculté Lomonossov
de Moscou (MGU) et
dix établissements français
d’enseignement supérieur parmi lesquels
Assas et la Sorbonne. Le C.U.F.
comprend deux sections: une
francophone et une russophone. Le
diplôme francophone est reconnu par les
universités partenaires en France. Le
Collège Universitaire Français est
aujourd’hui dirigé par Guillaume Garetta.
D’après lui: "Le Collège est un enfant
de la Perestroïka car il reflète
exactement ce que Mikhaïl Gorbatchev a
voulu faire: ouverture à l’Ouest, fin de
la censure, échanges académiques et
intellectuels. C’est un projet qui
s’inscrivait parfaitement dans un projet
politique plus large".
Les 3, 4 et 5 octobre dernier,
le CUF à donc fêté ses 20 ans dans la
joie et la bonne humeur, sous le haut
patronage de Monsieur Nicolas Sarkozy,
président de la République Française et
de Monsieur Dmitri Medvedev, président
de la Fédération de Russie. Parmi bien
d’autres, ont assisté aux cérémonies:
Mikhaïl Gorbatchev, Victor Sadovnitchi,
recteur de l’Université d’Etat de
Moscou, Jean de Gliniasty, ambassadeur
de France en Russie, Marek Halter
bien évidemment, mais aussi nombre
d’étudiants du dit Collège.
Le courrier de Russie a
publié des témoignages d’anciens
élèves du CUF. On peut y lire que
pour certains, l’établissement a été une
porte d’entrée vers la France, via la
langue française. Tout autant que le
haut niveau d’éducation et la
possibilité de bénéficier de diplômes
reconnus, c’est sans doute en grande
partie par ces échanges humains, surtout
entre jeunes étudiants, que les peuples
français et russes apprendront à mieux
se connaître, et à mieux se comprendre.
Depuis longtemps, les échanges
universitaires ont été une des pierres
de voûte de l’Europe en construction.
Nul doute que des réalisations comme le
collège universitaire français de Russie
font partie des outils permettant à nos
peuples de mieux se comprendre, et à la
France de se faire connaitre en Russie
comme un acteur incontournable dans les
réalités européennes. Cette
collaboration franco russe au sein du
CUF montre toute son importance,
maintenant que des projets industriels
de grande dimension associent en Russie
des entreprises françaises et des
entreprises russes. Cette collaboration
est une nécessité pour faire face à la
mondialisation incontrôlée et chaotique
que connait notre planète. Elle est
aussi une contribution à la
création d’une grande Europe pacifique
de l’Atlantique au Pacifique. Comme le
rappelait déjà Marek Halter
pendant l’année croisée franco-russe:
"Il n'y aura pas d'Europe en tant que
puissance politique et économique dans
le monde face à ces nouveaux géants que
sont l'Inde, la Chine, le Brésil,
l'Amérique ; sans la Russie. Donc,
l'Europe a besoin de la Russie, et la
Russie a besoin de l'Europe".
L’opinion de l’auteur ne coïncide
pas forcément avec la position de la
rédaction.
Article publié sur RIA Novosti
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