Opinion
Pourquoi le
Hezbollah participe-t-il
aux combats en Syrie ?
Alain
Gresh
Alain
Gresh
Lundi 25 mars
2013 Le
Hezbollah reconnaît qu’un certain nombre
de ses combattants sont présents en
Syrie. Il explique pourquoi et dans
quelles limites. Ibrahim
al-Amine, le rédacteur en chef d’Al-Akhbar,
un quotidien qui a toujours appuyé «
le camp de la résistance » à Israël
et aux Etats-Unis, vient de publier un
important article, «
Hezbollah’s Role in Syria » (22
mars). Bien introduit auprès des
dirigeants du Hezbollah, Al-Amine offre
un éclairage intéressant sur leur vision
de l’évolution de la situation dans la
région et sur les conséquences qu’ils en
tirent. Il confirme la participation
d’un certain nombre de combattants de
l’organisation aux affrontements en
Syrie.
« Quels sont les fondements
idéologiques, politiques et
opérationnels de la position du
Hezbollah ? », s’interroge Al-Amine.
« Le Hezbollah continue à voir les
événements du point de vue de son rôle
central dans la confrontation avec
Israël. Il n’explique pas toujours
l’objectif ultime de cette lutte, mais
le parti se comporte comme si celle-ci
s’inscrivait dans une campagne à long
terme visant à en finir avec Israël, une
bataille qui nécessite beaucoup de
préparation. Alors que la majorité des
peuples arabes et musulmans ne seraient
pas dérangés par l’élimination d’Israël,
seule une minorité est prête à mener ce
combat jusqu’au bout. (...)
Personne n’aurait pu, au début de
la crise, imaginer que le Hezbollah
prenne position contre le régime syrien.
Si le parti connaît les causes internes
de la crise, il n’approuve pas pour
autant les batailles qui se déroulent
dans ce pays. Sa vision plus large
[l’auteur parle de sa vision de
l’affrontement avec Israël] l’empêche
d’adopter une posture neutre, d’autant
qu’il a en Syrie davantage de
sympathisants que la plupart des groupes
impliqués dans les combats. »
L’auteur fait ici allusion aux liens
avec les diverses minorités, sur
lesquels nous reviendrons plus bas.
(...) « Pour le Hezbollah, tout
simplement, la guerre en Syrie vise à
faire basculer ce pays, politiquement et
stratégiquement, dans une position
d’opposition à son existence même
[celle du Hezbollah]. C’est pourquoi
il voit le régime actuel dirigé par
Bachar Al-Assad comme une ligne de
défense avancée pour le mouvement de la
résistance au Liban et en Palestine.
C’est la raison pour laquelle le parti
est au cœur de la crise. »
L’auteur donne ensuite des éléments
concrets sur la participation du
Hezbollah aux combats en Syrie.
— « Le Hezbollah, entraîne, arme
et fournit un soutien logistique aux
habitants des villages frontaliers
libanais.
— Le Hezbollah a pris la relève de
la protection du sanctuaire de Sayida
Zeinab au sud de Damas [le tombeau
de Zeinab, la fille de l’imam Ali],
remplaçant les gardes irakiens ; des
membres du parti y sont déployés en
vertu d’un plan qui limite leur
responsabilité à la proximité immédiate
du sanctuaire.
— Le Hezbollah a reçu des
délégations d’un nombre considérable de
mouvements druzes, chrétiens, chiites et
ismaéliens, qui pensent que leurs
communautés minoritaires sont
sérieusement menacées. Il n’a pas
répondu à leur demande de formation
militaire et d’armement, mais « leur a
donné les moyens d’empêcher leur
déplacement ». [Cette allégation
n’est pas plus précise.]
— Le Hezbollah, qui a des liens
militaires et de sécurité avec le
régime, aide les forces syriennes à
protéger des académies scientifiques et
des usines de missiles construites au
cours de la dernière décennie, en grande
partie avec l’aide de l’Iran.
— Le Hezbollah gère un important
programme, peut-être le plus conséquent,
pour aider les réfugiés syriens au Liban
et en Syrie même. Il ne s’agit pas de «
rembourser » les Syriens qui avaient
accueilli des réfugiés du Liban en 2006.
Ce programme est conduit en toute
discrétion, avec la conviction que les
réfugiés et les personnes déplacées ont
droit à toute l’aide humanitaire
possible, indépendamment de leurs
opinions politiques. »
Cet article a été publié à la veille
de la démission du premier ministre
libanais Najib Mikati. Cet épisode
confirme que le Liban (pas plus que
l’Irak d’ailleurs) ne pourra rester
longtemps à l’abri des affrontements qui
se poursuivent en Syrie. Cette démission
marque peut-être, comme l’écrit Al-Amine
dans un autre article, la fin de la «
dissociation », de la séparation des
dossiers libanais et syrien («
Mikati’s Resignation : The End of
Dissociation », 23 mars).
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